Avis n°283
Rendre l’A31 fluide. Chiche ?
le ,Nous publiions récemment un petit billet expliquant pourquoi l’amélioration des temps de parcours et de la fiabilité de ceux-ci était peu possible – car ceux-ci, malgré l’importance du trafic ne sont pas dégradés, à part le tronçon frontalier et lors d’incidents de toute façon inévitables. Pour autant, même si cela ne concerne pas l’ensemble du linéaire, il est incontestable que même sans perde de temps chiffrable, l’A31 n’est pas fluide. Mais l’approche telle qu’elle est expliquée par le Maître d’Ouvrage se limite à rapporter un débit journalier à un nombre de voies, et estimer le niveau d’engorgement.
Si l’on se doute que les techniciens sont bien plus précis en coulisses, ce raisonnement fait état de deux erreurs. D’une part la non-prise en compte de la répartition du trafic dans la journée, d’autant que dans le cas précis de l’A31, la prépondérance des flux locaux crée de très forts phénomènes de pointe (si le trafic et quelques études par tranche horaire sont effectivement détaillés dans le Dossier du Maître d’Ouvrage, les conclusions restent généralistes, et donc faussées, notamment au nord de Thionville). D’autre part, le débit d’une autoroute telle que l’A31 (aux nombreux échangeurs) n’est pas contraint par le nombre de voies d’une section courante, mais par la configuration et le trafic des échangeurs, principaux obstacles. Or, la pratique de l’A31 montre que c’est aux abords des échangeurs que se concentre l’essentiel des formations de ralentissements et de sentiment d’insécurité. Certains ralentissements sont provoqués par des rétrécissements : au niveau de Bouxières-aux-Dames, de part et d’autres de l’échangeur d’Illange ou en amont de la frontière (sens sud-nord). Sur les « sorties », certaines d’entre-elles génèrent des remontées de files qui se répercutent sur l’autoroute, ou provoquent tout au moins des différentiels de vitesse dangereux. Celles-ci sont situées essentiellement dans les traversées urbaines. En outre, beaucoup de voies d’accélération et de décélération sont trop courtes (en particulier les échangeurs thionvillois et surtout sur les aires de repos). Ce sont ces détails qui créent le sentiment d’autoroute sous-dimensionnée et dangereuse.
Mais c’est surtout au niveau des grands échangeurs autoroutiers que naissent les ralentissements. Quels sont-ils ? La croix d’Hauconcourt (A31/A4), et dans une moindre mesure l’échangeur Origine (A31/A33) ou le triangle de la Fensch (A31/A30 ; malgré une très nette amélioration suite aux travaux d’élargissement en amont de la bifurcation en 2008). Dans le sillon lorrain mais hors A31, l’échangeur de Ludres est également très préoccupant tant en terme de ralentissement que de sécurité, et dans une moindre mesure le raccord N431/A31 et D955/N431.
Dans l’ensemble des cas cités, le problème est avant tout du à des voies d’insertion trop courtes ou des rétrécissements trop tôt. Dans les cas les plus extrêmes (Hauconcourt, Ludres et les deux échangeurs « à lunettes » de la N431), c’est la configuration même des échangeurs qu’il faudrait revoir entièrement pour remédier aux problèmes de goulot d’étranglement et d’insécurité, par la création (ou remplacement) de bretelles.
A noter qu’hors sur les traversées urbaines (dont la déviation n’est pas susceptible d’apporter d’amélioration notable aux heures de pointe), le projet A31 bis ne traite pas de ces problèmes. Au contraire, de ce point de vue-ci, la situation serait aggravée à plusieurs endroits par la création d’échangeurs nouveaux ou l’utilisation plus intensive d’existants. Au raccordement de Dieulouard (3 voies de chaque côté de l’A31 ce qui créerait une insertion difficile). Au raccordement de Fameck sur l’A30 (la configuration des lieux laisse peu de place pour créer des larges bretelles, ce qui créera des problèmes du même type qu’à Hauconcourt. Le raccordement de Bétange (4 voies s’emmanchant dans 3 sur la section la plus critique aux heures de pointe). La croix d’Hauconcourt (davantage sollicité par la déviation par Metz-est, coupant la continuité autoroutière). L’échangeur de Féy (problème empiré par l’obstacle de 2 giratoires successifs sans reconfiguration totale ; un risque de discontinuité autoroutière même en cas de reconfiguration). Aggravation des conséquences des remontées de files sur l’échangeur de la FIM sur la N431, celles-ci débordant quotidiennement sur la rocade.
Si la problématique des échangeurs n’est pas éludée par le Maître d’Ouvrage, la question n’est en revanche pas traitée ; nous n’avons aucune idée de comment pourrait être revus les échangeurs, ni même lesquels seraient effectivement traités... Alors qu’il s’agit de la clé de voûte de la problématique de fluidité, bien plus que le nombre de voies ! Et qu’une restructuration d’échangeur, compte-tenu des importantes contraintes du site, peut nécessiter un budget du même ordre qu’un élargissement d’un tronçon complet. Ce qui laisse peu d’espoir sur des travaux d’envergure efficace.
Reste que les problématiques de déplacements autoroutiers du sillon lorrain ne sont pas nécessairement alignées sur le trajet même de l’A31. Ne réfléchir qu’à la continuité du trajet Gye – frontière ne peut que conduire à traiter la problématique du transit, parfois au détriment des locaux (le meilleur exemple étant celui de l’A33, plus fréquentée et sous-dimensionnée que l’A31 dans la traversée nancéienne, laissée à l’écart alors qu’elle est un maillon essentiel de la circulation du sillon). Lorsque le trafic est élevé, même un élargissement ne peut être efficace qu’à condition qu’il n’y ait pas d’obstacle de part et d’autres. Pour le reste, comment veut-on régler des problèmes d’engorgement d’échangeurs en ajoutant des routes sur des itinéraires minoritaires, en laissant le reste en l’état ? On veut rendre l’A31 plus fluide ? Qu’on traite en priorité les points de difficulté !