QUESTION 246 - déchets étrangers
Posée par L MATHIEU [L'organisme que vous représentez (option)], (BESANÇON), le 16/07/2013
Actuellement, moins de 4% de ce qui sort des centrales nucléaires est réellement recyclé (cf le rapport du HCTISN). Plus de 90% de ce qui sort est classé en matière valorisables sans jamais être valorisées, mais pas en déchets. C'est donc une opération de blanchiment. Pourtant, une grande partie finira en déchets un jour et l'ANDRA devra proposer des solutions. Dommage qu'elle n'en parle pas. En particulier, toutes les matières dites "valorisables" d'origine étrangères peuvent rester sur le territoire français, même si l'on en fait rien. En cas de changement de politique, si ces matières deviennent "déchets", resteront-elles en France ou seront-elles renvoyées ? Si la décision intervient dans quelques décennies, quel pays sera prêt à les accepter ? Dans ce cas, l'ANDRA devra les gérer. Serait-il possible d'avoir un inventaire exhaustif de ses matières dites "valorisables" d'origine étrangères qui, si elles deviennent déchets, devront être prises en charge par l'ANDRA ? Et aussi les solutions qui sont envisagées pour leur gestion ?
Réponse du 10/02/2014,
Réponse apportée le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie :
Le Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs prescrit aux propriétaires de matières valorisables les études à mener à titre conservatoire sur les filières possibles de gestion dans le cas où ces matières seraient à l'avenir qualifiées de déchets. Ce plan est mis à jour tous les trois ans par le ministère chargé de l’énergie et par l’Autorité de sûreté nucléaire, en s’appuyant sur les échanges réalisés au sein d’un groupe de travail pluraliste comprenant notamment des associations de protection de l’environnement et des autorités d’évaluation et de contrôle, aux côtés des producteurs et gestionnaires de déchets radioactifs. Ce document et sa synthèse sont consultables sur le site du débat public : http://www.debatpublic-cigeo.org/informer/documents-complementaires/documents-de-planification.html
Certains combustibles usés (MOX et URE) sont actuellement entreposés de façon sûre dans l’attente de leur utilisation ultérieure dans les réacteurs de 4ème génération. Les recherches sur la quatrième génération, génération qui permettrait de tirer parti complètement de tout le potentiel énergétique contenu dans l’uranium naturel, sont actuellement encadrées par les lois n°2005-781 du 13 juillet 2005 et la loi n°2006-739 du 28 juin 2006.
Au cas où cette filière venait à ne pas être déployée, ces combustibles MOX et URE, produits par les réacteurs nucléaires français, seraient alors considérés comme des déchets. Le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie a demandé à l’Andra d’étudier à titre de précaution la faisabilité du stockage de ces combustibles usés dans Cigéo.
Le Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire a publié un rapport qui fait précisément l’état sur le cycle du combustible, y compris les flux de matières en provenance et à destination de l’étranger. Ce rapport, ainsi que l’actualisation annuelle des flux et stocks de matières, est disponible sur le site du Haut Comité : http://www.hctisn.fr/article.php3?id_article=41
En application de l’article L.542-2-1 du code de l’environnement, les combustibles usés ne peuvent être introduits en France qu’à des fins de traitement, de recherche ou de transfert entre états. Cet article précise qu’une introduction à des fins de traitement doit être encadrée par un accord intergouvernemental et que les déchets radioactifs issus après traitement de ces substances ne doivent pas entreposés en France au-delà d'une date fixée par ces accords.
Depuis la loi de 1991, le Parlement a interdit le stockage en France de déchets radioactifs en provenance de l’étranger. Cette interdiction figure aujourd’hui à l’article L. 542-2 du Code de l’environnement. Cette législation est cohérente avec la directive européenne du 19 juillet 2011 établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre des combustibles usés et des déchets radioactifs, qui réaffirme la responsabilité de chaque État dans la gestion de ses déchets radioactifs.
Réponse apportée par l’Andra, maître d’ouvrage :
La nécessité de stocker des combustibles usés dépendra de la politique énergétique qui sera mise en œuvre par la France dans le futur. Dans le cadre de la politique énergétique actuelle en France, les combustibles usés issus de la production électronucléaire ne sont pas considérés comme des déchets mais comme des matières pouvant être valorisées, notamment dans les réacteurs de quatrième génération. A ce titre, ils ne sont pas destinés à être stockés dans Cigéo. Seuls les déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue, issus du traitement de combustibles usés, sont destinés à Cigéo.
Dans l’hypothèse où les combustibles usés devraient être stockés directement, après refroidissement, ils pourraient être stockés dans Cigéo, qui a été conçu pour être flexible afin de pouvoir s’adapter à d’éventuels changements de la politique énergétique et à ses conséquences sur la nature et les volumes de déchets qui devront alors être stockés. A la demande du Ministère en charge de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, l’Andra, EDF et Areva ont étudié l’impact des différents scénarios établis dans le cadre du débat national sur la transition énergétique sur la production de déchets radioactifs et sur le projet Cigéo : http://www.debatpublic-cigeo.org/docs/rapport-etude/20130705-courrier-ministere-ecologie.pdf.
La faisabilité de principe et la sûreté du stockage profond des combustibles usés ont par ailleurs été démontrées par l’Andra en 2005. Dans le cadre du Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, l’État a demandé à l’Andra de vérifier par précaution que les concepts de stockage de Cigéo restent compatibles avec l’hypothèse d’un stockage direct de combustibles usés si ceux-ci étaient un jour considérés comme des déchets. L’Andra a remis fin 2012 un rapport d’étape. Dans l’hypothèse d’un stockage direct des combustibles usés, compte tenu du temps nécessaire de refroidissement, comme pour l’essentiel des déchets HA, leur stockage n’interviendrait pas avant l’horizon 2070/2080.
La nature et les quantités de déchets autorisés pour un stockage dans Cigéo seront fixées par le décret d’autorisation de création du centre. Toute évolution notable de cet inventaire devra faire l’objet d’un nouveau processus d’autorisation, comprenant notamment une enquête publique et un nouveau décret d’autorisation.
Ces éléments sont présentés dans le chapitre 1 du dossier de l’Andra support au débat public : http://www.debatpublic-cigeo.org/docs/dmo/chapitres/DMO-Andra-chapitre-1.pdf.
Réponse apportée par AREVA :
Après quelques années d’utilisation en réacteur, le combustible dit « usé » contient environ 95% d’uranium, 1% de plutonium, des produits de fission et d’autres éléments présents en très faible proportion, les actinides mineurs. L’usine AREVA de la Hague permet de traiter ces combustibles en séparant chimiquement les divers composants. Le plutonium et l’uranium issus du traitement du combustible usé sont valorisables. Le reste appelé « déchets ultimes » est conditionné dans la perspective d’un stockage sûr dans Cigéo.
Le plutonium et l’uranium permettent la fabrication d’assemblages combustibles au plutonium (MOX) ou à l’uranium de recyclage (URE). Plus de 5 000 assemblages combustibles MOX ou URE ont déjà été utilisés en France.
Des informations complémentaires sont données dans le cahier d’acteur « Recyclage » AREVA, cf. http://www.debatpublic-cigeo.org/informer/cahier-acteurs.html.
La loi sur la gestion des déchets radioactifs et des matières valorisables du 28 juin 2006 précise qu’un accord intergouvernemental fixe les modalités définies dans tout contrat concernant le traitement des combustibles nucléaires, notamment la date limite d’entreposage sur le territoire français des déchets radioactifs issus après traitement, « les périodes prévisionnelles de réception et de traitement de ces substances et s’il y a lieu les perspectives d’utilisation des matières séparées lors du traitement ».
Conformément à l’article 542-2-1 du Code de l’environnement, AREVA remet chaque année au ministre chargé de l’énergie un rapport comportant l’inventaire des combustibles usés et des déchets radioactifs en provenance de l’étranger ainsi que des matières et des déchets radioactifs qui en sont issus après traitement qu’AREVA détient. Ce rapport est rendu public. Le rapport remis par AREVA pour l’année 2012 est disponible au lien ci-dessous :
http://www.areva.com/activities/liblocal/docs/BG%20aval/Recyclage/La%20hague/Rapport-AREVA-Art-8-2012.pdf