QUESTION 1518 -
Posée par Geoffroy MARX, (VERDUN), le 30/01/2014
Questions posées dans le cahier d'acteurs n°139 de M. Geoffroy Marx : Il en va de l'économie comme de la politique : les changements sont fréquents et imprévisibles. Grande dépression de 1929 à 1937, chocs pétroliers de 1973 et 1979, crise financière de 2007 à 2010. Certains pays frôlent la faillite (le Mexique dans les années 90, l'Argentine et la Russie en 1998, la Grèce ou le Portugal aujourd'hui). Ces crises influent sur les priorités de financement. Aujourd'hui, pour équilibrer les ocmptes, on remet en cause le financement des énergies renouvelables, de certaines aides sociales ou d'avantages fiscaux aux entreprises et on abandonne des grands travaux ; demain ça sera le projet Cigéo qui sera considéré comme un gouffre financier. Cette hypothèse d'une cessation de paiement est-elle envisagée dans les études de l'Andra? Dans quelles mesures le budget prévisionnel du projet Cigéo prend-il en compte les incidents et les retards qui ne manqueront pas de se produire? Quelles sommes seront provisionnées au démarrage du projet aifn d'en garantir non seulemet la viabilité économique et financière mais également la sureté et la sécurité? Le coût d'une catastrophe majeure a-t-il d'ors et déjà été estimé? Est-il couvert par une assurance?
Réponse du 10/02/2014,
Réponse apportée par l’Andra, maître d’ouvrage :
La question de la protection de l’homme et de l’environnement vis-à-vis de la dangerosité des déchets radioactifs se pose quel que soit le mode de gestion envisagé. Ces déchets ont été produits en France depuis une cinquantaine d’années par les premières installations nucléaires, aujourd’hui arrêtées, et par les installations nucléaires actuelles, dont le démantèlement produira également des déchets radioactifs. Notre génération est donc responsable de mettre en place des solutions de gestion sûres pour ces déchets et de ne pas reporter la charge de leur gestion sur les générations suivantes. Ces principes sont inscrits dans le code de l’environnement par la loi du 28 juin 2006.
Le Parlement a fait le choix de confier la gestion à long terme des déchets radioactifs à un établissement public pérenne directement rattaché à l’Etat, l’Andra, et non à une entreprise privée. Si Cigéo est autorisé, il est effectivement important que l’Andra dispose des ressources nécessaires pour exploiter en toute sécurité le site pendant toute sa durée.
Conformément à la loi du 28 juin 2006, les producteurs de déchets radioactifs (EDF, CEA, Areva) doivent prévoir les ressources nécessaires à la construction, à l’exploitation et à la fermeture de Cigéo sur toute sa durée. Cela se traduit par l’enregistrement de provisions dans leurs comptes et par la sécurisation de ces ressources au travers de placements (« actifs dédiés »), sous le contrôle de l’Etat. Les provisions sont constituées dès aujourd’hui pour couvrir les charges à financer par les producteurs, et sont sanctuarisées dans des placements qui ne peuvent être sujets à des coupes budgétaires. Pour un nouveau réacteur nucléaire, sur l’ensemble de sa durée de fonctionnement, le coût du stockage des déchets radioactifs est de l’ordre de 1 à 2 % du coût total de la production d’électricité. L’évaluation des coûts réalisée par l’Andra comprend le chiffrage des risques et des aléas.
Le cadre législatif et réglementaire qui s’applique à l’Andra, futur exploitant du stockage s’il est autorisé, est très clair et donne la priorité à la sûreté. Outre les limites strictes imposées par les textes, ceux-ci imposent également aux exploitants d’abaisser autant que possible le niveau d’exposition des populations au-delà des limites fixées par la réglementation. L’Andra, comme tous les exploitants, est soumise à ces exigences réglementaires, qui sont de plus complètement cohérentes avec sa mission, qui est de mettre en sécurité les déchets radioactifs, afin de protéger l’homme et l’environnement sur le long terme.
En ce qui concerne le coût d’un éventuel accident, les risques nucléaires sont couverts par un régime spécifique de responsabilité civile nucléaire régie en France par les conventions de Paris et de Bruxelles. Celles-ci définissent notamment les dommages rattachés à ces risques, l'indemnisation des victimes et les niveaux de garanties requis. Plusieurs tranches de garanties sont prévues : une première à la charge de l'exploitant (qui doit faire l'objet d'une garantie financière, un contrat d'assurance par exemple), une seconde à la charge de l'Etat et enfin une dernière à la charge d'un fonds international.
En France, l’IRSN conduit des travaux sur le coût économique des accidents nucléaires entraînant des rejets radioactifs dans l’environnement. Selon les évaluations réalisées par l’IRSN, un accident grave représentatif engendrerait un coût global de quelque 120 milliards d'euros. Un accident majeur pourrait coûter plus de 400 milliards d’euros. http://www.irsn.fr/FR/Actualites_presse/Actualites/Pages/20130219-Travaux-recherche-IRSN-cout-economique-accidents-nucleaires.aspx
Cependant, ce type d’accident ne peut s’appliquer à Cigéo : Cigéo n’est pas une centrale nucléaire mais un centre de stockage situé à 500 mètres de profondeur, qui sera peu vulnérable aux activités humaines comme aux catastrophes naturelles. L’évaluation réalisée par l’Andra, à ce stade des études, de l’impact des scénarios accidentels montre que leurs conséquences resteraient limitées, et nettement en-deçà du seuil réglementaire qui imposerait des mesures de protection des populations (mise à l’abri, évacuation).