Documents du débat

Cahiers d'acteurs

Les cahiers d'acteurs du débat public sont des contributions écrites d'acteurs du débat public, institutionnels ou associatifs, édités par la CPDP au cours du débat. Ils permettent d'éclairer le public, sur des questions touchant les nanotechnologies.

Vivagora (cahiers en français et en anglais)

Association Vivagora

Informer, mobiliser, engager les parties prenantes

Organiser une gouvernance pluraliste des nanotechnologies

Vivagora

Fondée en 2003, l’association VivAgora agit pour la mise en démocratie des choix scientifiques et techniques. Elle explore et révèle les enjeux sociétaux des innovations technologiques par l’exercice du débat public multiacteurs. Elle promeut l’engagement citoyen dans la gouvernance des technologies et considère que la montée en compétence et en influence de la société civile peut construire des priorités durables, humaines et solidaires.

VivAgora s’est engagée dans la mise en débat public des nanotechnologies dès 2005. Convaincue que les nanotechnologies sont de nature à transformer en profondeur les liens sociaux et les conditions de vie, elle estime urgent de faciliter l’appropriation par les citoyens de leurs enjeux. Il s’agit de faire des nanotechnologies une « affaire publique », ce qui implique de développer de nouveaux modes de gouvernance, transparents, ouverts et participatifs dans tous les secteurs concernés (transports, énergies, médecine, cosmétique, agro-alimentaire…). Car la démocratie technique constitue l’une des réponses pertinentes aux crises (ou désajustements) économiques, écologiques et sociales.  

Trois actions indissociables conditionnent l’innovation responsable dans ce domaine :

>Délivrer une information répondant aux préoccupations des citoyens (usages, risques, responsabilités, régulations). L’objectif est de structurer le champ pour augmenter la capacité des citoyens à formuler un avis et faire entendre leur voix ;

>Débattre des opportunités, risques et incertitudes créées par les technologies émergentes sur la base d’expertises pluralistes. Les conflits sont considérés moins comme des obstacles que comme des ressources pour co-construire un futur souhaitable ;

> Questionner les choix technologiques pour faire entrer les logiques sociétales dans l’innovation (démarches d’open-innovation).

 

1er débat Nanomonde
Premier débat du cycle Nanomonde, organisé par VivAgora à la Cité internationale universitaire de Paris, le 12 janvier 2006.

 

Pionnière dans l’instauration du débat public sur les nanotechnologies en France, VivAgora a mis sur pied en 2006, les cycles de débats NanoMonde à Paris, NanoViv à Grenoble à la demande des Collectivités locales (voir les recommandations produites sur le site). Elle s’est impliquée dans le Comité de pilotage de la Conférence de citoyens sur les nanotechnologies en Ile-de-France (début 2007), et a contribué aux Cahiers d’acteurs présentés lors des trois tables rondes de mars 2007 à La Cité des Sciences et de l’industrie.

 

Depuis juin 2007, VivAgora s’est engagée dans la co-organisation du NanoForum permanent du CNAM porté par William Dab avec le soutien de la Direction générale de la santé (DGS). Elle a mis en place une Alliance citoyenne sur les enjeux des nanotechnologies (ACEN-CACEN), plate-forme d’ONG concernées par les nanos. Ce collectif ouvrira à la fin 2009 un portail collaboratif d’informations pertinentes pour la société (réglementations, débats, campagnes, réseaux associatifs...).

 

VivAgora est aussi active au sein :

> du groupe « nano » de l’AFNOR (en lien avec les groupes « nano et société » et « nano et sustainability » de l’ISO) ;

> du Comité sectoriel sur les nanotechnologies de l’Agence nationale de la recherche (ANR) ;

> du groupe « nano » du Conseil national de la consommation (CNC).

 

Les nanotechnologies n’auront de sens que si elles sont inscrites dans un véritable projet de société.

 

Depuis les nanoparticules qui sont déjà dans nos peintures, voitures, aliments et cosmétiques jusqu’aux applications les plus futuristes visant à augmenter les performances humaines, les nanotechnologies concernent chacun de nous.

Elles soulèvent des enjeux majeurs (voir encadré à droite) à la hauteur des investissements colossaux dont elles bénéficient. Pourtant, du fait de l’apparente technicité du sujet, d’un relatif désintérêt des médias, du peu de transparence de la part des industriels, elles sont largement ignorées du public, et les discussions sur leurs risques, leur utilité, leurs finalités sont jusqu’à présent restées très limitées.

Le débat national sur les nanotechnologies s’impose comme une urgence avant que les décisions soient arrêtées à l’échelle nationale et locale, pour ajuster l’innovation aux attentes des citoyens, à leurs systèmes de valeurs comme aux impératifs écologiques actuels.

 

Pour relever ce défi, il nous faut :

 

> construire les informations pertinentes avec les citoyens concernés ;

> instruire les situations à risque et clarifier les responsabilités par le débat pluraliste ;

> favoriser l’engagement durable des parties prenantes pour orienter les innovations.

Développer une information ciblée sur les enjeux de gouvernance

Les débats publics menés sur les nanotechnologies dans le monde montrent que les citoyens entrent dans la discussion sous l’angle de la gouvernance.

 

Les questions qui comptent sont les suivantes :

 

> De quelles informations disposent les citoyens ou consommateurs (étiquettes sur les produits, par exemple) ?

> Quels sont les arguments qui motivent les décisions (Minatec, Clinatec,
NanoInnov, par exemple) ?

> Quels sont les pouvoirs respectifs du marché et de l’Etat dans les politiques scientifiques et les choix technologiques ?

> Quelle protection des citoyens, consommateurs, usagers, travailleurs et patients ?

> Comment réguler les usages (des nanotubes de carbone, nanoparticules d’argent ou puces électroniques, par exemple) susceptibles de menacer la santé, l’environnement ou l’intérêt général ?

> Quelles normes et réglementations ? Quel contrôle et par qui ?

> Quelle attention est portée aux questions de justice et d’équité (nord-sud notamment) dans l’accès aux bénéfices des nanotechnologies ?

 

Ainsi, VivAgora contribue à aborder les nanotechnologies non par secteurs technologiques mais sous l’angle de la gouvernance en vue d’établir un dialogue entre les divers acteurs et de co-construire ces technologies émergentes avec la société. Trois angles d’approche sont proposés.

 

Des consommateurs concernés, protégés ou menacés ?

Les citoyens sont aujourd’hui concernés en tant que consommateurs, même s’ils sont peu informés de la présence de nano-ingrédients dans les produits de consommation courante.

 

Ils ont besoin de savoir en quoi les nanotechnologies peuvent réellement améliorer la qualité de vie (solutions pour une industrie durable…) et pour qui ?

Ils doivent connaître les impacts potentiels sur la santé humaine et sur l’environnement (risques) et participer à l’évaluation raisonnée des mesures à prendre pour réguler leur commercialisation et leurs usages.

 

Corps et conditions de vie : de la réparation à l’amélioration de l’humain

 

Les nano-biotechnologies se caractérisent par leur intervention sur le corps humain et pas seulement sur le milieu. La réduction de taille des dispositifs rendue possible par les nanotechnologies permet des diagnostics précoces et l’administration de médicaments vectorisés sur une cible précise. Elle autorise aussi d’implanter dans le corps des dispositifs capteurs ou actionneurs pour surveiller la biochimie de l’organisme et délivrer des réponses appropriées notamment dans le cerveau. Ainsi le corps des individus, leurs comportements, leurs humeurs se trouvent monitorés, compensés, réparés, pilotés, normalisés, améliorés. Il est important de pouvoir débattre des risques et avantages de ces projets, comme des valeurs qu’ils servent. D’autant qu’aux Etats-Unis, le but assigné aux technologies convergentes est « l’amélioration des performances humaines », privilégiant donc l’individualisme et la compétition.

 

Automates : vers des machines vivantes ou des organismes vivants artificiels

 

Dès le lancement des nano-initiatives dans divers pays, les promoteurs des nanotechnologies ont donné libre cours à de grandes visions futuristes : machines capables de s’auto-assembler et de se répliquer ou organismes vivants de synthèse.

Ces visions plus ou moins réalistes orientent néanmoins les recherches dans une direction précise, à l’exclusion d’autres styles de recherche. Elles mettent en jeu des conceptions métaphysiques touchant les distinctions entre inerte et vivant, nature et artifice, autant que les rapports entre activités humaines et environnement. Les citoyens sont en droit de les discuter et de les orienter.

 

Mettre en politique et en démocratie les projets en matière de nanotechnologies

 

De nombreux débats publics ont été réalisés sur les nanotechnologies mais ils permettent rarement d’enclencher des pratiques nouvelles pour donner du sens à l’innovation.

Pour progresser dans l’engagement de la société civile sur ces sujets, il est nécessaire de lui permettre de s’inscrire dans la durée, dans les territoires (en prise avec les projets locaux), et de peser sur les choix à travers des situations concrètes (études de cas).

 

Sans dédaigner les événements ponctuels nécessaires pour attirer l’attention des médias, VivAgora s’efforce de développer une culture du débat public, durable et authentique.

 

L’objectif est de forger des outils politiques nouveaux (contrats sociaux sur le rapport bénéfices-risques, régulations, cadrages des responsabilités avec les assureurs, étiquetages ayant du sens) sans lesquels il ne peut y avoir de développement durable des nanotechnologies.

 

Dans le contexte de la Stratégie nationale de recherche et d’innovation (SNRI), cette « mise en politique et en démocratie » des nanotechnologies peut permettre de :

 

> Questionner les transformations sociales et culturelles provoquées par l’usage généralisé des nano-biotechnologies ;

> Mettre en lumière les valeurs associées (compétitivité, individualisme…) ;

> Aborder les questions de contrôle et de responsabilité face aux risques ;

> Interroger les finalités des nanotechnologies : à quels besoins répondent-elles ? Sont-elles, dans chaque cas, la seule et la meilleure réponse possible ?

 

Introduire des logiques sociétales dans l’innovation

 

La mise en débat des nanotechnologies ne saurait cependant suffire pour instaurer une démocratie technique. Les débats ont encore peu d’impacts sur les prises de décisions et les industriels notamment ceux de l’agro-alimentaire ou de la cosmétique, s’y dérobent trop souvent. Il apparaît donc nécessaire de travailler avec eux plutôt que sans eux, afin d’installer les logiques sociétales au cœur même des processus d’innovation.

 

Face aux défis de gouvernance partagée et de développement durable, VivAgora fait le pari d’accompagner les acteurs de l’innovation pour favoriser des démarches responsables, attentives aux problèmes de santé, d’environnement et d’utilité sociale. Elle propose aux industriels des processus sur mesure d’interactions avec les partenaires sociaux, propices à une construction robuste et collectivement « souhaitée » des projets innovants.

Bernadette Bensaude-Vincent, Bernadette Bensaude-Vincentprésidente de VivAgora

 

Construire une politique de l’incertitude

 

Les nanotechnologies sont souvent présentées comme une révolution. Or les nanoparticules sont difficilement caractérisables et échappent aux normes de traçabilité. Les nanotechnologies augmentent le champ de l’incertitude

et plus fondamentalement invitent à une attitude de non maîtrise.

La volonté d’affronter l’incertitude est encore plus affirmée dans le phénomène de convergence avec d’autres technologies. Les synergies entre biotechnologies, chimie, technologies de l’information, de la cognition, voire neurosciences, démultiplient les possibles, libèrent des potentialités. Nous avons donc à affronter une politique de l’incertitude, à apprendre et à décider en méconnaissance de cause.

 

Propos de Bernadette Bensaude Vincent, présidente de VivAgora

Extrait des Actes du Colloque Innovation responsable du 29 avril 2009 au Collège de France organisé par VivAgora, le Conseil régional d’Ile-de-France et le MEEDDM, p.26


VivAgora propose diverses formules originales de construction collective des choix techniques qu’elle met au service de la société :

 

> Une « formule maison » : le cycle de débats publics

En 2009 sur le thème : ingénierie du vivant 2.0, La biologie synthétique en question.

Pour explorer les enjeux sociétaux des technologies émergentes

> Une expérience originale : le Nanoforum (avec le CNAM et le DGS)

Pour responsabiliser acteurs et décideurs des choix technologiques

 

> L’ Alliance citoyenne sur les enjeux des nanotechnologies (ACEN - CACEN)

Pour augmenter la capacité des citoyens à contribuer à des choix responsables

 

 

 

Acen-Cacen

http://acen-cacen.org

Le portail Internet collaboratif ACEN-CACEN sur les enjeux des nanotechnologies ouvre fin 2009.
 
 

SYNTHESE

La mise en débat public des nanotechnologies a peu de chance de conduire à une co-construction des projets tant que demeure une asymétrie entre le point de vue des experts et celui des « profanes ». La société civile est en effet peu armée pour prendre la mesure des enjeux liés aux nanotechnologies, se représenter le paysage des possibles et du souhaitable et s’imposer comme partenaire à part entière dans les choix technologiques.

Au-delà des quelques mois de débats publics, il est primordial que se mettent en place des processus innovants et permanents de concertation et d’instruction collective des sujets controversés ou préoccupants.

Cette dynamique exige des coopérations pour une information pluraliste, un débat contradictoire ouvert sur les valeurs, l’engagement des citoyens pour une politique d’ouverture des choix technologiques à la société civile.

 

COORDONNÉES

VivAgora

Bernadette Bensaude-Vincent, présidente

Dorothée Benoit-Browaeys, déléguée générale

103 rue de la Tombe Issoire - 75014 PARIS - Tél. : 06 14 01 76 74

E-mail : vivagora@vivagora.org - http://www.vivagora.org