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Les Questions/Réponses reçus par la CPDP seront consultables sur le site de la Commission et figureront dans les archives du débat

Questions traitées pour le mois : Octobre

Question de Lacombe Elisabeth-  31400 Toulouse - le 25/10/2009
Au cours du débat public de Toulouse, il a été évoqué l'étiquetage des produits contenant des nanomatériaux, mais la représentante du ministère n'a pu répondre de façon non équivoque. Concernant les produits alimentaires notamment, je voudrais savoir si les pouvoirs publics français vont honorer les engagements du Grenelle de l'environnement sur l'information des citoyens et des consommateurs: "donner une information écologique sur les produits et services" (engagement n°213) et "généraliser les informations environnementales présentes sur les produits et services" (engagement n°217). S'agissant des produits alimentaires contenant des nanoparticules, ces engagements doivent forcément se traduire par un étiquetage clair et lisible sur leur présence.

Réponse le  28/10/2009

Les engagements du Grenelle de l'environnement auxquels il est fait référence concernent l'empreinte écologique (ou étiquette carbone) des produits dont l'objectif est de donner au consommateur une information sur l'impact environnemental du produit qu'il achète. D'autres engagements du Grenelle concernent plus spécifiquement les nanomatériaux : il s'agit de la déclaration obligatoire par les industriels des usages des nanoparticules. L'article 42 de la loi du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement a repris cet engagement et prévu également la mise à disposition du public de cette information.


 Concernant les denrées alimentaires, à ce jour, l'indication sur l'étiquetage de la forme nano n'est pas obligatoire. Elle peut néanmoins être revendiquée par un opérateur économique, dans le cadre d'une approche commerciale.


 Mais ce cadre réglementaire peut évoluer. Des discussions en cours au niveau européen, dans le cadre de la révision du règlement sur les nouveaux aliments, envisagent l'intérêt d'un étiquetage de la présence de nanomatériaux dans les produits alimentaires.


 Un tel étiquetage, s'il est décidé, doit avoir une réelle signification pour le consommateur et permettre un choix réfléchi. Les considérations pouvant être prises en compte par le consommateur (lorsqu'il décide par exemple de ne pas choisir un produit étiqueté comme étant « nano ») ne peuvent être liées à la sécurité du nanomatériau en question car l'autorisation de mise sur le marché obligatoire délivrée par les pouvoirs publics implique l'absence de risques pour le consommateur. Elles pourraient reposer sur des questions de non tromperie du consommateur ou de sécurité environnementale.


 En ce qui concerne les emballages des produits alimentaires, la question est plus complexe. Il n'existe pas d'obligation d'étiquetage sur ces produits (spécifiant par exemple les matières premières utilisées) et l'information du consommateur ne peut pas se faire par ce biais. C'est pour ce type de produits que la déclaration prévue par le Grenelle prend toute son importance, les moyens de mise à disposition de l'information pour le consommateur étant encore à réfléchir.

Question de LACOMBE Elisabeth-  31400 Toulouse - le 23/10/2009
Quelles expériences scientifiques indépendantes de l'industrie des nanotechnologies ont été menées à partir des nano éléments de l'alimentation ou des compléments alimentaires, pour en évaluer les effets à long terme ?

Réponse le  03/11/2009

Nous entendons ici par nano-éléments l’ensemble des particules de la taille du nanomètre formées à partir des éléments chimiques. Cela exclut les protéines, les assemblages lipidiques naturels (micelles), les structures issues de l’association entre protéines, lipides et polyosides, qui sont les composantes essentielles de l’aliment.


L’évaluation des effets à long terme des nano-éléments présents dans l’alimentation constitue une question de recherche complexe. A ce jour, seules quelques études ont abordé la toxicité des nanoparticules après ingestion orale. Elles sont recensées dans des avis rendus par des agences d’évaluation des risques, notamment :


- le rapport de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) relatif aux nanotechnologies et nanoparticules dans l’alimentation humaine et animale publié en mars 2009 [http://www.afssa.fr/Documents/RCCP-Ra-NanoAlimentation.pdf] ;


- le rapport de l’Autorité Européenne de Sécurite des Aliments (EFSA) relatif aux risques potentiels de la nanoscience et des nanotechnologies pour la sécurité de l’alimentation humaine et animale adopté en février 2009 [http://www.efsa.europa.eu/EFSA/efsa_locale-1178620753816_1211902361968.htm] ;


- le rapport de la Food and Drug Administration américaine publié en 2007 [http://www.fda.gov/downloads/ScienceResearch/SpecialTopics/Nanotechnology/ucm110856.pdf


Ces différents avis ont pointé la difficulté de mener à bien cette évaluation des effets toxiques à long terme, du fait : i) de l’absence de méthode de détection, de quantification, ou de caractérisation de ces particules applicable en routine, ii) de l’absence de modèles standardisés d’évaluation des effets néfastes à long terme.


Pour répondre à ces besoins de recherche, des programmes de recherche publique en toxicologie des nanoparticules se mettent en place en France et à l’étranger. Sans être exhaustif, il faut notamment souligner l’existence de projets :


- internationaux : programme Nanogenotox ; programme de parrainage OCDE ; initiative européenne Joint Research Centre Nanobiotechnology Research [http://ec.europa.eu/dgs/jrc/downloads/jrc_aaas_2009_04_stamm_nanofood.pdf] ;


- nationaux, avec notamment :


· la constitution de réseaux thématiques de recherche (Initiative C'nano ; réseau ECCOREV) ;


· un programme de recherche dédié aux questions de santé liées à l’environnement et au travail piloté par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire de l’Environnement et du Travail (AFSSET). Ce programme finance actuellement des travaux de recherche sur l’évaluation des effets toxiques des nanoparticules présentes dans l’environnement, dont les conclusions, notamment en terme de développement méthodologique, pourront être étendues aux nano-éléments alimentaires ;


· des programmes financés par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), mais qui concernent le plus souvent le devenir et la toxicité des nanoparticules dans l’environnement ou l’effet de l’inhalation des particules nanométriques sur l’homme (par exemple : programme NANOBIOTOX étudiant les conséquences toxicologiques de l’exposition pulmonaire aux nanoparticules biodégradables).


En ce qui concerne spécifiquement le devenir des nanoparticules dans l'organisme après ingestion, les projets en cours sont peu nombreux. Ceux-ci débutent, notamment à l’institut national de la recherche agronomique (INRA), afin de suivre la transformation des nano-éléments dans le tube digestif. L’enjeu in fine sera de trouver un ou des paramètres facilement mesurables in vitro pour servir de marqueurs de toxicité pour les cellules. Cela permettrait ainsi d’élaborer des diagnostics fiables qui n’impliquent pas une expérimentation animale lourde. Les recherches se poursuivent, les initiatives et les échanges d’information se font au niveau mondial.

Question de RAZAFIMANANTSOA Volana - le 19/10/2009
Trouve-t-on des nano particules dans la nourriture ? Si oui, quels sont les dangers ?

Réponse le  20/10/2009


 


Concernant l'aliment en tant que tel, la majorité des applications sont encore au stade de la recherche ou du développement et il n'y a pas de réalité commerciale avérée en France ni dans l'Union européenne (à l'exception du cas de la silice  en tant qu' additif autorisé depuis très longtemps dans l'industrie alimentaire et qui pourrait se présenter sous une forme nanométrique). Par ailleurs, figurent sur Internet ou dans divers inventaires disponibles (Wilson Woodrow Institute, Amis de la Terre) plusieurs produits revendiquant le recours aux nanotechnologies (compléments alimentaires), sans que cela puisse être vérifié ni qu'il soit possible de dire s'il s'agit de démarches marketing ou de véritable innovation. Ainsi, la présence d'argent sous forme nanoparticulaire est un argument commercial qui permet à certains producteurs d'invoquer des effets immunostimulants et anti microbiens. La réglementation européenne prévoit une ré-évaluation de ces compléments alimentaires avant fin 2009. Jusqu'à cette date tout produit non interdit est autorisé; après cette date, tout produit non autorisé sera interdit. C'est sur ce point réglementaire que s'appuient des industriels pour continuer à proposer ces compléments. Dans tous les cas traités, l'autorité européenne de sécurité des aliments (european food safety authority-EFSA-) a donné un avis négatif. Sur la base de cet avis, les structures réglementaires nationales doivent prononcer l'interdiction.


Pour les Etats membres de l'Union européenne et la France, tout ingrédient, aliment, additif sous forme « nano » doit faire l'objet d'une autorisation européenne préalable à sa mise sur le marché, délivrée par les pouvoirs publics. Cette autorisation est subordonnée à une évaluation des risques démontrant l'innocuité du produit pour le consommateur.


Par ailleurs, les emballages, surfaces de découpes et parois de réfrigérateurs  concentrent la plupart des applications déjà transposées à l'échelle commerciale, permettant par exemple l'amélioration des propriétés mécaniques par l'incorporation de feuillets d'argile ou ayant un effet antimicrobien grâce à l'utilisation de nanoparticules d'argent. De plus, ce type de matériau peut permettre de réduire considérablement la quantité de conservateurs appliqués sur les aliments emballés. Les processus de migration de l'emballage vers l'aliment sont bien connus et largement étudiés par les fabricants d'emballage. Ce phénomène est pris en compte dans l'évaluation de la sécurité de l'emballage. Les fabricants sont responsables, réglementairement, de la mise sur le marché de produits sûrs, ce qui, en cas contraire, peut engager leur responsabilité pénale.


L'AFSSA a rendu en mars 2009 un rapport sur l'évaluation des risques sanitaires liés aux nanotechnologies dans les aliments. Ce rapport souligne la faiblesse des données de fond (données sur la toxicité par voie orale et sur l'exposition), qui sont pourtant un préalable à toute évaluation sanitaire. C'est pourquoi des efforts de recherche doivent être menés sur ces points. De plus, toute évaluation de nanomatériau, dans le cas où une demande d'autorisation de mise sur le marché est formulée par un fabricant alimentaire, devra être conduite au cas par cas, en prenant en considération ses propriétés spécifiques, différentes de celles du matériau conventionnel correspondant.