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 / Compte rendu du 20 mars 2006


Débat public ITER

Réunion thématique - 20 mars 2006 à Marseille

Thème : ITER en Provence, débat sur le débat et son utilité

L'essentiel du débat


Le débat public s'est déroulé devant près de 40 personnes. Patrick Legrand a rappelé les constats issus des réunions précédentes : besoin d'informations, désir de cohérence, intégration du projet dans le territoire et nécessité d'une concertation ouverte à tous. Il a enfin situé le débat public dans son cadre législatif.

Yves Mansillon, président de la Commission nationale de débat public, s'est exprimé sur l’historique et l'opportunité du débat public dans le projet ITER. Il a rappelé que le débat était un instrument de la démocratie participative.

Pascale Amenc-Antoni, directrice générale de l’agence ITER-France, et Yannick Imbert, directeur de mission auprès du Préfet de Région chargé des mesures d'accompagnement d'ITER ont fait part de leur intérêt à participer au débat public. Celui-ci leur permet de mieux appréhender les avis de la population et de revoir certains de leurs projets. Ils ont énuméré les sujets en cours de réflexion tels que les aménagements routiers, les nuisances du chantier, ou encore les outils d'évaluation des conséquences d'ITER sur le territoire.

Les questions du public ont concerné l'opportunité du débat public dans le projet ITER alors que les décisions les plus importantes ont déjà été prises. L'absence des opposants au projet et des élus dans le débat public a aussi fait l'objet de remarques. D'autres réflexions portant sur l'alimentation électrique d'ITER ou sur l'école internationale ont aussi été soulevées.


Introduction de Patrick Legrand, président de la Commission particulière du débat public (CPDP ITER)


Présentation de la tribune
Après avoir présenté les particularités de cette réunion, Patrick Legrand a présenté la tribune : Yves Mansillon, président de la Commission nationale de débat public et Didier Houi, membre de la CPDP. Les porteurs du projet étaient représentés par Pascale Amenc-Antoni, directrice de l'agence ITER-France et du CEA Cadarache, et Yannick Imbert, directeur de mission auprès du Préfet de Région chargé des mesures d'accompagnement d'ITER.

Constats des réunions d'ITER
Patrick Legrand a résumé les constats résultant des réunions passées : le besoin d'informations, l'aspiration au réalisme du projet, le devoir d'intégration d'ITER sur le long terme et la nécessité d'une concertation ouverte à tous. Il a conclu en soulevant le fait qu'ITER était à la fois un projet scientifique et un projet de société.

Cadre législatif
Il a ensuite noté l'importance de resituer le débat public dans son cadre législatif. Ainsi, l'article L121.1 du code de l'environnement en précise le rôle : débattre sur l'opportunité, les objectifs et les caractéristiques principales du projet. Il a aussi fait référence à la loi sur la proximité et à la décision du 6 juillet 2005 de la CNDP de mettre en place un débat sur le projet ITER.

Objectifs du débat public
Patrick Legrand a rappelé qu'un débat public se jugeait une fois achevé. Selon lui, le projet ITER sera modifié par le débat. Il a rappelé que les maîtres d'ouvrage annonceront à la fin du mois de septembre 2006 leur façon d'intégrer les remarques du public dans le projet ITER.


Didier Houi


Il a précisé que ce débat sur le débat avait fait l'objet d'une co-organisation particulière avec les associations ayant fait part de leur opposition au débat et rencontrées début février à l’issue des premières réunions perturbées par des manifestants. Il a aussi précisé que la communication autour de cette réunion avait été identique à celle des autres réunions : communiqué de presse, annonce de la réunion sur le site et mailing sur Internet, distribution de tracts…

Yves Mansillon


Yves Mansillon a expliqué que le débat public sur ITER avait d'abord été décidé en juillet 2003 puis bloqué suite aux controverses de la communauté internationale. La CNDP a été ressaisie du dossier en 2005 et a finalement permis ce débat en juillet dernier. Il a précisé que la CNDP a voulu mettre en place ce débat sur ITER parce que le projet est fondé sur une coopération internationale avec d'importants enjeux énergétiques. Elle était consciente que des décisions importantes avaient déjà été prises mais ne pas ouvrir le débat aurait certainement été encore plus mal perçu.

Éléments à débattre
En effet, de nombreux sujets pouvaient encore être remis en question lors des réunions publiques, notamment autour des enjeux socio-économiques et de l'aménagement du territoire.
Deux attitudes sont possibles face au débat public d'ITER :

  • Soit exiger la perfection du débat et donc refuser de se présenter parce que des décisions ont déjà été prises. Ceci reviendrait à ne pas faire entendre sa voix.
  • Soit accepter ce débat et appliquer la loi même si les conditions optimales ne sont pas réunies. Il a précisé que cette option était celle de la CNDP. La Commission souhaite avant tout faire avancer la démocratie participative.

Pascale Amenc-Antoni

Pascale Amenc-Antoni a précisé que le CEA représentait tous les partenaires du projet au sein du débat public et que la présence de l'équipe internationale (notamment en la personne de Eisuke Tada, chef de l'équipe internationale sur le site de Cadarache) à chaque réunion illustrait son attachement au débat public. Elle a ajouté que le CEA s'était pour sa part toujours placé dans la perspective d'un débat public.   

Utilité du débat public
Elle a aussi fait remarquer que les centres d'intérêt du public étaient différents suivant les lieux de réunion. Le débat public permet au maître d'ouvrage de mieux expliquer son projet. Les points abordés par la population vont donner lieu à des réflexions en coordination avec la mission d'accompagnement de la Préfecture.

Questions soulevées par le public
Pascale Amenc-Antoni a fait le bilan des différentes questions soulevées par le public lors des réunions précédentes. Celles-ci ont amené des réflexions notamment sur les sujets :

  • des transports avec les possibilités de construction d'une liaison ferroviaire Aix-Marseille, d'une liaison routière Manosque-Brignoles, d'un pont sur la Durance…
  • du foncier avec la justification des superficies pré-ZADées et de la zone isochrone de 20 minutes autour du CEA.
  • du chantier par la possible application d'un label grand chantier.
  • l’application des normes de la Haute qualité environnementale pour les constructions.
  • de l'emploi par la création d'une maison de l'emploi spécialisée sur ITER.
  • de la mise en place d'outils d'évaluation du projet, tant environnementaux qu'économiques…

Yannick Imbert

Yannick Imbert a dit que la question de l'opportunité d'un débat public ne se posait pas : il suffit d'appliquer la loi. Il a ensuite fait part de sa volonté de participer au débat et de dialoguer avec le public. Selon lui, la population s'approprie le projet par la discussion et les questions.

Justification du débat public
Il a souligné que le débat avait soulevé des questions tant au niveau du projet ITER lui-même (technique mise en œuvre, aménagement des routes…) qu'au niveau de la région avec les sujets de l'emploi ou de la hausse du prix du foncier. Selon lui, le débat est justifié.
Après cette introduction sur le débat public et son opportunité, le public a pris la parole.


ITER et les Verts
Jean-Luc Bennhamias, député européen et président du groupe Verts au Conseil régional PACA, a remercié la tribune pour l'organisation de cette réunion et a rappelé la position des Verts : participation à ce débat pour s'exprimer sur les questions portant sur l'aménagement du territoire.. Il a cependant regretté l'absence des opposants au projet. Il a ensuite expliqué sa déception quant à l'insuffisante prise en compte du débat par les gouvernants. Selon lui, le débat public est un outil de citoyenneté et de démocratie mais n'a pas assez de pouvoir dans les décisions importantes.
Yves Mansillon a expliqué que, depuis une dizaine d'années, certains débats publics ont permis de conforter l'option initiale du maître d'ouvrage mais d'autres l'ont remis en cause partiellement ou même totalement. Il a donc rappelé l'utilité du projet.

Loi sur la recherche et point de vue des Verts
Anne-Marie Billiottet, du Conseil exécutif national des Verts, a fait remarquer les disparités dans la disposition même de la salle : les porteurs du projet sur l'estrade et le public en bas, s’interrogeant sur l'égalité du débat dans une telle configuration. Elle a ensuite fait référence à un texte législatif qui permettrait, s'il est voté, de réviser le POS pour l'implantation d'un centre de recherche. Cette mesure pourrait concerner ITER. Elle craint que des projets d'envergure soient ainsi mis en œuvre à l'occasion de l'application de cette loi.
Yannick Imbert a répondu qu'il prenait la parole sur un texte qui n'avait pas encore d’existence juridique. Il a précisé que le processus d'accélération de l'adoption de cette loi était cohérent avec le calendrier du projet ITER. Elle permet au maître d'ouvrage de tenir ses délais avec la communauté internationale. Il a par ailleurs rappelé qu'aucun acte préparatoire ne serait entrepris avant la fin du débat public : ni enquête publique, ni construction.

Choix d'investissement d'ITER
Jean-Pierre Estela, du Mouvement de lutte pour l'environnement, s'est désolé du fait que le débat ne porte pas sur les grandes décisions du projet ITER. Il a rajouté que défendre le débat public était un devoir pour un citoyen de la République. Il a aussi expliqué que l'investissement du projet ITER était énorme alors qu'il n'existe aucune certitude de réussite du projet. Il aurait préféré développer les générateurs de 4° génération dont la technologie est aujourd'hui maîtrisée.

Opposition au projet
Bruno Malvezin, des Alternatifs, a fait part de son opposition au projet. Il a déclaré que plusieurs points restaient encore sombres dans la présentation du projet par le CEA. Il a rappelé que le débat public devait se dérouler dans un esprit de concertation.

ITER et Génération Écologie
Michel Villeneuve, porte-parole de Génération Écologie, a fait part de son plaisir de pouvoir s'exprimer en public sur un sujet environnemental, du soutien de Génération Écologie à ITER, comme tout projet de recherche énergétique. Il a rappelé qu'un projet de recherche demandait un investissement important mais que celui-ci était nécessaire. Il a aussi mis en garde la tribune contre les risques de pollution de la fusion lors de la phase industrielle. Il a enfin fait part de sa satisfaction quant à la décision de la communauté internationale d'implanter ITER en France.

Absence de certains acteurs et ligne très haute tension
Etienne Fourquet, président de l'association Aérer, a déploré l'absence de contestataires à la tribune. Selon lui, le débat public ne sert pas à la discussion mais uniquement à l'information de la population sur le projet ITER, évoquant l’importante diversité des questions abordées lors de la réunion de Pertuis. Il a regretté l'absence d'élus autres qu'écologistes lors des débats publics. Il a aussi expliqué que la consommation électrique d'ITER de 120 MW correspondait à la puissance fournie par 300 éoliennes. Il a enfin demandé des précisions à la tribune sur le doublement électrique de la ligne d'approvisionnement d'ITER.
Patrick Legrand a précisé que la CPDP ne pouvait convoquer des personnalités mais qu’elle a en date du 9 février dernier proposé aux associations opposées au projet d’inviter des intervenants de leur choix. Elle ne peut que constater qu’aucun ne s'est présenté ce soir, alors que cette réunion supplémentaire avait été organisée dans ce but, et qu’aucun opposant n’a pour l’instant souhaité engager un débat entre experts. Il a également déploré l'absence des élus.
Pascal Garin, adjoint en chef de la division fusion nucléaire au CEA Cadarache et directeur adjoint d'ITER-France, a expliqué qu'ITER allait consommer 120 MW en période constante, et 400 MW en période d'expérimentation. La puissance nécessaire proviendra de la ligne très haute tension de Tavel. Cette ligne sera doublée avec un raccord vers Tore Supra et un autre vers ITER.

Risque d'explosion d'ITER
Robert Gaudens, citoyen, a demandé si le risque d'explosion avait été pris en compte pour ITER.
Maurice Hassler, directeur adjoint du CEA Cadarache, a répondu que tous les risques étaient pris en compte, tant dans la conception de la machine, que dans l'exploitation future d'ITER.

Précisions techniques
Bruno Malvezin, des Alternatifs, a souligné que, dans un débat public, le porteur du projet devait connaître à la fois son projet et sa région. Il a déclaré avoir relevé plusieurs zones d'ombre dans le projet ITER. Il a ainsi demandé au CEA quelles avaient été les validations scientifiques concernant le confinement et les couvertures du réacteur. Il a aussi interrogé la tribune sur la puissance électrique nécessaire à ITER. Il a fait pour cela référence à un document parlant d'une consommation de 1 250 MW contre les 120 annoncés par le CEA. Il a enfin fait part de son indignation quant au choix de la Région de financer une école internationale, alors que certains lycées existants manquent cruellement de moyens.
Gabriel Marbach, adjoint en chef au département de fusion contrôlée du CEA Cadarache, a expliqué que de nombreuses recherches et expériences avaient déjà été menées sur la supraconductivité ou encore sur les couvertures du réacteur. Tous les résultats obtenus ont été validés et seront utilisés dans ITER.
Pascal Garin a précisé que le projet ITER était fondé sur une base de données scientifiques mondiale. Sept autres grands projets ont déjà été menés afin d'assurer la fiabilité d'ITER. Quant à sa consommation électrique, il a expliqué que M. Malvezin faisait référence à un texte ancien, les dimensions du réacteur ayant été revues à la baisse depuis le retrait du projet des États-Unis.
Yannick Imbert a rappelé que la Région était porteuse d'un projet collectif et international. Les partenaires ont investi dans ITER en exigeant, en contrepartie, l'accès à une école internationale pour leurs enfants. La Région s'est engagée. Elle doit tenir son contrat.
Michel Villeneuve, porte-parole de Génération Écologie, a souligné qu'une école de ce type existait déjà à Sophia Antipolis. Selon lui, la construction d'une école internationale est indissociable d'un grand projet de recherche.

Localisation de l'école internationale
Jean-Pierre Estela, du Mouvement de lutte pour l'environnement, a déploré l'implantation de l'école internationale sur la commune de Manosque. Selon lui, les ingénieurs du personnel d'ITER vont préférer habiter à Aix-en-Provence ou à Marseille, pour faciliter l'accès à l'université de leurs enfants. Il a rajouté que des classes internationales auraient aussi pu être créées au sein des établissements scolaires existants.
Yannick Imbert a rappelé que le choix de l'implantation géographique de l'école internationale relevait du rôle de l'État. Il a aussi précisé que l'aménagement du territoire servait à réduire les disparités territoriales et non pas à les accentuer. Selon lui, l'école de Manosque répondra à la fois aux besoins du personnel d'ITER mais aussi à la population locale qui est en pleine expansion démographique. Il a enfin souligné que de nombreux ingénieurs étrangers avaient choisi de vivre à Manosque pour son cadre de vie.

Conclusion
Patrick Legrand a rappelé que d'autres questions pouvaient être posées par courrier ou internet. Il a rajouté que ce "débat sur le débat" avait démontré l'utilité de la discussion autour du projet ITER en Provence. Puis il a invité le public à s'exprimer de nouveau lors des prochaines réunions.

Yves Mansillon a rappelé que la CNDP ne donnait en aucun cas son avis lors du compte rendu final du débat public. Il s'agit simplement d'une synthèse des interventions du public pendant les réunions. Le maître d'ouvrage devra statuer en fonction de l'avis de la population.