Question n°131
Center Parcs : quel tourisme ?
le ,Accueillir ou se rendre ailleurs que dans un lieu de résidence est un facteur d'ouverture et de découverte qui va dans le sens de tissage de liens sociaux. La vision uniforme des vacances proposée dans les Center Parcs est en contradiction avec la stratégie de mise en valeurs de la Bourgogne. Alors se pose la question : le tourisme a-t-il pour seule vocation un aspect économique?
Le collectif Le Geai du Rousset
CENTER-PARCS : QUEL TOURISME ?
1- Le tourisme n’a pas pour seule vocation l’aspect économique, mais aussi :
- La découverte culturelle, sociale, historique, géographique d’une région
- Le renforcement des liens humains et sociaux, l’ouverture d’esprit
- L’accès à la diversité des paysages, des modes de vies, des activités, des gastronomies, des modes de cultures (agri-cultures), des langages...
Accueillir ou se rendre ailleurs que dans son lieu de résidence est un facteur d’ouverture, de découverte, qui va dans le sens de tissage de liens sociaux. Considérer le touriste uniquement sous l’angle d’un « touriste-consommateur » tel qu’on peut le lire dans certaines études est une vision réductrice et appauvrissante qui nie qu’avant tout l’hôte reçu vient rencontrer l’hôte et le pays (au sens large) qui le reçoit.
La vision uniforme et formative des vacances et des loisirs proposée par Pierre et Vacances dans les Center Parcs est porteuse d’une idéologie forte réduisant le touriste à un consommateur fatigué, qui a besoin d’être protégé et qui souhaite être déconnecté du temps et de l’espace recherchant des « activités tous temps, .../... qui ne soit pas exposé aux risques géopolitiques ou climatiques ».(extrait du DMO).
Cette vision est en complète contradiction avec la stratégie participative de mise en valeur de la Bourgogne, de ses particularités, de sa richesse culturelle, architecturale, paysagère, gastronomique et de son agriculture mises en avant par les ADT et Bourgogne Tourisme (CRT) et le SRADDT (Schéma Régional d’Aménagement et de Développement durable du territoire adopté en novembre 2014 par les élus régionaux) .
2- La stratégie affichée par la Région et le Département s’appuient sur l’itinérance douce, l’œnologie, le cyclotourisme. Sur quoi se basent les collectivités locales pour considérer que l’installation d’un Center Parcs dans le Charolais répond aux orientations stratégiques issues des études menées localement ?
3- Si ce projet correspond à une stratégie régionale, quel appel d’offre a été réalisé pour comparer les projets envisageables ?
4- Comment le choix s’est-il porté sur P et V ? Les mauvais résultats de PetV sont publiés et consultables par tous et devraient rendre les élus particulièrement prudents.
5- Lorsque la région ou les départements soutiennent des projets touristiques, l’apport de l’investisseur doit être au minimum de 70 % (cf. doc ci-joint et extrait ci-dessous). Qu’estce qui justifie la prise de risque à laquelle s’exposent Région et Départements dans cette opération ?
6- La Bourgogne est un territoire riche et attractif qui sera dégradé par l’image standardisée de Center Parcs.
Au delà, la région Bourgogne a défini une orientation stratégique concernant la mise en place d’une politique d’accueil s’appuyant sur la diversité des territoires. En quoi P&V participe à l’attractivité du territoire pour le maintien ou l’installation de nouvelles populations (sous-entendu quels bénéfices réels, durables, pour les habitants du territoire)?
Extrait du SRADDT, novembre 2014
A contrario, les gîtes et chambres d’hôte ont une place privilégiée dans le dynamisme rural : - en habitant sur de petites communes rurales, ils contribuent au maintien des commerces et des services publics de proximité.
- en participant à l’entretien du patrimoine bâti, à l’entretien des paysages bourguignons et au dynamisme économique, social et culturel, ils contribuent à créer les conditions d’aménités, facteurs incitatifs au maintien ou à l’installation de familles sur le territoire.
Pierre et Vacances recherche habituellement des endroits plutôt sinistrés au niveau de l’attractivité touristique. Ce n’est pas le cas de la Bourgogne au contraire !
Il est prévu dans les engagements réciproques que La Région s’appuiera sur le nom de Center Parcs pour valoriser son identité :
CF DMO : « Cette coopération se traduira notamment par une réflexion conjointe sur les moyens de valoriser les éléments d’identité marquants de la Saône-et-Loire à travers le nom du Center Parcs ».
7- Nous avons appris que des élus locaux ont été invités par Pierre et Vacances pour les amener à soutenir cet investissement. Cette action de lobbying met en doute l’indépendance de jugement des élus qui ont accepté cette invitation.
8- Est-ce que Pierre et vacances a pour projet d’intégrer l’étang du Rousset pour valoriser son CP ?
9- La carte qui présente les lieux d’activités à proximité du Rousset est remplie d’erreurs. Cela met en doute la qualité de l’étude marketing réalisée pour argumenter en faveur de ce projet.
10-Comment justifier l’installation de 3 Center Parcs sur une même zone de Chalandise si ce n’est parce que l’intérêt de PetV est la promotion immobilière et non le développement d’activités touristiques et de loisirs ? (cf cartes Région Parisienne et région R.Alpes/Suisse/Jura).
11-Quelle étude indépendante a été réalisée pour identifier la capacité « d’aspiration » d’un Center Parcs par rapport à une offre locale d’accueil, de loisirs et d’animation bénéficiant d’aides financières similaires ?
12-Y a-t-il des données chiffrées sur la perte d’activité induite pour ces autres acteurs du tourisme ?
13-Le fait qu’une telle structure soit autant aidée par la collectivité représente manifestement une distorsion de la concurrence par rapport aux autres acteurs du tourisme local. Le montant global de soutien prévu en Saône est Loire est de 600 000 €.
14-Le DMO signale la mise en place de partenariats avec des acteurs locaux. Quels contacts ont été pris ? Dans quel délai est-il prévu que ça se fasse, dans quelles conditions, avec qui ? Quelles sont les conditions des partenariats existant dans les autres CP ?
Le « tourisme non marchand », que constituent les résidences secondaires*, est un aspect du tourisme qui stimule la vie locale tant au niveau culturel qu’économique de manière stable. Les résultats publiés par l’Insee indiquent une augmentation significative des logements vides. Quelles actions sont menées pour stimuler ce secteur ? *actuellement de plus en plus mises en réseau
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16-Les personnes qui viennent à center Parcs, même ceux qui se disent relativement satisfaits, critiquent largement les tarifs et le montant des dépenses supplémentaires à effectuer dans l’enceinte de manière quasi obligatoire (Wifi, voiturettes, vélos) mais aussi coût des massages, restaurants ... Dans la période que nous vivons de contraction des dépenses des ménages, il est clair que l’argent dépensé là ne le sera pas ailleurs. Et comment croire à la fable qui raconte que trop heureux de dépenser trop dans la bulle par rapport à ce qu’ils avaient imaginé, les touristes vont encore aller faire des dépenses ailleurs ?
En conclusion : pourquoi tant d’argent public engagé dans un tel projet ?
- Hors stratégie de développement « durable », régionale et départementale,
- Avec prise de risque majeur pour les collectivités et non pour l’investisseur,
- Avec un partenaire en mauvaise situation économique,
- Au dépend de quelles autres activités actuelles ou autres projets envisageables en regard des besoins locaux déjà identifiés, en l’absence de tout projet alternatif présenté par les collectivités ?
Collectif Le Geai du Rousset – Débat public – mai 2015 – atelier Tourisme
Réponse apportée par le Conseil départemental de Saône-et-Loire le 3 septembre 2015 :
Réponse commune aux points 1 et 2 :
La stratégie de mise en valeur de la Bourgogne n’est pas remise en cause par ce projet, pas plus que le maintien et l’amélioration de ses richesses patrimoniales, mais il faut bien considérer que la disponibilité de telles ressources ne vaut pas mise en marché touristique.
La stratégie déployée de soutien au tourisme de découverte reste d’actualité et trouve sa concrétisation dans le concept de « Country break », qui vise une cible de clientèle urbaine et à faire de la Saône-et-Loire une destination.
Par contre, le contrat de destination intervenu en 2014 entre le CRT et les ADT, indique clairement trois problématiques non résolues à ce jour par les différentes politiques conduites :
- la fragilité des investissements touristiques, en raison de la saisonnalité (météo) et de la faible durée des séjours,
- un tourisme de halte et non une véritable destination,
- une forte déprise touristique en milieu rural, en raison de la faiblesse d’une offre de tourisme nature familiale structurée et en phase avec les attentes de cette clientèle.
Les collectivités, sans faire d’un Center parcs l’alpha et l’oméga de leur politique touristique, vise sur une stratégie à double entrée où Center parcs, en faisant bénéficier de sa puissance médiatique, ouvre le champ à d’autres types de séjour, sans constituer une altération des atouts de la Saône-et-Loire pour d’autre forme de tourisme.
Réponse commune aux points 3 et 4 :
En l’occurrence, les collectivités n’ont pas eu à faire un choix ou à ouvrir un appel d’offre, mais à répondre si elles acceptaient d’accompagner une offre d’implantation.
Après une réflexion avisée, aucun autre concept d’hébergements touristiques de cette ampleur en milieu rural ne permet d’assurer un remplissage à l’année, garant d’un équilibre d’exploitation, et une visibilité du niveau d’un Center parcs.
Réponse au point 5 :
Ce qui justifie la prise de risque des collectivités relève du même mécanisme que dans l’octroi d’une subvention pour une chambre d’hôte susceptible de disparaitre dans les cinq ans du paysage touristique : la confiance dans l’entreprenariat et une contribution active à tout projet porteur de valeur ajoutée pour le territoire.
Le quasi doublement des nuitées marchandes touristiques de loisirs (hors tourisme urbain d’affaires) est un élément de réponse.
Réponse aux points suivants :
Concernant certaines parties de la question, les réponses relèvent de Pierre et Vacances, notamment les études de marché et les risques de cannibalisation entre Center parcs voisins.
Toutefois, le Département de Saône-et-Loire a conduit les négociations en partenariat avec des opérateurs financiers privés qui ont commandité des audits internes sur la question de la fiabilité du groupe, de la stratégie commerciale et du potentiel de clientèle, qui ne seront aboutis qu’à la fin de l’année et qui éclaireront les postures des collectivités dans la construction des partenariats financiers à intervenir.
Sur la question de la distorsion de concurrence, il est renvoyé à la réponse à la question n° 67.