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Le dossier du maître d'ouvrage

Le dossier du maître d’ouvrage aborde les grands champs du sujet qui structurent le débat.

Dossier du Maître d'ouvrage - Partie 2

Le maître d'ouvrage

La bioréhabilitation et la réduction des pollutions

Les nanotechnologies offrent actuellement de nombreuses pistes pour diminuer la pression de l’homme sur l’environnement. Outre les sources alternatives d’énergie que nous venons d’évoquer (Cf. L’énergie), elles pourraient contribuer à améliorer les processus industriels, à optimiser l’utilisation des ressources tout en limitant la production des déchets et à mettre en place des dispositifs de suivi et de détection plus fiables.

 

Incinérateur de Saint-Ouen


L’incinérateur de Saint-Ouen

L’un des effets secondaires attendus des nanotechnologies est une réduction de la quantité de déchets liée à la miniaturisation des produits.

 

Améliorer les processus industriels

Le secteur industriel a effectué au cours des quarante dernières années des transformations tenant compte de la réglementation environnementale. Il pourrait bientôt bénéficier d’une amélioration de ses processus de production liée aux nanotechnologies pour poursuivre la réduction de ses émissions et la baisse de ses consommations de ressources.

De nombreux processus sont encore énergivores car ils font intervenir des réactions chimiques à haute température (plus de 1 000 °C) ou dans des conditions de surpression (de 2 à 50 fois la pression atmosphérique). C’est le cas notamment pour la fabrication des matières plastiques. Les nanotechnologies devraient permettre de mettre au point de nouveaux processus réactionnels garantissant un important gain d’énergie.

Elles devraient également aboutir à des mécanismes de production utilisant moins, voire plus du tout, de produits toxiques ou dangereux, notamment des solvants, des solutions acides ou des produits de catalyse employés, par exemple, dans la production de plastiques rigides, les dépôts de couches métalliques ou encore la fabrication de peintures.

Enfin, la mise au point à bas coût de capteurs miniaturisés de toutes sortes permettrait d’optimiser certains processus industriels (ajustement en temps réel de la quantité des éléments entrant dans la production, de la température, de l’évacuation de certains composés…).

Limiter la consommation de ressources et la production de déchets

Dans l’industrie, les nanotechnologies peuvent permettre de créer des objets qui rendent davantage de services en utilisant moins de matière première et d’énergie. La miniaturisation constante des appareils électroniques, à laquelle contribue la nanoélectronique, permet une réduction des quantités de matière utilisées (un ordinateur ne pèse plus que quelques kilogrammes et effectue des milliards d’opérations à la seconde alors que son prédécesseur des années quatre-vingt pesait environ dix kilos et était 1 000 fois plus lent).

La réduction de la consommation d’énergie est déjà effective dans bien des objets courants : remplacement des lampes à incandescence par des diodes électroluminescentes beaucoup moins gourmandes en électricité, ou des écrans cathodiques par des systèmes à cristaux liquides, dix fois moins consommateurs… Enfin, le développement de composants nanoélectroniques de faible consommation pour des systèmes de calcul efficaces énergétiquement constitue un enjeu majeur. Toutefois, à ce jour, une autre difficulté demeure malgré ces améliorations : l’absence préjudiciable de prise en considération du cycle de vie des matériaux dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC).

 

LED

Ampoule à filament

 
   Les cristaux de taille nanométrique (2 à 100 nm) à la base des diodes électroluminescentes (LED) les rendent dix fois plus économes que les ampoules à filament.

Améliorer le traitement des pollutions

La décontamination des sols et des eaux est aujourd’hui un domaine en plein essor. Il reste toutefois à en améliorer l’efficacité et à en réduire le coût. Pour la dépollution de l’air, les nanotechnologies font espérer une amélioration des processus de catalyse en sortie de cheminées et des pots d’échappement, voire de réacteurs d’avions. De même, elles permettraient de développer des filtres spécifiques à intégrer en sortie de cheminées pour optimiser le filtrage des composés organiques volatils (hydrocarbures) et des substances chlorées.
Aussi, Cf. dépollution de l’eau.

Une détection et un suivi plus fiables

Les nanotechnologies pourraient enfin permettre le développement de capteurs fiables et bon marché pour détecter et suivre l’évolution de molécules spécifiques ou de micro-organismes.

Seraient concernées des applications comme la détection de particules dangereuses dans les usines (protection des travailleurs) et dans les habitations (produits toxiques émanant des peintures ou d’un nouvel objet, fuites de produits d’entretien…). Mais elles pourraient également servir à la surveillance des écosystèmes. Pourquoi ne pas imaginer, par exemple, de mesurer de façon fine et continue des émissions de gaz produits par les micro-organismes vivant dans un lac afin de suivre l’évolution des populations de bactéries et détecter très tôt une prolifération du type verdissement des eaux ?

 

DEFINITION

Les pots catalytiques insérés à l’échappement des voitures ont pour but de réduire les émissions de certains gaz toxiques tels que le monoxyde de carbone, les oxydes d’azote et les particules diesel produits lors de la combustion du carburant. Ils sont composés de céramique sur laquelle sont implantés des métaux précieux (platine, rhodium, osmium, palladium) lieux des réactions chimiques avec les gaz d’échappement. Si leur efficacité est avérée, les pots catalytiques actuels présentent des limites : non-élimination du CO2, encrassement, inefficacité lors des premiers kilomètres, relargage dans l’environnement de certains métaux ainsi que de particules ultrafines dont certaines, produites non intentionnellement, sont de taille nanométrique. Les nanotechnologies peuvent, en ce domaine, contribuer à une amélioration de la protection de l’environnement, à condition que la recherche et l’innovation permettent de limiter drastiquement le relargage de particules ultrafines par les pots catalytiques.
 

 

De meilleurs pots catalytiques et des filtres à particules nanostructurés devraient contribuer à réduire la pollution de l’air

 

La défense nationale et la sécurité intérieure

La réalisation et le succès des différentes missions de défense nationale et de sécurité intérieure (sécurité publique, sécurité civile, police judiciaire, protection du territoire et des citoyens, opérations extérieures de maintien de la paix et de lutte contre le terrorisme, assistance et protection des ONG…) s’appuient aujourd’hui sur des technologies de plus en plus avancées ; parmi elles, les nanotechnologies.

Les enjeux sont importants puisque leur maîtrise et la connaissance approfondie des menaces qui y sont associées assurent le maintien de notre sécurité, mais garantissent également notre indépendance technologique et donc notre souveraineté.

Les armées utilisent déjà des produits et technologies intégrant des éléments à l’échelle nanométrique : pneumatiques aux renforts carbonés, revêtements anticorrosion ultraminces, systèmes de communication électronique à base de circuits intégrés… De plus, et d’une manière générale, la miniaturisation et la réduction de l’encombrement à performances égales, permises grâce aux nanotechnologies, sont un facteur important pour les systèmes d’armes.

 

Drone libellule
En matière de sécurité du territoire, le drone libellule illustre les capacités de miniaturisation offertes par les nanotechnologies.

 

 
Drone libellule
L’équipement du combattant
L’équipement du combattant est un exemple d’utilisation future de textiles fonctionnalisés : on peut ainsi imaginer des tissus faits à partir de matériaux qui ne laissent aucune substance les traverser ou les imprégner et qui offrent diverses fonctions grâce à l’intégration de capteurs, de systèmes de communications ou de visualisation.

 

La Défense a en outre des besoins beaucoup plus spécifiques que les nanotechnologies satisfont en améliorant de façon significative les performances de certaines fonctions. Citons, par exemple, des technologies déjà en service dans les forces armées ou sur le point de le devenir comme les dispositifs de vision nocturne, les matériaux qui permettent de rendre les avions furtifs aux radars ou encore les matériaux de blindage nanostructurés qui associent rigidité renforcée et légèreté.

Comme dans le domaine civil, le potentiel des applications futures des nanotechnologies est extrêmement vaste.

Vers une meilleure protection du combattant

La protection du combattant est un sujet très large qui couvre de nombreuses technologies. On peut ainsi imaginer, dans un avenir relativement proche, la tenue du combattant avec des textiles faits à partir de matériaux qui ne laissent aucune substance les traverser ou les imprégner, offrant diverses fonctions grâce à l’intégration de capteurs, de systèmes de communications ou de visualisation (écran souple). Et pourquoi pas des armures souples grâce à des matériaux capables de s’épaissir aux chocs ?

De nouveaux concepts utilisant des nano-objets sont à l’étude comme des détecteurs chimiques ou biologiques, qui pourront progressivement devenir individuels, autonomes et peu consommateurs en énergie, communicants, sélectifs et présentant une haute sensibilité en temps réel.

Même si les performances requises en matière de microsources d’énergie diffèrent entre applications civiles et militaires, les nanotechnologies interviendront dans l’élaboration de microbatteries, de micropiles à combustible mais aussi dans l’élaboration de dispositifs de récupération d’énergie (énergie solaire, mécanique, thermique). Elles devraient également permettre d’envisager des progrès significatifs pour le soutien médical à distance, notamment dans la surveillance des conditions physiologiques du combattant, les contre-mesures préventives, la dispense de premiers soins à distance ou la vectorisation de substances thérapeutiques.

Enfin, d’autres dispositifs de protection à base de nanotechnologies sont en cours d’étude ou de validation, en particulier contre les agressions lasers, pour la sécurisation de la mise à feu des munitions ou pour la détection d’explosifs. Les technologies térahertz (THz), envisagées pour la détection d’engins explosifs improvisés, peuvent être aussi considérées comme faisant partie des nanotechnologies dans la mesure où les composants qui y sont développés font intervenir des grandeurs de dimensions nanométriques.

Des systèmes d’armes plus performants

Les nanomatériaux sont présents dans tous les systèmes d’armes et font l’objet d’une attention particulière pour de nombreuses applications comme le renforcement et l’allègement de structures à taille ou à performances égales, la tenue à haute température y compris en environnement hostile, des capacités de camouflage évoluées et le comportement vis-à-vis des contaminations nucléaires, biologiques et chimiques (NBC). Un certain nombre de matériaux intéressent également les militaires, comme ceux susceptibles de participer à la détection de la contamination ou à la décontamination, les matériaux énergétiques, qu’ils soient pyrotechniques ou propulsifs, ou les matériaux autoréparants et autocicatrisants.

Des apports en matière de sécurité intérieure

Comme toute nouvelle technologie (informatique, téléphonie mobile…), les nanotechnologies trouvent un débouché au profit des forces de sécurité intérieure. Corrélativement, ces avancées sont aussi utilisées, parfois même avec de l’avance, au service d’objectifs répréhensibles par des malfaiteurs… De fait, ces applications sont de plus en plus portées par le marché civil, aujourd’hui très dynamique, puis « détournées » par les forces de sécurité intérieure.

À moyen terme, les technologies de miniaturisation, en particulier en électronique, pourraient permettre de doter les services de capteurs discrets, voire totalement dissimulables. De même, les développements actuels permettent d’espérer rapidement la mise en œuvre de balises miniaturisées, moins consommatrices et donc de forte autonomie. Le domaine de l’investigation et de la surveillance devrait être le grand bénéficiaire de ces avancées, comme il l’a déjà été de celles de l’électronique.

À plus long terme, l’amélioration des performances et de l’encombrement des moyens de liaisons, tant phoniques que de données, pourrait favoriser une plus grande mobilité des fonctionnaires. A contrario, on peut redouter que la banalisation de ces technologies ne mette à la disposition des malfaiteurs les plus aguerris des systèmes de contre-mesure, de détection, voire des moyens similaires pour supporter leurs activités.

Dans d’autres domaines, les nanotechnologies doivent permettre de réaliser des avancées sans contreparties. Dans celui de la protection des fonctionnaires notamment, les technologies spécifiques aux matériaux résistants (nanotubes et céramique) permettront à la fois d’alléger et de renforcer les équipements de protection individuels et collectifs : gilets pare-balles et pare-coups, vitrages blindés, etc. Par ailleurs, les nanomatériaux devront permettre l’élaboration de nouveaux moyens de criminalistique, et favoriser des gains sensibles dans le domaine de la recherche de traces : détection plus fine des indices (révélations de traces papillaires par des poudres spécifiques par exemple), exploitation plus rapide des découvertes, en particulier en matière d’exploitation in situ des ADN (grâce à des nanopuces issues des biotechnologies).

Enfin, la mise en œuvre à venir des objets « intelligents », embarquant dans des puces de type RFID ou assimilées des informations d’identification ou de traçage, devrait changer les modes de travail dans la lutte contre les trafics et les contrefaçons.

 

 

DÉFINITION : Technologies térahertz

Les rayonnements térahertz (ondes électromagnétiques entre 100 GHz et 30 THz) ont un fort pouvoir pénétrant. Ils permettent potentiellement de voir à travers de nombreux matériaux non conducteurs, tels que la peau, les vêtements, le papier, le bois, le carton, les plastiques…
Ils trouvent des applications comme les télécommunications à hauts débits, les réseaux sans fils, des radars, la surveillance de l’environnement, les tests biomédicaux, l’observation astronomique, la sécurité, etc..

 

 

DEFINITION : La criminalistique

La criminalistique regroupe l’ensemble des techniques mises en œuvre par la justice et les forces de police et de gendarmerie pour établir la preuve du crime et identifier son auteur (anthropométrie, médecine légale, toxicologie, etc.) (Larousse)

 

 

Conclusion

Les nanotechnologies représentent un domaine vaste de recherche et de développement qui n’est nullement orienté vers des activités particulières. Elles apparaissent diffuses, comme l’a souligné ce chapitre, et préparent une importante mutation industrielle. L’amélioration des propriétés de la matière à l’échelle nanométrique impacte déjà certains produits industriels et impactera bon nombre de produits futurs.

L’exemple de la maison de demain

Ce dernier exemple résume les changements que pourrait induire l’application de certaines nanotechnologies à la maison devenue maison à énergie positive. Pour atteindre les objectifs d’efficacité énergétique, de durabilité et de moindre maintenance des constructions, il faudra innover dans toutes les directions. Des tuiles solaires aux vitres autonettoyantes et aux surfaces antibactériennes, en passant par des matériaux superisolants ultrafins, les nanotechnologies pourraient à terme s’insérer dans tous les produits de construction.

La maison du futur sera une maison à énergie positive à double titre. Elle sera productrice d’énergie (solaire, biomasse, éolien) pour ses besoins propres et même au-delà, notamment pour la recharge des batteries des moyens de transport (véhicule électrique) et elle sera moins consommatrice en énergie grâce à une isolation thermique poussée et amortissant les cycles thermiques (nanomatériaux à changement de phase), à des systèmes d’éclairage basse consommation (diodes électroluminescentes) et à une gestion intelligente et optimisée des ressources (réseaux de nanocapteurs et nanoactionneurs).

La maison de demain gagnera également en facilité d’entretien (vitres autonettoyantes, peinture résistante aux UV et aux intempéries, surfaces antibactériennes dans les cuisines et salles de bain…) et, grâce aux technologies multimédias basées sur la nanoélectronique, elle deviendra communicante et intelligente pour le confort ambiant des occupants, les tâches ménagères, les loisirs, le télétravail, l’aide au maintien à domicile…

 

La maison à énergie positive
Vers un habitat plus économe grâce à l’intégration ciblée de nanotechnologies ?

La maison à énergie positive