Vous êtes ici

Avis n°234

L'homme pense l'humanité ou il ne pense rien

Ajouté par Yves ANONYMISé (BERGHOLTZ), le
[Origine : Site internet]

Ouvrir le débat vers d'autres considérations que ce que nous pouvons penser en France.

Le réchauffement climatique est actuellement l'objet de nos préoccupations. La teneur en CO2 est probablement le facteur principal de ce phénomène. La lutte doit donc porter sur la diminution d'émission du CO2. Dans le domaine de l'énergie, la solution viendrait des énergies renouvelables : produire plus d'énergie sans CO2. Prenons l'exemple des éoliennes, sans prendre en considération le bruit, les oiseaux tués, les terres agricoles perdues, l'intermittence de la production, les très grandes lignes électriques à construire, la déconstruction, etc. Ne prenons en compte que la fabrication. C'est tout d'abord une génératrice de courant qui est parfois constituée de « terres rares » (métaux rares qui sont issus principalement de Chine), du cuivre (qui devient rare aussi), de l'argent, c'est ensuite un mât de 80 m en acier avec peinture, c'est aussi un socle de 400 m3 de béton qui est fait de sable (qui commence à devenir rare car ça ne peut pas être n'importe quel sable) et de ciment, puis le transport de tous ces matériaux. Pour fabriquer une éolienne le résultat en CO2 de toute cette énergie ramené à sa durée de vie est de : 6 g de CO2/kwh produit, ce qui est bien moins qu'une centrale au gaz naturel qui est à 800 g, au photovoltaïque qui est à 60 g/KWh, Le nucléaire est à 6 g/KWh (comme l'éolien). Malheureusement les énergies renouvelables ne sont donc pas un miracle : plus on en développe plus on génère du CO2, cela constitue le mur de la physique. La seule vraie solution est donc de ne pas consommer d'énergie ni de CO2 : ne pas construire (sauf si nécessité), ne pas transporter, en limiter la consommation (isoler sa maison, agriculture proche, fabrique proche, transports en commun, voiture électrique partagée pour les petits trajets ...). Comme il existe un temps de retour sur investissement, il faudrait un temps de retour sur CO2. On éviterait ainsi des décisions qui relèvent plus des idéaux que de la physique. Deux exemples : la construction de la seule batterie d'une Zoe génère 45 à 100 g CO2/km, la mise en place d'un panneau chauffe-eau solaire en toiture a un bilan Carbonne inégalable.

Le second volet concerne les autres pays (Le Maroc, l'Algérie, Le Sénégal, l'Indonésie, l'Inde, la Chine... les Iles... ). Ces pays veulent vivre comme des occidentaux et bénéficier de l'enseignement, des soins, de l'hygiène, etc. Pour atteindre notre niveau de développement ce monde va consommer de l'énergie (« renouvelable » ou pas). On s'attaque ici au mur de la fourniture : la terre n'est pas infinie, tout particulièrement les matières premières qui servent à construire. Dit autrement, la terre et ses ressources sont limitées. Il existe même un mot pour qualifier l'air géologique que nous vivons : l'antropocène, c'est l'empreinte écologique mondiale qui correspond actuellement 1,5 fois ce que produit la terre : on « tire » sur les stocks. Quelques exemples (approximatifs, mais significatifs) de dates de fin de stocks (voir https://www.encyclo-ecolo.com/Epuisement_des_ressources) :
- 2012, fin du terbium : Le terbium est un élément chimique, de symbole Tb et de numéro atomique 65. Le terbium est utilisé dans les lampes à basse consommation.
- 2018 : fin du hafnium (Hf) Les gisements exploitables de hafnium à un coût acceptable seront épuisés autour de 2018. Le hafnium est utilisé pour les processeurs, comme isolant remplaçant le dioxyde de silicium SiO2.
- 2024, la fin du chrome (Cr 24), présent à 100 ppm dans la croûte terrestre. La production minière de chrome (chromite) était de 19 755 236 tonnes en 2006 et de 7 394 684 sous forme de chrome métal.
- 2025 Le néodyme, constitue en terme de coûts la partie la plus importante d'un aimant néodyme-ferbore. Son prix a été multiplié à peu près par 5 entre janvier 2011 et juin 2011.
- 2030 : fin du plomb (Pb 82) : les gisements exploitables à un coût acceptable seront épuisés en 2030 ; 71% de la production utilisés pour les batteries.
     ... .
- 2158 : fin du charbon : La consommation de charbon dans le monde représente 184 000 kilos par seconde, soit 5,8 milliards de tonnes.
Ainsi quand les pays riches se gaussent d'installer de l'énergie renouvelable en fait ils pillent la planète. On assiste à l'installation de photovoltaïque dans des lieux ayant 10 fois moins d'ensoleillement que des zones tropicales ; à la construction d'éoliennes dans des endroits nécessitant des kms de lignes électriques, une mise en coupe réglée des matières premières.

N'y aurait-il pas de solution donc ? Si, peut-être. J'en vois 2 : la première et la plus simple, on continue de faire n'importe quoi (ex : les riches sont encore plus riches) et on va dans le mur. L'humanité disparaitra de la terre, la nature reprendra ses droits. Car il ne faut pas l'oublier, en définitive quelque soit les décisions humaines la nature gagnera avec ou sans nous (Hubert REEVES). L'enjeu n'est pas la biodiversité mais l'avenir de l'espèce humaine. Nous en arrivons donc à la seconde solution : conservons le plus possible les matières premières et les métaux rares ou précieux pour les pays en voie de développement, aidons-les. Ils feront du renouvelable. Pour les pays riches, faisons marcher nos installations actuelles le plus longtemps possible en les rendant plus sûres et plus performantes. Développons encore le recyclage pour nos usines. N'oublions pas que l'immigration massive modifiera tout autant notre pays qu'un désastre écologique local. Plus d'obsolescence programmée (par les industriels ou par politique), taxons au juste prix les produits en fonction de leur impact de pollution (actualisons le « pollueur/payeur » au CO2). Faisons de l'égalité et de la fraternité une devise universelle : égalité des matières premières au prorata des habitants, fraternité en accordant des écarts au prorata du matériel universel produit ?

Mais la France ? On fait quoi de nos centrales nucléaires ? Pour certains cette question est l'alpha et l'Omega. La réponse est simple : être pragmatique. En tout cas, pour une fois, il ne faudra pas faire comme l'Allemagne qui a toujours 900kg de CO2/habitant (48 000 morts par an) alors que la France est à 450kg (20 000 morts quand même). Il ne faut pas non plus faire comme les russes avec des centrales instables (Tchernobyl) ou les japonais (centrales à eau bouillante). A la rigueur on peut faire (et on a fait) comme les américains qui ont eu un accident comparable à Tchernobyl et Fukushima mais qui n'ont eu qu'un mort (crise cardiaque au volant de sa voiture) et une pollution sur 40 m x 40 m à Three mails Islande. Comparer ces 3 installations revient à dire qu'un moteur à essence, au gazogène ou au gasoil sont identiques. Le risque existe, il est là, mais soit nous l'assumons soit nous allons piller les pays en voie de développement pour que nous ayons chez nous une énergie « propre ». Cela rappelle ce que l'Europe a fait pendant les siècles précédents : profiter et exploiter les autres. Malgré tout il faudra quand même renouveler des installations. Des pistes apparaissent pour les pays dits occidentaux : des mini-réacteurs qui n'ont pas besoin de sources électriques en ultime sécurité ou d'autres qui permettent la transmutation des matières fissiles et des recyclages.

Nous en arrivons au mur de la réalisation. Prenons l'Alsace : pour remplacer la production d'électricité de 2 tanches de 900mw (Fessenheim) il faut installer 2348 éoliennes de 2,5 Mw (il y a 3372 km2 cultivés en Alsace) qui reposeront sur l'équivalent cumulé d'un socle en béton de 40 stades de football (40x105mx 68m/stade) de 3,2 m d'épaisseur. Cette solution nécessite le triplement des lignes électriques pour évacuer la puissance en cas de vent et 1800 Mw supplémentaires en cas de manque de vent (voir l'Allemagne). Etant donné notre histoire et notre géographie la mise en place d'énergie renouvelable ne peut donc être qu'un complément, utile et intéressant. La meilleure énergie reste malgré tout celle qui n'est pas consommée.

Je crois sincèrement que nous pouvons vivre avec la nature. C'est à l'homme de faire des efforts : aux pays riches de prendre en charge certains risques pendant que les autres se développent et assument leur part. Je suis trop âgé pour voir l'issue finale, j'espère que vous prendrez les bonnes décisions en sachant éviter les amalgames. En conclusion, je résumerais ma pensée comme le disait un philosophe : l'homme pense l'humanité ou il ne pense rien.