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Avis n°140

Les cadres " Chambragri 71 " sont de sortie

Ajouté par Jacquy LIEVRE (St-Ythaire), le
[Origine : Site internet]

Trois points de vue similaires de chefs de service de la Chambre d'Agriculture le même jour (Avis 136 - 137 - 139) : on l'aura compris la Chambre soutient le projet et ses salariés sont mobilisés pour le faire savoir. Ce n'est en rien une surprise quand on a pu voir la virulence du Président de cette Chambre pendant les réunions publiques, celui-ci se comportant comme si les opposants au projet Center Parcs étaient des détracteurs de l'agriculture et des agriculteurs en général.
La question à se poser est : pourquoi un tel engagement du milieu agricole, dans ses instances majoritaires, en soutien de ce projet ? Pourquoi en ces temps où la profession est si malmenée par le système économique en place, ses représentants choisissent-ils d'investir une telle énergie pour soutenir l'implantation de Pierre & Vacances ?
L'atelier Agriculture a montré que même si les promesses du Center Parcs étaient tenues - les restaurants du centre de vacances alimentés en partie par des produits locaux - les volumes concernés seraient minimes par rapport à la production départementale ; ils seraient très, très loin d'être en mesure de modifier en quoi que ce soit la situation économique des agriculteurs du 71. Et pourtant dans son cahier d'acteur la Communauté de Communes de Charolles, à l'unisson avec la Chambre d'Agriculture, ose écrire : " les revenus moyens des éleveurs allaitants sont au plus bas [...] l'implantation du Center Parcs est l'opportunité d'inverser [cette] tendance ".
Il faut prendre cet engagement et ces déclarations comme un aveu d'impuissance !
La situation est grave et il est nécessaire pour eux de montrer qu'ils agissent. Soutenir l'installation du Center Parcs en y plaçant des espoirs, bien que dénués de tout réalisme, c'est montrer que l'on est actif ; même si c'est simplement en confiant son sort à une sorte de messie qui viendrait sauver le Charolais. " Pierre & Vacances mon espérance est en toi " comme dit la chanson entonnée par le Geai du Rousset le 4 juillet aux portes du débat public !
Le paradoxe est que cet espoir placé dans des accords avec une multinationale du tourisme s'exprime au moment même où les agriculteurs manifestent bruyamment pour essayer de se sortir des griffes du réseau d'intermédiaires qui les étrangle, grande distribution et industriels du secteur principalement. Comment leurs représentants peuvent-ils dans ce contexte présenter Pierre et Vacances et le groupe Elior qui gère la restauration des Center Parcs comme une solution ?
Cet activisme en faveur du projet ressemble fort à un rideau de fumée qui masque l'absence d'engagement vers de vraies solutions, capables de modifier la trajectoire critique sur laquelle sont engagés un grand nombre d'agriculteurs. Trouver des ennemis - les écologistes en général, les citoyens qui regrettent que le Département s'endette pour ce tourisme hors-sol et d'un autre temps, en particulier - est plus facile que de se remettre en cause. Imaginer que la solution aux problèmes du monde rural arrivera clé en main, portée par un généreux entrepreneur extérieur à notre région est moins compliqué que d'aider les producteurs locaux à se reconvertir dans une agriculture paysanne, portée sur la qualité et restant dans des dimensions humaines qui leur permette de vivre décemment de leur travail.

Nous invitons donc le monde agricole à ne pas se laisser leurrer. Center Parcs n'apportera aucun remède significatif à sa situation. Les AOC de Saône et Loire n'ont pas besoin d'être associés à cette forme de tourisme pour que leur valeur soit connue et reconnue. Les touristes captés par le Center Parcs encombreront les routes deux fois par semaine mais ne modifieront pas les cours de la viande.
Par contre les fonds publics placés dans cet équipement géant seraient infiniment utiles pour aider à monter des projets donnant de l'autonomie aux exploitants agricoles, créer des structures de transformation et de commercialisation indépendantes des multinationales, diversifier les activités.
Alors, chers agriculteurs, il est encore temps de dire " Center Parcs ce n'est pas ce qu'il nous faut, c'est inutile et trop cher. Pour nous, c'est non ! ".