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Questions traitées pour le mois : Octobre

Question de NITKOWSKI Jean-  31200 Toulouse - le 23/10/2009
En raison de leur capacité à passer les barrières. Que sait-on des risques des nanoparticules en cours de fabrication industrielle à l'égard es travailleurs ?

Réponse le  05/11/2009

Avant de répondre à cette question, il est important de préciser ce que l’on entend par « capacité à passer les barrières » : au regard des connaissances actuelles, la voie respiratoire constitue la voie d’entrée privilégiée des nanoparticules en raison de leur taille. Les quelques données disponibles jusqu’ici montrent qu’elles se répartissent dans les voies respiratoires en fonction de leur diamètre. Toutefois, l’appareil respiratoire semble présenter une barrière efficace et le passage des nanoparticules entre les poumons et le sang serait limité. On l’estime, à partir de données expérimentales chez l’animal, à environ 1 % des nanoparticules inhalées. Le dépôt des nanoparticules peut se produire à tous les niveaux de l’appareil respiratoire depuis le nez jusqu’aux alvéoles.


Concernant la voie cutanée, il semble que la peau intacte constitue une barrière efficace : les particules ne passeraient pas la couche cornée de l’épiderme, même si une accumulation dans les follicules pileux (organes qui produisent les poils) est observée. L’exposition au travers d’une peau lésée n’a toutefois pas encore été étudiée avec précision. Néanmoins, selon la lésion, les nanoparticules sont susceptibles de pénétrer dans l’organisme via le derme et le réseau des veinules (vaisseaux sanguins de la peau) qu’il contient, ainsi que les terminaisons nerveuses.


L’exposition par ingestion de nanoparticules peut se produire en mangeant des aliments contaminés, en avalant des particules inhalées ou en portant à la bouche une main contaminée. L’évaluation de l’exposition est limitée par l’absence de méthodes validées et applicables en routine permettant la détection, l’identification et la quantification des nanoparticules dans les aliments.



Il est par ailleurs important de préciser que les nanoparticules se présentent rarement sous une forme unitaire mais le plus souvent sous la forme d’un agglomérat ou d’un agrégat de nanoparticules, d’une taille, par conséquent, supérieure à celle de la nanoparticule elle-même. Il ne faut néanmoins pas négliger la possibilité que ces agglomérats-agrégats se décomposent lorsqu’ils pénètrent dans l’organisme et que des nanoparticules unitaires puissent passer les barrières.



Par ailleurs, des études sur les nanoparticules et leurs mécanismes d’agglomération et de dispersion sont en cours au niveau européen et international.


 


En milieu professionnel, la voie respiratoire est la voie d’exposition la plus importante lors des activités de fabrication industrielle, notamment lors des manipulations, transferts, échantillonnages, conditionnements, stockage des produits, et dans le traitement des nanocomposites (découpage, polissage, perçage,…), de traitement des déchets ou de nettoyage, d’entretien et maintenance des équipements et locaux. Au poste de travail, la fraction inhalée est d’autant plus importante que l’activité physique est intense.


Néanmoins, les substances à l’état nanoparticulaire, en tant que substances chimiques, entrent dans le champ de la réglementation existante pour la prévention des risques chimiques et répondent donc aux exigences du code du travail en matière d’évaluation et de maîtrise des risques. La réglementation hiérarchise notamment les actions afin d’éviter toute exposition des travailleurs en privilégiant :


 


•        la suppression du risque ;


•        à défaut, la substitution par un agent chimique ou procédé non/moins dangereux ;


•         le cas échéant, la réduction du risque au niveau le plus bas possible de l’exposition des travailleurs par des mesures techniques et organisationnelles.



Elle précise également que, lorsque la suppression du risque et la substitution ne sont pas possibles, l’employeur s’assure que la production ou l’utilisation de l’agent chimique dangereux a lieu dans un système clos, dans la mesure où cela est techniquement possible.


Seulement si le confinement total n’est pas réalisable, les meilleures techniques disponibles en matière de moyens de protection collective doivent être mises en œuvre afin d’assurer une extraction efficace à la source.


 


Les équipements de protection individuelle interviennent en dernier lieu lorsque des émissions résiduelles sont présentes dans l’atmosphère du poste de travail, lorsqu’il y a une situation accidentelle à traiter, ou que le process prévoit des phases de rupture de confinement où le travailleur doit manipuler le produit.


En matière de protection individuelle respiratoire, les premières études réalisées notamment par l’institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) et le commissariat à l'énergie atomique (CEA) concernant des médias filtrants  conduisent à estimer que ces protections respiratoires seraient efficaces pour la rétention des nanoparticules. Par ailleurs, si le media filtrant s’avère efficace, il est essentiel de veiller à l’étanchéité des masques au niveau de la jointure avec le visage. C’est la raison pour laquelle certaines organisations professionnelles préconisent l’utilisation de masques à ventilation assistée ou à adduction d’air, afin d’assurer une surpression à l’intérieur du masque qui évite l’entrée d’air par des fuites éventuelles de jonction.


Concernant les équipements de protection cutanée présents sur le marché, leur efficacité n’a pas encore été prouvée. Des études réalisées courant 2009 sur plusieurs types de gants et vêtements de travail sont en cours de validation et devraient fournir des informations précises sur leur étanchéité.


L’INRS préconise néanmoins de revêtir une combinaison à capuche jetable de type 5 (étanche aux poussières) avec serrage au cou, aux poignets et aux chevilles, dépourvue de plis ou de revers, avec des poches à rabats ainsi que des couvre-chaussures. Il est également conseillé de porter des gants étanches ainsi que des lunettes équipées de protections latérales. Ces éléments doivent être maintenus en parfait état et nettoyés, pour ceux qui ne sont pas jetables, après chaque usage.


En conclusion, si les nanoparticules ont, dans les conditions les plus défavorables, un certain potentiel à passer les barrières et si des études complémentaires sont nécessaires pour préciser les mécanismes de pénétration, le respect des obligations réglementaires en matière de prévention des risques chimiques en milieu de travail permet de prévenir les risques d’exposition professionnelle aux substances à l’état nanoparticulaire.