Chaque semaine, nous vous proposons de découvrir les réponses de trois membres de la CPDP Réseau de Transport Public du Grand Paris à un questionnaire que nous leur avons soumis. Ce questionnaire est le même pour chacun des membres de la Commission.
Le Président Leblond, madame Aguila-Baldit et monsieur Carriot ont donc répondu à nos questions, voici leurs réponses.
1. Pourriez-vous décrire en quelques mots votre parcours professionnel ?
En tant que préfet, puis préfet de région, j’ai eu l’habitude d’organiser des débats sur des sujets d’actualités, j’ai été préparé à ce type d’exercice car un préfet est amené à présider des réunions avec des personnes qu’il ne connait pas. Un préfet essaie toujours de faire en sorte que chacun puisse s’exprimer librement, quelles que soient ses opinions sur le ou les sujets abordés.
2. Quelles ont été les motivations qui vous ont amené à vous engager dans cet exercice de démocratie participative ?
Je ne me suis pas à proprement parler engagé dans cet exercice de démocratie participative, en effet, c’est le président de la Commission Nationale du Débat Public qui m’a proposé en avril 2010 la présidence de la commission particulière chargée de ce débat très lourd. J’ai tout de suite accueilli favorablement cette proposition et ai accepté car c’est un honneur pour moi de participer à un tel projet, qui touche à l’avenir de 12 millions de nos concitoyens, ainsi que de nombreux acteurs étrangers.
3. Quelle est, selon vous, la pertinence d’une telle procédure dans le processus décisionnel d’une infrastructure de transport ?
Les grandes opérations d’infrastructures sont souvent l’objet de critique, il est donc fondamental d’entendre tous les points de vue, qu’ils envisagent ce projet comme favorable ou au contraire inopportun ou mal conçu.
La loi établie en 2002, complétée par celle du 3 juin 2010, est une procédure qui facilite une meilleure compréhension et lisibilité pour le débat et qui me parait adaptée à la situation. La loi du 3 juin 2010 a réduit les délais de façon importante. On pouvait dès lors se poser la question de savoir si la procédure ne serait pas un peu trop hâtive. La façon dont la Commission particulière a travaillé – et je tiens ici à rendre hommage à l’implication et à la réactivité des membres de la Commission et du secrétariat général – a permis de répondre à ces délais. Le travail engagé permettra d’enrichir le débat pour le maître d’ouvrage et lui apportera de nouveaux éléments qu’il n’avait pas au préalable.
1.    Pourriez-vous décrire en quelques mots votre parcours professionnel ?
J’ai exercé comme avocat en matière pénale puis juge de proximité et enfin, j’ai participé à deux autres débats publics en tant que membre d’une commission particulière dans les domaines suivants : un projet de construction d’un terminal méthanier et un projet de construction d’une infrastructure autoroutière.
2.    Quelles ont été les motivations qui vous ont amené à vous engager dans cet exercice de démocratie participative ?
Mon parcours professionnel ainsi que mon gout personnel pour les débats et l’argumentation m’ont conduite à participer à cet exercice riche en échanges.
3.    Quelle est, selon vous, la pertinence d’une telle procédure dans le processus décisionnel d’une infrastructure de transport ?
Cette procédure est pertinente au sens où grâce aux auditions des différents acteurs, le maitre d’ouvrage a la possibilité d’affiner ou de modifier les tracés et variantes envisagés dans le projet eu égard aux besoins et nécessités soulevées tout au long du débat public par les différents usagers, associations, élus… avec leurs spécificités territoriales et humaines.
1. Pourriez-vous décrire en quelques mots votre parcours professionnel ?
J’ai fait toute ma carrière à France Télécom. N’étant pas de formation ingénieur, -je suis titulaire en effet d’une maîtrise de lettres classiques- j’ai dû trouver lorsque je suis entré dans cette entreprise en 1975 -à l’époque encore dans le giron de la fonction publique-, un positionnement spécifique qui me permette d’être à la confluence des deux cultures technique et commerciale -on pourrait presque dire de deux mondes-, et de poursuivre en même temps mon évolution de carrière. J’ai donc dû m’adapter et développer des compétences particulières « d’intermédiation » et de dialogue inter-organisationnel entre les différents services. J’ai occupé d’une manière assez constante au sein du Groupe, diverses fonctions qui répondent à cette caractéristique. Par exemple en 1984 dans un service d’audit et de méthodes, au niveau du siège de la direction régionale parisienne qui rassemblait alors plus 40 000 personnes, et où j’ai eu la chance d’être associé à de gros projets dont la réalisation de réseaux câblés pour la ville de Paris, et où j’avais la responsabilité de définir une méthode de programmation (à base de PERT..), avec autour de la table, des ingénieurs, des opérationnels, des commerciaux, des communicants, des logisticiens, des financiers et des prestataires multiples. Le maire de Paris -qui s’appelait Jacques Chirac- n’aurait pas supporté une minute de retard dans la livraison des réseaux ! Il a donc fallu déployer des trésors d’imagination, mais surtout des méthodes de travail spécifiques pour faire dialoguer tout ce monde et .. livrer les réseaux à l’heure ! Pas toujours simple !
Puis, d’autres fonctions telles que par exemple la Direction de la Qualité dans une filiale internationale de construction de réseaux de mobiles, avec la mise en Å“uvre de la norme ISO 9001. Comment appliquer cette norme à Chissinau en Moldavie ou à Alexandrie, à Varsovie ou à Dakar sans tenir compte des cultures, des spécificités, du contexte, des hommes et des femmes qui les composent ? Même chose quand j’eus en charge la mise en place de la norme environnementale ISO 14001 au niveau du Groupe France Télécom. C’est le principe d’adaptation qui m’a guidé et le goût pour faire dialoguer entre eux des univers professionnels et culturels différents, quelquefois antinomiques, aux objectifs contradictoires qui ont forgé peu à peu mes convictions et m’ont conforté dans cette approche…
2. Quelles ont été les motivations qui vous ont amené à vous engager dans cet exercice de démocratie participative ?
Lorsque je quittai mon entreprise, je me suis lancé tout naturellement dans une seconde carrière de médiateur…appliqué à l’environnement. Je suivis une formation spécialisée au CNAM durant une année entière, au terme de laquelle j’acquis le diplôme de médiateur. Au cours de cette année, j’ai pu approfondir sous l’égide d’enseignants eux-mêmes praticiens de la médiation et de la concertation, et parmi eux, de célèbres experts américains-, toutes ces questions complexes liées à la résolution des conflits, et mieux encore à leur anticipation par la pratique du dialogue, de l’écoute active et du questionnement comme outil privilégié de l’expression des attentes, des besoins et des ressentis. N’est-ce pas ce qui se passe lors des débats du Grand Paris ?..
A peine ma formation terminée, je me suis lancé tout de suite dans une opération commanditée par la DREAL de la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur en lien avec le Ministère du développement durable et le Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris (CMAP). J’avais pour mission -avec deux autres médiateurs chevronnés-, de remettre du lien au sein d’une instance de …concertation environnementale. Il s’agissait d’un organisme mis en place dans les années 1907, et qui s’appelait le Secrétariat Permanent pour la Prévention des Pollutions Industrielles (SPPPI), qui souffrait alors d’un déficit de dialogue et de communication. Faire travailler ensemble trois cent personnes, tel était le deal ! Il a fallu remettre à flot cette instance qui- Grenelle oblige- devait être structurée entre cinq collèges, mais sous une nouvelle configuration. Nous y sommes parvenus suite à l’instauration d’un dialogue réel et authentique entre parties prenantes.
Parallèlement à cette action, j’ai mis en place dès 2008 au sein de l’AFITE (Association Française des Ingénieurs et Techniciens de l’environnement dont j’assure les fonctions de Secrétaire Général), une commission intitulée « concertation et médiation environnementales », où nous analysons les conflits nés de projets tels que l’implantation d’éoliennes, de centres d’enfouissement de déchets ou d’incinérateurs, ou de l’agrandissement d’une carrière par un cimentier… L’important est que viennent y débattre et surtout témoigner des praticiens de la médiation, des universitaires (dont certains ont participé à une CPDP), des chercheurs, des managers d’entreprises, des consultants et des experts. Tout cela dans un but bien précis : montrer aux entreprises qu’on est toujours gagnant en jouant la transparence et en pratiquant la concertation préalable. Un long dialogue coûte moins cher qu’un conflit surtout si on veut construire ensuite des relations durables… Quant au Débat Public, je l’avais découvert quelques années auparavant lors d’une intervention devant les membres de l’AFITE du vice-président de la CNDP -Philippe Marzolf-. J’avais instinctivement compris tout le parti que les décideurs publics ou privés pouvaient tirer de cette instance de débat. Et je l’avoue, je souhaitais déjà devenir membre d’une Commission particulière du débat public ! Me voici à présent engagé dans cette belle aventure collective depuis le mois de juillet dans une équipe de douze membres pour organiser le débat public sur le réseau de transport public du Grand Paris, sous la présidence de François Leblond…
3. Quelle est, selon vous, la pertinence d’une telle procédure dans le processus décisionnel d’une infrastructure de transport ?
Tout d’abord, est-il concevable qu’un tel projet d’une telle ampleur et dont l’impact sur l’environnement de la vie des franciliens est si important, puisse être mis en place, sans coup férir, c’est-à -dire sans discussion ni débat aucun. Les procédures de DUP prévues par la Loi ne sauraient suffire à elles seules à épuiser les questions que se posent les parties prenantes, à savoir les collectivités locales, départementales régionales ou intercommunales, les associations, les élus, les syndicats, les entreprises, les opérateurs de transports, les organismes consulaires (CCI..), tous les acteurs en somme qui se sont exprimés lors des cinquante quatre réunions du débat public, dans les deux cents quarante cahiers d’acteurs, mais aussi et surtout les populations concernées, les utilisateurs des transports franciliens.
Un projet qui va structurer la région Ile-de-France pour cent ans ou davantage et qui concerne plus de dix millions d’habitants, je n’imagine pas une seconde que cela se fasse sans eux !
N’oublions pas aussi que nous sommes entrés dans l’ère de l’après-Grenelle de l’environnement qui a permit d’inscrire dans la Loi -en particulier la seconde, celle du 12 juillet 2010-, bon nombre d’objectifs, sur la gouvernance notamment- qui ont été repris dans la Stratégie nationale du développement durable, dont va s’inspirer l’action des pouvoirs publics dans les trois ans à venir. Des principes qui découlent directement de la convention d’Aarhus signée par la France le 25 juin 1998 et qui préconise l’accès du public à l’information ainsi que sa participation pour des décisions ayant des incidences sur l’environnement. Et, précise la convention, « lorsque toutes les options sont encore possibles…». C’est dire !
Nous sommes en plein dans le sujet !
Le réseau de transport du Grand Paris est par ailleurs un projet à très forte composante technique : le choix du tracé, l’emplacement des quarante gares -peut-être soixante aux lendemains du débat public- les interconnexions avec les réseaux existants, les moyens financiers mobilisés, tout cela suppose, de toute évidence, des variantes, des scénarios, des simulations, des alternatives que seuls la discussion, la réflexion et l’argumentation peuvent mettre à jour. Ce n’est pas le tout ou rien ! Le Maître d’ouvrage s’est soumis de plein gré à cette exigence démocratique et les membres de la Commission en sont les garants.
A nous de rendre le débat le plus large possible, d’entendre et d’écouter le maximum de personnes ! A nous de favoriser l’expression de tous les acteurs et de tous les participants, jusqu’au dernier rang de la salle ! Et quand je prends la mesure du nombre de questions posées sur internet qui frôle les mille, le nombre des cahiers d’acteurs proche des deux-cent quarante, du nombre de personnes qui ont déjà participé à ce débat et qui avoisinent les 15000, je me dis que nous aurons eu beaucoup de chance de disposer de tant d’informations et d’éléments. A nous de tirer parti de ce trésor et d’en restituer les enseignements sans lesquels le Maître d’ouvrage, la Société du Grand Paris, ne pourrait améliorer et enrichir son projet. Oui, le débat public, c’est la débat certes, avec la légitimité en plus !
Pour ma part, je considère que la CPDP ressemble à un laboratoire d’idées où viennent débattre les citoyens – le grand public -« les vrais gens » comme je l’ai entendu dire ici et là -, d’un projet de transports de grande envergure, auquel s’est joint celui d’Arc Express. Voilà une expérience unique que les autres pays vont nous envier.
Le Débat Public, a fait d’un principe abstrait -la concertation-, un principe d’action dans les mains des décideurs. Et l’on voit bien que le Débat public est appelé à jouer un rôle central dans les année à venir. J’ai l’impression que les choses bougent …