QUESTION 608 -
Posée par Joëlle DEBELLEIX, le 03/12/2013
Question posée dans le cahier d'acteurs de Mme Joëlle DEBELLEIX : Avez-vous pris en compte, alors que l’écorce terrestre est toujours en mouvement et en transformation, les risques d’effondrements des souterrains et d’écrasements des déchets ? Quel est le degré d’écrouissage et de ductilité des matériaux utilisés pour ce stockage ? N’y a-t-il pas de risques que ces colis subissent des déformations et des détériorations dans le temps d’autant plus si l’on considère le nombre d’années pris en compte, c’est-à-dire des milliers voir des millions d’années selon les radionucléides avant que ces derniers ne perdent leur dangerosité ? Dans le Journal du dimanche du 12 mai 2013 (par Matthieu Pechberty), Thibaud Labelette directeur du projet à l’Andra ose dire : « Les conteneurs en acier se désintégreront dans quelques centaines d’années, mais l’enveloppe imperméable de l’argile permet de contenir la radioactivité pendant 100.000 ans. » Comment M. T.Labelette peut-il apporter avec tant de certitude et de désinvolture une telle affirmation ? N’est-ce pas au mépris des générations futures ? Un peu plus haut dans l’article, je lis : Un ingénieur projette sur la paroi des dizaines de litres d’eau : « Nous tentons de ramollir l’argile pour creuser plus facilement. » Où est la soi-disant imperméabilité protectrice de l’argile ? Cela ne me paraît pas très sérieux. Plus loin dans l’article, M. Labelette parle du coût de Cigéo. Il dit : « Les discussions ne sont pas simples avec EDF, qui veut limiter les dépenses… Mais nous ne transigerons pas sur la sûreté ». Sommes-nous donc dans un jeu télévisé où le prix est donné au hasard du petit bonheur la chance ?
Réponse du 10/02/2014,
Réponse apportée par l’Andra, maître d’ouvrage :
Concernant vos questions relatives aux ouvrages de stockage
Les matériaux utilisés pour le stockage (béton, acier) sont de même nature que ceux classiquement utilisés pour le soutènement d’ouvrages souterrains (tunnels, canalisations…). L’épaisseur des ouvrages de stockage sera dimensionnée pour garantir la sûreté des opérations pendant toute la phase d’exploitation de Cigéo. Après la fermeture du stockage, les colis contenant les déchets radioactifs et les ouvrages souterrains se dégraderont petit à petit au contact de l’eau contenue dans la roche. C’est là que l’argile prend le relais pour retenir les radionucléides et freiner leur déplacement. Le stockage permet ainsi de garantir leur confinement sur de très longues échelles de temps. Seuls des radionucléides mobiles et à vie longue, plus particulièrement l’iode 129 et le chlore 36, pourront traverser la couche d’argile du Callovo-Oxfordien sur une durée d’un million d’années. Cette migration s’effectuant majoritairement par diffusion dans une forte épaisseur d’argile, ces radionucléides parviendront aux limites de la couche argileuse de façon très étalée dans le temps et très atténuée. Les études ont montré que le stockage n’aura pas d’impact avant 100 000 ans et que celui-ci sera très inférieur à l’impact de la radioactivité naturelle.
Concernant votre question relative aux coûts
Le coût global du stockage couvre la mise en sécurité définitive de tous les déchets français de haute activité et de moyenne activité à vie longue, produits par les installations nucléaires françaises depuis les années 1960 et qui seront produits par les installations nucléaires actuelles jusqu’à leur démantèlement. L’Andra doit évaluer toutes les dépenses sur plus de 100 ans : les études, la construction des installations en surface et en souterrain, les équipements, le personnel, la maintenance, l’électricité, les assurances, les impôts, les taxes… L’évaluation de tous ces coûts est un travail complexe qui demande du temps. Aucun autre projet industriel n’est évalué aussi loin dans le temps.
L’Andra a lancé en 2012 les études industrielles avec des maîtres d’œuvre spécialisés qui apportent leur retour d’expérience sur d’autres projets industriels (construction de tunnels, d’ateliers nucléaires, d’usines…). Un travail important est réalisé sur les outils et les méthodes de chiffrage pour apporter le maximum de robustesse à l’estimation du coût du stockage et prendre en compte l’ensemble du retour d’expérience disponible sur les installations nucléaires existantes et sur d’autres installations industrielles ou ouvrages souterrains de grande envergure.
L’Etat a demandé à l’Andra de finaliser son nouveau chiffrage en 2014 après prise en compte des suites du débat public et des études d’optimisation en cours. Sur cette base, le ministre chargé de l’énergie pourra arrêter une nouvelle estimation après avis de l’Autorité de sûreté nucléaire et observations des producteurs de déchets. La loi du 28 juin 2006 stipule que c’est le ministre qui rend publique cette nouvelle évaluation.
Le cadre législatif et réglementaire qui s’applique à l’Andra, futur exploitant du stockage s’il est autorisé, est très clair et donne la priorité à la sûreté. Outre les limites strictes imposées par les textes, ceux-ci imposent également aux exploitants d’abaisser autant que possible le niveau d’exposition des populations au-delà des limites fixées par la réglementation. L’Andra, comme tous les exploitants, est soumise à ces exigences réglementaires, qui sont de plus complètement cohérentes avec sa mission, qui est de mettre en sécurité les déchets radioactifs, afin de protéger l’homme et l’environnement sur le long terme.