Réponse du 10/02/2014,
Réponse apportée par le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie :
En France, le transport de matières nucléaires est soumis au Code de la Défense. Le Haut Fonctionnaire de Défense et de Sécurité, placé auprès du ministre de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie (MEDDE) est chargé du respect des règles de confidentialité. Celles-ci s'imposent à tous les intervenants (pouvoirs publics, exploitants, transporteurs, etc.) lors de la préparation et l'exécution des transports de matières nucléaires.
La réglementation relative au transport des combustibles usés et des déchets radioactifs impose au transporteur de ne pas communiquer les itinéraires précis pour des raisons de sécurité. Le trajet emprunté est validé par les autorités compétentes et sa diffusion est restreinte.
48 heures avant le transport, le COGIC (Centre Opérationnel de gestion interministérielle de crises) informe l’ensemble des autorités compétentes et les services de sécurité de l’Etat au niveau national ainsi que les services de sécurité et d’intervention dans les régions et les départements concernés.
S’agissant du transport de substances radioactives, le transporteur est tenu de respecter la réglementation en vigueur et de s’assurer de l’absence de danger pour les populations et l’environnement. Les autorités et services de sécurité de l’Etat compétents sont informés du parcours du transport afin d’être en mesure d’agir et d’informer la population si cela le nécessitait.
Dans une entreprise, le droit de retrait correspond au droit, pour un salarié confronté à un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, d’arrêter son travail et, si nécessaire, de quitter les lieux pour se mettre en sécurité.
Réponse apportée par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) :
La sûreté des transports de substances radioactives à usage civil est contrôlée en France par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), sur la base d’inspections et de l’instruction de demandes d’agrément d’emballages. Ce contrôle vise à assurer la protection des personnes et de l’environnement. Il porte sur la conception des emballages et les opérations de transports qui sont soumises à des contraintes réglementaires rigoureuses.
Les emballages doivent notamment assurer un confinement des substances radioactives transportées et fortement réduire le rayonnement à l’extérieur du colis.
De façon plus spécifique, le débit de dose à proximité du véhicule ne doit pas dépasser certains plafonds. En pratique, les niveaux relevés sont en général beaucoup plus faibles que ces plafonds. Même si ces plafonds étaient atteints, une personne devrait rester 10 heures à deux mètres du véhicule pour que le rayonnement reçu atteigne la limite annuelle d’exposition du public.
Concernant les risques en cas d’accident, les modèles de colis sont soumis à des épreuves réglementaires destinées à démontrer leur résistance lors du transport. Le niveau d’exigence de ces épreuves est proportionné à la dangerosité des substances transportées. À titre d’exemple, les modèles de colis correspondant aux substances les plus dangereuses doivent conserver leurs fonctions de sûreté, y compris en cas d’accident (simulé par une chute de 9 m sur une surface indéformable, une chute de 1 m sur un poinçon, un incendie d’hydrocarbure totalement enveloppant de 800° C minimum pendant 30 mn, une immersion dans l’eau à une profondeur de 200 m).
Les autorités se sont naturellement interrogées depuis plusieurs années sur le comportement des colis agréés dans des cas d’agressions allant au-delà de ces épreuves réglementaires décrites précédemment.
Des études ont été menées en France et à l’étranger, notamment par l’IRSN, AREVA, l’autorité allemande BAM (Bundesanstalt für Materialforschung und –prüfung) et le laboratoire national américain SANDIA, afin d’évaluer le comportement des colis contenant des substances radioactives dans des conditions réalistes d’impact mécanique et de feu et pouvant aller au-delà des sollicitations prévues par les épreuves réglementaires. Ainsi, la tenue de ces types de colis dans des conditions de feu plus contraignantes (en termes de durée et de température) et dans des conditions de chute plus réalistes (en termes de surface d’impact et de hauteur de chute) a été étudiée. Par exemple, une étude de l’IRSN consultable sur le site Internet de l’institut[1] permet de comparer l’écrasement du colis sur une surface indéformable, comme prévu dans les épreuves réglementaires et sur des surfaces représentatives de cibles réelles : par exemple des sols en sable, argile ou des cibles métalliques représentatives de l’environnement des emballages durant le transport dont l’essieu de wagon et le longeron de wagon. Cette étude a montré que les colis considérés dans l’étude conserveraient leur capacité de confinement en cas d’accident réel et que leurs équipements additionnels (châssis et râtelier) ainsi que les cibles absorberaient une part importante de l’énergie d’impact et augmenteraient ainsi les marges de sûreté.
D’autres études ont été réalisées à l’étranger concernant le transport ferroviaire de colis de substances radioactives. Par exemple :
- l’institut allemand (BAM) a réalisé des essais visant à représenter un scénario d’accident impliquant une explosion d’un wagon citerne chargé de propane à proximité d’un colis de type CASTOR contenant du combustible irradié De façon à être plus pénalisant, le colis de combustible n’était pas muni de ses capots amortisseurs. L’essai a entraîné une boule de feu ainsi que des flammes allant au-dessus du point d’explosion. Le colis de substances radioactives a été projeté à 7 m de sa position initiale et s’est enfoncé de 1 mètre dans le sol. Toutefois, les tests d’étanchéité, réalisés après essai, ont montré que l’emballage restait étanche, il n’y a donc pas eu d’augmentation des conséquences de l’accident lié au caractère radiologique du contenu de l’emballage transporté[2].
- Le BAM a également réalisé une simulation numérique visant à évaluer l’impact d’une chute sur des rails à une hauteur de 14 m d’un colis contenant des déchets vitrifiés de haute activité qui aurait été préalablement endommagé par une entaille de 12 cm. Le BAM a conclu que l’emballage restait intact[3].
- La « Central Electricity Generating Board for England and Wales » a organisé un crash-test public consistant à faire entrer en collision un train de 140 t roulant à 160 km/heure dans un colis de combustible irradié de type B. Les vidéos du crash-test disponibles sur Internet montrent que le combustible est resté confiné dans l’emballage[4].
En France, aucun accident ferroviaire ayant impliqué des colis de combustible usé n’a à ce jour été rapporté.
La dernière ligne de défense de la sûreté des transports de substances radioactives repose sur les moyens d’intervention mis en œuvre face à un incident ou un accident. Les pouvoirs publics, l’ASN et les exploitants se préparent donc à la gestion des situations de crise impliquant un transport de substances radioactives à travers les plans ORSEC et au moyen d’exercices.
Réponse apportée par AREVA :
La sûreté des transports est un des facteurs clés du succès de Cigéo. En France, les premiers transports de substances radioactives liés à l’industrie électronucléaire ont débuté dans les années 60. Aujourd’hui, on estime à environ 11 000 par an le nombre total de transports nécessaires au cycle du combustible pour l’activité électronucléaire. Les exigences des autorités nationales et internationales en termes de sûreté et de sécurité de transport n’ont cessé de se renforcer. Les matières et déchets radioactifs sont transportés dans des « emballages » de haute technologie et agréés par l’Autorité de Sûreté Nationale. Le retour d’expérience de plusieurs dizaines d’années confirme le haut niveau de sûreté mis en œuvre : aucun accident ayant eu des conséquences radiologiques n’est à déplorer.
La résistance des emballages est testée en conditions extrêmes. En effet, la sûreté nucléaire repose d’abord sur l’emballage. Les emballages utilisés sont conçus pour assurer la protection des personnes et de l’environnement en toutes circonstances, tant dans des conditions normales que dans des situations accidentelles.
Les emballages destinés aux transports des déchets les plus radioactifs sont conçus pour être étanches et le rester même en cas d’accident (collision, incendie, immersion…). Leur étanchéité maintenue même en situation extrême permet de prévenir le risque de contamination. Par ailleurs, ces emballages sont composés de plusieurs types de matériaux permettant de réduire les niveaux d’exposition aux rayonnements pour les rendre inferieurs aux limites fixées par la réglementation. Celle-ci établit que la quantité de rayonnements reçus par une personne qui resterait à 2 m du véhicule pendant une heure n’excède pas la limite de 0,1 mSv quel que soit le type de déchets transporté. A titre de comparaison, l’exposition moyenne annuelle de la population française à la radioactivité naturelle est de 2,4 mSv. Enfin, la France a mis en place un dispositif national pour gérer de potentiels accidents. Les autorités s’appuient sur les dispositifs mis en place dans le cadre des plans ORSEC et à leur déclinaison départementale. Les Préfectures sont averties par le Centre Opérationnel de Gestion Interministérielle de Crises (COGIC) des transports transitant par leur département ; ce dernier assure, entre autres missions, sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur, des responsabilités opérationnelles dans le domaine de la gestion et du suivi des transports.
AREVA au travers de sa filiale AREVA TN dispose, par ailleurs, d’un plan d’urgence interne spécifique appelé PUI-T. Celui-ci couvre les phases d’alerte, d’analyse de la situation et d’intervention sur le terrain suite à un incident ou un accident de transport de matières radioactives. Il permet à AREVA TN de mettre à la disposition des autorités compétentes des moyens humains spécialisés et des matériels spécifiques. L’ensemble de ce dispositif est testé, en moyenne, chaque année à l’échelon national avec les principaux acteurs et notamment les autorités compétentes.
Concernant le dispositif d’information autour des transports, la loi de 2006 relative à la Transparence et à la Sécurité en matière Nucléaire, aujourd’hui codifiée dans le Code de l’environnement, fixe notamment les conditions d’information autour des transports de substances radioactives. Ainsi, pour garantir la sécurité du transport afin d’empêcher tout détournement, les itinéraires, dates et horaires ne sont pas communiqués.
Les transports de substances radioactives répondent aux exigences de l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique) contre le détournement de substances. Le COGIC, sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur, informe l’ensemble des parties prenantes au transport : les autorités nationales et départementales, les services de l’Etat concernés ainsi que les intervenants dans l’éventuelle mise en œuvre d’un plan ORSEC, notamment les Préfets des départements concernés. Le Président de la Commission Locale d’Information CLIs peut être également informé de la réalisation d’un transport quelques jours avant sa date.
[1] http://www.irsn.fr/FR/Larecherche/publications-documentation/aktis-lettre-dossiers-thematiques/RST/RST-2002/Documents/Chap03_art1.pdf
[2] http://www.tes.bam.de/de/umschliessungen/behaelter_radioaktive_stoffe/dokumente_veranstaltungen/pdf/rmtp1999104231.pdf
[3] http://www.tes.bam.de/en/umschliessungen/behaelter_radioaktive_stoffe/behaelterpruefungen/index.htm
[4] http://www.britishrailways.tv/train-videos/2012/100mph-nuclear-flask-train-crash-test/