Avis n°107
Sans population résidente, il est impossible d’assurer une fonction de médiation
le ,Sans population résidente, il est impossible d’assurer une fonction de médiation indispensable pour permettre une greffe durable.
Il n'y a plus de projet métropolitain en ile de France sans intégrer la dimension touristique à l'échelle du grand Paris.
On constate tout un renforcement et un repositionnement en zone dense sur les grands sites touristiques de la capitale élargie (ile de la Cité, BHV, Samaritaine, Serres d'Auteuil, Fondation Louis Vuitton à Boulogne, etc.). Ceux-ci ont pour caractéristique de mêler des activités à la fois culturelles, ludiques, hôtelières et commerciales de luxe mettant à distance les habitants de ces sites.
Les résidents remettent en cause dans les réunions de présentation des projets les méthodes technocratiques qui sont mises en œuvre et réclament d'être associés en amont aux décisions afin que ces projets ne constituent pas « des kystes » dans les quartiers mais intègrent aussi les besoins des résidents.
Les habitants vivent particulièrement mal l'arrivée massive des visiteurs qui contribuent par leur accaparement de logement à durée temporaire (airbnb), par l'occupation désordonnée de l'espace public à des concurrences entre usages et des nuisances importantes. Ceci aboutissant à une réduction de l'offre de logements et une augmentation des prix des loyers et du foncier, une hausse des nuisances de bruit et d'occupation de l'espace public, la saturation des équipements de transport, et un appauvrissement de la vie locale et une perte de liens sociaux de proximité.
Plusieurs cas de démarches participatives sont en cours en zone métropolitaine dense pour trouver des solutions à ces nouvelles problématiques.
Le projet d'Europa city implanté sans aucune concertation, et sans intégrer les problèmes de concurrence entre territoires, lancé par un investisseur et par l'EPA Plaine de France de manière descendante avec un débat public qui arrive en fin de parcours pour un projet largement bouclé apparaît comme générateur de situations conflictuelles insolubles entre les « pour » et les « contre ».
On risque d'avoir un excès d'offres de projets qui se traduirait par l'échec de certains d'entre eux débouchant sur des fermetures et la création de friches urbaines en déshérence.
L'importance du patrimoine historique dans l'attractivité des sites touristique qui fait de Paris la première destination touristique mondiale apparaît grandissante. En témoigne les chiffres de visiteurs suivants enregistrés chaque année : Notre Dame (14 millions), Basilique Sacré Cœur (10,5millons), Le Louvre (9,66 millions), Centre Pompidou (3,8millions), Musée d'Orsay (3,6 millions), Muséum d'histoire naturelle (2 millions de visiteurs), Grand Palais (1,5millions), etc.
A l'inverse, les projets fabriqués de toute pièce se démodent comme le montre la perte de 2 millions de visiteurs sur Eurodisneyland constaté entre 2013 et 2015 (passé de 16 à 14 millions de visiteurs). Notre Dame vient désormais à égalité avec Disney.
A l'exemple de l'ile de la cité, qui va faire l'objet d'une importante restructuration urbaine liée au départ du palais de justice, d'une partie de l'hôtel Dieu et des services de Police, l'attractivité de la zone centrale dont la richesse patrimoniale est considérable sera sans doute encore renforcée.
Dans ce changement de contexte et en comparaison, le projet d'EuropaCity situé dans un environnement cumulant l'éloignement, les nuisances de bruit et de pollution des grands équipements de transports, sans habitants permanents, apparaît complètement dépassé et risque d'entrainer plus de désagréments que de richesse nouvelle apportée au territoire.
Sans population résidente, il est impossible d'assurer une fonction de médiation indispensable pour permettre une greffe durable.
Roger Biriotti
Architecte urbaniste