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Avis n°170

Directeur honoraire Chambre agriculture 71 et ancien conseiller Régional de Bourgogne

Ajouté par Pierre TERRIER (Macon), le
[Origine : Site internet]

Dans un territoire en difficultés récurrentes, une obligation : saisir une opportunité pour rompre avec les fatalités.

La Région du Rousset fait partie d'un territoire difficile. La rudesse du climat, la pauvreté des sols, l'exode rural entamé dès le 19° siècle, constituent autant de facteurs lourds qui conduisent ce territoire vers la désertification.
Aujourd'hui la faiblesse de la densité de population, une population vieillie, des activités rurales et surtout agricoles à l'avenir incertain et toujours sur le déclin, ne compensent pas la beauté des paysages ou le calme - trop ? – de la vie des habitants de ce territoire. Le désert appelant le désert, c'est lentement que les services se raréfient, que le calme automnal et hivernal repousse les candidats potentiels vers d'autres cieux.
Dans ce contexte un projet d'envergure national mérite attention. Ce territoire a suffisamment contribué jusqu'alors au développement d'autres régions pour qu'il mérite aujourd'hui que nous regardions avec attention et prudence les chances que représente le projet de center Parc pour ce territoire.
Le développement ne se proclame pas ni ne se décrète. D'abord des acteurs.
Quelque soit le territoire considéré, le développement de celui-ci repose sur des acteurs individuels ou collectifs porteurs de projets. L'existence de porteurs, d' initiateurs, de réalisateurs portés par un territoire au terreau favorable sont des conditions fondatrices du développement d'un territoire. Mais un vieillissement de la population, une désertification progressive sont souvent destructeurs de toute velléité de « faire ». C'est d'abord pour ces familles de raisons que le développement endogène, c'est-à-dire porté par des acteurs du territoire, ne parvient pas à s'y implanter.
Le projet Center Parc, une opportunité faute d'autres solutions crédibles.
Le projet représente une chance pour ce territoire en ce sens qu'il apporte une initiative qui change la pente déclinante de l'évolution du territoire. Par l'activité créée, par les effets induits, ce projet mérite fondamentalement d'être saisi par les acteurs locaux. Ce ne sont pas les résidents externes souvent urbains lointains qui n'ont à fortiori jamais mis les pieds dans ce secteur qui ont le droit de rejeter ou stigmatiser un tel projet.
Les arguments sur les efforts demandés aux collectivités tombent au seul regard des contributions qu'a apporté ce territoire au développement de zones extérieures à commencer par le charbon et l'acier du nord massif central. Par contre comme tout citoyen nous avons le droit et le devoir de veiller à ce que le promoteur ait un respect plus que réglementaire des composantes environnementales et sociales.
Le porteur se doit de garantir le respect scrupuleux des textes en vigueur en particulier ceux sur l'eau et sur la constitution du dossier installation classée. En contre partie du coût, le porteur se doit d'être exemplaire.
Il se doit aussi d'ouvrir rapidement les concertations nécessaires au développement de partenariats avec les hommes et femmes du territoire, tant sur les emplois qu'il créera et dont il faut rapidement préparer les candidats à les occuper que pour soutenir contractuellement les porteurs d'initiatives complémentaires à celles du Center Parc.

Deux propositions :
1. Dès la décision de création du centre, mettre en place un agent de développement chargé d'aider tout candidat au développement d'activités contractualisables avec le porteur du projet. Le financement de cet agent porté sans doute par une association des collectivités locales et les établissements consulaires devra être à la disposition de chaque habitant, de chaque élu, de chaque entrepreneur existant ou potentiel. Son coût est a intégrer dans le projet global.
2. Des interrogations existent. Des questions sont posées.
Afin de rendre les modalités de réalisation transparentes et accessibles à tous ceux qui se sentent concernés, l'Etat doit désigner un interlocuteur de proximité en capacité de répondre à toutes questions et fournir les éléments issus des études ou celles présentes dans les dossiers. Les procédures d'enquête publique sont insuffisantes. L'état doit se porter garant tant de la transparence que du respect des procédures.

Pierre TERRIER
Aout 2015.

Commentaires

Cet avis est raisonnable.
Il est clair et étayé. Il est argumenté.
Oui au projet de Center Parcs au Rousset, qui est une vraie opportunité pour la région, son économie, ses habitants. Et cela, comme le dit l'auteur de l'avis "faute d'autres solutions crédibles".

Monsieur Terrier,
Votre intervention en faveur d'un Center Parcs au Rousset, vous montre fataliste et découragé...
Fatalité? Effectivement, nous voyons les agriculteurs dans la rue et les campagnes perdre leurs services publics. Fatalité donc? Je suis de celles et ceux qui ne le pensent pas.
Je suis étonnée qu'un ancien dirigeant du "monde agricole" l'abandonne ainsi, n'y croit plus, persuadé que les "activités rurales et surtout agricoles" auraient un "avenir incertain et toujours sur le déclin". Condamnation sans appel de ces agriculteurs qui demandent à vivre de leur métier. Je suis étonnée que cet ancien dirigeant se résigne "faute d'autres solutions crédibles" à soutenir que l'avenir de ce territoire est dans un parc de loisirs... une "chance" à saisir faute de mieux... Faute de vision (adaptée au monde qui vient), depuis tant d'années, des politiques et des responsables syndicaux agricoles qui creusent (avec autorité) la même ornière du productivisme, du toujours plus et plus gros. Un abandon au productivisme qui vide les fermes et désespère leurs exploitants... au profit de "fermes des 1000 vaches" et de la surproduction de cochons, de volaille... Avec semble-t-il la conviction "qu'Il n'y a pas d'alternative", qu'on ne peut rien contre ce système. Je suis étonnée qu'un ancien dirigeant agricole abandonne purement et simplement la perspective de pouvoir vivre de l'agriculture sur des terres agricoles avec un savoir faire et une identité qui n'est pas synonyme de "passéisme" au contraire. Comment peut-on considérer comme une solution ce nouvel avatar du même système qui est le problème. Une grande surface du tourisme donc pour sauver le pays du Rousset et ses agriculteurs "en déclin"?
C'est peut être cet abandon, ce découragement qui fait de la Chambre d'agriculture un des soutiens les plus enthousiastes à ce projet. Un abandon de l'envie de réfléchir sur l'avenir de la production agricole et des agriculteurs.
Peut être est-ce également un des effets du vieillissement du personnel politique et des responsables institutionnels... qui leur enlèverait toute "velléité de faire"... Une grande fatigue. Un manque d'enthousiasme pour penser et mettre en oeuvre un plan de transition vers un autre développement de ce territoire agricole et des métiers qui en découlent. Comme l'ont fait d'autres régions européennes et ceci pour ne rester que dans le domaine dont vous parlez...Plutôt que de se résigner comme vous le faites, Monsieur, à donner, faute de mieux, les clés à une multinationale de l'immobilier de tourisme à l'avenir incertain...
Cela ne me semble pas la meilleure disposition d'esprit pour entreprendre et travailler à de vraies solutions d'avenir .
Lisez donc un certain nombre d'interventions enthousiastes, de plus jeunes que vous et moi, pour la reprise en mains de nos vies et entre autre de notre agriculture et de la vie du territoire.
Vous dites aussi que "ce ne sont pas les résidents externes souvent urbains lointains qui n'ont à fortiori jamais mis les pieds dans ce secteur qui ont le droit de rejeter ou stigmatiser un tel projet". Voici des affirmations bien gratuites si vous avez un peu suivi les débats en salles et sur ce site.
Mais soit, je suis une de ces résidentes externes (au périmètre du Rousset) et même originaire d'une autre région de France. Nous avons choisi de vivre en Saône et Loire il y a une trentaine d'années. Nous y avons créé de l'activité, nous consommons ici (et de préférence local et bio) ... Nous encourageons nos hôtes à faire de même et nous les envoyons "mettre les pieds" dans tous les secteurs du département... Il me semble même,mais je peux me tromper, que nous nous soyons rencontrés, Monsieur Terrier, dans ces circonstances il y a quelques années. Toujours est-il que je me sens absolument le droit de m'opposer à ce projet hors sol dans le Charolais (ce qui est un comble pour "une de l'extérieur", n'est ce pas?) en citoyenne de la Saône et Loire, contribuable, habitante, intéressée par un développement alternatif de transition vers une autre économie sociale, solidaire, écologique. Je me sens en droit de vouloir que l'on utilise autrement cet argent public qu'on pourrait investir dans une vraie vision d'avenir basée sur les savoir faire et les énergies locales.
Mais j'apprécie votre bonne volonté, tout en lui trouvant de la naïveté, quant à la garantie de transparence et de dialogue public... Et je partage sans réserve votre affirmation que "les procédures d'enquête publique sont insuffisantes". Tout en doutant de la possible neutralité "d'un interlocuteur (ou d'une interlocutrice) de proximité", lorsqu'on constate avec quelle unanimité tout ce qui ressemblerait à ce que vous dites se proclame partout haut et fort comme soutien sans réserve et sans faille à ce projet!

Seriez-vous tellement habitué à ce que les procédures soient contournées, M. Terrier, que vous insistez par deux fois pour dire qu'ici il faudrait les respecter ?
C'est pourtant le b-a-ba et personne d'autre n'imagine que Center Parcs puisse les contourner ; nous sommes en tout cas un certain nombre à le vérifier, dès maintenant.
Quant à votre proposition d'un "interlocuteur de proximité" elle témoigne d'une conception de la démocratie qu'on connait trop bien. "On" prend les décisions puis ensuite "on" explique le pourquoi au bon peuple. Et si jamais il n'est pas d'accord ... c'est qu'il a mal compris. Reste alors à lui ré-expliquer jusqu'à ce qu'il soit d'accord, n'est ce pas.