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Les Questions/Réponses reçus par la CPDP seront consultables sur le site de la Commission et figureront dans les archives du débat

Questions traitées pour le mois : Novembre

Question de FNE  - le 09/11/2009
Un temps d’exposition maximal pour chaque nanomatériau peut-il être défini ?

Réponse le  12/01/2010

Concernant les substances toxiques en général, le risque est estimé par la relation entre la dose sans effet  toxique calculée après étude toxicologique expérimentale, et le niveau d'exposition à la substance. Cette exposition dépend de la quantité de la substance à laquelle on est exposé, ainsi que de la fréquence et de la durée de l'exposition. Ainsi est-il possible d'agir sur le niveau de l'exposition et sur sa durée pour réduire un risque. 


Cependant, les nanomatériaux possèdent des propriétés spécifiques différentes de leurs équivalents de taille micrométrique, qui déterminent notamment leur réactivité au sein des systèmes biologiques. Ainsi, il apparaît que considérer l'espèce chimique et la dose sans effet ne suffit pas pour mener à bien l'évaluation des risques. La problématique se situe au niveau de leur détection spécifique et de leur mesure précise dans les milieux biologiques, mais aussi de leurs mécanismes d'action, qui varient en fonction de leur taille, de leur forme et de leur biodisponibilité. Des études sont en cours pour évaluer la pertinence des tests actuellement utilisés pour les substances chimiques à l'état nanométrique.





Le nouveau règlement REACH prévoit l'obligation pour les fabricants et importateurs de substances manufacturées à plus de 10 tonnes par an d’évaluer les dangers des substances par l’établissement de valeurs toxicologiques de référence nommées DNEL (« Derived No Effect Level » ou dose dérivée sans effet). Pour les substances dangereuses (persistantes, bioaccumulatives et toxiques ou PBT; très persistantes et très bioaccumulatives ou vPvB; cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques ou CMR), elles doivent être calculées quel que soit le tonnage. Ces nouvelles valeurs sont des valeurs limites d'exposition dans le cadre de REACH. 


Les DNEL correspondent à une dose maximale calculée pour laquelle aucun effet néfaste ne devrait apparaître. Elles sont établies pour une substance donnée et sont spécifiques d’un effet (local ou systémique), d’une voie d’exposition donnée (inhalation, cutanée, ingestion), d’une durée et d’une fréquence d’exposition et d’un type de population (travailleurs/consommateurs/hommes via l’environnement/sous-populations sensibles). Ces DNEL sont associées aux mesures de gestion des risques et à des scénarios d’exposition présentés en annexe de la fiche de données de sécurité (FDS) établie pour chaque substance dangereuse.

Question de FNE  - le 09/11/2009
Le dosage des nanos dans l’enceinte de travail est-il prévu par des outils de mesure adéquats ?

Réponse le  27/11/2009

La connaissance précise des dangers d'une substance est à la base de l' évaluation des risques permettant de définir les moyens de prévention et de protection adaptés. C'est pourquoi il importe de poursuivre les efforts entrepris pour améliorer la connaissance des effets sur la santé des substances de taille nanométrique. La France y contribue par la qualité de sa recherche.


Dans ce cadre, la recherche d'une méthodologie adaptée à la mesure de l'exposition professionnelle pour les nanoparticules est en cours. L'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) y participe notablement. Il existe d'ores et déjà des instruments permettant d'obtenir directement ou indirectement un certain nombre de caractéristiques des nanoparticules, mais dans leur majorité ces outils restent plutôt conçus pour des applications de recherche que pour des mesures de terrain. La tâche est complexe et relève encore du domaine des spécialistes. Le développement de méthodes fiables et accessibles constitue l'un des importants défis à relever dans les délais les plus brefs possibles.


Pour autant, en milieu professionnel, au même titre que pour les autres agents chimiques susceptibles de présenter un danger pour la santé ou la sécurité des travailleurs, les nanoparticules entrent dans le champ d'application de l'ensemble de la réglementation du code du travail relative à la prévention du risque chimique, notamment les dispositions relatives à la prévention des risques liés aux agents chimiques dangereux (ACD) auxquelles s'ajoutent, le cas échéant, les dispositions spécifiques définies pour les substances entrant dans le champ d'application des agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) de catégorie 1 ou 2. L'absence d'informations exhaustives concernant les nanoparticules n'empêche pas la réglementation du code du travail de s'appliquer. Sans attendre une meilleure connaissance des dangers intrinsèques des nanoparticules, la plus grande vigilance peut et doit être observée dans les entreprises par l'adoption d'une démarche de précaution consistant à mettre en place les mesures de gestion des risques les plus strictes (notamment systèmes clos, moyens techniques et organisationnels, collectifs et individuels de protection, information des salariés et de leurs représentants, suivi médical, traçabilité des expositions, exclusion des postes de travail concernés des femmes enceintes). De telles mesures sont d'ailleurs préconisées par l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET), le Haut conseil de santé publique et le comité de la prévention et de la précaution (CPP). En effet, comme pour l'ensemble des risques professionnels, l'employeur est tenu, en matière de prévention des risques liés aux substances de taille nanométrique,  à une obligation de sécurité et de résultat vis-à-vis de ses salariés.

Question de GRANGE Elisabeth - le 05/11/2009
Qui connait aujourd'hui les seuils de toxicité des nanoparticules utilisés dans l'industrie ?

Réponse le  23/12/2009

Du point de vue de la réglementation du travail, il convient de parler  de valeurs limites d'exposition professionnelle plutôt que, directement, de seuils de toxicité. Les valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) sont exprimées sous forme de concentrations dans l'air d'une substance chimique, associées à un temps d'exposition déterminé, concentrations en dessous desquelles le risque d'altération de la santé est négligeable. Ces niveaux de concentration sont déterminés à partir des informations disponibles, en matière de toxicologie, provenant d'études chez l'homme (études épidémiologiques, cliniques) ou d'études expérimentales animales (études toxicologiques).


Il n'existe pas actuellement de valeurs limites d'exposition aux nanoparticules dans les législations française et européenne. Néanmoins, en France, une valeur limite de moyenne d'exposition contraignante (pondérée sur huit heures de travail) a été définie pour les poussières réputées sans effet spécifique, de 10 mg/m3 pour les poussières inhalées et de 5 mg/m3 pour les poussières alvéolaires (c'est-à-dire celles qui pénètrent dans les alvéoles pulmonaires). Il existe également pour les fumées de soudage, pour le dioxyde de titane et pour le graphite sous forme non fibreuse des valeurs moyennes d'exposition (VME). Par ailleurs, des valeurs limites d'exposition spécifiques ont été définies pour les poussières de certains oxydes ou sels métalliques.


Depuis novembre 2005, le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) propose une valeur limite d'exposition (concentration moyenne pondérée pour une durée de travail de 40 heures par semaine) de 1,5 mg/m3 pour le dioxyde de titane fin et de 0,1 mg/m3 pour le dioxyde de titane ultra-fin (particules de diamètre inférieur à 100 nm).


Si la toxicité des nanoparticules manufacturées n'a pas à ce jour été clairement identifiée, il a déjà été démontré que les composantes particulaires ultra-fines de la pollution atmosphérique, émises notamment par les usines et les moteurs diesel, présentent des propriétés toxiques qui sont susceptibles d'avoir des effets néfastes sur la santé humaine (pathologies allergiques respiratoires - rhinite, asthme, bronchite - et troubles cardiovasculaires - notamment chez les personnes fragilisées). Ces propriétés spécifiques pourraient s'appliquer aux nanoparticules manufacturées. Il a par ailleurs été clairement établi que les objets de taille nanométrique présentent une toxicité différente de celle des mêmes composés sous forme micro ou macroscopique.


Si l'appareil respiratoire constitue la voie majeure de pénétration des nano-objets et notamment des nanoparticules et des nanofibres dans l'organisme humain, il est néanmoins essentiel de tenir compte des deux autres voies d'exposition que sont les voies digestive et cutanée.  


Les nano-objets peuvent, notamment, se retrouver dans le système gastro-intestinal après avoir été ingérés ou après déglutition lorsqu'ils ont été inhalés.


La pénétration transcutanée des nano-objets est une hypothèse encore à l'étude.


Dans l'objectif d'améliorer la connaissance en toxicologie, la France, tout comme l'Union européenne et les autres instances internationales (OCDE, ISO,...) ne reste pas inactive en matière de recherche en santé et environnement sur les effets des nanoparticules. De nombreux programmes sont engagés depuis ces dernières années, tels que :



  • le programme européen « Nanogenotox » sur la sécurité des nanomatériaux, engagé sous la présidence française de l'Union européenne en décembre 2008, vise à établir une méthodologie robuste relative à la détection de molécules potentiellement génotoxiques, c'est-à-dire pouvant compromettre l'intégrité du génome ;

  • le programme SEST (santé environnement et santé travail) qui a pour but de révéler l'impact, encore peu connu, des facteurs environnementaux sur la santé humaine, s'intéresse en particulier à l'éventuelle toxicité des nanoparticules ;

  • le programme Signanotox (2007) a pour objet de déterminer la signature toxicologique de nano-objets manufacturés sur des cellules humaines après inhalation ou ingestion.


L'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET) soutient par ailleurs, depuis 2004, plusieurs programmes nationaux en santé environnement concernant :



  • l'impact sur des cellules rénales des nanoparticules manufacturées ;

  • le devenir des nanoparticules minérales manufacturées dans les milieux aquatiques ;

  • les niveaux, déterminants et variabilités des nanoparticules dans l'environnement intérieur (projet «Nanop») ;

  • l'évaluation in vitro de la réactivité des particules fines et ultrafines ;

  • la toxicité respiratoire des nanotubes de carbone (université catholique de Louvain).


En outre, il convient d'ajouter que les deux règlements européens REACh et CLP portent des avancées, tant en matière d'amélioration des connaissances que de diffusion des informations, mais ils demandent à être précisés pour mieux prendre en compte les spécificités des substances de taille nanométrique. En conséquence, la France plaide pour les faire évoluer, notamment dans le cadre de la prochaine révision de REACh prévue courant 2012.


 


 

Question de MATHEY Loïc-  33000 BORDEAUX - le 05/11/2009
Les outils de mesure actuel n'étant pas aujourd'hui suffisant pour détecter l'émission "non désirée" de particules nanométriques dans l'usage et l'usure de produits de consommation en agglomérant et sachant la toxicité potentielle de celle-ci : pourquoi sont-ils autorisés à la vente ? Mesure non efficace, seuils incertains... Où est le principe de précaution ?

Réponse le  18/12/2009

L'introduction de nanomatériaux dans des produits de consommation doit faire l'objet d'une évaluation de la sécurité par le responsable de la mise sur le marché pour s'assurer de leur innocuité. Les quelques études existantes montrent que les nanomatéraux utilisés lors de la fabrication ne sont pas retrouvés après des tests d'usure ou de relargage. Par ailleurs, tout produit peut générer des nanoparticules même si aucun nanomatériau n'y a été introduit au départ. L’interrogation porte sur la quantité et le type de particules émises qui viennent s’ajouter au bruit de fond environnant. L'exposition spécifique de la population liée à l'introduction de nanomatériaux dans les produits de grande consommation est donc difficile à mesurer. Dans ce contexte, toute évaluation de risque ne peut être menée de manière valable. Il est donc à ce stade dififcile d'interdire la mise sur le marché de produits en l'absence d 'éléments de preuve de l'existence d'un danger grave ou immédiat. Par contre, il est indispensable de poursuivre la recherche tant sur la toxicité que sur les outils de détection. Des études sont en cours pour faire avancer la métrologie et vérifier la fiabilité des études classiques, voire les modifier, notamment dans le cadre de l'OCDE ( organisation de coopération et de développement économiques) et de l'Union Européenne.

Question de ROUSSEAU SANDRINE-  45800 ORLÉANS - le 02/11/2009
Comment évalue-t-on l'exposition des travailleurs au poste de travail ? = méthode d'évaluation des risques ? Et d'abord comment identifier le risque ?
Aujourd'hui en production, tous secteurs confondus et pas seulement ceux "de pointe".

Réponse le  27/11/2009

La connaissance précise des dangers d'une substance est à la base d'une évaluation des risques permettant de définir les moyens de prévention et de protection adaptés. Pour autant, en milieu professionnel, l'absence d'informations exhaustives concernant les nanoparticules n'empêche pas l'application de la réglementation du code du travail. Sans attendre une meilleure connaissance des dangers intrinsèques des nanoparticules, la plus grande vigilance peut et doit être observée dans les entreprises par l'adoption d'une démarche de précaution consistant à mettre en place les mesures de gestion des risques les plus strictes (notamment systèmes clos, moyens techniques et organisationnels, collectifs et individuels de protection, information des salariés et de leurs représentants, suivi médical, traçabilité des expositions, exclusion des postes de travail concernés des femmes enceintes). De telles mesures sont d'ailleurs préconisées par l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET), le Haut Conseil de santé publique et le comité de la prévention et de la précaution (CPP). En effet, comme pour l'ensemble des risques professionnels, en matière de prévention des risques liés aux substances de taille nanométrique, l'employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés.


Néanmoins, les efforts entrepris pour améliorer la connaissance doivent être poursuivis. La France y contribue par la qualité de sa recherche. Elle figure au 5ème rang mondial des publications sur les nanotechnologies. La création des agences sanitaires dont l'AFSSET vise aussi à répondre à cet objectif en renforçant l'indépendance de l'expertise par la séparation de l'évaluation du risque de sa gestion. Concernant les nanoparticules, ces agences ont été saisies sur les dangers susceptibles d'être liés à leur production et à leur utilisation et les risques potentiels qu'elles induisent pour la santé de la population générale et des travailleurs ainsi que pour l'environnement.


Par ailleurs, la recherche d'une méthodologie adaptée à la mesure de l'exposition professionnelle pour les nanoparticules est en cours. L'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) y participe notablement. Il existe d'ores et déjà des instruments permettant d'obtenir directement ou indirectement un certain nombre de caractéristiques des nanoparticules, mais la majorité de ces outils restent plutôt conçus pour des applications de recherche que pour des mesures de terrain. La tâche est complexe et relève encore du domaine des spécialistes. Le développement de méthodes fiables et accessibles constitue un des importants défis à relever dans les délais les plus brefs possibles.


D'autre part, il est indéniable que l'identification de la présence de nanoparticules à chaque étape de leur cycle de vie est indispensable pour être en capacité d'en maîtriser les risques éventuels. Dans l'objectif d'assurer la continuité de la chaîne de l'information relative à la présence des substances de taille nanométrique, l'article 42 de la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, du 3 août 2009, dispose notamment que « L'Etat se donne pour objectif que, dans un délai de deux ans qui suit la promulgation de la présente loi, la fabrication, l'importation ou la mise sur le marché de substances à l'état nanoparticulaire ou des matériaux destinés à rejeter de telles substances, dans des conditions normales ou raisonnablement prévisibles d'utilisation, fassent l'objet d'une déclaration obligatoire, relative notamment aux quantités et aux usages, à l'autorité administrative ainsi que d'une information du public et des consommateurs ». Ces dispositions témoignent de la volonté des pouvoirs publics de mettre en place un dispositif national efficace d'identification des substances de taille nanométrique. Les modalités d'application du dispositif seront détaillées dans la loi Grenelle 2.


En outre, il convient d'ajouter que les deux règlements européens REACh et CLP portent des avancées, tant en matière d'amélioration des connaissances que de diffusion des informations, mais ils demandent à être précisés pour mieux prendre en compte les spécificités des substances de taille nanométrique. En conséquence, la France plaide pour les faire évoluer, notamment dans le cadre de la prochaine révision de REACh prévue courant 2012.