Avis n°144
Débattre, c'est bien... écouter, c'est mieux !
le ,Le débat public sur EuropaCity s'achève ce jour, mercredi 13 juillet.
Quel que soit le regard que l'on porte sur ce projet, après 4 mois de réunions publiques, d'échanges variés, de contributions diverses et d'expertises en tous genres, plusieurs conclusions s'imposent :
1. ce projet n'est pas susceptible de tenir les belles promesses qui ont entouré son étonnante promotion dans les médias pendant les 5 longues années, de 2011 à 2016, qui ont précédé l'ouverture du débat public ;
2. loin d'être innovant ce projet porte tous les stigmates de temps révolus où le progrès rimait avec industrialisation, concentration urbaine et société de consommation ;
3. bien que conçu dans des bureaux d'études prestigieux, ce projet ne peut surmonter le handicap originel d'être foncièrement déconnecté des réalités du territoire sur lequel il devrait se déployer ;
4. même amendé et enrichi par les nombreuses contributions suscités par le débat qui s'achève, il n'y a aucune chance que ce projet puisse répondre aux attentes des habitants en terme de créations d'emplois et de nouvelle dynamique offerte à leur territoire ;
5. au contraire la poursuite de ce projet affecterait profondément l'emploi et les commerces de proximité ;
6. dans la perspective d'un tel projet, la réalisation par la puissance publique de nouvelles infrastructures routières et de transports collectifs tous modes confondus (train, bus, route, circulations douces) serait une nécessité incontournable et une exigence inconsidérée au regard des capacités financières disponibles ;
7. l'Est du Val d'Oise et le Nord de la Seine-Saint-Denis étant en dépassement constant des seuils de pollution de l'air tolérés par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), un minimum de considération pour la santé des populations environnantes exposées à l'accroissement rapide de maladies cardiovasculaires ou respiratoires (asthme précoce, etc.) devrait conduire à l'abandon d'un tel projet ;
8. vu les recommandations récentes (13 mai 2015) du Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) sur la bonne gestion des sols agricoles, vu les multiples engagements de la France pour juguler l'étalement urbain et limiter la consommation d'espaces naturels et de terres agricoles (Loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 et Rapport publié le 27.09.2015 par le Cabinet du Premier Ministre sur "Les nouveaux indicateurs de richesse"), vu la Loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte promulguée le 17 août 2015, vu la ratification par le Président de la République le 15 juin 2016 de l'Accord de Paris sur le climat adopté à l'unanimité par 195 pays en décembre à l'issue de la COP21, il devient incontournable pour la crédibilité et l'autorité de la puissance publique que les différents acteurs de l'État, de l'Administration et des Collectivités territoriales renoncent à apporter leur soutien à des projets privés de la nature du projet EuropaCity.
Avant même l'ouverture du débat public sur EuropaCity, l'Autorité environnementale (Ae) a été saisie par l'Établissement public d'aménagement "Plaine de France" pour la création d'une zone d'aménagement concerté (ZAC), en vue de l'urbanisation du Triangle de Gonesse.
Dans son Avis délibéré du 2 mars 2016 n°Ae : 2015-103, l'Ae s'interrogeait sur "les raisons pour lesquelles les maîtres d'ouvrage de la ZAC et d'EuropaCity n'ont pas proposé à la commission nationale du débat public (CNDP) de faire porter le débat public sur un seul et même projet et d'indiquer en quoi le projet de création de ZAC serait modifié, en fonction des conclusions possibles de ce débat public et de l'enquête publique sur le projet de ligne 17". L'Ae notait alors que "cette approche n'est pas de nature à garantir de façon optimale le respect du principe de participation du public, plusieurs consultations étant conduites en parallèle sur des projets intimement liés, sur la base d'informations incomplètes, laissant penser que leurs autorisations peuvent être prises indépendamment les unes des autres." (p. 3 Synthèse de l'avis)
Le débat public, riche et instructif, qui vient d'avoir lieu, a largement confirmé la nécessité de traiter globalement de toutes les questions économiques, sociales et environnementales soulevées par les différents projets d'aménagement du Triangle de Gonesse. Le groupe Auchan s'honorerait de reconnaître cette nécessité en renonçant à poursuivre un projet qui divise si profondément les collectivités locales du territoire.
Cette sage décision permettrait de commencer à résorber les oppositions que ce projet a suscitées entre les départements du Val d'Oise et de la Seine-Saint-Denis 93 et 95. Il serait à nouveau possible de poursuivre le débat sur le devenir du Triangle de Gonesse dans un cadre régional et en se conformant au Projet d'ordonnance relatif à la démocratisation du dialogue environnemental soumis à consultation publique depuis le 12 juillet 2016 et qui vise à réformer les procédures amont destinées à assurer l'information complète des citoyens sur l'ensemble des impacts et des objectifs des projets pour rendre possible et pertinente leur participation à l'élaboration des projets et garantir la compatibilité des dits projets avec la protection de l'environnement.
Claude LOUP, membre du CA du Collectif pour le Triangle de Gonesse