Avis de : haentjens emmanuelle Jouy-le-Moutier 95280 - le 22/06/2006 Madame, Monsieur,
Avant de donner mon avis, je souhaite attirer votre attention sur les multiples anomalies qui ont été relevées au cours des débats publics organisés par vos soins. Les approximations et incohérences notées dans le dossier remis (parfois) aux populations concernées doivent faire l'objet d'un examen approfondi pour que vous puissiez considérer en toute honnêteté que votre travail n'aura pas seulement servi à donner le change après la décision prise par notre ministre. Il ne suffit pas d'admettre du bout des lèvres certaines erreurs ou difficultés d'informer, il faut aussi et surtout les remettre en cause et en tenir compte dans votre rapport prochain au ministre, en toute humilité.
Pour ce qui est du prolongement de la Francilienne : je suis directement concernée par le tracé rouge, qui passe à moins de 500 m de ma commune de résidence. Je ne milite pas seulement contre ce tracé mais contre tous les autres, qui me paraissent les uns comme les autres aussi nuisibles pour la vie quotidienne et la santé de mes concitoyens. Je ne crois pas une seconde que ce nouvel axe routier pourra permettre une amélioration de la vie des Franciliens et des usagers en transit dans notre secteur. Tout au plus modifiera-t-il les flux de circulation et ponctuellement permettra-t-il de réduire pendant un temps très court les temps de transport de certains automobilistes (à quel prix !). Créer des axes routiers : ce débat appartient au siècle dernier : celui qui a vu dans le transport individuel des personnes et le transport des marchandises par la route un progrès miraculeux et irrépressible, sans en percevoir les défauts. A l'aube du 21ème siècle, qu'on le veuille ou non, nous avons une idée de plus en plus précise et de plus en plus angoissante des effets de ce mode de déplacement. Et il est plus qu'urgent de tourner le dos à ce type de transport, qui ne correspond plus du tout à nos critères (et nos obligations !) de développement dans le respect maximal de l'environnement. La pollution ne vous et ne me tuera probablement pas mais elle nous rend la vie de plus en plus difficile et surtout, elle met en grave danger la vie de nos enfants et des générations futures. Il faut être aveugle, sourd et absolument inconséquent pour ne pas l'admettre, alors que toutes les instances scientifiques les mieux placées pour en rendre compte ne cessent de nous le seriner : il faut changer nos modes de déplacement, cesser de brûler à tout va et dans un gâchis indescriptible ces énergies fossiles qui nous pourrissent déjà la vie, de façon irréversible. On a pu identifier un certain nombre de solutions transitoires applicables dès à présent, comme le développement des transports en commun et leur accès libre pour tous, ou le co-voiturage. Beaucoup de gens réfléchissent à des solutions plus élaborées et encore plus efficaces. Il s'agit avant tout d'inciter les usagers à changer leurs habitudes.
Comment peut-on dans le même temps poursuivre dans une voie qui n'est pas une autoroute mais qui est à coup sûr une impasse ? Cette attitude suicidaire me rappelle quelques événements de notre histoire qu'il n'est jamais agréable de se remémorer : l'immobilisme des politiques dans les années précédant la seconde guerre mondiale, par exemple. Voir les catastrophes se préparer, les supputer (sans jamais en imaginer l'ampleur, bien entendu, l'imagination de l'Homme a des limites) mais ne pas agir pour détourner le cours des choses, fermer les yeux, tourner la tête ailleurs et prier pour que le cyclone passe à côté... Voilà ce que nous sommes en train de faire, en feignant par paresse intellectuelle ou par lâcheté, de croire celui qui crie haut et fort que l'autoroute est "nécessaire et indispensable" pour "améliorer" la circulation et donc la vie des habitants de la Région. Comment peut-on affirmer des choses pareilles si l'on possède un tant soit peu de jugeote, de capacité de réflexion, d'honnêteté intellectuelle ? Comment peut-on manquer autant de clairvoyance, ou à l'inverse posséder autant de cynisme, pour induire en erreur toute une population, à coup de chiffres, d'études et d'hypothèses erronées ? Sans jamais aborder dans le débat les aspects à long terme, le devenir du transport routier et notre place dans ce que sera devenu notre environnement dans 30 ou 40 ans ? Sans admettre que nous ne savons pas traiter les impondérables, que nos hypothèses de travail sont rien moins que sûres, que NOUS NE SAVONS PAS, tout simplement.
Je veux bien admettre que tout le monde n'ait pas la même sensibilité, que les "impératifs économiques" (à très court terme !) priment pour certains, mais je vous implore de vous pencher de façon très approfondie, très globale, sur les enjeux de ce projet. Tentez de vous interroger profondément, de remettre en cause vos postulats de départ, d'imaginer autre chose que des routes, toujours plus de routes, pour améliorer les difficultés que nous vivons déjà tous au quotidien et que nous subirons de plus en plus fortement. En un mot, participez à faire évoluer les mentalités plutôt que de restreindre votre pensée à des solutions limitées, qui s'avèreront probablement inefficaces voire qui empireront la situation actuelle. Le transport routier appartient à un autre âge, il est temps de se le mettre dans la tête. Changer sos habitude est sans doute l'effort le plus douloureux à consentir pour l'homme moderne, occidental imbu de sa supériorité. Arrêter les frais et admettre que l'on s'est fourvoyé en toute bonne foi, limiter les dégâts en piétinant son amour propre s'il le faut. En un mot, prendre ses responsabilités, ce que nous attendons tous de nos politiques et que nous obtenons bien peu souvent ...
Il ne s'agit pas ici de développer une thèse sur le manque de courage et d'à propos de nos dirigeants. Ils se doivent pourtant, de par leur position de décideurs, de faire preuve de plus de sagesse et de clairvoyance que les autres.
Je suis pour ma part intimement persuadée que s'attacher à régler les problèmes dans l'urgence et l'immédiateté entraîne de graves carences dans la gestion des questions sous jacentes, plus globales et plus décisives : celui qui cherche à résoudre au plus simple et au plus vite le problème qu'il a devant les yeux, ne prend pas le temps de lever la tête et de regarder le nuage de poussière à l'horizon, qui pourtant devrait lui faire prendre conscience des difficultés à venir...
Les arguments développés par les "anti" autoroute ne sont plus à énumérer, rabachés avec plus ou moins de pertinence tout au long des débats, lorsque cela a été possible et utile. J'en appelle pour ma part à l'honnêteté des décideurs, à laquelle je continue à croire, malgré tout. Parc que je ne peux pas imaginer qu'un homme ou un groupe restreint d'hommes puisse sceller ce genre de décision et toutes celles du même acabit s |