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Avis n°253

Canevas pour une analyse du coût/bénéfice des ENRs électriques

Ajouté par Pierre ANONYMISé (Paris), le
[Origine : Site internet]

Parmi les questions à débattre, les participants à l'atelier préparatoire du 17 janvier avaient retenu les suivantes : Que va coûter la transition énergétique ? Qui va payer ? Quels emplois peuvent être créés ? Questions d'autant plus légitimes que l'information du public sur la PPE est l'un des trois objectifs du débat, tels que définis par la CNDP elle-même. Questions d'autant plus importantes que l'opinion – régulièrement invitée à se prononcer sur la Transition Energétique – est laissée dans l'ignorance de cette problématique. Cette contribution au débat se présente sous forme de questions posées à celles et ceux qui disposent de l'information nécessaire pour y répondre avec autorité et objectivité.

Quel besoin pour des EnR intermittentes (ENRis) ?
A cette question il n'est jamais répondu. Le sujet n'a pas été traité dans le débat national de 2015 sur la transition énergétique (DNTE). Il ne l'a pas été non plus dans la PPE d'octobre 2016 (Programmation pluriannuelle de l'énergie) qui s'appuie sur les objectifs de la LTECV.
Plus généralement, la diminution du pourcentage de nucléaire dans le mix électrique (de 75 à 50 %) n'a jamais été justifiée, si ce n'est par le fameux accord de février 2012 entre le PS et les Verts. Pourquoi 50 % plutôt que 35 ou 25 % ? Si c'est parce que le nucléaire est dangereux, alors il faut tout arrêter le plus rapidement possible.
Et, si l'on ne peut qu'approuver le ministre quand il a pris acte de l'irréalisme d'un passage de 75 à 50% nucléaire dans le mix électrique d'ici 2025, on souhaiterait savoir pourquoi, deux ans après sa promulgation, la loi de 2015 doit être révisée, ne serait-ce pour ne pas répéter les mêmes erreurs.

La création d'emploi est souvent évoquée comme argument à l'appui du développement des sources intermittentes. On se contentera ici de rappeler que la construction de panneaux solaires a pratiquement disparu d'Europe et que, de ce fait, la majorité des emplois créés en France par le solaire sont ceux – éphémères – du montage. Quant aux parties nobles des éoliennes (rotors ...) elles ne sont pas fabriquées en France.

Quels coûts pour le système électrique et la collectivité nationale ?
Ce coût va bien au-delà du coût d'achat et d'installation des éoliennes et des panneaux solaires
Plusieurs facteurs essentiels sont en effet à prendre en considération et devraient, dans la mesure du possible, être chiffrés :
- le back-up ou maintien en état de fonctionnement de moyens de production permettant de pallier les conséquences de l'intermittence (périodes d'absence totale de vent et de soleil) ;
- le stockage court terme : batteries par exemple ;
- le stockage de masse pour le stockage inter-saisonnier, notamment le séduisant Power to Gas puis Gas to Power mais avec un rendement aujourd'hui inférieur à 30 % et l'absence de référence industrielle qui ne fait qu'ajouter de l'incertitude ;
- le coût en investissement, comparé avec celui du parc nucléaire : il faut un mix – aux proportions actuelles - éolien plus photovoltaïque de 84 GW pour fournir la même quantité d'énergie annuelle que 21 GW de nucléaire ;
- le coût de l'obligation d'achat ou de son substitut, le complément de rémunération ;
- les nouveaux défis que doivent relever les gestionnaires de réseaux pour en garantir la stabilité. On sait déjà que les difficultés croissent plus vite que le pourcentage d'EnRi injecté dans le réseau ;
- la perte de valeur du parc nucléaire due à l'insertion des EnRi dans le réseau, est estimée à 2,9 milliards par Percebois et Sommeret (étude publiée par le CREDEN ; juillet 2016) qui ont exploité les données 2015. Un chiffre déjà conséquent mais qui porte sur une année où la participation des EnRi dans le mix électrique était encore faible ;
- les dépenses fiscales, par exemple : exonération de l'IRPP pour l'électricité envoyée sur le réseau par les auto-consommateurs, les financements verts etc. Ce à quoi il convient d'ajouter l'équivalent du produit de la TIPP qu'il faudra bien trouver quelque part au fur et à mesure de l'augmentation du pourcentage de véhicules électriques dans le parc ;
- sans compter bien sûr les dommages non comptabilisables comme les atteintes aux paysages.

Enfin il conviendrait de jeter un regard outre Rhin. Il est loin le temps où, en 2004, Jûrgen Triffin évaluait à l'équivalent du prix d'un cornet de glace le coût par habitant du tournant énergétique de l'Allemagne (Energiewende) dont il fut l'un des principaux architectes. Dans un article daté de septembre 2017 - c'est-à-dire avec le bénéfice de l'expérience - Justus Haucap (Kosten der Energie wende - Université de Düsseldorf) chiffrait à 520 milliards d'€ le coût de ce tournant énergétique (150 pour la période 2000-2015 et 370 pour la période 2016-2025).
Sans oublier que, malgré le déversement de plusieurs centaines de milliards d'€ pour la promotion des ENRs intermittentes, les émissions de CO2 par le secteur électrique n'ont pas diminué et que le prix de l'électricité payé par les ménages allemands est près du double de celui payé par les ménages français.

* *

Cette contribution traite de la France métropolitaine, nullement des départements et territoires d'outre-mer ; le contexte y est totalement différent.

PS. Dans sa communication au Sénat de mars 2018 – Le soutien aux énergies renouvelables - la Cour des Comptes évalue à 121 milliards le montant du soutien public pour les contrats de soutien aux ENRis signés avant 2017. Il faut espérer que ce document, qui ne traite que d'une partie de la problématique, trouvera sa place dans le débat.

Commentaires

Monsieur Audigier,
Le rapport de la Cour des comptes a bien été publié sur le site du débat. La commission a d'ailleurs communiqué à ce sujet : https://ppe.debatpublic.fr/importante-contribution-cour-comptes-au-debat...

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Cette loi a été faite de bric et de broc sous la poussée des antinucléaires. Elle fixe des injonctions paradoxales comme par exemple le passage à 50 % de nucléaire en 2025. Elle ne parle pas des énergies renouvelables thermiques sous forme de chaleur sauf au détour d'une phrase dans le dernier titre. Elle est incomplète comme on peut le voir dans le nombre de sujets importants qui sont rejetés dans des ordonnances à venir. Comme le disait le Président du Conseil Constitutionnel, c'est une loi bavarde. CF. le nombre de pages sur les installations des prises électriques pour les véhicules électriques alors que ces dispositions pouvaient faire l'objet d'un décret. Elle est globalement incohérente. Alors comment faire une PPE cohérente en partant d'une loi qui ne l'est pas. Les sénateurs avaient proposé des amendements de bon sens. le député Président de la Commission Paritaire les a rejetés d'un revers de main.

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