Avis n°254
A31 et fiabilité des temps de parcours
le ,Le Maître d’Ouvrage indique systématiquement en préambule que l’un des principaux objectifs de l’A31 bis est de « fiabiliser les temps de parcours ». Au passage, cette sémantique est déjà un aveu : on ne parle plus de « diminuer » les temps de parcours ; le MO reconnaît donc que peu de temps est réellement perdu sur l’A31, et avance donc l’argument de la « fiabilité », comme quoi plus que le temps réellement perdu, ce serait la part d’aléa qui empêcherait à l’A31 d’être optimale. Argument abondamment repris par les auto-proclamés représentants du secteur de l’ « économie », dénonçant des pertes de temps dommageables à l’économie… Vraiment ? Reste que cet argument n’est ni précisé ni chiffré. Et pour cause.
Il y a un seul tronçon où les temps de parcours peuvent être sensiblement différents d’un jour à l’autre : Thionville – Luxembourg (et surtout sur la partie luxembourgoise). Et encore, seulement quelques heures dans la journée, dans le sens des pointes. Ce tronçon-là restera aléatoire car son débit, contraint au Luxembourg par les nœuds autoroutiers et l’entrée de ville, ne sera pas modifié. En dehors de cela, malgré des risques de ralentissement inhérents à toute traversée urbaine, les temps de parcours restent fiables.
Si l’on prend le cas extrême où un automobiliste effectuerait une vitesse moyenne de 90 km/h au lieu de 110 km/h (cas extrême qui n’arrive jamais, des ralentissements ponctuels ne faisant pas une vitesse moyenne). Au bout de 50 kilomètres, le temps perdu est de 6 minutes. A comparer avec ne serait-ce qu’une entrée de ville, où l’aléa est plus important, et ce sur moins de 3 km !
Si une forte circulation peut être mal ressentie par certains automobilistes, en revanche on ne peut donc pas identifier de problème susceptible de générer des pertes pour l’économie. (Du moins cela suppose-t-il que les employeurs ne comptent pas utiliser l’autoroute en excès de vitesse, auquel cas l’exercice est effectivement délicat ; l’importante proportion des véhicules d’entreprise, notamment utilitaires, parmi les véhicules en net excès, responsables de nombreux ralentissement brutaux et dangereux, laisse à réfléchir sur cette boutade. On ne fait pas des autoroutes pour rendre possible des excès de vitesse.)
Au contraire, comme nous l’avons déjà-dit, c’est l’A31 dans sa configuration actuelle – gratuite, accessible depuis les villes et par ses nombreux échangeurs – qui a fait l’économie de la Lorraine jusqu’à présent, preuve de son bon fonctionnement. Il suffit de comparer le bouillonnement économique respectif des abords de l’A31 à ceux de l’A4 (payante, celle-ci) pour s’en rendre compte. Pas de temps de gagné mais une gratuité confisquée… L’économie locale aurait tout à perdre de l’A31bis. Alors pourquoi le bloc MEDEF – CCI – BTP défend la thèse inverse ? Parce qu’ils sont ligués pour les intérêts particuliers du très influent secteur du BTP, ce dernier comptant sur une importante activité sur plusieurs années et surtout les juteuses concessions à la clé.
Le raisonnement précédent (temps de parcours A31 vs temps de parcours en ville) rappelle quant à lui que l’A31 est finalement… le seul itinéraire où le temps de parcours est fiable ! (Tout au moins aux heures de pointe ; cela s’explique par l’importante urbanisation du sillon). Alors certes l’autoroute est quelque part victime de son succès, mais personne ne peut l’accuser de porter préjudice à l’économie lorraine.