Les notes d’actualité
nécessairement incomplètes, ne visent qu'à donner quelques impressions
de séance à l'attention de ceux qui souhaitent suivre l'actualité du
débat en temps réel. Seule la restitution complète de la réunion, à
venir dans quelques jours, fera foi. Ces notes d’actualités sont
stockées au fur et à mesure dans la rubrique : "notes d’actualité
archivées".
Réunion thématique de Pontoise, le 14 juin
Les nuisances et les risques une nouvelle fois au cœur du débat La
réunion de Pontoise du 14 juin, animée par Sophie Allain, a constitué
le second volet de la thématique consacrée aux nuisances et aux
risques. Cette thématique a pour objectif de débattre de façon
transversale de l’ensemble des nuisances et des risques engendrés par
l’autoroute pour les populations riveraines, - c’est-à-dire la gêne
comme les répercussions sur la santé ou sur la sécurité -, des mesures
susceptibles de limiter ces nuisances et ces risques, ainsi que des
perspectives d’amélioration de la sécurité routière. La réunion,
consacrée à la sécurité et à la pollution de l’air, a reposé sur des
exposés d’experts, invités par la CPDP ou par le maître d’ouvrage, des
informations du maître d’ouvrage sur les études réalisées dans le
dossier ou sur des études complémentaires réalisées depuis l’ouverture
du débat, et des temps de débat avec le public.
Séquence n°1 – La sécurité
La séquence consacrée à la sécurité a porté essentiellement sur la
sécurité routière. L’objectif était de répondre à la question suivante
: le tronçon d’autoroute de la Francilienne envisagé peut-il améliorer
et garantir la sécurité routière dans la zone du projet ?
Les perspectives du projet d’autoroute en matière de sécurité routière
Lionel Patte, de la DREIF, a commencé par présenter l’étude réalisée
dans le cadre du dossier, complétée par des statistiques d’accidents
relatives à l’A1 et à l’A86 notamment, infrastructures importantes dans
le trafic de la région Ile-de-France. L’analyse des accidents
intervenus pendant la période 1999-2003 sur le réseau routier
considéré, comprenant 27 routes sur un linéaire total de 379
kilomètres, montre l’importance des enjeux de cette zone en terme de
sécurité routière, puisque plus de 6000 accidents ont été dénombrés,
dont plus de 200 mortels. Les zones les plus accidentogènes se trouvent
sur les autoroutes A1, A4 et A86, sur la RN184 et sur un certain nombre
de départementales traversant des environnements urbains ; les
autoroutes font néanmoins surtout l’objet d’accidents légers.
L’estimation de l’impact du projet d’autoroute envisagé sur la sécurité
routière fait apparaître une réduction de l’insécurité, - appréciée en
terme de risque individuel -, à l’horizon 2020, quels que soient les
tracés, par rapport à un scénario tendanciel sans aménagement ; cette
réduction est plus marquée pour le tracé noir que pour les autres
tracés. Par contre, cette étude met en évidence une augmentation du
coût total de l’insécurité pour tous les tracés ; ce second indicateur
est un indicateur synthétique permettant de tenir compte à la fois du
nombre d’accidents et de leur gravité en monétarisant ceux-ci ; là
encore, le tracé noir se trouve mieux placé que les autres.
L’amélioration globale de la sécurité routière sur le tracé noir
s’explique par l’insécurité importante de la RN184 aujourd’hui. Lionel
Patte a précisé que l’étude ne tient pas compte des possibilités de
requalification de certaines portions de route, et notamment de la
RN184, ni de tous les reports de trafic, à partir de voies très
secondaires en particulier.
Le public s’est inquiété de l’augmentation des accidents dans la zone.
Ainsi, Maryline Chivé, habitante de Carrières-sous-Poissy, s’est
exclamée : « j’habite dans la zone d’étude et je veux moins d’accidents
et moins de voitures chez moi ! ». Eric Debarle, chef de mission A104 à
la DREIF, a cherché à rassurer le public, en expliquant que,
globalement, le trafic n’augmenterait pas, dans la mesure où une partie
des véhicules empruntant aujourd’hui l’A86 et l’A13 opteraient pour un
passage par l’A15 et par l’A104, en cas de réalisation du projet. Il a
par ailleurs fait observer que l’indicateur le plus intéressant pour
apprécier les perspectives d’un projet routier en matière de sécurité
routière, c’est le risque individuel : « il vaut mieux avoir trois
risques pour mille d’avoir un accident qu’avoir un risque d’accident de
deux pour dix ». Il a précisé que le nombre d’accidents est néanmoins
un indicateur important pour le Ministère de l’Equipement, car il
permet de repérer des situations anormales qui peuvent mettre en cause
les caractéristiques de l’infrastructure et donc nécessiter des
aménagements. Globalement, le maître d’ouvrage a insisté sur le
caractère plus sûr des autoroutes par rapport aux autres voies
routières : si les autoroutes représentent seulement 1% du linéaire
routier, elles comptent certes 5% des accidents, mais absorbent 20% du
trafic.
Joël Tissier, maire-adjoint de Maurecourt, a néanmoins demandé : «
est-il nécessaire de dépenser 2 milliards d’euros pour faire une RN184
qui fonctionne bien au niveau sécurité, ou faut-il commencer par
essayer d’optimiser l’existant, c’est-à-dire des carrefours qui
fonctionnent bien et qui ne soient pas accidentogènes, avant de se
lancer dans un grand projet ? »
La sécurité dans les tunnels
Pour répondre aux interrogations apparues au cours du débat concernant
la sécurité dans les tunnels, la CPDP avait invité Michel Deffayet,
directeur du Centre d’Etude des Tunnels. Celui-ci a tout d’abord
rappelé que cette question « n’est pas une problématique typiquement
française, mais largement européenne, pour ne pas dire mondiale ». Il a
indiqué que c’est sur les tunnels supérieurs à 300 mètres que se
concentrent les efforts en matière de sécurité, du fait des difficultés
d’échappement par les extrémités qui se font sentir à partir de cette
longueur, ce qui concerne environ 200 tunnels sur les 900 existants en
France. Il a souligné que, dans les tunnels, ce n’est pas la sécurité
routière qui pose prioritairement problème en matière de sécurité, mais
le contrôle des risques d’incendie. En effet, les taux d’accident dans
les tunnels, – tous types de voies routières confondus -, sont proches
de ceux enregistrés sur les autoroutes, car les conducteurs font preuve
d’une plus grande prudence. A contrario, si le risque d’incendie est
rare, il peut s’avérer catastrophique, comme l’a montré l’accident
survenu dans le tunnel du Mont-Blanc en 1999. Cet évènement a toutefois
permis de faire considérablement évoluer la réglementation tant
française qu’européenne et d’introduire des dispositions visant à
assurer la fluidité du trafic dans le tunnel en cas d’accident, à
favoriser l’évacuation des personnes et l’intervention des secours, et
à contrôler la circulation des fumées.
Répondant à une question de Jean-Claude Mussotte, vice-président de
l’association des Colibris à Herblay, sur l’intérêt comparé de deux
tubes parallèles côte à côte ou superposés, Michel Deffayet a indiqué
que les deux solutions étaient équivalentes, l’important étant de
séparer les deux sens de circulation, et de veiller à l’aménagement
d’issues de secours tous les 200 mètres, pour regagner la surface ou
accéder à une autre galerie. Eric Debarle a précisé que, dans le cas du
projet d’autoroute de la Francilienne, tout tunnel comporterait deux
tubes et que ces deux tubes accepteraient à la fois poids lourds et
véhicules ; de ce fait, des dispositifs puissants de ventilation
seraient installés pour tenir compte de la vigueur plus forte d’un
incendie lorsque des poids lourds sont aussi concernés.
Hubert Biteau, maire adjoint de Conflans Sainte-Honorine, s’est pour sa
part enquis de la réglementation de la circulation en vigueur dans les
tunnels. Michel Deffayet a indiqué qu’il n’existait pas de
réglementation unique en la matière au niveau national, et que chaque
cas faisait l’objet d’une étude spécifique ; il a néanmoins précisé que
les transports de matières dangereuses sont interdits dans les tunnels
en Ile-de-France.
Roselle Cros, maire adjoint de Saint-Germain-en-Laye, s’est, elle,
informée, des emprises au sol nécessaires aux aménagements des issues
de secours. Eric Debarle a précisé que ces sorties doivent être
prévues, outre tous les 200 mètres, dans les deux sens de circulation,
et qu’elles occupent une surface légèrement supérieure à deux abribus.
Il a ajouté qu’il convenait aussi de tenir compte de la construction de
locaux de ventilation, d’une taille un peu plus importante, tous les
400 à 800 mètres.
Séquence n°2 – La pollution de l’air
La seconde séquence de la soirée, consacrée à la pollution de l’air,
avait pour objectif d’informer le public sur les impacts sanitaires de
la pollution de l’air et sur les moyens de protection existants, ainsi
que de répondre à la question suivante : les risques sanitaires liés à
la pollution de l’air engendrée par le tronçon d’autoroute de la
Francilienne envisagé sont-ils acceptables, à quelles conditions ?
Les risques sanitaires liés à la pollution de l’air engendrée par les transports routiers
• Mireille Chiron, chercheur à l’Institut National de Recherche sur les
Transports et leur Sécurité, a commencé par brosser un tableau des
risques sanitaires encourus par les populations du fait de la pollution
de l’air. Elle a précisé qu’elle s’exprimait du point de vue de
l’épidémiologie, discipline qui étudie les rapports existant entre les
maladies et les facteurs susceptibles d’exercer une influence sur leur
fréquence, leur distribution, leur gravité ou leur évolution. Cette
discipline cherche ainsi à répondre à des questions telles que les
personnes les plus exposées sont-elles plus nombreuses à être malades,
ou plus souvent malades, ou plus gravement malades ; les malades
sont-ils plus nombreux à avoir été exposés, sont-ils plus exposés en
moyenne ? Elle permet de mettre en évidence des facteurs de risque.
De manière globale, la pollution de l’air (particules et fumées noires,
dioxyde de soufre, dioxyde d’azote, monoxyde de carbone, ozone et
oxydants) a des effets à court terme sur la santé, qu’elle augmente les
troubles de la fonction pulmonaire (baisse des performances chez les
sportifs, par exemple), des symptômes respiratoires comme la toux,
l’asthme, les pathologies cardiovasculaires comme l’angine de poitrine,
ou encore la mortalité cardio-pulmonaire. Le programme national de
surveillance des effets sur la santé de la pollution de l’air conduit
par l’Institut de Veille Sanitaire et portant sur neuf villes
françaises (Bordeaux, Le Havre, Lille, Lyon, Marseille, Paris, Rouen,
Strasbourg et Toulouse) permet de préciser le risque de mortalité selon
l’augmentation du taux de pollution de l’air : il met par exemple en
évidence une augmentation de mortalité d’environ 1% pour une hausse de
la teneur en particules dans l’air de 10 micro-grammes par mètre cube,
le jour du décès et dans une courte période précédent celui-ci. La
relation entre concentrations journalières de polluants et effets
sanitaires est linéaire et il n’existe pas d’effet de seuil : chaque
dose supplémentaire accroît les effets.
La pollution de l’air a également des effets à long terme. La mortalité
à long terme résulte soit d’un cumul de décès attribuables à des effets
de court terme (augmentation de la mortalité chez les personnes
souffrant d’insuffisance respiratoire ou mortalité d’origine
cardio-vasculaire), soit de décès attribuables à des effets sanitaires
cumulatifs (apparition d’un cancer ou d’une maladie respiratoire
chronique). Une étude de l’OMS de 1999 met ici en évidence une
augmentation de la mortalité à long terme d’environ 4% pour une hausse
de la teneur en particules fines (PM10) dans l’air de 10 micro-grammes
par mètre cube.
Mireille Chiron a souligné que la part des polluants d’origine routière
dans l’exposition des populations est beaucoup plus importante que leur
part dans les émissions : en effet, s’il existe d’autres sources de
pollution de l’air que les transports routiers, cette dernière source
se trouve en dessous de nos voies respiratoires alors que les autres se
trouvent en hauteur et que leurs émissions sont beaucoup plus
dispersées. Elle a par ailleurs insisté sur la différence importante de
risques sanitaires pour les populations selon la distance de leurs
habitations par rapport à l’autoroute : la pollution de l’air a une
influence notable jusqu’à 100 mètres ; une étude hollandaise de 2002
montre ainsi que la mortalité est augmentée de 50% à moins de 100
mètres d’une autoroute ou à moins de 50 mètres d’une voie à fort trafic.
Elle a conclu son exposé en rappelant les points importants suivants :
les risques sanitaires liés à la pollution de l’air existent ; il
s’agit de risques individuels faibles, mais concernant des populations
importantes (l’ensemble des populations urbaines, soit 2/3 de la
population française) et il existe par ailleurs des groupes à risques
(enfants, personnes âgées, personnes souffrants d’insuffisance
respiratoires ou cardiaques). Dans la mesure où il n’y a pas d’effet de
seuil, - c’est-à-dire où, d’un point de vue sanitaire, si on souhaitait
qu’il y ait zéro risque, il faudrait qu’il y ait zéro polluant dans
l’environnement -, « le risque acceptable est uniquement une décision
politique ».
• Le pédiatre Philippe Vial, habitant d’Herblay, a ensuite apporté des
compléments concernant les effets de la pollution de l’air sur la santé
des jeunes enfants. En effet, parce que « le rôle des pédiatres dans la
société, c’est bien sûr de soigner les enfants, mais aussi de défendre
leurs intérêts, leur position et leur place dans la société », le
médecin a souhaité « introduire dans ce débat cet acteur qu’est
l’enfant ». Il a souligné que l’on observe depuis 25 ans une
augmentation considérable et en continu de deux pathologies
respiratoires importantes dans cette population, la bronchiolite du
nourrisson et l’asthme du jeune enfant (nombre de cas de plus en plus
élevé, début d’apparition de plus en plus précoce, sévérité plus
grande), et corrélativement des traitements médicamenteux de plus en
plus sophistiqués et lourds. Si tous les polluants de l’air sont
responsables de cette situation, les particules fines constituent un
facteur de risque prépondérant, et ce d’autant plus que leur taille est
réduite et qu’elles sont donc en mesure de pénétrer plus profondément
dans l’arbre respiratoire. Le docteur Philippe Vial a insisté sur le
rôle du trafic routier dans cette situation, en faisant référence à une
étude américaine conduite pendant les Jeux Olympiques d’Atlanta en
1996, au cours desquels le centre ville a été fermé à la circulation
automobile : comparant la demande de soin pour crises d’asthmes chez
des enfants résidents d’Atlanta de 1 à 16 ans avant et pendant les JO,
l’étude a mis en évidence une très grande réduction de la demande dans
le second cas. Le médecin s’est enfin inquiété des incertitudes
relatives aux performances des filtres à particules qui devraient être
mis en service sur les véhicules diesel ; si cette introduction « peut
permettre une diminution significative des émissions de particules de
type PM10, elle pourrait générer des émissions de particules
ultrafines, capables de traverser des barrières alvéolaires, et dont
les effets sur la santé ne sont pas encore tous établis ».
Sébastien Lanza, habitant de l’Ile des Migneaux, a alors remis à la
CPDP un CD-rom comportant une ensemble d’informations (études
médicales, rapports et lettres) mettant en évidence les impacts de la
pollution de l’air sur la santé.
La prise en compte des risques sanitaires liés à la pollution de l’air dans le projet d’autoroute de la Francilienne
Mireille Lattuati, du bureau d’étude Scetauroute chargé de la
réalisation du « volet air » du dossier, a tout d’abord rappelé les
grandes étapes de l’étude : caractérisation de la qualité de l’air
actuelle dans la zone concernée par le projet ; estimation par
modélisation de la concentration en polluants à l’horizon 2020 pour les
différents tracés et pour une situation tendancielle sans réalisation
de l’autoroute (modélisation des émissions de polluants, puis de leur
dispersion) ; calcul d’un indicateur sanitaire, l’Indice Pollution
Population (IPP), permettant de comparer les différents tracés eu égard
à l’impact de l’infrastructure sur la population ; évaluation des coûts
de la pollution de l’air et de l’effet de serre.
• Jean-Louis Plazy, directeur adjoint de l’Air, du Bruit et de
l’Efficacité énergétique à l’Agence de l’environnement et de la
maîtrise de l’énergie, a alors apporté un éclairage sur l’évolution de la pollution de l’air
et sur les méthodes de modélisation permettant d’estimer les
concentrations en polluants dans l’air. Il a ainsi indiqué que, depuis
1990, on assiste globalement à une réduction assez sensible de la
concentration d’un certain nombre de polluants, la situation devant
néanmoins être précisée composant par composant. Il a par ailleurs fait
valoir que des progrès importants ont été faits et continuent d’être
faits sur les véhicules du fait de l’évolution de la législation
européenne, les progrès étant toutefois plus récents pour les poids
lourds que pour les automobiles. Jean-Louis Plazy a ensuite présenté le
logiciel IMPACT 2.0 mis au point par l’ADEME pour modéliser les
émissions de polluants et utilisé par Scetauroute pour réaliser son
étude. Il a expliqué que ce logiciel tient compte d’un parc automobile
composite, formé de différents types de véhicules d’âges différents et
présentant donc des caractéristiques d’émissions différentes. Il a
ensuite montré les résultats d’une estimation de la pollution de l’air
engendrée par la réalisation d’une rocade dans une ville moyenne à
l’horizon 2020, effectuée à l’aide de ce logiciel.
L’expert de l’ADEME a enfin souligné que, sur le plan de la
construction automobile, « on a atteint un seuil où l’on est en conflit
entre les émissions de gaz carbonique et les émissions de polluants » ;
on devra donc « trouver le bon équilibre entre la lutte contre l’effet
de serre d’un côté (la pollution planétaire) et la lutte contre la
pollution locale de l’autre ». Il a également insisté sur les
nombreuses incertitudes concernant la pollution de l’air (équilibres
entre oxydes d’azote et ozone, évolution des particules très fines…).
Présentant alors les résultats de son estimation des concentrations de
polluants à l’horizon 2020 dans le cas du projet d’autoroute de la
Francilienne, Mireille Lattuati a mis en évidence une diminution
globale des concentrations en monoxyde de carbone, benzène, PM10 et
dioxyde de carbone à l’échelle de la zone d’étude et à cet horizon,
avec ou sans tracé. Elle a précisé que pour les deux premiers
polluants, les concentrations devraient ainsi être inférieures aux
objectifs de qualité, alors que pour les deux seconds, elles devraient
être supérieures à ces objectifs de qualité à proximité des axes de
routiers, mais qu’au-delà de 200 mètres, l’impact des polluants ne se
ferait de toute façon plus sentir. Face aux vives réactions du public,
Jean-Louis Plazy est intervenu pour confirmer qu’à circulation égale,
la pollution de l’air devrait effectivement globalement diminuer d’ici
2020 dans la zone d’étude ; « par contre », a-t-il ajouté, « si vous
vous trouvez à un endroit où il n’y a pas de voitures, et qu’on vous
ramène une voiture près de chez vous, il est clair que vous aurez une
augmentation de la pollution locale près de chez vous ». Il a par
ailleurs souligné que les mécanismes de dispersion des polluants sont
mal connus.
Eric Debarle a ensuite fait état d’une étude complémentaire réalisée
par le Centre d’études techniques de l’Equipement de Lille et présentée
par Christine Bugajny. Cette étude, qui peut se retrouver sur le site
internet du débat, confirme globalement l’étude effectuée par
Scetauroute.
Claude Boiteau, du COPRA d’Orgeval, a fait observer au maître d’ouvrage
que la lecture de l’étude relative à la pollution de l’air est ardue :
« quand on veut aller dans le tableau du dossier, c’est un grand
mystère. Il y a des chiffres partout, des tableaux immenses avec des
microgrammes des différents polluants, auxquels on ne comprend rien ».
Il lui a demandé que, comme pour le bruit, de nouvelles mesures soient
effectuées permettant de mieux apprécier l’état initial. Eric Debarle a
alors rappelé comment les mesures de pollution de l’air avaient été
réalisées.
• Mireille Lattuati est à nouveau intervenue pour expliquer comment avait été apprécié l’impact de la pollution de l’air engendré par l’autoroute sur les populations.
Elle a tout d’abord précisé que l’indicateur retenu, l’IPP, permet de
calculer l’exposition des populations à différents polluants d’origine
routière et qu’une bande de 300 mètres de part et d’autre des axes
routiers de la zone d’étude avait été prise en compte. Elle a ensuite
indiqué que l’étude réalisée montre qu’aucune population ne devrait
être soumise à des teneurs supérieures aux objectifs de qualité pour
les PM10 et pour le benzène, et que seulement 1% de la population
devrait être soumise à un dépassement de l’objectif de qualité pour le
dioxyde d’azote à l’échelle de la zone d’étude. Eric Debarle a ajouté
que la nouvelle étude effectuée montrait des résultats similaires pour
le benzène, mais que davantage de personnes devraient être affectées
par les particules fines et par le dioxyde d’azote.
Pour Mireille Chiron, « cette démarche de rapprocher la population à
son exposition est intéressante ; c’est la première étape de
l’évaluation des risques sanitaires ». Mais, « ensuite, il faut aller
au bout de la démarche ».
Joël Tissier, adjoint au maire de Maurecourt, a alors entrepris une
critique de l’étude réalisée par le maître d’ouvrage. Il a tout d’abord
fait observer que la caractérisation de l’état initial avait été faite
conformément à des recommandations minimales, sans explication de ce
choix, et que les mesures semblaient davantage viser à caractériser la
qualité de l’air de la zone d’étude que l’état initial près des tracés
envisagés. Se concentrant surtout sur les études concernant la
pollution de l’air engendrée par l’autoroute et ses répercussions sur
les populations, Joël Tissier a regretté que le maître d’ouvrage n’ait
conduit qu’une étude d’impact de niveau 2 ; en effet, selon lui, la
charge de trafic prévue (près de 100 000 véhicules par jour) et la
population résidant dans la zone d’étude (plus de 100 000 personnes)
auraient justifié une étude d’impact de niveau 1, qui implique une
étude complète des risques sanitaires. Pour l’élu, « on détermine
d’abord un tracé, et, une fois qu’il est choisi, on se donne les moyens
pour savoir si c’était le meilleur en termes sanitaires ; sauf, que
c’est trop tard ». Joël Tissier a par ailleurs souligné qu’aucune
analyse d’incertitude n’a été effectuée, alors même que le rapport
précise que « les résultats sont à interpréter avec précaution, compte
des incertitudes inhérentes à ce type d’estimations ».
Ce dernier point a abondamment été relayé par Yorghos Remvikos, des
Amis du Vexin, qui a insisté sur les multiples sources d’incertitude
existant dans l’estimation de la pollution de l’air, au niveau tant des
mesures que de la modélisation. Le représentant associatif a également
rappelé que, du point de vue de la santé publique, plus on pourra
réduire la pollution de l’air, mieux ce sera, et que cela est à mettre
en balance avec l’intérêt économique du projet.
Jean-Pierre Dejou, président du COPRA 184, a alors lu un texte de son
conseil, Maître Corinne Lepage, empêchée par un impondérable. Celle-ci
considère que « les différentes variantes qui sont proposées sont
toutes, à l’exception d’un tracé, en contradiction flagrante avec les
documents PRQA et PPA d’une part et avec les normes européennes et
françaises d’autre part ». En particulier, elle fait valoir que les
normes prises en comptes sont celles existant en 2002, alors que des
normes beaucoup plus sévères seront en vigueur en 2010 (pour le dioxyde
d’azote et pour les particules fines) et que le projet est évalué pour
2020. Dans ces conditions, le calcul qui a été fait de l’IPP « est
totalement faux ». Maître Corinne Lepage souligne par ailleurs le coût
très élevé de la pollution atmosphérique dans le projet (240 000 € par
jour en moyenne), soit un coût annuel de 87 600 000 € ; elle fait
observer que « pour contrecarrer un tel coût de 87 M€ qui vont être
supportés directement par la population et la Sécurité sociale, il
conviendrait que l’Etat puisse avancer un avantage collectif au minimum
supérieur à cette somme ».
Concernant ce dernier point, Eric Debarle a expliqué que le coût de la
pollution atmosphérique figurant dans l’étude ne porte pas que sur le
projet mais sur l’ensemble de la zone d’étude et qu’il doit être
apprécié de manière relative. Revenant sur d’autres critiques, il a
souligné que c’est peut-être le seul débat public où ont été diffusées
en même temps que le dossier du maître d’ouvrage l’ensemble des études
réalisées pour constituer celui-ci, et que l’on ne peut pas attendre le
même niveau de vulgarisation pour ces études que pour le dossier. Il a
enfin justifié le choix d’une étude d’impact de niveau 2, en faisant
valoir qu’une telle étude « s’arrête au moment où il s’agit de comparer
les variantes », et que « dans un débat public, on en est bien là ».
Les moyens de limitation des risques sanitaires liés à la pollution de l’air engendrée par les transports routiers
Michel Deffayet a tout d’abord rappelé que le tunnel peut jouer un rôle
bénéfique dans la limitation des effets de la pollution de l’air, dans
la mesure où il « peut permettre d’éviter de renvoyer de la pollution
là où ne voudrait pas en avoir et par contre de choisir les lieux où
l’on va la faire sortir » ; il convient toutefois de concevoir et de
dimensionner les cheminées correctement pour que le panache de produits
pollués n’affecte pas la population située à proximité. Faisant le
point sur les systèmes de traitement de l’air pollué avant rejet,
encore peu utilisés ou à l’état expérimental, le directeur du CETU a
indiqué que les filtres électrostatiques sont surtout efficaces pour
piéger les particules les plus grosses et sont donc pour le moment
réservés à des contextes particuliers (traitement de l’air intérieur
dans des tunnels de grande longueur, par exemple) ; quant aux
dispositifs de traitement des polluants gazeux, il n’existe pas de
retour d’expérience en cas réel, la difficulté semblant toutefois être
que la dilution de l’air nuirait à la qualité du traitement.
Enfin, Marc Denis, des Verts d’Ile de France, a souligné que le
problème du réchauffement climatique constitue « le défi majeur du
21ème siècle » et que « cela doit nous amener à réfléchir et réorienter
notre politique de transport ». Jean-Claude Roude, de PROFILE, a pour
sa part réaffirmé que « la réalisation d’une infrastructure nouvelle
adaptée est de toute façon préférable au maintien de la situation
actuelle ». La séance, très riche en informations et en arguments, a
été levée à 1H30.
Réunion thématique de Conflans-Sainte-Honorine, le 23 mai
Les nuisances et les risques au cœur du débat
La réunion conflanaise du 23 mai, animée par Sophie Allain, a
constitué le premier volet de la thématique consacrée aux nuisances et
aux risques. Cette thématique a pour objectif de débattre de façon
transversale de l'ensemble des nuisances et des risques engendrés par
l'autoroute pour les populations riveraines, - c'est-à-dire la gêne
comme les répercussions sur la santé ou sur la sécurité -, des mesures
susceptibles de limiter ces nuisances et ces risques, ainsi que des
perspectives d'amélioration de la sécurité routière. La réunion,
consacrée au bruit et à l'eau, a reposé sur des exposés d'experts,
invités par la CPDP ou par le maître d'ouvrage, des informations du
maître d'ouvrage sur les études réalisées dans le dossier, et des temps
de débat avec le public.
En préambule, Philippe Esnol n'a pas manqué de rappeler que
cette thématique concernait sa commune au premier chef. Le maire de
Conflans a profité de l'occasion pour réaffirmer, comme il l'avait fait
lors de la réunion de proximité, la nécessité d'« un véritable bouclage
de la Francienne », seul capable de réduire les problèmes de
circulation et d'éviter un engorgement à Orgeval au débouché sur l'A13.
Evoquant le manque d'intérêt suscité par le tracé violet, il a fait
observer qu'« il y a de fortes chances que l'on reste dans les tracés,
malheureusement, qui nous concernent au premier chef et qui sont loin
de faire l'unanimité ». « Si tel était le cas », a-t-il poursuivi, « je
dois avouer, car j'en ai beaucoup entendu parler ces derniers temps,
qu'un tracé qui envisagerait un passage souterrain avec un tunnel
extrêmement long mériterait qu'on le regarde avec attention. Pour de
nombreuses villes du secteur, ce serait une solution "moins pire" que
celle qu'on peut nous proposer ».
Séquence n°1 - Le bruit
La séquence consacrée au bruit avait pour objectif d'informer le
public sur les impacts sanitaires du bruit et sur les moyens de
protection phoniques existants, ainsi que de répondre à la question
suivante : pourrait-on se protéger efficacement contre le bruit généré
par le tronçon d'autoroute de la Francilienne envisagé ?
Didier Cattenoz, de la Mission Bruit du ministère de
l'Ecologie et du Développement durable, a rappelé que c'est au maître
d'ouvrage qu'il incombe de prendre les dispositions nécessaires pour
que les nuisances sonores affectant les populations riveraines d'une
nouvelle infrastructure soient limitées à des niveaux compatibles avec
les normes existantes, 60 dB de jour et 55 dB de nuit. Il a précisé
que, selon les textes en vigueur, c'est un traitement à la source qui
est privilégié, c'est-à-dire directement au niveau de l'infrastructure.
Richard Durang, de la DREIF, a ensuite présenté les différents
points sur lesquels il est possible d'agir pour atténuer le bruit à la
source : la distance, le tracé en long, l'altitude et le revêtement de
chaussée. Eric Debarle, chargé de mission A104 à la DREIF, a complété
cet exposé en montrant les différents modes de protections phoniques
existants, à l'aide de diapositives projetées dans la salle.
A une question concernant les progrès possibles en matière de
réduction de bruit à la source, Richard Durang a expliqué que si les
revêtements se perfectionnent, le problème se pose néanmoins de la
tenue dans le temps des couches de roulement ; Didier Cattenoz a pour
sa part fait remarquer que, si l'on peut s'attendre à une réduction du
bruit des moteurs à l'avenir, c'est le bruit de contact des pneus sur
la chaussée qui domine au-delà de 50 à 60 km/h.
Enfin, Nicolas Grenetier, de la Direction Générale de la Santé au
Ministère de la Santé et des Solidarités, a exposé les impacts du bruit
sur la santé. Avant tout, il a rappelé un principe simple : l'échelle
de bruit n'est pas une échelle linéaire ; deux sources de 40dB chacune
produisent un son de 43dB (et non de 80 dB). Il a souligné que les
principaux effets du bruit sur la santé résultent d'une perturbation du
sommeil (à partir de 30 dB, en intérieur, selon les normes de
l'Organisation Mondiale de la Santé), qui engendre des troubles de
comportement (irritabilité, anxiété, perte de vigilance, fatigue
chronique...). En réponse à une question du public faisant observer
l'écart existant entre ce seuil de 30dB et la norme de 55 dB, Nicolas
Grenetier a précisé qu'il convenait de tenir compte de l'isolation
phonique créée par un mur, qui représente environ 25dB, et que seuil de
l'OMS et norme de protection en vigueur étaient donc compatibles.
Toutefois, cela n'est plus vrai lorsque l'on dort fenêtres ouvertes,
puisque le sommeil est alors perturbé dès 45 dB, selon les normes de
l'OMS. Toujours selon ces normes, l'expert a par ailleurs indiqué qu'un
niveau de bruit de 55 dB en zone résidentielle et en extérieur
constitue une gêne sérieuse le jour et en soirée. Il a à cet égard
précisé que la sensation de gêne provoquée par le bruit n'est toutefois
expliquée qu'à 30 ou 40% par le niveau sonore réel : en effet, de
nombreux facteurs non-acoustiques (histoire personnelle, activité en
cours, caractère choisi ou subi du bruit...) interviennent dans la
réaction individuelle. Enfin, Nicolas Grenetier a insisté sur la
nécessité de tenir compte de la multiexposition sonore dans
l'appréciation de l'impact d'une infrastructure.
En complément de cet exposé, Yorghos Remvikos, de
l'association les Amis du Vexin, a pointé un fait important : « nous ne
sommes pas tous égaux » devant le bruit. En effet, la sensibilité au
bruit diffère selon les populations. Chez les enfants notamment, le
bruit n'a pas d'effet sur la qualité du sommeil et sur l'état mental ;
par contre, il provoque des troubles des d'apprentissage (de la
lecture, par exemple) à l'origine de retards de scolarité. Et le
représentant associatif d'interroger : « quelle société pourrait
prétendre que l'investissement sur les générations futures sur la
qualité de leur apprentissage et leur développement intellectuel
passerait au second plan par rapport à l'importance de l'activité
économique ? ».
Suite aux contestations du public quant aux études de bruit
présentées dans le dossier, Eric Debarle a expliqué la manière dont
celles-ci ont été réalisées. Pour connaître le bruit ambiant dans la
zone d'étude, 32 mesures ont ainsi été effectuées, à l'aide d'un
appareil enregistrant le bruit pendant 24 heures, toutes sources
sonores confondues ; 10 nouvelles mesures ont été réalisées,
consécutivement à plusieurs demandes formulées au cours des réunions de
proximité, qui peuvent être trouvées sur le site internet du débat. Par
ailleurs, le bruit moyen que génèrerait l'infrastructure en période
diurne (6H-22H) a été simulé, en se plaçant dans des conditions de
saturation acoustique : autoroute à 2x3 voies, avec un trafic continu
de 1000 véhicules par heure et par voie circulant à 105km/h, dont 20%
de poids lourds. Ces études permettent de dimensionner les protections
acoustiques, en fonction des normes en vigueur.
Au public s'interrogeant sur les critères d'appréciation d'un
« coût disproportionné à l'enjeu » pouvant amener un maître d'ouvrage à
envisager des moyens de protection individuels (isolation de fenêtres
ou de façades), Eric Debarle a fait valoir que les études réalisées
écartent une telle éventualité : en effet, celles-ci montrent que, dans
tous les cas, des moyens de protection collectifs permettraient de
respecter la norme diurne de 60 dB en vigueur. Enfin, au public
s'inquiétant des garanties de protection phonique des riverains par le
maître d'ouvrage, le chargé de mission A104 de la DREIF a expliqué que
c'est au moment de l'enquête publique que les protections phoniques
sont précisément définies et que c'est le cahier des charges annexé à
la Déclaration d'Utilité Publique qui constitue le dossier des
engagements de l'Etat.
Séquence n°2 - L'eau
La seconde séquence de la soirée, consacrée à l'eau, avait pour
objectif de répondre à la question suivante : le tronçon d'autoroute
envisagé peut-il être compatible avec la gestion de la ressource en eau
?
Caroline Lavallart, de la DIREN Ile-de-France, a commencé par
rappeler les enjeux en matière de protection de la ressource en eau
pour le projet d'autoroute de la Francilienne : préserver la ressource
en eau potable, ne pas aggraver les risques d'inondation et ne pas
dégrader les écosystèmes aquatiques, voire reconquérir certains d'entre
eux.
• En matière d'eau potable, Philippe Branchu,
responsable de l'étude sur l'eau du dossier du maître d'ouvrage, a
indiqué que neuf zones de captage sont concernées par la proximité d'un
tracé et que tous les tracés sont intéressés ; les champs captants de
Poissy-les Migneaux (tracés rouge et vert) et d'Achères (tracé bleu)
figurent parmi les zones de captage les plus concernées. Hélène
Schutzenberger, de la DDASS des Yvelines, a précisé que le champ
captant de Poissy-les-Migneaux est constitué de deux forages
moyennement profond (120 m) et d'un forage profond (530 m), mais que
les communes de Poissy et de Carrières-sous-Poissy ne sont alimentées
qu'à 10% par ces forages, 90% de l'eau potable provenant du champ
captant d'Aubergenville. Le champ captant d'Achères comporte, lui, un
forage de faible profondeur (30 m) appartenant à la commune d'Achères
et un forage profond (600 m) appartenant à la SNCF ; il existe des
interconnexions de sécurité entre Achères, Andrésy, Maurecourt,
Chanteloup, Conflans et Neuville.
Concernant la protection de
ces ressources en eau potable, Eric Debarle a fait observer que la
nappe stratégique, - celle dont la qualité est la meilleure et qu'il
convient de réserver à la seule production d'eau potable -, est la
nappe la plus profonde et que celle-ci n'est pas menacée par
l'autoroute, du fait même de sa profondeur. Pour garantir la protection
des forages plus superficiels du champ captant de Poissy-les-Migneaux,
- et notamment ne pas prendre de risques pendant la phase de chantier
-, le maître d'ouvrage a prévu un passage en viaduc au-dessus de l'Ile
des Migneaux ; cet aménagement serait par ailleurs équipé de
dispositifs anti-reversement permettant de protéger tant la nappe que
les riverains en cas d'accident d'un camion transportant des matières
dangereuses par exemple. Pour Eric Debarle, il ne devrait pas y avoir
d'impossibilité technique à la construction d'un tel ouvrage vis-à-vis
de la protection des champs captants, en raison d'une profondeur
limitée des piles, point qui n'a pas convaincu les habitants de l'Ile
des Migneaux.
Denis Faist, maire adjoint d'Andrésy, a alors pointé une
contradiction dans le dossier : alors, que la protection des
écosystèmes aquatiques constitue l'un des objectifs à respecter, et que
l'étang de la Galiotte, qui constitue une zone humide remarquable,
devrait selon l'étude environnementale, être traversé en tunnel pour
pouvoir être préservé, c'est un viaduc qui est envisagé pour le
franchissement de l'Ile des Migneaux. Le maître d'ouvrage a répondu
que, dans une telle situation, où un objectif ne peut être respecté,
des mesures compensatoires sont recherchées : en l'occurrence, le
dossier propose de mieux protéger l'étang voisin des Grésillons, jugé
d'une valeur environnementale supérieure, notamment pour la faune
avicole.
Enfin, répondant aux préoccupations du maire d'Achères et de
la Société des Eaux de Fin d'Oise au sujet des captages superficiels
d'Achères, Philippe Branchu a reconnu que les forages situés les plus à
l'ouest du tracé bleu pourraient souffrir d'une baisse de productivité
si l'infrastructure créait un masque constituant un obstacle à
l'écoulement de l'eau et donc à l'alimentation de ces captages. Il a
expliqué que, dans ce cas, il convenait soit de passer plus en
profondeur dans une couche imperméable, soit de déplacer les ouvrages
de production d'eau potable (en, l'occurrence plus à l'est par rapport
au tracé bleu) ; Eric Debarle a alors fait observer que la première
solution condamnerait la réalisation du tracé bleu en tranchée
couverte.
• C'est pour la commune d'Achères que la question de la compatibilité de l'autoroute avec la gestion des risques d'inondation
s'est le plus posée pendant les réunions de proximité, en raison du
Plan Global d'Aménagement en cours de réalisation. Jean-Marie Proust,
de la DDE des Yvelines, - la DDE est l'administration compétente pour
la gestion des risques d'inondation -, a exposé les principes d'un tel
plan de gestion : il s'agit d'un plan visant à permettre la poursuite
de projets de construction dans des zones qui devraient en principe
être considérées comme des zones d'expansion de crue et qui devraient
rester inconstructibles (zones vertes du Plan de Prévention des Risques
d'Inondation) ; pour cela, le plan prévoit de compenser, sur le
territoire concerné, tout nouveau projet de construction, - qui
nécessite une zone de remblai -, par une zone de déblai permettant
l'écoulement de l'eau. A Achères, le Plan Global d'Aménagement a été
établi sans tenir compte du projet d'autoroute (tronçon C3 du tracé
vert), qui vient donc potentiellement en concurrence avec les projets
déjà envisagés : en effet, si ce tronçon est prévu en tranchée
couverte, les entrées et sorties à chaque extrémité de celle-ci doivent
néanmoins être réalisées à des niveaux supérieurs au terrain naturel
pour que l'autoroute ne risque pas d'être inondée en cas de crue.
Eric Debarle a alors expliqué comment le tronçon C3 du tracé
vert pourrait être réalisé sans remettre en cause le Plan Global
d'Aménagement d'Achères :
- d'une part, l'entrée nord de la tranchée couverte pourrait être
décalée plus au nord dans une zone qui ne nécessite pas de compensation
;
- d'autre part, à l'autre extrémité, le pont qui permettrait de
relier Achères à la boucle de Chanteloup pourrait être réalisé sur
piles au lieu d'utiliser des volumes en remblais.
Malgré ces améliorations, le maire d'Achères n'a toujours pas
jugé satisfaisantes les modalités de réalisation du tracé vert sur sa
commune. Alain Outreman rappelle en effet que la sortie sud du tracé se
trouverait notamment à proximité d'une cité HLM de 1500 logements, dont
les habitants subiraient des nuisances importantes en terme de bruit et
de pollution de l'air. En outre, un projet de reconquête de la plaine
d'Achères permettant de mieux relier la ville au fleuve et d'aménager
des espaces récréatifs et de loisirs est actuellement en cours
d'élaboration, dans le cadre d'un Schéma de Cohésion Sociale visant à
désenclaver les cités HLM. Le maire d'Achères déclare de toute façon ne
pas être convaincu qu'il faille doubler la RD30 ; il considère en effet
que le Port Autonome devrait générer un trafic maximal de 1000 camions
supplémentaires par jour, alors que le trafic actuel sur la RD30
s'élève à 13 000 véhicules par jour, et que le trafic total serait donc
éloigné du chiffre de 30 000 véhicules par jour annoncé par le maître
d'ouvrage.
La réunion publique s'est terminée par l'expression de
quelques points de vue généraux sur les nuisances et les risques
sanitaires. Thierry Sibieude, conseiller général du Val d'Oise, a tout
d'abord insisté sur la nécessité de réaliser la Francilienne dans sa
partie nord, mais il a aussi souligné la nécessité de protéger
convenablement les riverains. Un propos relayé par François Coupin, de
l'ARDIES. Jean-Claude Roude, du comité PROFILE a pour sa part indiqué
que « plus les nuisances sont fortes, plus il y a de raison de les
transférer sur des infrastructures nouvelles en réalisant des
protections adéquates », afin de « les mettre dans des endroits où l'on
peut mieux traiter les conséquences ». Christophe Quenet, des Verts
d'Ile de France, et Jacques Simeray, du CAPUI, ont réaffirmé leur
opposition à la construction d'une nouvelle infrastructure routière.
Après un débat riche en informations et en arguments,
l'adjoint au maire de Conflans, qui a regretté que la réunion ait
dérivé à la fin vers des considérations hors du sujet de la thématique,
s'est chargé de conclure : « on ne veut pas voir cette autoroute, ni
l'entendre, ni la sentir, mais on veut qu'elle passe. Eh bien,
cachons-là le plus possible ! ».
Réunion thématique de Carrières-sous-Poissy, le 17 mai
L'économie et l'aménagement du territoire en débat
La réunion de Carrières inaugurait les cinq rendez-vous thématiques
du débat public après dix neuf réunions de proximité. A l'ordre du
jour, l'opportunité du projet sous l'angle des enjeux économiques et
d'aménagement du territoire. Le public avait une nouvelle fois
répondu en nombre à l'invitation de la CPDP avec plus de 400
participants dans la salle Louis Armand.
Dès l'accueil, M. Daniel Schalck, maire de Carrières sous
Poissy évoque les tracés, rappelant les deux critères retenus par la
Communauté de Communes des deux Rives pour la Francilienne : un passage
dans les zones les moins urbanisées et la desserte des zones
d'activités. Puis, il réaffirme son opposition au tracé rouge et
rejette le « 6e tracé » formulé récemment par le président des
automobiles club de France.
Les acteurs économiques ont soutenu l'opportunité d'une infrastructure de prolongement de la Francilienne dans la zone
M. Francis Rol Tanguy, Directeur de l'équipement de la Région Ile de
France, resitue le projet et la zone d'étude dans la perspective des
enjeux économiques et d'habitat du SDRIF en cours de préparation : la
création de 60 000 logements par an et le développement d'activités
stratégiques comme les sièges sociaux de grands groupes internationaux
ou certains pôles de recherche qui « ne peuvent se situer qu'en Ile de
France » dans le contexte de la mondialisation.
Les acteurs économiques premiers intervenants de la table
ronde débutant la soirée, ont défendu l'opportunité du projet. M.
Patrick Devergis, Vice -président de la Chambre de Commerce et
d'Industrie de Versailles, a basé son intervention sur les avantages
économiques du tracé rouge par rapport aux autres tracés en s'appuyant
sur les chiffres d'une nouvelle étude réalisée par l'IGN à l'initiative
de la CCIV. Une partie importante de la salle s'est exprimé avec force
contre cette présentation, perçue par certains participants comme le
choix du développement économique contre la protection de la qualité de
vie des habitants.
A cet égard, Mme Corinne Lepage a souligné les écarts entre
l'évaluation du coût du projet d'autoroute commentée par la CCIV et
celle du dossier du maître d'ouvrage (dus à la date d'actualisation
choisie) et surtout l'absence du coût social dans l'analyse coûts
avantages du projet. Pour elle, le débat doit aussi être alimenté par
des données sur la contrepartie en termes d'emplois aux sacrifices
demandés à 200 000 habitants concernés dans la zone par les nuisances
liées à la proximité d'une autoroute.
M. Devergies, malgré les protestations, a poursuivi son
raisonnement, soulignant avec conviction : « L'absence de liaisons
routières représente un handicap qui nuit à l'activité économique »
notamment pour pérenniser et développer les 500 000 emplois des deux
départements du Val d'Oise et des Yvelines.
Puis, il a annoncé un cahier d'acteur reprenant les éléments de
l'étude IGN à laquelle il s'est référé pour étayer sa présentation des
avantages comparatifs des différents tracés. Les deux ARDIES n'ont
pas réduit les protestations même si M. Bernard Quétier, mieux entendu,
s'est référé à l'exemple de Saclay pour illustrer concrètement le rôle
bénéfique des infrastructures d'accès à une zone pour son
développement.
Mme Roselle Cros, adjointe au maire de Saint-Germain,
conseillère régionale, a fait appel au principe de réalité pour
soutenir le prolongement de la Francilienne afin de répondre aux enjeux
d'aménagement et de développement de la zone d'étude : la réalisation
d'un projet satisfaisant aux objectifs, particulièrement la desserte
des zones d'activité économiques et le délestage de la N184. Dans cette
perspective, elle insiste sur les nécessaires mesures de protection des
habitants contre les nuisances, comme cela a été fait sur l'A14, où le
dialogue a permis d'améliorer le tracé.
Le conseiller régional PRG, M. Eddie Aït, rappelle son
appartenance à la majorité régionale, son opposition à l'autoroute au
profit d'une politique pour de meilleurs transports en commun et pour
une utilisation plus importante du fluvial et du ferroutage. Il
rappelle en outre que le Conseil régional ne compte pas participer
financièrement à la réalisation de l'A104.
Les élus ont ouvert le débat avec le public en présentant leurs visions de l'aménagement des territoires de la zone d'étude
M. Dominique Lefebvre a évoqué la nécessité d'une perspective
alliant une importante création de logements dans la Communauté
d'agglomération avec un esprit de mixité sociale (17 000 d'ici 2O2O) et
l'attractivité du territoire pour les entreprises en leur apportant de
bonnes conditions d'accueil et de fonctionnement. Dés lors une
politique de desserte des espaces de vie et d'activités, et de liaison
entre pôles d'activités, est indispensable, en n'opposant pas
l'économie et le social.
M. Philippe Sueur souligne les faibles retombées actuelles du
développement de Roissy pour la zone du projet, faute de liaisons
efficaces avec les pôles de l'Ouest comme Cergy-Pontoise, contrairement
à l'est de l'Ile de France (Seine et Marne, Seine saint Denis, Oise).
Puis il rappelle la contribution des entreprises au financement des
collectivités locales, qui réalisent les équipements et fournissent les
services de la vie quotidienne.
M. Pierre Cardo, se référant à son expérience de création de
près de 1800 emplois à Chanteloup les Vignes, confirme la possibilité
d'en créer sans autoroute et l'indispensable développement des
transports en commun au bénéfice d'une zone en retard, qu'il s'agisse
des fréquences du RER ou des carences des dessertes par chemin de fer.
Toutefois, dans la situation actuelle, avec les voies secondaires et
les transports en communs saturés, la création d'un axe routier
conséquent lui paraît nécessaire.
Mais, il faut situer le projet dans une perspective globale
intégrant les questions d'emplois et de logement, l'habitat et les
entreprises et les différents modes de transport.
L'ensemble des élus intervenants est en accord sur deux
points, d'ailleurs partagés, avec des nuances, par une partie
importante du public, sans pour autant atténuer les craintes pour leur
cadre de vie, à nouveau fréquemment exprimées:
- la nécessité d'une infrastructure de desserte des zones de
vie et d'activités améliorant les liaisons entre pôles de développement
de l'Ouest de l'Ile de France et libérant les voies secondaires et la
RN184 pour la vie locale. Cette position est complémentaire du
développement des autres modes de transport : transports en commun (Cf.
notamment le prolongement de la tangentielle grand ouest) pour les
habitants et les salariés des entreprises de la zone ; recours plus
important au fluvial avec la perspective de la plate-forme d'Achères et
du projet Seine Nord, et au ferroutage pour le fret des entreprises.
Sur ces points, Alain Outreman, rappelle qu'il y a mieux à faire
que 2% du fret sur le fluvial (les voitures Peugeot, le sable des
carrières...) et regrette l'incohérence des choix d'infrastructures en
rapprochant la non réalisation d'une gare de fret ferroviaire, Achères
Grand Cormier, et la perspective à 10, 15 ans de la plate-forme
fluviale d'Achères.
- la possibilité d'ouvrir le débat vers une solution
conciliant l'efficacité économique et la préservation du cadre de vie
en abandonnant une approche bloquante par tracé complet mais en
raisonnant par tronçon, comme le Président de la CPDP Jean Bergougnoux
y a invité les participants au débat public.
M. Hugues Ribault a rappeler dans cet esprit les apports du débat
permettant cette ouverture : le temps de réalisation est similaire pour
tout projet (hors le noir du dossier compte tenu du maintien du trafic
durant les travaux) ; le maître d'ouvrage est ouvert à l'études de
solutions issues du débat public autres que les cinq tracés du dossier
; les zones très urbanisées sont à exclure en raison des risques pour
la santé.
Lettres des trois Premiers ministres
Au cours des différentes réunions, les représentants du COPRA 184 ont
affirmé que le tracé rouge avait été rejeté ou annulé par trois
Premiers ministres :
• M. Pierre Bérégovoy le 3 février 1993
• M. Edouard Balladur le 7 avril 1995
• M. Lionel Jospin le 11 avril 2002
La lecture que fait le maître d’ouvrage est différente. Vous pourrez
prendre connaissance de la réponse qui a été faite à la question n° 41
dans la rubrique :
> Réponses aux questions posées
>Thème : Trafics, tracés, coûts, financements
Afin que chacun puisse se faire une opinion, vous pouvez télécharger les documents précités ici.
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