JA micro

À mi-parcours du débat, les avis et les positions se précisent, dans le contexte d'un échange entre quelques parlementaires sur la place respective du Havre et de Dunkerque. 

 

Le récit du Grand Port Maritime de Dunkerque (GPMD) reçoit l’approbation d’une grande partie des participants, heureux qu’enfin les choses paraissent bouger : le Port ne peut pas rater le grand virage de la diversification des activités, de la conteneurisation massive et de l’économie décarbonée. Un signal fort en termes d’investissement et d’équipement doit être donné pour capter une part plus significative de la hausse des trafics sur la rangée nord, rapatrier ceux qui, desservant les Hauts-de-France et passant aujourd’hui par les ports du Benelux, devraient passer demain par Dunkerque, port naturel de sa région. Avec un enjeu majeur : l’emploi sur un territoire sévèrement touché en particulier par le chômage des jeunes.

Mais ce récit et la promesse qui l’accompagne sont aussi interpellés par une partie, plus critique, des participants : le modèle de développement ainsi proposé est il soutenable, ne représente-t-il pas une fuite en avant vers une mondialisation dont les effets sociaux et environnementaux négatifs font part ailleurs la Une de l’actualité ?

Il n’appartient pas à notre commission de réduire le présent débat à cette opposition de modèles stratégiques qui relèvent cependant de choix démocratiques à toutes les échelles et non à une seule. Il lui appartient par contre d’attirer l’attention sur le fait qu’au-delà de cette opposition, les habitants du Dunkerquois que nous avons rencontré, insistent tous sur plusieurs aspects : 

  • Le développement du port doit s’accompagner d’une stratégie nationale, régionale et locale garantissant le maintien à un haut niveau et une cohérence forte des activités industrielles. 
  • Il ne suffit pas de creuser un bassin pour "être dans le coup" : il faut accompagner cette infrastructure d’une élévation considérable du service rendu, notamment en termes de logistique, et se mettre en situation d’intégrer les innovations qu’exigent les demandes nouvelles des clients et des utilisateurs.
  • Les activités nouvelles annoncées sur le territoire doivent profiter aux salariés et aux PME du territoire : elles doivent pour cela être préparées par des dispositifs d'accompagnement et de formation, favorisant un recul massif du chômage et une élévation du niveau des emplois sur la durée.
  • La croissance du port et les emplois eux-mêmes ne peuvent se payer d’une dégradation supplémentaire du cadre de vie, sujet sur lequel les Dunkerquois disent avoir déjà beaucoup donné : l’accroissement considérable du nombre de poids-lourds, les nuisances afférentes, les ruptures dans l’espace et les risques d’une réduction de l’accès à la mer, sont perçus, malgré les arguments du maître d’ouvrage, comme inacceptables par une nette majorité de participants.

Cet ensemble de points qui conditionnent au fond le positionnement final des habitants (par exemple entre le projet retenu et sa variante) ne relèvent pas tous de la compétence du port : il mettent en jeu, pour ne citer que celles-ci, la cohérence des politiques de transports, de formation et de gestion prévisionnelle de l’emploi. Ils mettent aussi en jeu la dynamique entrepreneuriale et managériale des acteurs économiques, la qualité de la négociation sociale territoriale. 

Ce que le GPMD présente ainsi à juste titre comme un projet de territoire paraît donc appeler des montages qui vont bien au-delà de l’accompagnement par lui-même et en direct des impacts positifs et négatifs du projet :  

Il nécessite l’affichage d’une mobilisation puissante du territoire pour se porter à la hauteur des acteurs mondialisés qui font l’avenir des ports.

IIs appellent sur place des partenariats à géométrie variable mais coordonnés qui garantiront la qualité des réponses aux questions que posent les habitants.

Si la seconde partie du débat pouvait contribuer à la définition des conditions pérennes d’une telle grande alliance pour le port, nous aurions vraiment le sentiment d’avoir fait œuvre utile.

Jacques Archimbaud

Président de la Commission particulière du débat public

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