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Avis n°443

Energies renouvelables : attention aux pièges du langage !

Ajouté par Francis ANONYMISé (Issy les moulineaux), le
[Origine : Site internet]
Energies renouvelables

Aristote déjà nous mettait en garde contre les pièges du langage.
Dans notre débat public d'aujourd'hui, la terminologie nous joue des tours qui peuvent nous induire en erreur, et dans le cas des « énergies renouvelables » (ENR) nous faire croire qu'on a trouvé la baguette magique : le 100% renouvelable ! L'expression ENR semble indiquer que les ENR sont la solution aux problèmes énergétiques du monde moderne en raison de leur caractère renouvelable sans limite de durée. Mais jusqu'à quel point sont-elles renouvelables ?

De fait, pour l'éolien et le solaire, les sources d'énergie sont entièrement fournies par la nature, car ni le vent ni le soleil de n'arrêteront à l'échelle humaine : ces sources d'énergie sont bien 100% renouvelable.

Mais déjà, il faut faire attention à ce que l'on dit quand on parle de l'énergie provenant de la biomasse : la biomasse est renouvelable à condition qu'elle ne soit pas surexploitée. Il faut s'assurer que la biomasse est bien renouvelée, selon un taux de renouvellement à la hauteur du taux de consommation. Ce n'est pas un problème théorique, il y a le drame de la surexploitation du bois de feu dans de nombreux pays en développement. Souvenons-nous que la société humaine de l'Ile de Pâques s'est effondrée pour avoir coupé tous les arbres de son île.

Mais concernant l'éolien et le solaire, il y a aussi un piège problématique. Les sources d'énergies brutes, sans infrastructures énergétique pour les mettre en œuvre, ne sont d'aucune utilité. Pour s'assurer que le système ENR électrique complet, sources d'énergie et infrastructures, est renouvelable, il faut donc regarder si on peut renouveler indéfiniment les éoliennes et les panneaux solaires, les dispositifs de stockage et les lignes électriques connectant les très nombreux points de production électrique au consommateurs. L'un des mes souhaits les plus chers est que la réponse à cette question soit : oui. Mais j'ai entendu des exposés de spécialistes des ressources minières et lu l'étude de l'UNEP "Green Energy Choices : The benefits, risks and trade-offs of low carbon technologies for electricity production" qui explique que les ENR, par nature diffuses sur tous les territoires, sont significativement plus consommatrices de ressources minérales, que les productions électriques concentrées. Ici non plus il ne s'agit pas d'un problème théorique : la Chine a massivement soutenu l'installation d'ENR dans ses régions de l'ouest mais se retrouve confrontée à la nécessité de construire des infrastructures massives de transport électrique pour les connecter aux régions urbaines de ses régions de l'est. Il convient donc de vérifier que l'on disposera bien d'assez de ressources : pour le fer et le cuivre qui présentent des réserves mondiales et des taux de recyclages élevés cela me semble être le cas, mais pour d'autres ressources la vigilance est nécessaire à la fois sur le plan des ressources minières et sur celui des filières de recyclage. Par exemple si le cobalt présent dans les batteries lithium-ion est recyclé, cela n'est pas le cas aujourd'hui du lithium. D'un autre côté, il est rassurant de savoir que les panneaux photovoltaïques de première génération sont recyclés aujourd'hui mais qu'en sera-t-il lorsqu'on passera aux technologies hyper sophistiquées à couches minces ?

Bref les ENR électriques présentent deux grandes qualités : les sources d'énergie sont inépuisables et les infrastructures émettent relativement peu de CO2 (leur « intensité carbone » est faible) mais elles ont un talon d'Achille, c'est leur assez forte « intensité matière ». C'est l'une des raisons qui peuvent faire penser qu'un mix électrique équilibré tel que visé par la Loi relative à la Transition Energétique pour la Croissance Verte est un objectif raisonnable.

Commentaires

Vous dites à juste titre que le vent et le solaire sont renouvelables mais pas les éoliennes et les panneaux solaires qui les convertissent en électricité. Mais ce sont des énergies de flux, et ce flux est limité. Il faut donc aussi considérer la quantité d'électricité maximale qu'elles peuvent produire annuellement par unité de surface. Dire comme on l'entend qu'elles sont inépuisables est donc inapproprié. Elles peuvent simplement produire un flux d'énergie pendant très longtemps,mais limité en quantité.
Le problème de la durabilité des ENR électriques va bien au-delà de la durabilité des matières premières qui sert à les fabriquer. Elles ne sont durables que si l'ensemble du système physique qui permet leur fabrication et leur fonctionnement l'est. En particulier elles ne sont pas plus durables que ne l'est le combustible de leur centrales de back-up, ou le combustible qui permet de fabriquer leurs composants .
Le caractère renouvelable des ENR électrique est donc dans les conditions actuelles un mythe. mais, comme le dit Madame Arditi, il y a le mensonge des mots (mais qui sont dits par des hommes, et des femmes, qui sont par conséquent des menteurs)!
Il en est de même de l'autonomie des territoires en France grâce à elles: aucun territoire n'est en France autonome dans les matériaux et l'énergie indispensable pour construire des éoliennes ou des panneaux solaires, ni même capable de les construire tout court.

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