DEBAT AVEC LA SALLE
Question de la salle 9
Thématiques : développement économique - financement
François KALFON, Conseiller Régional Ile-de-France, Président de la Commission des Transports : Non, il n’y a aucun problème, car patience et longueur de temps font plus que force ni que rage.
Moi, j’ai beaucoup aimé les interventions de Monsieur VERON, en ce sens qu’il nous a dit à plusieurs reprises à quel point ce projet de la SGP et sa concrétisation avec des transports étaient la logique de faire un effet de levier, de faire en sorte qu’enfin l’Ile-de-France, la région-métropole bougent. Moi, je trouve que cette approche, d’une certaine manière, est une forme d’utopie concrète que vous nous avez présentée. Je retiens l’utopie, parce qu’il faut des visionnaires. Mais je retiens aussi la dimension concrète de la vie des Franciliens, qui pour le coup ne relève pas de l’utopie. J’ai à côté de moi, à ma droite, le représentant des usagers de la ligne D du RER. Nous en avons longuement parlé. Je pense qu’au fond finalement, si nous voulons sortir par le haut de ce débat public, de cet effet de levier auquel nous participons tous (usagers, élus, etc.), il faut que nous puissions simplement trouver les axes de convergence possibles.
Je précise, parce que je ne me suis pas présenté, que je suis élu de Seine-et-Marne, du Nord, à Noisiel, et par ailleurs Conseiller régional et Président de la Commission des Transports à la Région. Je pense que nous devons avancer, car le bon sens, dans le quotidien et dans l’utopie, nous force à dire qu’il va falloir dans le temps trouver des éléments de convergence. Mais cela veut dire aussi régler un certain nombre de problèmes.
Vous avez parlé un peu, j’évacue cela, de la question du débat Arc Express. Je tiens à dire, comme élément, puisque c’est pour réagir à ce que vous avez avancé, qu’Arc Express n’est que l’un des aspects d’un plan de mobilisation qui, pour le coup, ne relève pas de l’utopie puisqu’il est phasé, cadencé, et arrive semaine par semaine, mois après mois, année par année. Par exemple, dès 2011, c’est le prolongement de 3 lignes de tramways supplémentaires, de 3 lignes de métro et c’est la création ex nihilo d’une ligne de tramway. Ce sont des choses très concrètes. Quand je parle de bus à haut niveau de service public, Jean-Jacques FOURNIER en parlait, le TZen qui va relier ces polarités de Sénart et de l’Essonne, c’est concret. J’ai vu ce chantier qui est extraordinaire, et j’imagine que vous viendrez avec nous voir à quel point cette réalisation va permettre d’améliorer la vie concrète des habitants. Mais, bien évidemment, il ne faut pas opposer concret et utopie. Tout à l’heure, nous avons cité Sénèque. Jean Jaurès disait que pour aller à l’idéal, il faut comprendre le réel et partir du réel. C’est bien relier les deux éléments qu’il nous faut.
Là, nous revenons quand même sur cette question de financements. 22 ou 23 milliards, je suis d’accord avec vous, nous ne sommes pas à 1 milliard près, surtout pour un projet en 2025. J’ai 42 ans, j’en aurai…enfin nous pouvons compter. Mais après tout, quand nous plantons un arbre, c’est quelque chose d’important. Pour savoir comment vont se faire les financements dans l’avenir, ce n’est pas mal de revenir sur le passé. Moi, j’ai le souvenir, en avril 2009, d’un discours du Président de la République qui nous parlait d’un financement de l’ordre de 35 milliards d’euros pour les transports en Ile-de-France. Le plan de mobilisation de la Région est de 19 milliards. Il y a 12 milliards qui sont déjà amenés. Bien évidemment, à date, s’il n’y a pas de décision de convergence intelligente qui nous permettre de construire les choses, nous n’y arriverons pas. Dans ce même discours, le Président avait saisi Gilles CARREZ d’un certain nombre de leviers de financements. Nous aimerions savoir où nous en sommes. Par exemple, vous avez parlé du versement transport (c’est en voie de finances rectificatives pour ces éléments-là), mais il y a beaucoup d’autres éléments de financement sur lesquels nous aimerions voir les choses. Par exemple, nous parlons des premiers 4 milliards, en loi de finances rectificatives, par un fond (un peu comme le fonds de réserve des retraites dont nous voyons à quel point il a été pérenne) issu du remboursement par exemple de l’industrie automobile. Bref, nous aimerions voir les éléments phasés, d’autant que les hypothèses, et j’en terminerai là, qui sont adossées à ces 25 milliards d’euros de financement sont extrêmement généreuses en termes de croissance (une croissance à 3 % alors que nous sommes à 1,5 %), en termes de croissance de la population et en termes de croissance de la construction. Ce qui pose d’ailleurs un problème. À l’inverse de l’aménagement du territoire à l’échelle française, nous sommes en République, le problème de l’équilibre entre la région-capitale et l’ensemble du territoire national. Là-dessus, nous aimerions être rassurés.
François LEBLOND, Président de la Commission particulière du débat public sur le projet de réseau de transport public du Grand Paris : merci beaucoup. Monsieur VERON, c’est quand même vous qui allez répondre, non ? Je croyais que vous alliez passer le micro à Monsieur BENSE, mais il faut que vous répondiez vous-même quand même.
Marc VERON, Président du directoire de la Société du Grand Paris : je ne me lancerai pas dans une polémique avec vous, sur l’ensemble de votre déclaration de principes. Simplement, je vous dis la chose suivante. Il y a, heureusement, toute une série d’actions qui sont en cours et engagées. Si nous voulons en effet voir les choses arriver en 2011, 2012, 2013, cela suppose que les projets sont engagés. Sinon, il n’y a aucune chance. Je l’ai dit l’autre jour, les délais sont incompressibles. Ce sont les mêmes, quel que soit le label sous lequel nous menons le projet, les délais sont les mêmes. Donc, je vous ai dit qu’il y en a pour 12 milliards, sur l’ensemble des projets qui sont ici listés, entre les tramways, etc. Je ne reviens pas sur la démonstration. L’État participe, à hauteur de 30 % et parfois jusqu’à 50 % dans le cas du plan Espoir Banlieues. Donc n’opposez pas les projets de la Région à l’État, cela n’a pas beaucoup de sens puisque dans le contrat de projet de la Région, les deux sont co-contributeurs et consignataires.
Maintenant la question est de savoir si nous préparons l’avenir en 2020 ou 2025. Moi, j’ai des enfants, qui sont bigrement intéressés de savoir ce qui va se passer en 2025. Si le jeu consiste à courir constamment derrière le retard, comme c’est le cas en gros depuis une génération, quel est le problème dans les transports ? Il y a eu un investissement massif à la fin des Trente Glorieuses. Puis il y a eu une chute verticale, et nous souffrons, en gros, des retards d’une génération d’investissement. C’est vrai que cela fait beaucoup. Et encore une fois, les responsabilités ne m’intéressent pas du tout. La question est de traiter. Je le répète, il faut à la fois avaler ce retard et préparer l’avenir. Ce n’est pas l’utopie de préparer l’avenir. Si nous ne prenons pas aujourd’hui un dispositif concernant un réseau de métro, par exemple, nous n’avons aucune chose, étant donné ce que sont les délais d’étude et de construction, de l’ouvrir avant 2018, quel que soit le maître d’ouvrage. Je ne connais pas de maître d’ouvrage qui, avec un fouet, fait avancer un tunnelier plus vite. C’est un non-sens. Je ne connais pas d’ingénieriste particulièrement lent et incompétent. Il y a une réserve formidable d’ingénieries ferroviaires en France. Il y en 5 000 à la SNCF, 1 000 à la RATP. Ce sont les mêmes qui travaillent sur tous ces projets. Il n’y pas une classe baptisée X et une autre Y. Ce sont les mêmes. Ils avancent à la même vitesse. Nous avons deux projets, l’un qui s’appelle Arc Express. Encore une fois, le projet ne s’appelle pas plan de mobilisation des transports de la région parisienne, il s’appelle Arc Express. Ce sont deux axes qui passent au Nord, vers l’Ouest, et au Sud vers l’Est. Je vous dis tout simplement que pour ce projet-là, et pour le projet de métro automatique, quelle que soit la décision finale, aucun des deux n’avancera plus vite que l‘autre, étant donné ce qu’est aujourd’hui l’état réel de ces deux projets en termes d’étude, et ce que sont les délais incompressibles en termes de travaux. Donc 2018 est la meilleure échéance que je connaisse. J’ajoute même qu’il faudrait un peu utiliser la loi du 3 juin dernier parce qu’il y a plusieurs dispositifs qui permettent d’accélérer. J’ajoute que, dans un sens de l’intérêt collectif que personne ne peut nous dénier, nous avons depuis un an fait une étude d’évaluation environnementale (elle est sur les réseaux de la Commission nationale du débat public) qui est totalement incontournable, quel que soit le maître d’ouvrage. Demain matin, elle servira à tout le monde, puisque nous l’avons fait sur une bande passante suffisamment large pour qu’elle serve indifféremment le tracé qui sera retenu, dans un cas ou dans l’autre. Je ne veux pas polémiquer, mais simplement admettez que ce n’est pas un problème entre le réel et l’utopie, pardonnez-moi, c’est du théâtre. La question est digérons le passé, préparons l’avenir, et l’avenir se prépare maintenant, pas en 2020.
François LEBLOND, Président de la Commission particulière du débat public sur le projet de réseau de transport public du Grand Paris : je pense, Monsieur VERON, que votre interlocuteur ne donnait pas au mot utopie exactement le sens négatif que vous évoquez dans votre réponse. C’était une utopie positive dans votre cas.