Les cahiers d'acteurs du débat public sont des contributions écrites d'acteurs du débat public, institutionnels ou associatifs, édités par la CPDP au cours du débat. Ils permettent d'éclairer le public, sur des questions touchant les nanotechnologies.
Créée en 1992, EpE est une association d’une cinquantaine de grandes entreprises engagées à mieux prendre en compte l’environnement dans leurs décisions stratégiques et dans leur gestion courante. Les
membres d’EpE appartiennent à des secteurs très divers, favorisant
ainsi une approche transversale des questions environnementales.
Dans
leurs recommandations finales, les citoyens ont exprimé leur grande
confiance à priori dans les bénéfices liés au développement des
nanotechnologies mais ont également souligné la nécessité d’avancer
avec prudence. Le présent cahier d’acteur est constitué des
recommandations citoyennes émises lors de la consultation organisée en
2006 et des commentaires en réponse, des entreprises membres d’EpE.
De
manière générale, les membres d’EpE souhaitent que, compte tenu des
propriétés spécifiques des nanoparticules qui rend leur usage utile
pour un grand nombre de produits et sont susceptibles d’améliorer la
qualité de vie, les performances environnementales et l’innovation, les
nanotechnologies connaissent un essor des recherches et des
développements dynamique mais contrôlé et responsable. Les réponses des
entreprises d’EpE aux recommandations des citoyens en précisent les
conditions.
Recommandation 1 : « Informer et rassurer sur les risques perçus concernant la santé et l’environnement
>
Informer et rassurer sur les risques sanitaires en démontrant
l’innocuité des produits. Ceci compte tenu de l’existence aujourd’hui
d’un réel problème de toxicité, perçu au travers de risques dont les
experts ont affirmé l’existence tout en précisant qu’ils ne sont pas
tous identifiés.
> Mettre en place des études épidémiologiques permettant de détecter de nouvelles maladies générées par les nanotechnologies.
>
Obtenir des garanties par rapport aux risques de toxicité concernant
l’environnement, notamment la dispersion des nanoparticules sur leurs
territoires d’action (eau, sol, air). Se prémunir du «dépolluant polluant»,
c’est-à-dire utiliser des produits dépolluants qui à long terme
s’avèrent être une source de pollution supplémentaire.
> Prévoir des conditions acceptables de recyclage des produits au moment de leur élaboration. »
Commentaire
EpE - Les entreprises d’EpE encouragent le développement d’analyses
approfondies de cycles de vie et des impacts sanitaires et
environnementaux dès le stade de la conception des produits utilisant
des nanoparticules. Ces analyses sont souvent déjà effectuées par les
entreprises ; elles doivent être poursuivies et renforcées, notamment
dans la durée pour repérer des impacts à moyen et long terme. Le
renforcement de ces pratiques est toutefois aujourd’hui encore
conditionné par le développement de la filière de la métrologie en
matière de nanotechnologies.
Recommandation 2 : « Protéger les personnels de production et de recherche pour assurer leur sécurité
> Créer un organisme spécialisé dans la prévention des risques et la protection des personnes et personnels travaillant sur les sites de production. Il a pour mission de recueillir des informations, mener des études épidémiologiques et communiquer les résultats aux différents acteurs chargés de mettre en place des outils de protection adaptés aux nanoparticules.
> Renforcer le rôle de la médecine du travail par une plus grande autonomie et des formations appropriées. »
Commentaire EpE - Les substances sous forme nanoparticulaire ne constituent pas un ensemble homogène vis-à-vis des évaluations
des risques pour l’Homme et l’Environnement ; d’ores et déjà, certaines
d’entre elles ont démontré leur innocuité. Chaque nanoparticule doit
être étudiée de façon spécifique, sans à priori, ni règles communes.
Lorsque des incertitudes scientifiques persistent sur les dangers liés
à certaines substances à l’état nanoparticulaire, il est
nécessaire d’en limiter l’exposition et de faire bénéficier de
protections adaptées les employés mettant en œuvre des nanoparticules
dans les laboratoires et dans les unités de production : les
entreprises d’EpE sont conscientes que, du fait de leur petite taille,
les nanoparticules peuvent éventuellement traverser les protections
usuelles ; elles travaillent donc à des protections spécifiques et
mettent en place des mesures de prévention et de captation à la source
en vue de prévenir les risques pour les employés ainsi que pour les
riverains des sites. Des entreprises ont déjà rédigé des guides de
bonnes pratiques.
L’Afsset a bien entendu un
rôle actif dans la détection et la prévention des impacts ; les
médecins du travail, dont l’indépendance est ici rappelée, peuvent
aussi jouer un rôle clef dans le conseil rendu aux entreprises et par
le suivi médical. La médecine du travail est peu à peu sensibilisée à
ces nouveaux enjeux et développe progressivement des méthodes
particulières de suivi médical et de protection pour y faire face. Le
rôle de ces organismes ne dispense toutefois pas les entreprises de la
vigilance qu’elles doivent exercer elles-mêmes sur ce sujet.
La traçabilité des expositions professionnelles peut également être améliorée.
Recommandation 3 : « Développer la recherche
>
Créer un organisme chargé de coordonner la recherche dans le but de
l’optimiser, celle-ci étant aujourd’hui considérée comme pas assez
rapide pour satisfaire à des enjeux économiques et financiers (1 300
produits lancés sur le marché sans recherche ni évaluation approfondie
des risques). Cet organisme doit faciliter la communication et les
échanges des résultats entre les laboratoires de recherche et les
industriels. Il doit veiller à la continuité des recherches publiques.
>
Augmenter significativement les moyens accordés à la recherche.
Accroître en parallèle le budget consacré à la recherche sur les
risques (aujourd’hui 10 % seulement du budget global). Accentuer la
recherche métrologique.
> Instaurer une taxe
sur les produits finis, des incitations fiscales pour les entreprises,
créer un fonds de financement sur la recherche pour les risques
alimentés par les entreprises et l’état. »
Commentaire
EpE – L’Agence Nationale de la Recherche (ANR), en liaison avec
l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du
travail (Afsset) nous paraissent aujourd’hui en position de faire la
coordination et l’optimisation de la recherche sur les nanotechnologies demandées par les citoyens.
Les
membres d’EpE reconnaissent le besoin de recherche sur les impacts
sanitaires et environnementaux ; plusieurs participent déjà à des
programmes de recherche existants comme Nanosafe 2 au niveau européen
ou Nanocare en Allemagne. Elles mettent à l’étude des engagements
volontaires de moyens de recherche sur ces risques dans le cadre de
leurs budgetsde R&D dans le domaine.
Les
membres d’EpE sont favorables à l’affectation des ressources publiques
pour la recherche sur les méthodologies d’évaluation de la sécurité,
compte-tenu de la diversité et des faibles quantités aujourd’hui
produites, et du caractère diffus des nanotechnologies. Il leur semble
également approprié de dédier de manière conjointe à la recherche sur
les impacts, des ressources internes des entreprises et une part des
budgets publics dédiés au secteur.
Recommandation 4 : « Mettre en place une recherche objective
> Créer des normes contraignantes à faire respecter par les industriels, assorties de sanctions financières.
>
Obtenir une plus grande objectivité de la recherche par une synergie
entre les différents acteurs : chercheurs, industriel et politique.
>
élaborer une charte de bonne conduite dans le but de prévenir les
mensonges et omission des industriels et des politiques plus attachés
aux enjeux financiers et aux profits réalisés grâce aux
nanotechnologies qu’à la santé du consommateur. »
Commentaire
EpE – Une expertise scientifique doit aussi tenir compte des enjeux
socio-économiques. L’expertise est d’autant plus crédible qu’elle est
transparente, contradictoire, exhaustive intégrant recherche publique
et privée et réalisée selon des principes de rigueur. EpE travaille
d’ailleurs depuis longtemps à ce sujet qui est fondamental pour les
entreprises et a publié en 2007 une « Charte de l’expertise privée ».
EpE
renouvelle son soutien à l’AFNOR dans ses travaux sur la mise en place
de normes internationales contribuant à un développement maîtrisé des
nanotechnologies, en liaison au sein de l’ISO avec les instances
normatives des autres pays producteurs ou utilisateurs :
l’objectif
est notamment d’harmoniser les pratiques au niveau international et de
façon évolutive, au fur et à mesure du progrès des connaissances sur
les effets réels de ces particules.
Recommandation 5 : « Le besoin de transparence
>
Renforcer le rôle des associations (de défense des consommateurs, de
l’environnement, de la santé, etc.) qui ont su générer la confiance du
citoyen.
> Mettre en place un plan de communication pour le grand public dans un objectif de transparence et d’information sur les nanotechnologies et concernant l’existence de risques et des résultats obtenus dans ce domaine.
>
Assurer la transparence en imposant une mention à porter sur les
produits (un avertissement au consommateur dont la formulation reste à
définir). »
Commentaire EpE – Les membres d’EpE
reconnaissent l’intérêt d’informer les consommateurs et utilisateurs de
la présence de nanoparticules libres dans les produits et des risques
de dispersion - encore une fois, l’amélioration de la traçabilité et de
la métrologie des nanoparticules leur paraissent primordiales. Mais il
importe de donner une information utilisable par les consommateurs : un
mode d’information devrait pouvoir être défini par type de produit ou
par filière, dans le cadre d’une réflexion générale sur les écolabels et sur l’information des consommateurs.
SYNTHÈSE