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Question n°115

J'ai fait un rêve. Mais comment j'explique la réalité à mes enfants

Ajouté par Jacques-Olivier ANONYMISé (Pont Saint Esprit), le
[Origine : Site internet]

Monsieur le Ministre,

J'ai donc fait un rêve et souhaite vous le partager, et associés à ce rêve, le constat et les interrogations qui en découlent relativement au contexte du débat et au contenu du « dossier du maître d'ouvrage » mis à notre disposition.

En préambule, je veux vous dire que je partage de nombreux points que vous évoquez dans votre vidéo de présentation. Oui, il s'agit bien d'un moment peut-être unique où nous devons nous projeter collectivement. Oui, ce serait bien qu'il s'agisse d'un moment de dialogue et de co-construction pour décider ensemble. Oui, il faut laisser derrière nous les énergies fossiles, actionner le levier des économies d'énergie selon le principe « si simple : l'énergie la plus propre et la moins chère est celle qu'on ne consomme pas ». Pour les énergies renouvelables, j'en rêve aussi (si du moins c'est réaliste). Oui, je suis d'accord qu'il ne faut pas laisser l'avenir décider à notre place. Par contre, et c'est ma première question, vous indiquez que, quand le nucléaire sera redescendu à 50% du mix électrique, on retrouvera la liberté de choix. A quel choix pensez-vous ?

Ce préambule étant dit, je tiens également à souligner qu'avant d'écrire cette contribution et formuler mes interrogations, je me suis efforcé de parcourir (à défaut de tout lire) les 172 pages du dossier mis à notre disposition.

Alors, au fait, quel est-il ce rêve ?

Et bien, il s'agit d'un rêve d'une nouvelle approche de la décision publique et politique, nouvelle approche qui ferait la part belle à une méthode pragmatique et éclairée par l'essentiel de ce qu'il faut savoir (validé par des « sachants », si possible venant d'horizons différents et ayant des points de vue différents mais capable de définir quels sont les points d'accords et quels sont les points de désaccord). Une approche tellement pertinente et de bon sens que je pourrai facilement en expliquer les enjeux à mes enfants, et qu'ils comprendraient.

Si j'en viens à l'objet du présent Débat public (ne faut-il pas plutôt d'ailleurs parler de consultation publique sachant que le texte de la PPE est écrit en parallèle de celui-ci, qu'on ne l'aura donc pas à disposition et qu'en fait (on trouve l'information à la p. 87), l'objectif du débat pour le décideur public est de mesurer l'acceptabilité sociale de la future PPE), l'enjeu central et unique est, de mon point de vue, la limitation des émissions de gaz à effet de serre.

Donc, ma première question serait : quels sont-ils et au fait, que font-ils de mal ?

Ma 2ème question serait alors naturellement : quelles sont les principales sources émettrices de gaz à effet de serre ?

Ce qui me permet d'arriver à la 3è étape de ma démarche : Comment agir ?

En premier lieu, je dirais : comment agir sur l'existant, quels leviers pour quels résultats. Appliqué à notre contexte de la PPE, ce serait comment optimiser (ou diminuer) nos consommations, peut-on, sans tout transformer à ce stade, effectuer des transferts vers des énergies moins émettrices.

En second lieu, je me projetterai pour imaginer le monde de demain : quels besoins, quels usages et quelles énergies pour les satisfaire.

A partir de là, je bâtirai des scénari exploratoires mais le plus proche de la réalité possible et qui prendraient en compte tous les aspects : résultats attendus, besoins et disponibilités de l'ensemble des ressources nécessaires (notamment, mais pas uniquement, les matières premières : lesquelles, quel stock, quelle accessibilité au stock, ..., et les enjeux géopolitiques associés), l'empreinte GES (et pas uniquement carbone) des différentes énergies (en intégrant le cycle complet de leur production : de l'extraction au recyclage, et donc de toutes les externalités extraterritoriales), besoins financiers associés, impacts sociaux et économiques (emploi, formation, compétences, balance commerciale, ...), niveau d'acceptabilité (et donc capacité à déployer les solutions), points forts, points faibles. Le tout étant construit avec l'ensemble des acteurs concernés avec un état clair des accords et des désaccords sur les différentes alternatives, en séparant les faits (physique, scientifique) et les opinions.

C'est donc fort de cette démarche que j'ai parcouru le document pour essayer de voir si je trouvais les réponses à mes questions, et donc quelque part me trouver en situation de « co-décision » comme vous l'évoquez dans votre vidéo.

Remarque préliminaire : le document est fouillé, riche et sûrement trop riche d'informations. Sans un minimum d'informations préalables, il me semble qu'il est compliqué pour un citoyen « lambda » de se faire une opinion vraiment éclairée.

Par exemple, il me semblerait intéressant de préciser que si de très nombreux signaux convergent vers de sacrés problèmes, on n'en est pas certain à 100%. Mais le principe de prudence doit nous inviter à considérer que le pire est possible et qu'on a tout intérêt à s'y préparer. De courtes contributions de scientifiques à ce titre seraient les bienvenues.

Si j'entre dans le vif du sujet de mes questions, qu'est-ce que je trouve.

En haut de la page 17, je trouve la liste des gaz à effet de serre et en haut de la page 21, une courte explication sur le « pouvoir » de réchauffement des 2 principaux. A ce titre, et dans un sens pédagogique, il serait intéressant d'expliquer pourquoi on parle plus du CO² que du méthane, alors que ce dernier est 25 fois plus « puissant » : tout simplement parce qu'il y a beaucoup plus de CO² dans l'atmosphère et que sa persistance est de l'ordre du siècle contre une douzaine d'années pour le méthane.

J'ai donc la réponse à ma 1ère question.

Pour ma 2è question (quelles sont les principales sources émettrices), je trouve un début de réponse à la page 19 :
• Le transport est le 1er contributeur (28.5%)
• Ensuite, l'agriculture (17.2%)
• Résidentiel tertiaire (15.8%)
• Industrie manufacturière et construction (13.1%)
• Ensuite, plusieurs autres sources à moins de 10% chacune

Les explications fournies sous le graphique ne donnent pas tellement plus d'information précise sur la « contribution » de l'énergie de ces différentes sources. Et là, je suis un peu frustré : pourquoi cette information stratégique n'y figure-t-elle pas ? Ne la connaît-on pas ? Probablement que si puisque le chapitre suivant s'appelle « Améliorer l'efficacité énergétique et baisser la consommation des énergies fossiles » avec un thème sur la mobilité propre (j'imagine que ça correspond au transport ci-dessus) et le bâtiment (= le résidentiel tertiaire ?).

Pour le transport, je trouve alors (difficilement car noyé au niveau de nulle part) un peu plus d'information au paragraphe 2.4 de la page 37 : « le transport routier représente, à lui seul, 93% des émissions du secteur des transports ». J'ai essayé de trouver une ventilation plus fine afin de mettre en face les actions associées. Je n'ai trouvé qu'une suite de solutions qui sont peut-être ( ?), probablement ( ?) pertinentes. J'aurai aimé trouver un tableau simple avec donc en face de chaque action le % d'émissions concerné. Serait-il possible d'avoir une telle information, simple d'accès pour le commun des mortels ?

Je passe ensuite au paragraphe suivant qui concerne le bâtiment.

Le début du paragraphe 3 est incompréhensible : « La consommation corrigée des variations climatiques est de l'ensemble résidentiel et tertiaire augmente jusqu'au début des années 2000, puis baisse légèrement depuis. La part dans la consommation totale est passée de 41,5 % en 1973 à 40,5 % en 1990, puis à 44,9 % en 201522 ». De quoi parle-t-on ?

Un peu plus loin, on apprend qu' « en 2015 la combustion du gaz naturel est à l'origine de près de 61% des émissions de CO² liées à ces usages ». C'est à peu près tout ce qu'on a comme information avant d'enchaîner sur une liste de mesures en vigueur.

Là encore, pour éclairer mon jugement et jauger la pertinence des actions menées, un tableau de correspondance entre les actions menées/prévues et les émissions actuelles, ainsi que le résultat escompté, m'aurait permis d'être en capacité de « co-décider ». Est-ce qu'il est possible d'avoir cela ?

Plusieurs questions complémentaires :
• Il n'y a rien sur l'agriculture : est-ce parce que la source principale des émissions serait le méthane et que l'énergie n'est pas concernée de façon suffisamment importante pour que des actions spécifiques soient menées ?
• Question identique sur l'industrie manufacturière et la construction : pas d'action spécifique. Pourquoi ? faut-il chercher dans un paragraphe particulier ?

A ce stade, on va dire que j'ai une réponse partielle (mais non éclairée – voir mes propos ci-dessus) à « mon » 1er axe d'action : agir sur l'existant. Visiblement, on peut l'améliorer. Mais, ma question « Y-a-t-il des transferts vers des sources d'énergie moins émettrice ? » reste sans réponse.

Le chapitre suivant s'appelle alors : Accélérer le développement des énergies renouvelables, avec 4 paragraphes sur la production de chaleur renouvelable, d'électricité renouvelable, de gaz renouvelable et de carburants renouvelables.

Quelle est donc la logique qui m'amène à ce chapitre après avoir parlé du Transport et du Bâtiment ? Cela m'est « imposé » mais je le comprends par rapport à la mention de la page 87 : l'objectif du « débat » public est de mesurer l'acceptabilité sociale de la future PPE (donc des choix et des solutions qui vont être proposés, mais en marge du débat public). En fait, et là c'est un peu une déception, il n'y a plus de « co-décision ». Il y a juste un grand sondage d'opinion pour préparer les argumentaires des décisions qui seront prises.

Du coup, je suis un peu « découragé » pour continuer la lecture du document, surtout que je n'ai pas les tenants et aboutissants.

Ce « découragement » est renforcé à la page 64 par la lecture des questions que la PPE devra traiter : en fait, ce sont toutes les questions centrales pour lesquelles on aurait besoin d'information. Et c'est pareil pour l'électricité, le gaz et le carburant renouvelables.

Certes, on trouve plein d'objectifs, plein de données. Mais à mettre en face de quoi et pour quels objectifs et résultats en termes d'émission ? J'ai peut-être mal lu mais l'information est quand même difficile d'accès. Comment se forger un jugement ou un embryon de jugement ?

J'ai d'ailleurs retrouvé cette difficulté dans le questionnaire qui est proposé en ligne.

Page 67, un tableau intéressant qui rappelle les enjeux des différentes ENR pour l'électricité, notamment la question de l'intégration sur les réseaux.

Le chapitre suivant « Maintenir un haut niveau de sécurité d'approvisionnement ». Oui, c'est évident et c'est une donnée stratégique dans le mix énergétique de demain.

Vient ensuite le chapitre sur les Réseaux, là aussi ô combien stratégique. Mais là encore, il y a peu de place pour aborder les enjeux physiques (au sens des lois de la physique et des matériaux).

Quand je lis tout ça, j'ai vraiment l'impression que la question essentielle des limites physiques n'est pas posée. Et pourtant, c'est fondamental. A ce sujet, comment sont pris en compte les résultats du Rapport Meadows récemment mis à jour et qui confirment les prévisions de son modèle élaboré en 1972, et notamment l'incompatibilité avec une croissance continue du PIB, et un "effondrement" prévu dans les 15-20 ans ?

Je poursuis la lecture du document à la recherche de mes réponses. Je passe au chapitre « Favoriser la compétitivité des entreprises et le pouvoir d'achat des ménages ». RAS.

Puis le chapitre « Prendre en compte les enjeux économiques et sociaux et agir avec les territoires ».

J'avoue que ça commence mal = par une information « bizarre ». Début du 1er paragraphe : « le secteur de l'énergie ... représente 138.900 emplois... » et le paragraphe suivant : « elle (la filière nucléaire) emploie environ 220.000 salariés » ! Je croyais que le nucléaire, quoi qu'on en pense, c'était de l'énergie. Pourquoi cette séparation ?

Ça continue mal avec le paragraphe Actions transverses (p. 115) que l'on peut imaginer être structurantes entre l'action de l'Etat et des territoires. Donc, 2 émoticônes rouges (gouvernance des réseaux avec approche intégrée des territoires, mise à jour régulière des études technico-économiques portant sur les synergies entre vecteurs énergétiques et leurs usages à des horizons de temps à moyen et long terme), 1 émoticône orange (préparer les compétences et les transitions professionnelles). Juste un émoticône vert pour la publication de la stratégie nationale de recherche énergétique.

Un peu plus loin (p.131), je m'arrête sur un émoticône orange. On y lit : « l'état de la balance commerciale liée à l'achat et à la vente d'énergie est suivi et publié chaque année ... Il ne rend pas compte de l'état de la balance commerciale des équipements nécessaires pour produire de l'énergie (panneaux solaires par exemple) ou pour faire de la maîtrise de l'énergie (véhicules électriques par exemple). » Donc on n'a pas d'information économique pertinente et on doit prendre des décisions structurantes ?

Page 134, un tableau intéressant sur les ordres de grandeur des coûts de production des ENR. Page suivante, on a une fourchette du coût du nucléaire qui s'avère moindre que ceux-ci. Il serait néanmoins pertinent d'être sûr que les coûts calculés, quelle que soit l'ENR et le nucléaire, inclut bien l'ensemble des coûts sur leur durée de vie, externalités incluses bien évidemment. A ce titre, les paragraphes suivants pointent bien du doigt la question de l'intégration de l'intermittence sur les réseaux existants et le coût induit. Donc, le vrai coût d'investissement dans les ENR doit aussi intégrer celui-ci.

Par contre, il n'est pas évoqué le fait que, avec un mix électrique conforme aux objectifs, les réacteurs nucléaires fonctionneront en deçà de leur nominal et qu'on leur demandera néanmoins d'assurer la stabilité du réseau, ce qui peut potentiellement poser des problèmes d'usure accélérée.

J'arrive aux annexes et au paragraphe « Coût public de financement des EnR » (p. 152). On a une fourchette entre 61 et 126 milliards d'euros sur la période 2017-2035.

Et là je suis pris d'un doute : sur le site de la Stratégie Nationale Bas Carbone (https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/suivi-strategie-nationale-bas-c...), il y a un graphique « Evolution des émissions de gaz à effet de serre du secteur "production d'énergie" en France et objectifs SNBC ». Et là, grande surprise : entre 2017 et 2028, stagnation des émissions de gaz à effet de serre. La France (donc chaque contribuable) a la capacité d'investir des dizaines de milliards d'euros pour aucun résultat alors qu'il s'agit de l'enjeu majeur des années à venir !

Ce n'est pas comme si la dette du PIB était proche de 100%, que les intérêts de celle-ci n'allaient pas augmenter dans les années à venir, réduisant d'autant les marges de manoeuvre budgétaire.

En plus, la variation d'emploi (toujours p. 152) est au mieux nulle, au pire déficitaire de 12.000 emplois !

Comment j'explique ça à mes enfants ? Comment comptez-vous expliquer ça aux Français ?

J'étais parti avec un rêve. A ce stade, c'est un bien mauvais rêve qui nous est proposé en fait.

D'avance merci de vos réponses.

Date de la réponse:
Réponse de La maîtrise d’ouvrage, le
Réponse:

Nous vous remercions de votre participation et de votre relecture attentive du dossier du maître d’ouvrage. Vous faites des commentaires que nous notons et posez quelques questions précises auxquelles voici des réponses.

Enjeu effet de serre

La loi relative à la transition énergétique a créé deux outils d’organisation de l’action publique : la programmation pluriannuelle de l’énergie et la stratégie nationale bas carbone. L’objet assigné par la loi à la programmation pluriannuelle de l’énergie est de contenir des volets relatifs :

  • A la sécurité d’approvisionnement ;
  • A l’amélioration de l’efficacité énergétique et la baisse des consommations d’énergie, en particulier fossiles ;
  • Au développement de l’exploitation des énergies renouvelables et de récupération ;
  • Au développement équilibré des réseaux, du stockage et de la transformation des énergies et du pilotage de la demande d’énergie pour favoriser notamment la production locale d’énergie, le développement des réseaux intelligents et l’auto-production ;
  • A la préservation du pouvoir d’achat des consommateurs et de la compétitivité des prix de l’énergie ;
  • A l’évaluation des besoins de compétences professionnelles dans le domaine de l’énergie et à l’adaptation des formations à ces besoins.

La Stratégie nationale bas-carbone donne les orientations stratégiques pour mettre en œuvre en France la transition nécessaire au respect des objectifs relatifs à la lutte contre le changement climatique. Elle définit une trajectoire de long terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre en France pour atteindre l’objectif à 2050 et fixe des « budgets carbone ». Il s’agit de plafonds d’émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser au niveau national sur des périodes de 5 ans.

Les budgets-carbone sont cohérents avec la trajectoire. Ainsi, pour chaque période est fixé un budget carbone plus bas que celui de la précédente.

La Stratégie nationale bas-carbone adoptée en 2015 a défini trois budgets carbone jusqu’en 2028 : pour les périodes 2015-2018, 2019-2023 et 2024-2028. Ils sont déclinés à titre indicatif par grands domaines d’activité.

La Stratégie nationale bas-carbone doit être revue d’ici fin 2018. Conformément au Plan climat, publié en juillet 2017, la révision de la SNBC intègrera l’objectif plus ambitieux (par rapport au facteur 4) de neutralité carbone à l’horizon 2050. Elle définira un 4ème budget-carbone pour la période 2029-2033. La Stratégie nationale bas carbone a fait l’objet d’une consultation avec garant du 13 novembre 2017 au 17 décembre 2017. Elle a reçu plus de 13 000 contributions.

Si vous souhaitez davantage d’informations concernant les sources émettrices de gaz à effet de serre vous pouvez vous reporter au site du ministère. Vous y trouverez à la fois les informations relatives aux émissions (inventairesainsi que les informations relatives aux actions de lutte contre les émissions.

Vous trouverez plus particulièrement le suivi de la stratégie nationale bas carbone.

La production et l’utilisation de l’énergie comptent pour une part importante des émissions de gaz à effet de serre. C’est pourquoi les objectifs politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont structurants pour la politique de l’énergie. Cependant, la politique de l’énergie aborde des sujets qui ne sont pas directement liés aux enjeux climatiques comme l’organisation de la sécurité d’approvisionnement, la flexibilité des réseaux, les enjeux de maîtrise des coûts de l’énergie.

Problème de compréhension d’un paragraphe relatif aux consommations d’énergie dans le bâtiment

Le début du paragraphe 3 est incompréhensible : « La consommation corrigée des variations climatiques est de l'ensemble résidentiel et tertiaire augmente jusqu'au début des années 2000, puis baisse légèrement depuis. La part dans la consommation totale est passée de 41,5 % en 1973 à 40,5 % en 1990, puis à 44,9 % en 2015 ». De quoi parle-t-on ?

Une coquille s’est effectivement glissée dans la phrase ; elle aurait dû se lire : « La consommation corrigée des variations climatiques de l'ensemble résidentiel et tertiaire augmente jusqu'au début des années 2000, puis baisse légèrement depuis. Sa part dans la consommation totale est passée de 41,5 % en 1973 à 40,5 % en 1990, puis à 44,9 % en 2015 ».

Lorsque les données sont dites « corrigées des variations climatiques », il s’agit de l’application d’une méthode statistique qui permet d’évaluer si la consommation d’énergie a baissé d’une année sur l’autre du fait de la météo ou de l’efficacité des équipements et des comportements. En effet, lorsqu’une année est plus froide, le besoin d’énergie pour le chauffage augmente. La méthode permet de comparer les années en reconstituant ce qu’aurait été la consommation si l’hiver avait été « standard ».

Si on suit les consommations avec des données corrigées des variations climatiques, depuis les années 2000, les consommations d’énergie liées à l’occupation des bâtiments (résidentiel et tertiaire) décroissent : cela signifie que les comportements et l’efficacité énergétique ont un effet à la baisse sur le total des consommations. En revanche, la part du bâtiment dans l’utilisation totale d’énergie en France augmente : cela signifie que les progrès en termes de comportements et d’efficacité énergétique de ce secteur sont plus faibles que ceux qui sont réalisés dans les autres secteurs (transports, industrie, agriculture).

Raisons de la mise en avant des secteurs bâtiment et transport

En 2016, l’utilisation des bâtiments (à la fois dans le résidentiel et le tertiaire) a consommé 43 % de l’énergie finale consommée en France, et le transport, 29 %. Ces secteurs représentent l’essentiel du défi de maîtrise de l’énergie. L’industrie compte pour 17 % et l’agriculture pour 3 %. Cela ne signifie pas que rien ne doit être fait pour l’industrie ni l’agriculture, mais que les bâtiments et les transports représentent les plus gros enjeux de la politique énergétique et ceux sur lesquels les citoyens ont le plus d’influence. C’est donc sur ces secteurs que le gouvernement a souhaité interroger le citoyen.

Il est à noter que les enjeux ne sont pas exactement les mêmes pour l’énergie et les émissions de gaz à effet de serre : l’agriculture est un contributeur significatif aux émissions de gaz à effet de serre du fait notamment des autres gaz que le CO2.

Enjeux de la consultation

Un des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie est d’organiser la substitution de sources d’énergie émettrices en gaz à effet de serre par des sources d’énergie n’en émettant pas, les énergies renouvelables. Conformément aux objectifs de développement des énergies renouvelables fixés par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : atteindre 32% de consommation d’énergies renouvelables en 2030 :

  • 40 % d’électricité d’origine renouvelable ;
  • 38 % de la consommation finale de chaleur d’origine renouvelable ;
  • 15 % de la consommation finale de carburant d’origine renouvelable ;
  • 10 % de la consommation finale de gaz d’origine renouvelable.

Il n’appartient pas à la programmation annuelle de l’énergie de s’interroger sur ces objectifs mais d’en organiser l’atteinte. Pour certains vecteurs, il existe plusieurs filières mobilisables pour remplir ces objectifs. Le dossier du maître d’ouvrage présente les informations relatives à chacune des filières dont il dispose et attend du citoyen qu’il lui dise ce qu’il pense : quelle filière devrait être plus ou moins promue par rapport aux autres ? Le gouvernement fera un choix sur la base des éléments objectifs et de ce retour citoyen.

Enjeux de réduction des consommations de ressources

Un des objectifs de la transition énergétique est de sortir d’un modèle trop intense en ressources pour aller vers un modèle qui le serait moins. La programmation pluriannuelle de l’énergie organise la réduction de l’utilisation d’énergie fossiles. La loi relative à la transition énergétique a également demandé au gouvernement d’élaborer un Plan Ressources pour la France qui propose des pistes d'actions pour réduire la dépendance de l'économie française vis-à-vis de ces ressources et pour maîtriser les impacts environnementaux associés à leur production et leur utilisation. Ces pistes d'actions ciblent à la fois la demande (il s'agit de limiter son augmentation qui demeure néanmoins inéluctable à court et moyen terme) et l'offre (notamment le recyclage) pour mieux en maîtriser les impacts environnementaux et sociaux.

Compréhension des chiffres d’emploi

La différence de statistiques que vous pointez entre le nombre d’emplois de la filière énergétique (138 900) et le nombre d’emplois de la filière nucléaire (220 000) est due à des questions de périmètre statistique : la filière énergétique ne compte que les emplois associés à la production d’énergie alors que la filière nucléaire compte également les emplois des sous-traitants dont l’activité principale n’est pas nécessairement la production d’énergie et qui ne sont donc pas classés dans la filière énergétique : ils sont comptabilisés dans les filières dont c’est l’activité principale : mécanique, BTP…

Eclaircissements sur les enjeux en termes de coûts

Les coûts de production par filière sont bien des coûts complets d’une installation de production d’électricité, de la genèse du projet au traitement en fin de vie de ses déchets.

Les évaluations des coûts pour l’Etat du soutien des énergies renouvelables dépend des prévisions que l’on peut faire sur le cours du marché de l’électricité. En effet, le soutien public principal prend la forme d’une compensation par l’État de la différence entre le prix de marché et un niveau de rémunération garanti qui reflète les coûts des installations. Si le prix de marché de l’électricité s’avérait plus haut que ce qui a été prévu, le coût pour l’Etat serait moindre et inversement.

L’enjeu de la programmation pluriannuelle de l’énergie ne concerne pas que les émissions de gaz à effet de serre du secteur énergie mais celles qui sont liées à la consommation d’énergie dans tous les secteurs

Les émissions de gaz à effet de serre liées au secteur de l’énergie sont celles strictement émises par les installations de production d’énergie, et elles sont assez faibles compte tenu de la faiblesse de la production nationale d’hydrocarbures et du caractère largement décarboné de l’électricité produite. Les substitutions d’énergie et les réductions des consommations qui sont organisées par la programmation pluriannuelle de l’énergie permettent d’éviter les émissions liées à l’utilisation d’énergies fossiles qui ne sont pas produites en France mais sont importées : le pétrole et le gaz notamment.