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Développement de l'éolien : une énergie en débat

Un dossier de Vie-Publique.fr

Vous pouvez retrouver l'intégralité de ce dossier du 13 mars 2015 sur le site de Vie-Publique.fr (Direction de l'information légale et administrative).

La Commission nationale du débat public prépare deux débats publics sur l’opportunité et les caractéristiques des projets de parc éolien en mer du Tréport et des îles d’Yeu et de Noirmoutier. L’Etat encourage le développement de l’énergie éolienne en France. Cette source d’énergie fait cependant l’objet de fortes oppositions et son développement doit s’opérer dans un cadre contraint.

Le développement des énergies renouvelables est l’un des axes du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Il s’agit d’équilibrer le mix énergétique et de valoriser les ressources du territoire. En outre, depuis le protocole de Kyoto adopté en décembre 1997, la France s’est engagée dans une démarche de réduction des gaz à effet de serre (GES) afin de participer à la lutte contre le réchauffement climatique.

Fixés au niveau de l’Union européenne (UE), les objectifs sont, à l’horizon 2030, de réduire les émissions de GES de 40%, d’accroître l’efficacité énergétique de 27% et de porter les énergies renouvelables à 27% du mix énergétique. En France, le Plan d’action national en faveur des énergies renouvelables pour la période 2009-2020 avait retenu un objectif de 23% d’énergies renouvelables dans la consommation totale d’énergie finale. Le texte relatif à la transition énergétique ambitionne une réduction des 40% des émissions de GES et une part des énergies renouvelables portée à 32% de la consommation énergétique finale à l’horizon 2030.

Parmi les sources d’énergie renouvelable, l’éolien est l’une des techniques les plus prometteuses (avec le solaire photovoltaïque). Son développement est indispensable si la France souhaite respecter les objectifs fixés. On estime que la France possède le deuxième gisement éolien européen après la Grande-Bretagne.

Un développement soutenu par l’État

Depuis les années 2000, l’État soutient le développement de l’énergie éolienne. Il intervient en amont pour aider la recherche et en aval pour favoriser le déploiement commercial.

Pour la réalisation du plan de développement des énergies renouvelables, l’État a, par exemple, lancé des appels d’offres portant sur des installations éoliennes en mer.

Il a également mis en place des mécanismes incitatifs afin de favoriser le développement de l’énergie éolienne.

Principal outil de soutien, l’obligation d’achat de l’électricité concerne tous les moyens de production d’énergies renouvelables. Cette obligation d’achat permet au producteur d’énergie éolienne de vendre sa production d’électricité à un tarif d’achat garanti fixé par arrêté. Une contribution au service public de l’électricité (CSPE) a été créée pour compenser les charges de service public de l’électricité supportées par les fournisseurs historiques, tels EDF. Outre les surcoûts liés aux tarifs bonifiés de l’électricité produite par les particuliers ou les opérateurs privés à partir d’énergies renouvelables, la CSPE finance ceux liés aux tarifs sociaux de l’électricité et à la péréquation tarifaire pour l’égalité de services sur tout le territoire.

Après l’annulation par le Conseil d’État de l’arrêté de 2008 sur les tarifs d’achat, un nouvel arrêté en date du 17 juin 2014 fixe les conditions d’achat de l’électricité produite. Cet arrêté a été notifié à l’Union européenne en tant qu’aide d’État. L’UE a validé le dispositif jusqu’en mars 2024. Néanmoins, la ministre en charge de l’énergie a annoncé à terme une évolution vers un dispositif adossé au marché. Le producteur d’électricité vendrait l’électricité au prix du marché et percevrait une prime compensant l’écart entre le prix obtenu sur le marché et le prix préalablement déterminé.

Par ailleurs, dans les zones exposées à un risque cyclonique et pour les éoliennes implantées à terre, les producteurs d’électricité bénéficient de tarifs de rachats privilégiés depuis un arrêté de mars 2013.

Un crédit d’impôt est également ouvert aux particuliers pour les dépenses d’équipement éolien dans l’habitat.

Un développement dans un cadre contraint

L’énergie éolienne est une énergie variable : il n’y a pas toujours du vent et le vent ne souffle pas toujours avec la même intensité. Néanmoins, ce phénomène peut être compensé au niveau national. Les études préalables à l’implantation d’un parc éolien permettent de sélectionner des zones où la production d’électricité est possible pour 80% du temps. Pour les 20% restants, il faut donc prévoir d’autres sources d’énergie.

L’exploitation d’éoliennes peut aussi être source de nuisances. L’Académie des Beaux-Arts a ainsi rendu un avis défavorable au développement de l’énergie éolienne au nom de la protection des paysages. Les éoliennes produisent du bruit : un sifflement dû au passage de l’air dans les hélices et un grincement dû à la rotation des hélices. Enfin, les éoliennes peuvent être dangereuses pour les oiseaux qui peuvent être pris dans les pales en rotation.

Des associations militent contre l’implantation d’éoliennes en France au nom de la protection des riverains et du respect de la propriété privée. Contestant aux éoliennes un intérêt économique ou écologique, elles considèrent, au contraire, qu’elles contribuent à renchérir le prix de l’électricité.

Pour tenir compte de ces contraintes et répondre aux critiques, l’implantation d’éoliennes a été soumise à un encadrement strict, notamment par les lois Grenelle de 2009 et 2010 : permis de construire obligatoire pour les éoliennes de plus de 12 mètres, enquête publique pour celles de plus de 50 mètres, minimum de 5 éoliennes par parc, étude d’impact, installation des éoliennes de plus de 50 mètres à plus de 500 mètres des zones d’habitation, création de zones de développement de l’éolien (ZDE), etc.

Ce cadre très contraint risquait cependant de menacer le développement de la filière. Une forte baisse d’installations d’éoliennes a d’ailleurs été constatée dès 2011. Pour corriger cette tendance, la loi du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes a simplifié certaines dispositions : les ZDE et la règle des cinq mâts ont été supprimées et il est désormais possible, après autorisation, d’implanter des éoliennes sans continuité avec l’urbanisation dans les communes outre-mer soumises à la loi Littoral.

De plus, une ordonnance du 20 mars 2014 permet l’expérimentation d’une autorisation unique délivrée par le préfet de département pour les parcs éoliens terrestres soumis à autorisation au titre de la procédure des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Cette autorisation vaut autorisation ICPE et permis de construire, autorisation de défrichement, autorisation d’exploiter au titre du code de l’énergie et dérogation dite "espèces protégées". Cette nouvelle procédure d’instruction unique est expérimentée dans les régions Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Picardie, Nord-Pas-de-Calais, Midi-Pyrénées, Bretagne et Basse-Normandie.

Néanmoins, les oppositions ne faiblissent pas et le Sénat a adopté, lors de la première lecture du projet de loi relatif à la transition énergétique, un amendement qui fixe à 1 000 mètres la distance entre une éolienne et des habitations contre 500 mètres actuellement.

Les spécificités de l’éolien en mer

Pour le développement de l’éolien en mer, des appels d’offres ont été lancées dès 2011 pour la construction de parc d’éoliennes off shore. Six parcs sont prévus à partir de 2020, chacun comptant entre 75 et 100 éoliennes.

En 2011, les appels d’offres concernaient quatre zones, situées au large des communes de Fécamp, Courseulles-sur-Mer, Saint-Brieuc et Saint-Nazaire. Après la désignation des lauréats, des débats publics sous l’égide de la Commission nationale du débat public ont été organisés. A l’issue de la phase de débat public, les sociétés lauréates ont annoncé leur décision de poursuivre le projet.

Un nouvel appel d’offres a été lancé en mars 2013 pour des parcs éoliens au large du Tréport et entre les îles d’Yeu et de Noirmoutier. La phase de débat public démarre en avril 2015.

Le gouvernement a décidé d’accélérer le déploiement de l’éolien en mer parce qu’il présente aussi des opportunités en matière d’innovation et de développement économique (technologies pour la préparation des fonds marins pour la pose d’hydroliennes, navires innovants pour la maintenance des éoliennes en mer, acheminement de l’électricité produite vers la terre). Le Comité national sur les énergies renouvelables en mer (CNEM) de novembre 2013 a défini une feuille de route pour l’éolien en mer qui prévoit notamment le développement de la technologie de l’éolien flottant.

Outre la production d’électricité, l’éolien marin est soutenu en tant que filière industrielle dont une part de la valeur ajoutée n’est pas délocalisable.

Quelle production d’électricité éolienne aujourd’hui ?

En 2014, la production d’électricité éolienne s’élève à 16,2 TWh ce qui représente 3,5% de la consommation électrique nationale (3,1% en 2013). Après une croissance rapide sur la période 2005-2008, puis trois années de baisse en 2011, 2012 et 2013, le nombre d’installations nouvelles progresse en 2014. Fin décembre 2014, le parc éolien français atteint une puissance installée de 9 143 MW. Les régions Champagne-Ardenne et Picardie concentrent à elles seules 30 % de la puissance installée en France.

Par rapport aux tendances d’évolution fixées par le plan national pour les énergies renouvelables, le développement de l’éolien a pris du retard puisque l’objectif initial pour 2020 s’élève à 25 000 MW dont 6000 MW d’éoliennes en mer.

Par rapport à d’autres pays européens, la France conserve une faible production d’énergie éolienne. Au Danemark, la part de l’éolien dans la consommation électrique atteint 39% en 2014. Les marges de progression sont donc importantes en France mais les oppositions restent fortes aussi.