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AVIS 134 / Beaucoup de questions
Ajouté par Vincent AMIOT (LYON), 18/12/2012
La lecture du dossier du maitre d'ouvrage appelle plus de questions qu'elle n'apporte de réponses, malgré les apparences.

Commençons par quelques remarques préalables:

1) que vient faire le président du conseil général dans ce dossier au moment où il nous annonce qu'il va transférer au Grand Lyon toutes les compétences du département?

2) alors que ce débat est annoncé comme préalable à toute décision, je suis surpris de lire dans le ''journal des entrepreneurs'' (décembre 2012) les propos du président du Grand Lyon affirmant que ''l'anneau des sciences se fera quelques soient les oppositions'' ! Curieuse conception de la démocratie !

3) le dossier du maître d'ouvrage précise qu'il y a un préalable à toute décision sur ce projet ; à savoir que fera l’État pour que le trafic de transit nord-sud ne passe plus dans le centre de Lyon. Or l’État porte depuis plus de 10 ans un projet de contournement ouest (COL) qui n'a pas débouché principalement à cause de l'hostilité des collectivités locales. Aujourd'hui, le préfet jette le trouble en annonçant que ce contournement autoroutier pourrait aussi se faire à l'est en prolongeant A432 au sud. Cette variante est une illusion dans la mesure ou cette solution représenterait pour l'usager un allongement de parcours de 35km au moins par rapport au trajet actuel ou au projet de COL. Et en plus il faudrait payer en marquant au moins deux arrêts au péage.
En réalité, compte tenu de l'état des finances publiques le plus vraisemblable est aujourd'hui que l’État ne fera rien ... au moins dans les 20 ans qui viennent. D'ailleurs ce n'est pas vraiment le problème dans la mesure où le trafic de transit nord-sud représente à l'heure de pointe moins de 5% du trafic du tunnel sous Fourvière. C'est le trafic de la métropole (trafic interne et trafic d'échange) qui sature le tunnel et l'axe A6-A7.

J'en viens maintenant au projet, c'est à dire au fond du dossier.

1) on peut d'abord s'interroger sur les objectifs qui nous sont proposés, à savoir développer et rendre accessible l'ouest lyonnais.
Si l'ouest lyonnais est aujourd'hui mal desservi -c'est un fait- aussi bien pour l'automobile que par les TC, ce n'est pas par un hasard de l'histoire ; c'est à cause de la topographie (cf le dossier).
Tous les efforts qui pourront être faits ne changeront pas cette donnée de base. L'ouest lyonnais sera toujours moins bien desservi que l'est. La sagesse consisterait donc à freiner l'urbanisation de ces secteurs mal desservis et qui le resteront. Malheureusement, ce n'est pas ce qui est prévu puisque le SCOT prévoit 20000 habitants supplémentaires d'ici 2030, soit une progression de 10% aussi importante que celle de l'ensemble de l'agglo. Encore faut-il ajouter les développements prévus sur le territoire du SCOT de l'ouest lyonnais au delà de l'agglo déjà très urbanisé (30000 habitants supplémentaires annoncés qui n'auront tous ou à peu près que leur voiture pour se déplacer). C'est d'abord cette stratégie urbaine qu'il faudrait corriger.

2) l'anneau des sciences permettrait d'achever le ''ring'' de l'agglo. Parlons français, il s'agit de terminer le périphérique. A priori cela part d'une bonne intention (mieux vaut tard que jamais !). Mais (car il y a un mais) pour que ce périphérique joue son rôle de protection et de soulagement du centre il faut qu'il soit attractif et pour cela il ne faut pas qu'il soit à péage. C'est agir contre nature de faire payer l'usager pour éviter le centre ville et de laisser gratuite la traversée de l'agglo. Autrement dit, si on a besoin d'une recette extra-budgétaire- c'est le contraire qu'il faut faire par exemple avec un péage urbain (le fait que la recette du péage urbain revienne à l'AOTU et non pas au Grand Lyon n'est pas un obstacle dans la mesure où aujourd'hui le Grand Lyon finance largement le SYTRAL). C'est une condition absolument nécessaire pour être sur de réduire la circulation dans le centre et donc d'être en capacité de développer des TC plus performants.

3) sur les modalités de financement, la présentation qui est faite n'est pas objective. D'abord on nous dit que le financement peut être soit entièrement public soit public-privé. Dans un PPP, le partenaire privé ne finance rien ; au contraire il cherche à gagner de l'argent. Il ne fait qu'avancer tout ou partie de l'investissement et c'est le contribuable (et/ou l'usager) qui rembourse. Dans le cas d'une maîtrise d'ouvrage publique c'est la collectivité qui s'endette. Le résultat est en gros le même. Presque toujours le PPP c'est les bénéfices pour le privé et les déficits pour le public.
Ensuite on nous dit qu'un PPP permettrait d'étaler la dépense dans le temps. Mais c'est la même chose en cas de maîtrise d'ouvrage publique puisque la collectivité emprunte et qu'elle rembourse dans la durée. La seule différence c'est la visibilité de l'endettement.

4) On nous présente un projet ''écologique'' parce que presque entièrement enterré. Mais sur le tronçon est du périphérique (L. Bonnevay) le trafic va augmenter et je ne vois nulle part de projet de couverture pour protéger les riverains. Il serait bien de ne pas faire comme à Paris avec un périphérique couvert à l'ouest et à l'air libre à l'est. Tous les lyonnais ont droit à la même considération. Peut-être même devrait-on commencer par cela. Les investissements correspondant ont été oubliés.

5) Presque anecdotique, le projet multimodal qui nous est présenté parle de bus express sur l'anneau des sciences. Avec 70000véh/jours ces bus express seront englués dans les bouchons de la circulation.

En résumé, je reste dubitatif. L'ambition de pouvoir un jour requalifier l'axe A6-A7 dans Lyon, et de réparer ainsi l'erreur originelle de Fourvière, ne peut qu'être approuvé. Mais le prix à payer pour y parvenir tel qu'on nous le propose (plus de 3 milliards d'euros quand on aura tout compté) parait bien élevé.

Associé à Coût et financement; Le débat public; Mobilité & modes de vie; Santé & qualité de vie; Contournement autoroutier de Lyon; Développement économique et urbanisme; Financement; Qualité de l'air; Suites du débat

Commentaires

Approbation de l'avis 134
Ajouté par Bernard RONJAT (PRIMARETTE), le 22/12/2012

Je partage totalement l'analyse proposée par Mr Vincent AMIOT sur chacun des points évoqués. En particulier sur le poste 4 effectivement ''tous les Lyonnais ont droit à la même considération''.


Le débat public porte sur l'opportunité du projet
Ajouté par CPDP ANNEAU DES SCIENCES - TOP (LYON), le 01/02/2013

Bonjour,

Vous évoquez dans votre message le fait que le maître d'ouvrage aurait déjà pris la décision de poursuivre le projet d'Anneau des Sciences.

Nous tenons à vous rappeler que, selon la loi, le débat public doit porter sur les objectifs et les caractéristiques du projet, mais également sur son opportunité : faut-il ou non le réaliser ?

Le Grand Lyon devra donc prendre une décision à l'issue du débat précisant les suites qu'il entend donner à son projet : le poursuivre en l'état, y apporter des modifications, ou l'abandonner. Cette décision sera rendue publique, y compris sur le site du débat public. Le maître d'ouvrage doit la prendre au regard des enseignements du débat public qui sont donnés dans le compte-rendu du débat de la CPDP et le bilan de la CNDP.

S'il décide de poursuivre le projet, il devra annoncer de quelle manière il entend assurer l'information et la participation du public tout au long du projet, jusqu'à l'enquête publique. Il devra également préciser les mesures qu'il prévoit en réponse aux enseignements du débat.

Cordialement