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Le projet de ligne nouvelle Paris-Normandie et le Grand Paris : des opportunités à saisir
par Florent ROUAULT (PUTEAUX), 01/12/2011
Déroulé du débat public

Une première constatation s’impose : le tracé en Normandie fait plus débat que le tracé en Ile de France, peut-être parce que les intervenants sont plus conscients de l’urgence du doublement de la section entre Mantes et Nanterre. Mais il s’agit là justement d’une bonne raison de faire le point.

L’intérêt du doublement de la section entre Mantes et Nanterre

Les trains normands roulent sur les mêmes voies que les trains de Mantes. Cela pénalise les trains normands et impose des restrictions aux trains franciliens. Ce partage ne cessera pas avec le prolongement du RER E à Mantes, mais cessera si la ligne nouvelle « normande » se concrétise sur sa section Mantes-Paris. L’Ile de France en a besoin car cela permettrait, sur le futur RER E, d’accroître le nombre de trains (au-delà de la limite de 6 par heure et par sens).
Au terme du débat public sur le prolongement du RER E à Mantes, les participants ont exprimé deux attentes que seule la ligne nouvelle Paris-Normandie permettrait de réaliser :
• ajouter un arrêt à Sartrouville sur le RER E : cela donnerait une correspondance avec la futur tangentielle nord, et faciliterait les trajets entre le RER E de Mantes et le RER A de Cergy (un autre arrêt pourrait aussi être créé à Achères Grand Cormier pour donner accès à la tangentielle ouest),
• intégrer la branche Poissy du RER A au RER E : c’est ce que demandent les Cergy-Pontains, sans doute avec raison, pour obtenir plus de RER A sur leur propre branche (la branche est également desservie par des Transiliens terminus St Lazare, mais ils n’ont pas le même succès car ils ne desservent qu’un seul point dans Paris) ; il en résulterait en outre une nette simplification de l’exploitation puisqu’il ne subsisterait que 2 branches à l’ouest sur le RER A.

L’opportunité d’une gare en ligne à La Défense, bien desservie et apte à accueillir des TGV

RFF propose d’implanter une gare traversante (dite « en ligne ») à Nanterre-La Défense. C’est une idée très intéressante car une gare qui ne se termine pas en cul-de-sac (comme la gare St Lazare) peut être utilisée aussi bien comme terminus et comme gare de passage.
Cela permet à la fois de respecter la demande des Normands de conserver une arrivée à St Lazare, dans la limite de la saturation de cette gare, et de desservir malgré tout La Défense avec une bonne fréquence tout au long de la journée.
Concrètement :
• aux heures de pointe, la gare St Lazare est saturée. La demande est plus forte dans le sens Normandie-Paris le matin, et l’inverse le soir. L’idée est de faire face à la demande accrue en ajoutant des trains terminus La Défense le matin et origine La Défense le soir. On se sert donc de La Défense comme gare terminus, et les trains terminus St Lazare n’ont pas nécessairement à s’arrêter à La Défense.
• aux heures creuses, la gare St Lazare n’est pas saturée. Les trains origine ou terminus La Défense risqueraient en outre de ne pas avoir un remplissage suffisant. Mais La Défense peut malgré tout être desservie comme simple gare de passage entre la Normandie et St Lazare : la perte de temps est estimée à 5 minutes pour les voyageurs qui partent ou arrivent à St Lazare, mais se justifie par le fait que La Défense contribue au remplissage du train à hauteur d’au moins 20 % (selon les estimations).
La gare se trouverait à Nanterre-La Folie, pas tout à fait en plein cœur du quartier d’affaires, mais dans un secteur en rapide développement et qui sera à terme très bien desservi : RER E, gare du RER A Nanterre-Préfecture toute proche, et gares des trois futures lignes du Grand Paris Express (rouge, orange et verte).
Grâce à sa bonne desserte tout au long de la journée, la gare sera clairement identifiée comme une gare grandes lignes à proprement parler. Elle est susceptible de faire gagner une vingtaine de minutes aux voyageurs qui ont un intérêt à l’utiliser, et rend le trajet plus confortable.
Une gare à La Défense est peut être coûteuse, mais elle constitue la meilleure porte d’entrée dans le Grand Paris pour les Normands. Selon les estimations elle intéressera au moins 3 200 000 voyageurs par an, ce qui est 3 fois la fréquentation annuelle de la gare de Massy TGV. Sa justification paraît donc simple à démontrer. Enfin, la Normandie a besoin d’un bon accès aux aéroports parisiens, car ses aéroports sont largement moins performants. Le train faciliterait nettement ces trajets au travers du métro automatique du Grand Paris (connexion directe aux aéroports).
A plus long terme, le caractère traversant de la gare lui permettra d’accueillir des TGV intersecteurs dans l’hypothèse d’un bouclage de la rocade TGV entre La Défense et Pleyel. Un tel « bouclage court » de la rocade TGV permet de dé-saturer les gares intra-muros (la gare St Lazare, les gares du nord et de l’est…) et redonnerait de la compétitivité aux trains. Le passage par La Défense me semble incontournable pour une bonne raison : il faut parvenir au remplissage des TGV intersecteurs. C’est en passant par des pôles aussi majeurs du Grand Paris que La Défense, Pleyel ou Roissy qu’on peut y parvenir, pas seulement grâce à la Normandie ou à Cergy. Exemple parlant : un TGV Rouen- Roissy-Lorraine-Strasbourg pourrait n’intéresser presqu’aucun Normand se rendant en Lorraine ou à Strasbourg et être malgré tout rempli grâce au passage par La Défense et Pleyel. C’est le cas si une moitié des voyageurs normands se rend à La Défense, un quart à Pleyel, et un dernier quart à Roissy. Et si, au fur et à mesure du parcours, les Normands descendus sont remplacés par des voyageurs lorrains ou Strasbourgeois, le remplissage se maintiendra à un niveau respectable.
Le quartier d’affaires a bien entendu tout intérêt à voir s’arrêter des TGV circulant vers des villes comme Lille ou Bruxelles, Strasbourg ou Luxembourg, et même vers Roissy (malgré l’accès direct par le Grand Paris Express).
En choisissant un bouclage de la rocade entre La Défense et Pleyel, on n’implante pas les gares en grande couronne, comme on a l’habitude de le faire, mais l’important est surtout de garantir un bon retour sur investissement : on recourt au bouclage le plus court possible, et on choisit les gares qui assureront sans doute la meilleure fréquentation possible aux trains.

La possibilité d’un raccordement aux voies de surface vers St Lazare qui puisse aussi servir à boucler la rocade TGV vers Pleyel

Entre la future gare traversante (et souterraine) de La Défense et la gare St Lazare, RFF prévoit un tunnel qui émerge à l’air libre au niveau de la gare des Vallées et se raccorde aux voies de surface actuellement utilisées par les trains Mantes-Paris (avec le prolongement du RER E jusqu’à Mantes, cette section ne servira plus qu’aux trains normands).
Ce tunnel fera environ 3km, ce qui semble la solution la plus courte que l’on puisse envisager.
Mais ce tunnel n’est pas dirigé vers St Lazare. Imaginons justement cette option : pour émerger vers la gare de Clichy-Levallois, il faut faire un tunnel un peu plus long (5kms au lieu de 3). Le point d’émergence se situe, quand on regarde en direction de la gare St Lazare, à gauche des voies, juste après le périphérique. Le train doit ensuite passer sous les voies (qui sont surélevées) puis émerger un peu plus loin, avant la gare Pont Cardinet.
Cette solution est plus longue en tunnel, mais elle est plus courte sur le trajet La Défense-St Lazare. Elle est donc globalement plus rapide.
Elle a ensuite le mérite de faciliter l’insertion des trains à St Lazare : en ne passant plus par les Vallées, les trains normands n’auraient plus à couper la route des trains arrivant par la gare de Bois-Colombes.
Enfin, il suffit de regarder une carte pour voir que réaliser ce tunnel amènerait les trains à proximité de la gare que l’Etat envisage de créer à Pleyel (pour dé-saturer la gare du nord). Entre les environs de Clichy-Levallois et la ligne de train (aujourd’hui existante) des Docks de St Ouen (qui permet, sans tunnel supplémentaire, de se rapprocher au plus près de Pleyel), il ne manque que 2km. Dans cette hypothèse, le bouclage devrait être très facile à réaliser.
Admettons qu’il soit techniquement possible de faire ce tunnel. Le financement reste toutefois à trouver, et ne doit pas être à la charge exclusive des Normands pour être réaliste. Il suffit parfois d’une contribution supplémentaire de l’Etat pour débloquer un grand projet. Aussi je me demande si, dans l’hypothèse où tous les trains normands passeraient par la gare de La Défense (éventuellement sans s’y arrêter car elle comptera 4 voies) et si, donc, le passage par l'ancienne section grandes lignes entre Les Vallées et Bois Colombes pouvait être remplacé par le tunnel envisagé ici, l’Etat ne pourrait pas, au travers de RFF, procéder à la vente à terme, à des promoteurs, du terrain de la coulée ferroviaire. Les promoteurs seraient sans doute ravis de construire des immeubles R+5 sur les 1,5 km ainsi libérés. L'Ile-de-France a besoin de logements et la requalification urbaine à Bois-Colombes serait prometteuse (à Bois-Colombes et également du côté de Nanterre-U, où la désaffection de certaines voies peut participer à recoudre la ville). J’ignore la ressource supplémentaire que cela peut générer, mais je me lance volontiers dans une estimation sous toutes réserves : imaginons que l’on puisse tirer de la coulée ferroviaire un prix du m2 constructible de 2 000 euro par m2, cela donne, sur une largeur des voies de 10 m sur 1 500 m de long, environ 30 millions d'euros. Certes cela n’est pas du tout suffisant, mais c’est important de voir ce dont on peut disposer sans forcément le savoir.

La demande d’une gare TGV à Achères et son impact sur le tracé normand

Il existe un projet de gare TGV à Achères. RFF préconise un passage de la LNPN par Achères pour en tenir compte. Mais je ne suis pas du tout convaincu par cette nécessité.
En effet, au vu des discussions, il apparaît que ce projet ne répond pas aux attentes :
• des Normands (qui admettent mieux une perte de temps liée à un arrêt à La Défense plutôt qu'à Achères),
• des habitants de Chanteloup ou de Vernouillet car une ligne nouvelle passant par Achères doit, pour avoir un coût raisonnable, traverser la Seine en plein air dans ce secteur (contrairement au tracé plus naturel dit « Mantes direct » qui passe plus au sud et longe les autoroutes A14 et A13 ce qui est en principe moins gênant, du moins si des mesures adaptées de protection contre le bruit sont prises)
• ni même de la grande majorité des habitants de Cergy-Pontoise : Achères est une fausse bonne idée car la gare, qui n’est pas au centre de l’agglomération, n’aurait par ailleurs vocation qu’à accueillir quelques (rares) trains (intersecteurs).
Par ailleurs, pour avoir du succès, les TGV intersecteurs ont tout intérêt à passer par La Défense et Pleyel, car ce sont des gares qui pourront vraiment participer au remplissage des trains, ce qui est un gage du succès commercial.
Le passage de la LNPN par Achères me laisse donc sceptique. Deux arrêts (un à Achères et un à La Défense) ne peuvent pas s’imaginer sur un TGV intersecteur normand. La perte de temps serait trop importante pour les Normands.
Mais il me semble en revanche tout à fait possible d’imaginer une gare à Achères (ou en cœur d’agglomération de Cergy-Pontoise). Ces trains n’ont pas forcément besoin d’utiliser la LNPN entre Achères et La Défense : ils peuvent s’insérer, au niveau d’Achères Grand Cormier, au milieu des RER E (les RER E sont sans arrêt sur cette section, sauf éventuellement un à Sartrouville), et peuvent desservir la gare grandes lignes de Nanterre-La Défense par un raccordement à créer à l’arrivée à Nanterre.
Du coup, on pourrait avoir des TGV intersecteurs normands et des TGV intersecteurs cergy-pontains. Ils seraient différents, mais s’articuleraient en bonne intelligence en fonction des besoins :
• à l’heure de pointe du matin, quand on arrive facilement à remplir des trains entre la Normandie et La Défense, on peut faire des TGV intersecteurs normands qui desservent La Défense, Pleyel et Roissy (voir au-delà, mais pas forcément) et en sens inverse, on fait circuler des TGV en provenance de Lille ou Strasbourg, passant par Roissy, Pleyel, La Défense, mais on ne les prolonge pas jusqu’en Normandie (le matin la fréquentation ne serait pas suffisante) : ils sont donc terminus Cergy.
• à l’heure de pointe du soir, c’est l’inverse : on arrive facilement à prolonger les TGV vers la Normandie, tandis que les trains allant vers Lille ou Strasbourg on tout intérêt à partir de Cergy plutôt que de Rouen.
Garantir au mieux le succès commercial de ces trains me paraît l’idée de base. Dans cette hypothèse, ce sont donc alternativement les Normands et les Cergy-Pontains qui doivent effectuer une correspondance à Nanterre-La Défense, en fonction de la fréquentation des trains.
On résout par ailleurs le problème du tracé pour la LNPN entre Mantes et Nanterre. En effet, je ne vois pas bien pour quelles raisons les TGV intersecteurs de Cergy ne pourraient pas utiliser les voies du RER E (rapides et capacitaires) pour rejoindre la gare grandes lignes de La Défense. Avec un intérêt supplémentaire : cette utilisation se ferait dans le sens contraire de l’affluence normale en Ile de France (dans le sens La Défense-Cergy le matin, et Cergy-La Défense le soir).