Déroulement des réunions

Comptes-rendus et synthèses des réunions publiques

Les comptes-rendus des réunions publiques font état de l’intégralité des propos échangés par l’ensemble des acteurs du débat. Un compte-rendu synthétique des réunions publiques sera, lui aussi, accessible au fur et à mesure du débat.

Note de synthèse de la réunion publique de Rennes

Des internautes soulèvent la question du risque du passage des barrières biologiques (cerveau, placenta) des nano ingérés. Ronan Lefort confirme qu’elles les traversent, sans pour autant qu’elles soient toxiques. Cela peut dans certains cas être utile, par exemple pour faire de l’imagerie médicale. Il établit un parallèle avec les marqueurs radioactifs, dont l’usage à faible dose est maîtrisé. Cela s’applique aussi aux chercheurs qui contrôlent de près la dosimétrie des expositions. Contrairement à la radioactivité, en nano, la mesure est d’autant plus difficile qu’on ne sait pas quoi mesurer.

Camille Helmer insiste pour que, dans un grand domaine de découvertes comme celui-là, on ne ferme pas la porte, l’objectif prioritaire de l’agro-industrie étant la sécurité du consommateur. Jean-Marie Haussone, délégué régional de la recherche et de la technologie, exprime sa conviction de la nécessité d’une recherche forte des gens issus des milieux scientifiques nationaux, impliqués pour protéger le consommateur et l’industrie, et capables de peser sur la définition de normes dans les organismes internationaux.

Isabelle Jarry signale l’importante contribution de Paul Colonna, consultable sur le site, présentant un inventaire assez complet des pistes de recherches alimentaires. M. Bergeret souligne deux domaines importants du rapport Colonna : celui des emballages, mais surtout celui des aliments fonctionnels et de santé.

Sur le plan règlementaire, l’INC fait valoir la nécessité d’un étiquetage pour informer les consommateurs de la présence éventuelle de nano. L’AFSSA est d’ailleurs en faveur de celui-ci. Pour l’ANIA, Camille Helmer remarque qu’en l’état actuel des choses, la question de l’étiquetage ne se pose, puisqu’il n’en existe pas. Elle fait valoir que le secteur alimentaire est le plus réglementé et que les autorités se sont saisies du problème, au niveau européen, avant l’utilisation concrète de cette technique. L’AFSSA confirme qu’il existe des groupes de réflexion au niveau communautaire entre les industriels, les consommateurs, et les parties prenantes et qu’il s’en met en place aussi à l’OCDE, à l’AESA (Agence européenne de sécurité des aliments), à l’AFNOR, etc.
Pour un internaute, les études montrant l’impact négatif des nanotechnologies doivent être publiées aux professionnels de santé et aux associations de consommateurs, à défaut d’un moratoire pour tout ce qui touche la santé et l’alimentation.

Christine Favrot précise que l’AFSSA rend des rapports et réalise des expertises collectives réunissant des experts compétents dans des domaines très différents susceptibles de démontrer des effets toxiques comme des effets bénéfiques. Elle établit une bibliographie extensive des publications scientifiques, comme de la littérature "grise" publiée sur internet, analysées et critiquées pour les rendre accessibles et compréhensibles aux associations et aux citoyens, qu’elles révèlent ou non des effets toxiques.

Invitée à compléter ces réflexions, Arila Pochet, du ministère de la Santé, souligne deux types de difficultés sur le sujet : d’une part, un champ de définition très large, pour les nano   et le travail de normalisation et de spécification des différents types de produits est en cours sur le plan de la réglementation   et d’autre part les études toxicologiques. L’OCDE parraine actuellement un programme de collecte de données. Par exemple, sur la silice utilisée dans l’alimentation dans des agglomérats à l’échelle micro, on vérifie si, à l’échelle nanométrique, elle acquiert des caractéristiques ou présente des dangers différents et si les études menées sont fiables pour valider les lignes directrices de toxicité existantes ou les modifier. Denis Morineau abonde dans son sens : la nature chimique d’un objet n’est pas suffisante pour le caractériser. À l’échelle nanométrique, le produit acquiert des propriétés différentes qui varient en fonction de sa taille, de sa forme, de la nature de sa surface, s’il est aggloméré ou en poudre…

Un internaute relève la contradiction entre l’ANIA, qui dit que la silice ne pose pas de problème, et le chercheur, qui affirme qu’on n’a pas assez de connaissances sur la toxicité des produits : qui se trompe ? Personne, car la silice employée ne l’est pas à l’échelle du nano, répond l’ANIA. C’est un sujet difficile, ajoute l’AFFSA, au sujet duquel on demande aux pouvoirs publics d’informer le plus possible, mais on n’est pas non plus à l’abri de produits importés par internet. En l’absence des travaux de l’OCDE notamment, il est difficile de trancher.

Des sujets connexes à l’alimentation font aussi l’objet de questions.

L’INC s’interroge sur l’innocuité des emballages. Une substance a obtenu une autorisation pour son adjonction à certains plastiques. Pour l’ANIA, les emballages ne sont pas en contact avec l’aliment et sont de ce fait totalement sûrs pour les consommateurs. L’AFSSA précise que l’on pourra revenir sur l’intérêt potentiel des nano dans les emballages lorsque la recherche sera plus aboutie. Il existe des matériaux intelligents et des matériaux actifs permettant d’assurer la conservation du produit sans altérer sa qualité au moment où le consommateur le mange. Isabelle Jarry signale aux internautes qu’Alain Mimouni, qui a fait une conférence sur le sujet de l’emballage alimentaire, a déposé cette contribution, très bien documentée, sur le site.

À une question posée sur la présence des nano dans les produits phytosanitaires, l’AFSSA indique n’avoir accordé aucune autorisation de mise sur le marché de produit de taille nano.

Plusieurs internautes s’interrogent sur les différences dans les risques entre OGM et nano dans l’alimentation. D’emblée, Arila Pochet, répond que ce sont deux problématiques très différentes, si ce n’est que, dans les deux cas, on est très en amont du développement et qu’on manque d’outils pour bien identifier et mesurer les risques et vérifier que les études sont fiables. Le point commun, selon l’INC, c’est que c’est l’impulsion du public pour la mise en place d’une gouvernance qui conduira à engager une réflexion afin de garantir la transparence et la représentation des consommateurs aux différents stades de décision.

Des internautes rennais s’enquièrent du respect de l’écoconception dans le développement des nano et de leur devenir dans les déchets. Denis Morineau dévoile un thème de recherche menée en Bretagne sur la possibilité d’utiliser des matériaux organiques à l’échelle nanométrique dans la fabrication de nouveaux composites type polymères. On ajoute des nanofibres, par exemple, pour apporter plus de résistance (emballages, aéronautique, industrie navale). Les travaux de recherche menés intègrent la notion d’écoconception, en particulier des études pour essayer d’utiliser des nanofibres d’origine naturelle, donc moins nocives comme des feuillets d’argile. Par ailleurs, des équipes travaillent sur l’utilisation des nanoparticules dans l’imagerie médicale pour remplacer les particules à base de métaux lourds.

En matière de recherche, Mme Larrieu, du ministère du développement durable, insiste sur les multiples facettes à approfondir : la question complexe du cycle de vie et du relargage des nano, celle de la reconnaissance et du repérage des nanoparticules relarguées dans l’environnement, celle de la métrologie et de l’instrumentation, enfin les travaux de toxicologie et d’écotoxicologie ; enfin les effets sur l’ensemble des écosystèmes, de l’eau, des organismes vivants de l’accumulation de tel ou tel type de nanoparticules.  

L’enseignement des nanosciences suscite également beaucoup de questions. Celui-ci inclut-il la prévention des risques d’un manque de maîtrise ?

Les enseignants expliquent qu’ils forment des scientifiques déjà utilisateurs de produits, donc sensibilisés à la gestion des risques du laboratoire,  notamment dans le domaine très pluridisciplinaire des nanotechnologies. Ils se font assister pour cela par des scientifiques expérimentés ou par des partenaires industriels. Il est difficile d’élaborer une formation complète, ne laissant aucun domaine à l’écart. En France, ces formations sont dispensées à Grenoble, Paris, Toulouse, dans l’Ouest. Des centres de compétences C’Nano, sous l’impulsion du plan Nano Innov, manifestent la volonté de créer des formations aux nanosciences, mais aussi aux nanotechnologies.

Pour bien s’approprier ce domaine, la formation devrait commencer au collège, avec des enseignants qui auraient été formés au contact avec l’université. Ceux-ci doivent être l’interface entre le monde de la recherche, les partenaires industriels   employeurs de demain  , et la société   étudiants et personnes en formation continue.

Pour répondre aux questions générales sur les applications et matières utilisées avec des nanotechnologies, les chercheurs sont invités à présenter leurs travaux.

Denis Morineau, coordinateur de C’Nano Nord-Ouest, explique que les nanomatériaux, qui englobent un ensemble vaste de matériaux, nécessitent une formation par la recherche pluridisciplinaire ainsi que la mise en place de réseaux d’échanges et de partenariats entre chercheurs de disciplines différentes.

Des réseaux de recherche fondamentale publique autour des nanosciences ont été montés en France. En Bretagne, près de 150 chercheurs travaillent dans des laboratoires de recherche publique   universités, CNRS, INRA, etc. Cette petite communauté est extrêmement dynamique, elle a su mettre en place des synergies pour regrouper l’ensemble des acteurs de la recherche dans le domaine des nanosciences.

Les domaines de recherche sont très vastes : ils portent sur les effets du nanoconfinement, sur les couches minces, sur les nanoparticules, sur les composites en intégrant des nanofibres dans des matériaux massifs. Les équipes en Bretagne travaillent par ailleurs dans le domaine des sciences humaines et sociales, notamment sur la réglementation et sur la protection de la propriété intellectuelle.

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De nombreuses questions posées ont trait aux dates de réunion et à la publicité qui en est faite. Certains signalent qu’un site administratif donnait pour ce débat la date du 5 janvier. La Commission rappelle que les dates exactes sont trouvées sur le site du débat public sur les nano.

En conclusion, Isabelle Jarry fait part à nouveau des regrets exprimés par bon nombre de participants que la réunion n’ait pas pu se poursuive tous ensemble. Elle remercie tout le monde des questions posées et réaffirme son engagement de répondre aux questions restées en suspens.

Elle remercie les intervenants d’avoir apporté leur compétence et leur contribution.