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AVIS
Tentative de synthèse pragmatique
par Jean CHANUT (SAINT-ANDRÉ-SUR-CAILLY), 02/02/2012
Au terme de ce débat riche et bien mené, une certaine perplexité nous saisit. LNPN, dispositif ferroviaire complexe rattaché au projet de développement de l'Axe-Seine fait l'objet d'une mise bout à bout de demandes individuellement pertinentes dont la sommation mène à des besoins financiers considérables. Peut-on faire la part de l’acquis, du conditionnel et de l’optionnel, en les confrontant aux besoins prioritaires et les plus prometteurs tant pour les passagers que pour le fret ?

L'aménagement de la section allant de Paris Saint-Lazare à Mantes, sans doute un acquis en termes de décision, règle les difficultés de l’Ouest de l’Île-de-France et améliore immédiatement la desserte de la Normandie en termes de fiabilité et de temps de transport. Un gain de cinq à dix minutes avec une bonne régularité règle peu ou prou les besoins de Rouen et de l’Eure.
En revanche, il n'y a pas de progrès significatif sur les temps pour Le Havre, Caen et au-delà.
Concernant la Basse-Normandie, des aménagements ponctuels sont évoqués qui pourraient améliorer ces temps. Soulignons que l’effet fréquence contribue souvent plus à la qualité de service que le temps de transport proprement dit.
Dans ce débat le lien entre les trafics fret et passagers s'est articulé autour d'un transfert de flux ; les passagers empruntant pour l'essentiel une voie nouvelle et le fret bénéficiant d'une utilisation non exclusive, mais plus fluide du réseau existant. Sur le plan du fret, on peut noter que les aménagements déjà réalisés et ceux en cours permettent aux flux entre l'Île-de-France et Le Havre de ne plus emprunter la ligne Paris-Rouen-le Havre. Cela résout sans doute en bonne partie les difficultés, d’autant que les trafics ferroviaires ont été infiniment supérieurs dans le passé.
Le trafic passagers ne devrait pas augmenter dans les proportions envisagées par le projet. Comment le pourrait-il avec une population stable, vieillissante dont le revenu disponible baisse et alors que les conséquences des NTIC tant au plan professionnel que privé n’ont pas été prises en compte.
L’implantation d’une nouvelle gare à Rouen, second enjeu annoncé du débat, a immédiatement fait l’objet d’un quasi-consensus de certaines parties prenantes recourant à l’argument d’autorité, donc sans valeur. Si les accès routiers de la gare de Rouen sont saturés (des améliorations sont possibles), cela est moins évident du côté quais. Les TER et les trains à deux étages ne sont pas trop longs et les innombrables correspondances locales ou interrégionales sous-entendues restent à confirmer. Quant au souhait louable de profiter d’un tel investissement pour amorcer le renouvellement urbain du quartier St Sever, aucun concept d’actualité n’a été présenté.

Le projet LNPN comporte trois scénarios A, B, C complétés d'un quatrième, combinant le A et le B. On peut observer que le scénario C comprenant un passage sous l'estuaire de la Seine a été d'emblée mis hors course par son coût et le manque d’intelligibilité de son passage à Rouen. Or, il présente un intérêt fondamental pour la desserte par le port du Havre de son Hinterland du Sud de la France, de la péninsule Ibérique et de l’Italie du Nord (la focalisation sur Paris, Axe-Seine aidant, est pour le moins limitative). Le projet avorté de liaison feeder entre Caen et Port 2000, la nouvelle liaison fluvio-maritime Le Havre-Honfleur, les projets de zones logistiques, notamment à Mézidon, démontrent amplement le besoin d’un débouché performant vers le Sud qui éviterait les ruptures de charge.

Il est envisagé de réaliser l'ensemble du projet sous forme de Partenariat Public Privé. Confier la globalité de l'ingénierie financière et de la construction des ouvrages à un consortium privé présente des avantages en termes d’efficacité. C’est aussi le moyen pour les promoteurs du projet de le rendre irréversible. Or cela a pour corollaire une charge financière lourde pour les contribuables à l’échelle de deux générations. Il y a un refus du phasage par les élus. Cela induira le paiement d’indemnités en cas de modification du scénario en cours de route. Or nous sommes en période de forte incertitude, il convient donc de rester flexible.
Cependant, le franchissement sous-terrain de l’estuaire est précisément un module unitaire qui se prête à une PPP. L’objectif est de faire du complexe de la Basse-Seine un authentique leader européen. Il serait sur ce point opportun d’oublier le dispendieux canal Seine-Nord qui ferait du Port Autonome de Paris, en partenariat avec Anvers et Rotterdam, LE port maritime de l’île de France. En se projetant un peu plus dans l’avenir, on peut imaginer que Port 2000 devienne Le port européen d’accueil des navires venant de la zone Pacifique par le passage du Nord-Ouest dont il semble qu’il deviendra navigable en toutes saisons.
L’Axe-Seine s'articule entre Paris et la mer. Mais quid des régions limitrophes, en particulier entre Amiens et Lille d’un côté et Rennes et les Pays de Loire de l’autre. Tout miser sur Paris est singulièrement réducteur. Il ne s’agit pas d’actualiser le Schéma d’aménagement de la Basse-Seine, mais de faire de la France du Nord-Ouest un acteur d’envergure mondiale.

En résumé, il apparaît souhaitable de :

- Engager immédiatement l’aménagement du Mantois ;
- Engager immédiatement la mise à niveau du réseau existant, complétée par des aménagements ponctuels réduisant les temps de parcours vers la Basse-Normandie ;
- Mener à bien, dans les meilleurs délais, les études techniques et financières de la traversée en tunnel de l’estuaire ;
- Mettre à niveau les infrastructures transversales (Amiens, Lille, Rennes…) et reconfigurer les services offerts ;
- Différer la réalisation des voies nouvelles et de la gare de Rouen jusqu’à ce que le besoin soit avéré ;
- Différer l’arrêt à la Défense jusqu’à la mise en place d’un nœud TGV.