Documents du débat

Cahiers d'acteurs

Les cahiers d'acteurs du débat public sont des contributions écrites d'acteurs du débat public, institutionnels ou associatifs, édités par la CPDP au cours du débat. Ils permettent d'éclairer le public, sur des questions touchant les nanotechnologies.

France Nature Environnement

L’urgence de la maîtrise des risques associés aux nanoparticules et nanomatériaux !

À chaque étape du cycle de vie des nanoparticules et nanomatériaux, la responsabilité de la maîtrise des risques doit être assumée.

France Nature EnvironnementFNE est une fédération de plusieurs milliers d’associations de protection de l’environnement sur le territoire français, métropole et outremer. FNE est un mouvement de citoyens qui s’engagent, volontairement, dans une démarche d’acteurs du dialogue environnemental basée sur un ensemble de valeurs : l’intérêt général, le respect du vivant, la sobriété, l’équité, la solidarité…

Notre objectif : faire en sorte que notre démocratie et notre économie soient en phase avec les limites de la planète.

 

Le dossier nanotechnologies réalisé par le Réseau Santé-Environnement de FNE permet de comprendre ce que sont les nanoparticules manufacturées, en quoi elles sont dès à présent une réalité et pourquoi elles présentent des risques sanitaires et environnementaux particuliers. Il vous fera aussi découvrir tout notre investissement sur cette question depuis déjà plusieurs années.

 

 

http://www.fne.asso.fr/fr/themes/sub-category.html?cid=170

 

Nous avons élaboré dès janvier 2007 une plateforme dédiée aux nanomatériaux, régulièrement actualisée en fonction des évolutions technologiques, scientifiques et réglementaires qui exprime nos attentes vis-à-vis des 3 types d’acteurs : la communauté scientifique, les industriels et les décideurs politiques et administratifs de l’Etat français.

 

La première version exprimait des positions présentées officiellement en France et au Parlement européen. Les publications scientifiques depuis cette date ont validé nos hypothèses et confirmé la pertinence de nos positions. Présentée aux parties prenantes dans le cadre du Grenelle de l’Environnement en 2007, la seconde version a été considérée positivement et a conduit à une évolution législative1. La troisième version intègre les publications scientifiques et les évolutions récentes, qui renforcent nos demandes.

 

http://www.fne.asso.fr/transfert/nanotechnologies/page_nano_a4.pdf

 

 Elle reste d’actualité !

 

 Notre communication s’articule autour des 3 thèmes essentiels à la bonne gestion des risques environnementaux et sanitaires spécifiques aux nanomatériaux. Ils alimentent nos demandes aux acteurs scientifiques, industriels et institutionnels pour la mise en place d’une gouvernance adéquate.

 

Pour évaluer les risques, il faut connaître ce qui est produit et commercialisé

Si les nanotechnologies suscitent une telle méfiance d’ordre toxicologique de la part de FNE, c’est que les études actuelles indiquent clairement l’existence de risques environnementaux et sanitaires, confirmé par le rapport SCENIHR de la Commission européenne2 du 19 janvier 2009 et surtout l’absence de possibilité d’évaluation des risques par manque d’information sur les produits commercialisés.

 

La déclaration obligatoire pour identifier et réduire les risques

Dans le cadre de la loi n° 2009-967 « l’État se donne pour objectif que, dans un délai de deux ans qui suit la promulgation de la loi, la fabrication, l’importation ou la mise sur le marché de substances à l’état nanoparticulaire ou d’organismes contenant des nanoparticules ou issues de nanotechnologies fasse l’objet d’une déclaration obligatoire, relative notamment aux quantités et aux usages, à l’autorité administrative ainsi qu’une information du public et des consommateurs. » Reste à rendre cela opérationnel !

 

L’étiquetage pour prévenir le risque de consommation contre-indiqué médicalement

FNE tient à souligner que l’absence d’étiquetage précis de produits franchissant les barrières biologiques pour atteindre organes, tissus, noyaux des cellules et interférant avec l’ADN du monde végétal et animal est irresponsable et incompréhensible, compte tenu des règles actuelles européennes d’étiquetage des produits quelque que soit leur degré établi de dangerosité. Même les colorants figurent sur la liste des ingrédients : pourquoi pas les nanoparticules ?

 

Cet étiquetage évitera le risque de consommer des produits contre-indiqués pour des raisons médicales et les scientifiques disposeront enfin d’éléments pour estimer les expositions probables.

Sur un plan éthique, cette « démarche étiquette » paraît aussi indispensable car le droit de choisir doit pouvoir être exercé par le citoyen consommateur.

Les chiffres d’affaires générés par la commercialisation des nanoproduits permettent de mettre en place des moyens d’étiquetage satisfaisants, avec communication tant aux agences sanitaires européennes qu’au public par la mise en ligne d’information. Un étiquetage détaillé permettra aussi aux scientifiques d’avoir une information nécessaire sur les caractéristiques des nanoproduits mis sur le marché et de compléter leurs bases de données.

Pour FNE toute mise sur le marché européen de nanoproduits doit dans les plus brefs délais s’accompagner d’une étiquette détaillée comprenant au minimum : la taille des particules, la concentration en nanoparticules, la structure des particules et du substrat, la nanotechnologie utilisée, la classification (exemple colloïde).

Tant qu’il n’y aura pas d’étiquette claire, les débats resteront théoriques, les risques incertains et les responsabilités de chacun ne pourront pas être assumées.

FNE demande :

> Qu’à partir de 2010 tout produit contenant des nanoparticules et commercialisé dans un circuit grand public ou professionnel (y compris sous traitance) soit soumis à un étiquetage adapté ;

> Que la déclaration produit contienne des informations les plus exhaustives possibles et soit accessible sur le net.

Les risques d’exposition des salariés et la sécurité au travail sont à prendre en compte de manière urgente

En raison des dangers d’exposition des salariés, FNE demande que soit mis en œuvre rapidement un ensemble de mesures de maîtrise des risques, conformément à la loi n° 2009-967 : « L’Etat veillera à ce que l’information due aux salariés par les employeurs soit améliorée sur les risques et les mesures à prendre pour assurer leur protection. »

 

Les risques de manipulation sans information suffisante et donc le danger d’exposition par ignorance

Les salariés des secteurs concernés, fabricants, utilisateurs de nanoparticules ou / et de nanomatériaux, réparateurs de produits et matériaux en contenant et les acteurs de traitement de déchets vont être de plus en plus nombreux dans les mois et années à venir. Ils doivent bénéficier d’un ensemble de mesures de prévention et de précaution, et, en tout premier lieu, d’informations et de formations, sur les risques éventuels, sachant que les risques d’explosion de certains nanomatériaux existent.  

L’étiquetage lisible et apparent est un élément essentiel du dispositif, la traçabilité étant nécessaire à tous les stades de manipulation, de transformation, de stockage et d’élimination.

Les salariés doivent aussi bénéficier de la prise en compte de cette exposition dans le cadre de la surveillance médicale dont ils bénéficient.

Les médecins du travail doivent être formés aux risques spécifiques des nanoparticules et nanomatériaux.

Enfin cet aspect de risques sanitaires pour les travailleurs doit être intégré, à l’échelle européenne, dans le cadre d’une surveillance sanitaire sous forme de cohorte.

 

Les risques d’intervention des personnels de secours et de traitement des victimes

Les services d’intervention d’urgence doivent être formés aux risques spécifiques des nanoparticules et nanomatériaux incluant les procédures et protections individuelles pour les sauveteurs amenés à intervenir dans des atmosphères contaminées par les nanoparticules et nanomatériaux.    La liste des établissements qui utilisent ces nanos doit donc être connue des services d’intervention.

Les procédures pour les hôpitaux devant traiter les victimes soumises à des taux élevés de nanoparticules doivent être adaptées, compte tenu des symptômes spécifiques.

Des moyens de vigilance et de surveillance, à tous les stades du cycle de vie du produit, doivent être opérants

Les dangers d’exposition sanitaires et environnementaux sont insuffisamment documentés d’où la nécessité d’une mise en place de moyens de vigilance et de surveillance, à tous les stades du cycle de vie du produit pour permettre de réduire au maximum l’exposition aux risques et de fournir aux scientifiques des éléments d’étude.

1/ FNE demande aux autorités de mettre en place un ensemble de mesures sur les processus industriels :

 

> Prévoir la surveillance des installations de toute nature fabricant ou utilisant des nanoparticules par les représentants de l’Etat qui ont la mission de surveillance et contrôle des rejets des activités économiques ;

 

> Mettre en place, en matière de nanoparticules, des dispositifs de surveillance de l’air ambiant et de l’air intérieur et des eaux de surface à proximité de ces installations ;

 

> Recenser les filières de production, d’utilisation et d’élimination des nanoparticules ;

 

> Inventorier et rendre accessible au public la liste des nanomatériaux commercialisés ou en voie de l’être de même que les produits en contenant avec leurs caractéristiques.

 

2/ Il est essentiel que les déversements de nanoparticules / nanomatériaux dans les milieux (eau, air, sols) soient interdits dans les plus brefs délais avant que les taux de nanoparticules ne soient suffisamment élevés pour être mesurables. FNE souligne que le but n’est pas de laisser les milieux absorber assez de nanoparticules pour servir de champs d’expérience et valider des hypothèses scientifiques.

 

Les retours d’expériences en qualité de l’air pour des particules de tailles supérieures montrent depuis longtemps les difficultés de dépollution auxquelles la planète est confrontée. Actuellement aucune étude de faisabilité de dépollution n’existe sur les nanoparticules et encore moins sur les coûts.

 

3/ FNE demande que les productions soient développées en intégrant la notion de risques et que l’Union européenne rende obligatoire :

 

> sur site industriel des instruments de mesure adaptés indiquant la présence et la concentration en nanoparticules, pour savoir dans quelles conditions une intervention d’urgence doit être déclenchée ;

 

> la mise en place des modes de gestion des résidus et rejets de production afin d’exclure toute dispersion de nanoparticules dans les milieux ;

 

> l’accompagnement de tout programme de développement de nouveaux produits de tests portant sur leur innocuité, notamment par des tests sur cellules, la communauté internationale mettant en doute l’intérêt de tests systématiques sur animaux.

 

Il est urgent que des moyens financiers suffisants, cohérents avec les investissements industriels, soient consacrés à la prévention des risques y compris transgénérationnels dûs aux nanoparticules et nanomatériaux. Un plan d’action ambitieux ne sera envisageable qu’avec des recommandations fortes sur les points soulignés par FNE.

 

Une étiquette pour la nano-éthique ou la « consomm-action »

par Dominique Proy-Huart

 

Des réunions officielles où les associations françaises et européennes sont conviées pour y exprimer leur point de vue sur les nanoparticules, nanotechnologies et nanosciences et leurs recommandations se multiplient depuis 2007.

 

Leur intérêt principal est de permettre les échanges entre les parties prenantes et d’initier un dialogue, démarche innovante par rapport à d’autres problématiques (amiante, etc.) qui n’ont été traitées que lorsque des crises graves étaient déclenchées.

 

Néanmoins elles sont seulement des groupes de travail sur le monde nano où chaque partie prenante s’accorde à dire que les principes de prévention et de précaution doivent être soigneusement respectés et que davantage de recherche est indispensable ; les « vraies décisions » se prennent ailleurs… à des niveaux gouvernementaux et relèvent d’une stratégique politique propre à chaque Etat.

 

En Europe, en ce qui concerne la réglementation d’étiquetage, les nanos font l’objet d’un retard inacceptable : je considère comme irresponsable de laisser commercialiser des nano-produits à usage alimentaire ou cosmétique sans étiquetage ; chaque consomm-acteur doit pouvoir exercer son choix en toute connaissance de cause !

En conclusion…

Certes, si FNE formule des demandes aux scientifiques et aux industriels (cf notre plateforme), elle attend des pouvoirs publics (décideurs politiques et administratifs de l’Etat français) qu’ils fassent en sorte de favoriser l’amélioration des connaissances ainsi qu’une information sincère du grand public, qu’ils élaborent une réglementation efficace, qu’ils mettent en place des moyens de vigilance et de surveillance et une gouvernance adaptée à ces domaines de forte incertitude où des procédés itératifs de gestion doivent être mis en œuvre.

 

FNE insiste sur deux points très importants :

> Un ensemble de valeurs doit être mis au cœur du débat et pas uniquement la compétitivité et l’importance des marchés.

> L’objectif partagé doit être de prendre des décisions économiquement, écologiquement et sociologiquement acceptables.

 

SYNTHÈSE

Les objectifs de FNE sont clairs :

> Faire mettre en place rapidement une politique efficace de précaution et prévention.

> Obtenir qu’un recensement régulièrement actualisé sur les nanos fabriqués et commercialisés soit disponible.

> Prendre des mesures adaptées en fonction des usages, des expositions, des risques sanitaires et environnementaux.

 

> Produire des connaissances scientifiques pour mieux
cerner dangers et risques et les rendre publiques.

> Impliquer les parties prenantes incluant les associations de protection de l’environnement.

Les nanotechnologies sont une illustration des TEPPR (Technologies émergentes potentiellement porteuses de risque) et justifient l’urgence d’un moratoire partiel sur les nano-objets à usage non médical et en contact, dans leur usage normal, grand public, avec le corps humain : 
  produits alimentaires, emballages alimentaires, cosmétiques, produits bronzants, vêtements…

Il est urgent d’avoir des précisions sur les risques sanitaires potentiels de ces produits déjà disponibles. Un risque faible par individu mais réel, induirait un véritable problème de santé à l’échelle de la population.

 

 

1. Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement dite Grenelle 1 - article 42 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000020949548&dateTexte=&categorieLien=id

 

2. Scientific Committee on Emerging and Newly Identified Health Risks - Comité scientifique de la Commission européenne sur les risques émergents et récents pour la santé – évaluant les risques des produits issus de nanotechnologies http://ec.europa.eu/health/ph_risk/nanotechnology/nanotechnology_en.htm

 

COORDONNÉES

France Nature Environnement

57 rue Cuvier 75231 Paris Cedex 05

http://www.fne.asso.fr

 

Réseau Santé-environnement de FNE

Tél. : 05 61 35 88 08

E-mail : sante-env@fne.asso.fr

 

 

Pilote du Réseau
Santé-environnement de FNE :
José Cambou

 

Experte nanotechnologies pour FNE : Dominique Proy-Huart