Documents du débat

Cahiers d'acteurs

Les cahiers d'acteurs du débat public sont des contributions écrites d'acteurs du débat public, institutionnels ou associatifs, édités par la CPDP au cours du débat. Ils permettent d'éclairer le public, sur des questions touchant les nanotechnologies.

MEDEF

 

 

Le Mouvement des Entreprises de France, MEDEF, est le premier réseau d’entrepreneurs de France. Il représente 750 000 entreprises de toutes tailles et de tous secteurs : industrie, commerce, services.

 

2 réseaux complémentaires assurent sa représentativité :

> le réseau des métiers avec ses 80 fédérations professionnelles,

> le réseau territorial avec les 148 MEDEF territoriaux.

 

Le MEDEF, acteur du développement durable, est le porte-parole des entreprises.


Le développement des nanotechnologies est porteur de nombreux progrès dans de multiples domaines touchant notre santé (prévenir, diagnostiquer et traiter certaines maladies), notre vie quotidienne et la protection de l’environnement (réduction des émissions polluantes).

Pour préparer l’avenir, toutes les nations industrielles sont engagées dans un effort soutenu de recherche et développement. Cette dynamique concerne surtout les Etats-Unis, l’Asie ainsi que l’Europe au sein de laquelle la France joue un rôle leader dans les secteurs de l’imagerie médicale, de l’électronique et de la cosmétique.

 

La France veille naturellement à intensifier ses efforts dans le cadre d’un réseau international de pôle de recherche.

Enjeu capital pour la compétitivité économique de la France, les nanotechnologies connaissent un développement très rapide dans un contexte marqué par un certain nombre d’interrogations des parties prenantes, ce qui conduit le MEDEF à s’exprimer sur les thèmes suivants :

> nanotechnologies et dimension sanitaire et environnementale : s’entourer des conditions de sécurité optimales,

> nanotechnologies et gouvernance : des mesures à renforcer.


Nanotechnologies et dimension sanitaire et environnementale : s’entourer des conditions de sécurité optimales

Le MEDEF considère que la question des impacts sanitaires et environnementaux est essentielle et doit être examinée à la lumière conjointe des données scientifiques et de l’analyse des bénéfices attendus, afin de poursuivre dans des conditions de sécurité optimales le développement des nanotechnologies. Le MEDEF, n’ayant pas de compétence scientifique spécifique, s’appuie sur les synthèses réalisées par les organismes scientifiques nationaux (notamment INRS et AFSSET) ou internationaux reconnus et sur l’expertise des entreprises.

Les impacts sanitaires et environnementaux de plusieurs matériaux nanostructurés (d’une dimension supérieure à 100 nanomètres) mis sur le marché depuis très longtemps à des tonnages très significatifs (silice précipitée, dioxyde de titane, argile…) ont fait l’objet d’évaluations précises. Le recul dont nous disposons par rapport à leurs utilisations, montre à ce jour l’absence d’effets observables alors que leur bénéfice pour la protection de la santé du consommateur ou de l’environnement apparaît incontestable.

 

Le MEDEF prend acte qu’à ce jour, « le risque chez l’homme demeure incertain »1 car peu de connaissances disponibles en matière de toxicité et d’écotoxicité des nano-objets (d’une dimension inférieure à 100 nanomètres) permettent d’explorer les spécificités de ces nanomatériaux. La plupart des données proviennent d’études expérimentales in vitro ou in vivo chez l’animal dont les protocoles doivent être adaptés aux substances à l’état nanoparticulaire. Il apparaît que les substances de taille nanométrique peuvent présenter une toxicité différente de celle des mêmes substances sous forme micro ou macroscopique.

 

Il n’est pas envisageable de considérer les substances concernées comme formant un groupe ayant les mêmes propriétés toxicologiques ou écotoxicologiques ; ainsi, chacune d’entre elles, dans le contexte de son cycle de vie, constitue un cas particulier en ce qui concerne ses effets potentiels sur la santé et l’environnement.

 

Selon les produits et leur forme, les conditions d’utilisation industrielles et professionnelles et l’usage par le consommateur, les voies d’exposition sont très variables. L’inhalation semble constituer une voie importante d’exposition aux nano-objets et notamment aux nanoparticules et aux nanofibres. Ces dernières, une fois inhalées, peuvent se déposer dans les différentes régions de l’arbre respiratoire. Ce dépôt varie notamment en fonction de la substance, de son diamètre, des degrés d’agrégation et d’agglomération ainsi que de son comportement dans l’air. Les nano-objets peuvent également se retrouver dans le système gastro-intestinal après avoir été ingérés. Des études expérimentales chez l’animal montrent que certains nano-objets inhalés ou ingérés peuvent être capables, du fait de leur taille, de franchir différentes barrières biologiques et de migrer vers différents organes. La pénétration transcutanée des nano-objets est une hypothèse encore à l’étude pour la plupart d’entre eux. Il est cependant établi que le dioxyde de titane ne franchit pas la barrière cutanée saine.

 

> Les entreprises fabriquant, important ou utilisant des substances à l’état nanoparticulaire analysent puis évaluent les risques lors de l’utilisation des substances tout au long de leur cycle de vie, y compris les déchets résultant des activités industrielles et les produits en fin de vie.

 

La question des impacts sanitaires et environnementaux reste encore empreinte d’incertitude scientifique. Le MEDEF estime que les recherches doivent être poursuivies pour améliorer la connaissance sur ces sujets. Les entreprises qui veulent innover en utilisant les nanotechnologies doivent prendre les mesures de prévention et de précaution qui intègrent le niveau d’incertitude des connaissances. Cette approche n’est pas spécifique aux nano-objets mais s’applique à toute technique nouvelle dont on ne connait pas nécessairement l’ensemble des impacts éventuels au moment de son développement. Les mesures de protection prennent notamment en compte le niveau de danger. L’utilisation des substances à l’état nanoparticulaire conduit à mettre en place des moyens de protection collectifs et individuels adaptés, par exemple le confinement en milieu industriel. Les substances à l’état nanoparticulaire pour lesquelles les données toxicologiques sont manquantes ou lacunaires, doivent être considérées à défaut comme présentant un haut niveau de danger.

 

Les entreprises doivent fournir à leur personnel, à leurs clients et aux consommateurs une information adaptée, loyale et régulièrement actualisée sur les substances utilisées à l’état nanoparticulaire. De plus, de manière à recueillir des informations a posteriori (après la mise sur le marché), la traçabilité des expositions professionnelles et l’ensemble des vigilances portant sur les produits de consommation doivent être mieux formalisés. Cette indispensable vigilance est d’autant plus importante que l’application des nanotechnologies à la science et notamment à la médecine ouvre des champs particulièrement prometteurs pour la santé (prévention, diagnostique, thérapeutique, …).

 

Les entreprises concernées travaillent sur ces questions, notamment au sein de leur organisation professionnelle (élaboration de lignes directrices…) et sont prêtes à collaborer avec les pouvoirs publics.

Nanotechnologies et gouvernance : des mesures à renforcer

Pour répondre au déficit ou aux insuffisances de connaissances scientifiques et techniques, il est nécessaire d’approfondir les recherches, en particulier sur les méthodes d’essai et d’évaluation des risques et les techniques analytiques de mesure, l’acquisition de données sur les effets (éco)toxicologiques et sur les utilisations et expositions, la caractérisation des « nanos », la mise au point de normes et d’une classification cohérentes.

Dans ce contexte évolutif, le MEDEF estime que l’une des réponses les plus appropriées consiste à renforcer les mesures de gouvernance, dont les principales sont les suivantes :

 

> Prévention et précaution

La mise en œuvre de substances ayant fait l’objet d’une évaluation complète des risques conduit à déployer des mesures de prévention graduelles. Si tous les risques ne peuvent être totalement évalués compte tenu des incertitudes scientifiques,   l’application du principe de précaution conduit à proposer des mesures proportionnées de maîtrise des risques prenant en compte l’incertitude de l’évaluation. 

 

> Cadre réglementaire

Le MEDEF estime que le cadre réglementaire existant est très complet. Il oblige les entreprises à évaluer, à mettre en place des mesures de maîtrise des risques et à organiser la communication d’informations dans la chaine de distribution des produits.

 

Les législations européennes et nationales embrassent globalement la question des « nanos » par les réglementations « Environnement » (IPPC, SEVESO II, Directive cadre sur l’eau, Directive cadre sur les déchets), « Santé et Sécurité au travail » (Directive Agents Chimiques…), « Produits » (REACH, réglementations « sectorielles », sécurité générale des produits).

 

En outre, il existe des dispositions réglementaires spécifiques relatives aux « nanos » dans les nouveaux Règlements Cosmétiques et Nouveaux aliments.

  Le MEDEF est cependant favorable à une évaluation précise de la portée des réglementations européennes et nationales existantes relatives à l’utilisation des nanos et à des ajustements si des insuffisances pouvant avoir des conséquences en matière de protection de la santé ou de l’environnement sont mises en évidence. Dans cette hypothèse, le MEDEF considère que les réglementations sectorielles sont plus appropriées pour accueillir des dispositions particulières aux nanos que les réglementations « génériques », car les caractéristiques des marchés et des substances l’emportent sur des critères plus généraux. 

 

> Cadre normatif

Le MEDEF constate que malgré un très important effort des Etats et des industriels, l’harmonisation des nomenclatures et des définitions n’est toujours pas actée. Celle-ci doit être réalisée au niveau international.

 

> Approche volontariste des acteurs économiques

L’approche réglementaire et normative peut être utilement complétée par des approches volontaristes développées par des fédérations professionnelles ou par des entreprises. Les fédérations professionnelles développent des guides techniques comportant des préconisations en matière de protection de la santé et de l’environnement.

 

> Assurer la transparence pour un développement serein

 

Information du public

L’Etat doit, par le biais des Agences compétentes, mettre à disposition du public des informations scientifiquement validées et mises à jour régulièrement. Il doit également veiller à équilibrer son discours en abordant systématiquement les bénéfices apportés par les nanotechnologies en regard des risques.

 

Communication vis-à-vis du grand public

Dès lors qu’une application concernant le public peut conduire à une exposition à des nano-objets, il est légitime que le consommateur reçoive une information appropriée par le truchement des moyens existants de communication (étiquetage, consignes de prudence, notice, composition…). A ce titre le dispositif de déclaration par les acteurs économiques auprès d’une autorité compétente constitue une réponse de premier niveau en vue de l’information des consommateurs.

 

Communication dans la chaine d’approvisionnement

S’agissant de technologies nouvelles dont les impacts ne sont pas intégralement appréhendés, il est nécessaire que la communication dans la chaine de distribution des produits permette à chaque maillon de la filière d’appréhender les risques et d’en informer son personnel et ses clients.

Le MEDEF est favorable à un recensement précis des filières de production, d’utilisation, et d’élimination des nanoparticules, de leur potentiel de développement. Il faut également identifier les flux de nanoparticules manufacturées, et les formes sous lesquelles elles sont conditionnées, transportées et mises en œuvre. Les filières de recyclage et d’élimination devraient également être recensées.

 

Protection des données

Le développement des nanotechnologies conduit à une compétition mondiale sans précédent. Il est important que les services de l’Etat prennent en compte le caractère confidentiel de certaines informations et assurent la protection des données qui leur sont transmises par les acteurs économiques.

 

> Surveillance du marché

Une réglementation efficace ne peut se concevoir sans un contrôle rigoureux et ciblé du marché visant aussi bien les productions intra-communautaires que les importations.

 

Gouvernance de la Recherche

 

Le MEDEF estime que la gouvernance de la recherche doit être améliorée pour que la France conserve une place de choix dans la recherche et le développement des nanotechnologies. Comme pour toute expertise scientifique, l’Etat doit veiller à garantir leur qualité ; ceci est particulièrement vrai pour les domaines où les connaissances sont extrêmement évolutives. L’expertise doit être plurielle, transparente et collectivement indépendante.
 
Il est nécessaire pour la France de renforcer l’expertise scientifique transversale associée à des compétences mobilisant les dimensions sociales, éthiques et politiques des projets.

 

Le déficit de connaissance doit en effet conduire à un renforcement et à une meilleure organisation de la recherche au niveau européen. Cela passe par une meilleure collaboration public / privé au moyen de structures mixtes de financement.

 

1. Le Concours médical 2008 ; 130 : 951-53

 

Cadre européen et international

 

L’utilisation des nanomatériaux répond à des enjeux de dimension internationale, les initiatives prises par la France, qui vont dans le sens d’une meilleure prévention et d’une information du public, doivent être portées au minimum au niveau européen, voire au niveau international.

 

SYNTHÈSE

Le développement des nanotechnologies offre des perspectives de progrès dans les domaines de la santé, de la vie quotidienne et de la protection de l’environnement qui en font des technologies clés du XXIe siècle. Elles représentent des enjeux économiques considérables.

Leur essor rapide rend nécessaire la poursuite des travaux sur les impacts sanitaires et environnementaux afin de s’entourer des conditions de sécurité optimales. La protection de la santé des salariés, celle des consommateurs tout comme la protection de l’environnement doivent être assurées avec la plus grande rigueur et une parfaite transparence.

 

Le cadre de gouvernance doit répondre aux attentes des parties prenantes et :

> garantir un développement responsable dans un cadre éthique bénéfique à l’ensemble de nos concitoyens,

> favoriser l’innovation et garantir la cohérence avec les obligations applicables dans d’autres zones géographiques afin de préserver la compétitivité des entreprises,

> permettre des ajustements au gré de l’acquisition des connaissances et du retour d’expérience.

 

 

COORDONNÉES

MEDEF

Direction Développement Durable

55 avenue Bosquet

75330 Paris Cedex 07

www.medef.com

Tél. : + 33 (0)1 53 59 19 19

Fax : + 33 (0)1 45 51 20 44