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Déroulement des réunions
Comptes-rendus et synthèses des réunions publiques
Les comptes-rendus des réunions publiques font état de l’intégralité des propos échangés par l’ensemble des acteurs du débat. Un compte-rendu synthétique des réunions publiques sera, lui aussi, accessible au fur et à mesure du débat.
Note de synthèse de la réunion publique de Toulouse
Note de synthèse
du débat public Nanotechnologies
de Toulouse le 20 octobre 2009
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Prologue
Comme le précédent débat public, à Strasbourg, celui de Toulouse a
démarré par quelques déclarations de militants anonymes dénonçant la
tenue de ce débat public et répandant de l’ammoniaque, obligeant les
participants à sortir, le temps que l’on renouvelle l’air dans la
salle. Jean Bergougnoux, président de la Commission particulière du
débat public sur les nanotechnologies, a déploré cet acte de
malveillance.
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Introduction
Un film de six minutes préparé par les services des ministres qui
avaient souhaité l’organisation de ce débat a servi de point de départ
à Jean Bergougnoux qui présidait cette réunion, pour préciser quelques
points essentiels :
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les pouvoirs publics sont à l’égard de ce débat dans une position
d’écoute et s’engagent à en intégrer les enseignements dans leurs
décisions concernant le développement des nanosciences, des
nanotechnologies et de leurs applications |
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dès lors que la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), ayant été
saisie, a décidé d’organiser un débat public, c’est la Commission
particulière (CPDP) constituée à cette fin qui est responsable de
l’organisation et de l’animation du débat et ce en toute indépendance
par rapport aux ministères demandeurs |
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comme dans tout débat public, la CPDP Nanotechnologies a pour objectifs : |
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d’informer un public aussi large que possible, non seulement de l’objet
technique du débat mais aussi, de manière équitable, des différentes
opinions qui se manifestent à son égard |
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d’écouter tout ce que le public souhaite dire : ses attentes, ses préoccupations, ses craintes et ses propositions |
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de rendre compte objectivement des arguments échangés au cours du débat
pour que chacun – l’État, bien sûr, mais aussi les chercheurs, le corps
médical, les entreprises, les associations,… et l’ensemble des citoyens
– puisse en tirer les enseignements utiles dans le cadre de ses
responsabilités |
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le film montre bien que les nanotechnologies connaissent déjà bon
nombre d’applications y compris dans notre vie quotidienne. Ce débat
vient-il pour autant trop tard ? Le président de la CPDP rappelle que
les spécialistes considèrent que le potentiel de développement des
nanosciences et des nanotechnologies est considérable. Rien n’est donc
joué. Par ailleurs, il eût été difficile d’organiser un débat sur des
objets de laboratoire n’ayant encore connu aucune application pratique.
Le débat a donc aujourd’hui, pour la CPDP, tout son sens.
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Jean Bergougnoux donne ensuite des indications sur l’organisation
générale du débat et les moyens mis à la disposition du public pour y
participer (voir la brochure « le débat public et vous »).
Avant de donner quelques indications pratiques sur la manière de
participer à la réunion, il rappelle, enfin, que le débat de Toulouse
comportera trois séquences :
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nanotechnologies et médecine, justifiée par l’existence d’importants
laboratoires pharmaceutiques à Toulouse ; et la recherche fondamentale
et les manipulations de la matière |
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les matériaux nanostructurés : leurs applications en aéronautique civile et militaire |
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le cycle de vie des produits des nanotechnologies et la protection de l’environnement |
Première séquence : Nano technologies et médecine (recherche, développement, applications actuelles et à venir)
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Panélistes : Claudine Picard (Sanofi-Aventis), Pierre Teillac
(Laboratoire Pierre Fabre), Rose Frayssinet (Les Amis de la Terre),
Didier Rod (Revue Prescrire), Christophe Vieu (CNRS/Laas), Dominique
Masset (AFSSAPS)
Animateur : Isabelle Jarry |
Didier Rod, médecin et collaborateur à la revue Prescrire destinée aux
personnels de santé et indépendante des laboratoires pharmaceutiques,
s’exprime en tant que médecin, ancien député européen et patient. Les
nanoparticules sont un paradoxe car elles présentent des effets
bénéfiques et des risques. En effet, elles ont des propriétés
extrêmement différentes des particules macroscopiques : elles peuvent
passer la barrière cutanée, intestinale, hémato-encéphalique ou
olfactive permettant ainsi des traitements nouveaux mais aussi
d’éventuels effets secondaires, d’autant qu’elles changent de forme
quand elles changent de milieu. Il y a lieu de se poser la question
bénéfice/risque avant de produire ce type de médicament. Et aussi, que
devient le médicament après son utilisation ? Quelle conséquence pour
l’environnement ?
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Dominique Massé, de l’AFSSAPS, explique que l’utilisation des
nanomatériaux en médecine permet de pénétrer au niveau cellulaire, de
voir mieux et de mieux diagnostiquer. Cela permet donc de mieux soigner
en accédant à des tissus , sans utiliser des dosages qui, de manière
classique, sont très nocifs pour le patient. Les nanotraitements
devraient permettre également de mieux réparer les tissus, en
particulier des lésions cérébrales ou des ruptures de moelle épinière.
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En principe l’utilisation de nanomédicaments doit permettre de limiter
les effets secondaires par l’utilisation de doses très faibles et par
la précision des traitements, mais ils apportent une toxicologie
nouvelle, dont il faut débattre largement.
Claudine Picard, du laboratoire pharmaceutique Sanofi Aventis de
Toulouse, indique que c’est l’impact considérable des nanotechnologies
en matière d’observation qui intéresse sa société. Elles permettent
d’avoir des outils plus performants pour découvrir de nouveaux
médicaments et de raccourcir le cycle des découvertes. Elle précise par
ailleurs que Sanofi Aventis ne commercialise actuellement aucun
nanomédicament.
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Pierre Teillac, des laboratoires Pierre Fabre, insiste sur la précision
dans l’administration du médicament, en apportant le médicament à
l’intérieur de la cellule. Mais il souligne que ces techniques sont
encore au stade de la recherche. Utilisées de façon contrôlée, elles
seront une source indéniable de progrès.
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Christophe Vieu, chercheur au CNRS/Lass, travaille sur l’interface
entre nanotechnologies, biologie et santé. Avec les nanotechnologies,
on manipule des molécules très petites et l’on peut voir ce qui,
jusque-là, était invisible. On a pu mettre ainsi en évidence des
biomarqueurs permettant d’adapter les thérapeutiques et de suivre les
thérapies de manière très fine. |
La position des chercheurs en la matière est à la fois très favorable,
car les nanotechnologies sont porteuses de progrès importants pour la
recherche. Il affirme néanmoins qu’il est nécessaire de s’interroger
sur les usages. Un diagnostic précoce pour une personne atteinte de
maladie est un avantage, mais il constitue une dérive pour quelqu’un
qui ne l’est pas.
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Faut-il arrêter les nanotechnologies ? Pour Christophe Vieu, ce n’est
pas responsable de le faire, mais il faut les évaluer et choisir ce que
l’on veut développer.
Rose Frayssinet, des Amis de la Terre, conteste assez radicalement ces
propos. A ses yeux, les nanomédecines sont le "cheval de Troie" des
nanotechnologies : comment en effet refuser de telles avancées
médicales ? Mais elles sont aussi porteuses de dérives : la
surveillance en médecine peut faire craindre la surveillance des
comportements humains. Une médecine aussi sophistiquée ne risque-t-elle
pas d’engendrer des injustices énormes, en particulier entre le nord et
le sud ? Quant aux techniques de réparation, elles risquent de
déboucher vers le transhumanisme.
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Par ailleurs, selon elle, les sommes consacrées à la recherche vont en
grande majorité aux applications et de manière dérisoire à l’évaluation
des risques. On ne se pose pas suffisamment non plus la question de
leur utilité sociale.
En conséquence, les Amis de la Terre demande un moratoire total sur les nanotechnologies.
Christophe Vieu considère que c’est jeter le bébé avec l’eau du bain.
Il faut regarder au cas par cas. Lui-même souhaite que certaines
applications voient le jour. Par ailleurs, il n’est pas raisonnable de
demander un moratoire sur la recherche : c’est en développant les
connaissances sur les nanotechnologies que l’on pourra répondre aux
questions. Refuser la connaissance, c’est ouvrir la porte à l’ignorance
et à toutes les manipulations.
De la salle, une personne souligne le fait que les assureurs refusent
d’assurer les travailleurs du secteur des nanotechnologies ; c’est bien
la preuve que le risque est énorme. Il est répondu que cela traduit en
réalité une insuffisante évaluation des risques pour fixer les primes
d’assurances. Par ailleurs, Jean Bergougnoux précise que les compagnies
d’assurances seront entendues.
Un autre participant fait remarquer qu’on mélange nanomédicaments et
nanorobots. Il regrette aussi, à propos des cancers, que l’on n’étudie
pas davantage plus leurs causes environnementales et la prolifération
des substances chimiques comme facteur d’influence.
Sur ce dernier point, il est rappelé l’existence de la directive REACH,
qui s’applique aux produits chimiques à partir de la tonne. Cela exclut
donc les nanoparticules, mais la Commission européenne envisage qu’elle
soit étendue.
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Un autre intervenant signale qu’il n’a pas peur des nanotechnologies,
qui peuvent être un moyen de capter le carbone et limiter les émissions
de gaz à effet de serre. Il rappelle qu’il existe aussi des substances
bien plus dangereuses.
Enfin, Madame Catherine Larrieu, du ministère du Développement durable,
informe que, suite au Grenelle de l’environnement et à un engagement du
ministre et du président de la République, un projet de loi obligeant
les industriels français à déclarer leur recours aux nanoparticules et
à informer le consommateur est en cours d’adoption. En cela, la France
est précurseur par rapport à l’Europe.
Compte tenu du retard dans le démarrage dans la soirée, Jean
Bergougnoux propose d'enchaîner directement sur le troisième sujet à
l’ordre du jour.
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Séquence 3 : le cycle de vie des produits des nanotechnologies et la protection de l’environnement. |
Panélistes : José Cambou (France Nature Environnement), Frédéric
Schuster (CEA), Pascal Guiraud (Observatoire des déchets industriels),
Catherine Mir (MEEDEM/DGPR)
Animateur : Jean Bergougnoux |
La présidente de France Nature Environnement, José Cambou insiste aussi
sur le fait que les nanoparticules se disséminent dans tous les milieux
tout au long de leur cycle de vie jusqu’au stade des déchets. Les
nanoparticules d’argent, utilisées comme bactéricide dans les
chaussettes, par exemple, ont des effets "terre brûlée" dans le milieu
aquatique, dans l'air et dans les sols.
France Nature Environnement propose donc une politique publique de précaution : |
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développer les connaissances, |
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réglementer les rejets, et générer un droit spécifique et adapté, |
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assurer une surveillance des milieux écologiques avec des protocoles de tests et des outils adaptés, |
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informer de manière continue et sur tous les sujets, |
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mettre en place un processus de concertation dans la durée. |
José Cambou, au nom de FNE, affirme l'importance du débat public qui a
lieu enfin et qu’il est important de s’approprier. Il n’est pas
raisonnable ni éthique de maintenir un tel déséquilibre entre des
connaissances lacunaires sur les risques et sur les impacts des
nanotechnologies sur l’environnement, et la production d'applications
destinées au grand public. À l'occasion du Grenelle, France Nature
Environnement a demandé un moratoire partiel sur les produits grand
public dont les usages ne sont pas médicamenteux et entrent en contact
avec le corps (habillement, alimentation, cosmétique, etc.).
Frédéric Schuster précise que, justement, le CEA développe des
recherches sur l’ensemble des moyens de maîtrise du cycle de vie des
nanomatériaux et des nanotechnologies de la santé (élaboration,
conditionnement, transport, usage, recyclage ou destruction).
Dans le cadre du programme NanoSafe, programme européen financé par la
Commission européenne, avec vingt-trois autres partenaires européens,
des avancées sont réalisées sur des domaines clés pour la maîtrise du
cycle de vie : la différenciation des particules environnantes (10 000
nanoparticules/cm3) et des particules produites ; l’indication de
l'exposition individuelle par l’utilisation de badges, les outils pour
évaluer la toxicité et le risque de passer les barrières biologiques,
l’évaluation de l’explosivité des matériaux, la sécurisation de la
production par des conteneurs de transport sécurisés, l’efficacité des
protections individuelles, la mesure du relargage des nanoparticules en
cours d’usage. (Huit rapports existent sur le site de NanoSafe , qui sont téléchargeables.)
Jean Bergougnoux remarque que les avancées de ce programme européen
devraient déboucher sur des dispositions réglementaires qui
mériteraient une réflexion européenne. En ce qui concerne le relargage
de nanoparticules, Frédéric Schuster fait remarquer que les résultats
sont encore embryonnaires. Mais l’adaptation du test Taber à la mesure
du relargage des nanoparticules est une contribution du CEA à la
normalisation. Il précise que le projet NanoSafe a à son actif une
quinzaine de résultats qui seront autant de contributions à des
standards potentiels.
Interpellée par la salle sur le fait que neuf cents entreprises sont
concernées par les nanotechnologies en Midi-Pyrénées, José Cambou
insiste à nouveau sur le suivi des déchets des nanomatériaux ou des
nanoobjets. Risque-t-on de les retrouver dans les boues des eaux usées
?
Jean Bourgougnoux reprend ce thème et donne la parole à Pascal Guiraud,
de l’Observatoire régional des déchets industriels en Midi-Pyrénées
(Ordimip), regroupant différents acteurs comme des services et
établissements de l'État, des collectivités territoriales, des
entreprises, des associations patronales, des associations de
protection de l'environnement et de consommateurs et des personnalités
qualifiées. Sait-on où vont les nanotechnologies ? L’Ordimip a-t-il
réussi à faire une cartographie du cheminement des nanoproduits ?
L’Ordimip s'est autosaisi du problème des nanotechnologies pour répondre à trois enjeux importants pour cette filière :
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est-on capable d'avoir une gestion des déchets adaptée à l'endroit où ils sont créés ? |
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peut-on protéger les salariés des filières de collecte et de traitement ? |
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est-on en mesure d'adapter des filières de traitement ? |
En corollaire, sait-on traiter l'eau qui pourrait être polluée ? Une
grande enquête a été faite en région Midi-Pyrénées en 2008 auprès de
neuf cents entreprises et trente-cinq laboratoires de recherche censés
utiliser des nanotechnologies, mais on ne sait rien, car les
industriels eux-mêmes ne savent pas si les produits qu’ils utilisent
ont recours aux nanotechnologies. Il existe un manque cruel
d'informations basiques pour organiser des filières et s'assurer que
les pratiques sont sans danger.
À partir de retours d’expérience, l’Ordimip a émis des recommandations très fortes visant en particulier à anticiper : |
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information et transparence par l'étiquetage, qui permettrait aux
entrepreneurs qui achètent des produits de protéger leurs salariés ; |
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la formation, qui est nécessaire : il faut être capable de proposer des cursus, qui n'existent toujours pas ; |
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la réglementation ; il faut progresser dans les définitions et aller
plus vite pour que l'on puisse savoir quelles nanoparticules présentent
un danger. |
De plus, le besoin de connaissance sur le devenir des nanoparticules
quand elles passent dans le traitement d'ordures ménagères est
essentiel. Il faut dégager des fonds substantiels pour mettre en oeuvre
des protections et des filières de traitement, ce qui ne va pas à
l'encontre d'un développement industriel.
Un intervenant dans la salle insiste sur le fait qu’avant d’arriver à
une réglementation des rejets, il faut les maîtriser et arrêter de les
diffuser dans la nature et souligne que les ouvriers qui manipulent les
produits ne sont pas informés de la présence de nanoparticules.
José Cambou insiste sur l’absence de cadrage des rejets pour un site utilisant les nanotechnologies et rappelle qu’il faudra surveiller l’obligation de déclaration contenue dans le projet de loi dit Grenelle 2. À cet égard, Jean Bergougnoux se tourne vers Catherine Mir, du MEEDEM/DGPR.
Cette dernière précise que la direction générale de prévention des risques, qui s'occupe des installations classées, prépare les textes discutés par l'ensemble des ministères en concertation avec les associations comme le Conseil supérieur des installations classées.
Il existe dans ce projet Grenelle 2 en cours de vote, une obligation de déclaration concernant les fabrications, la mise sur le marché et l’utilisation de nanoparticules. On devra déclarer les quantités et l’identité des produits et identifier les usages. Elle rappelle que, au niveau européen, le Parlement européen demande que le règlement REACH soit adapté aux nanotechnologies.
Elle insiste sur deux dispositions solides et importantes : |
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le principe de substitution, lorsqu’une substance est toxique, par une substance moins dangereuse ; |
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le fait que le producteur de déchet est responsable du déchet qu’il
produit et que le producteur d'un produit est également responsable de
l'élimination du produit in fine. |
Mais il faut voir si, sur le plan pratique, les nanomatériaux peuvent
rentrer dans ce dispositif. Pour certains, les connaissances manquent,
pour d’autres, les moyens existent.
Jean Bergougnoux demande si la traçabilité des nanotubes de carbone aux
étapes successives de fabrication d’un produit et de l’obligation de
déclaration est assurée. Catherine Mir confirme que le fabricant a
l'obligation de déclarer aux autorités publiques les personnes auprès
de qui il commercialise le produit.
Jean Bergougnoux évoque un outil précieux qui existe dans les
entreprises pour l’identification des risques encourus par les
travailleurs : les fiches de données de sécurité, et donne lecture
d’une fiche de donnée de sécurité établie par un producteur norvégien
de nanotubes de carbone : « Le produit a peu de chance d'être nocif si
utilisé et conditionné comme prescrit. Néanmoins, d'une façon générale,
l'inhalation à haute dose peut être à l'origine d'un risque pour la
santé, mais la valeur limite n'a pas été définie pour les
nanoparticules ». Voilà une fiche de données de sécurité établie selon
les règles…
Un intervenant, regrettant que l’on reproduise l'erreur faite pour le
nucléaire en ne prenant pas en compte l’élimination des déchets,
demande quelles entités vont garantir la prise en compte du cycle de
vie d'un produit ? Jean Bergougnoux prolonge la réflexion : vers une
agence indépendante avec un conseil d'administration pluridisciplinaire
?
Pascal Guiraud revient sur l’aspect réglementaire et rappelle que
l’ORDIMIP a proposé des recommandations de réglementation, notamment
d'étiquetage, et demande que soit inclus un volet obligatoire sur
l'analyse du cycle de vie et de récupération.
Jean Bergougnoux lui demande comment on détruit des nanotubes de
carbone ou l'argent nanométrique. Pour les nanotubes de carbonne, M.
Flahaut, chercheur au CNRS, répond qu’il suffit de les incinérer et ils
retrouvent alors leur état d’oxyde de carbone CO2. Pour l’argent
nanométrique, personne n’a la réponse dans la salle.
Un jeune diplômé en nanotechnologies, par ailleurs militant écologiste,
considère que le moratoire n’est pas réaliste. Il reprend l’idée d’une
agence indépendante pour l’analyse de toxicité des produits et de leurs
déchets. Jean Bergougnoux lui promet de soumettre la question.
Michel Sanciau, d’Attac Midi-Pyrénées, suggère que la norme Iso 14000
soit imposée par l’État aux industriels voulant fabriquer des
nanotechnologies. Il rappelle que l’eau est un bien vital de l’humanité
et qu’elle pourrait être polluée par les nanotechnologies.
Pascal Guiraud redoute que l’on ne soit pas capable d'arrêter les
nanoparticules et regrette la faiblesse des financements liés à ce type
de problème.
Un intervenant rappelle qu’à ce jour on n’est pas en mesure de caractériser physico-chimiquement les nanomatériaux.
Rose Frayssinet signale que l’empreinte écologique de la production de
nanocarbone est plus importante que le bénéfice qu’elle apporte au
cours de son cycle de vie. À ce propos, une intervenante qui se déclare
chercheuse et citoyenne remarque que les nanomatériaux peuvent être
amenés à remplacer des matériaux existants dans certains process, en
particulier du chrome 6, dont la toxicité est très élevée. L'empreinte
écologique d’un produit doit prendre en compte le produit qu’il aura
supprimé : principe de substitution.
José Cambou se méfie de l’effet de l’obligation de substitution. Elle
rappelle, à propos de l’amiante, qu’on a mis 80 ans à décider
d’arrêter de l’utiliser et qu’on l’a finalement remplacée par d’autres
produits contenant aussi des fibres. Elle insiste sur la nécessité
d’opérer une véritable comparaison des risques.
À un intervenant dans la salle qui affirme que la destruction des
déchets dus aux nanotechnologies dépense beaucoup d'énergie,
participant ainsi à la production de gaz à effet de serre, M. Flahaut
répond que les quantités utilisées sont infimes. S’agissant de la
toxicité, les caractéristiques sont très différentes en fonction des
procédés de fabrication et il n’y a pas une réponse unique.
Les matériaux nanostructurés. Leurs applications en aéronautique civile et militaire.
Constatant l’heure tardive, Jean Bergougnoux demande simplement à
Jean-Marc Thomas, d’Airbus France, si l’utilisation des
nanotechnologies, qui contribue à l’allègement des avions, permet de
réduire effectivement les consommations de kérosène.
Jean-Marc Thomas le confirme et rappelle que la filière aéronautique européenne a pris des engagements très importants :
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réduire par deux les émissions de CO2 |
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diminuer par deux le bruit perçu. |
Il souligne l’importance, pour l'Europe, d’être en avance mais pas
trop pour faire pression sur les normes au niveau mondial.
Il insiste aussi sur la longueur du cycle des avions. L’Airbus A 350
qui sortira dans trois ans intégrera à peine 50 % de matériaux
composites. Les progrès apportés par les nanotechnologies sont attendus
au-delà de 2020.
Quant à la fin de vie de ses avions, Airbus a développé à Tarbes le
premier centre mondial de démantèlement environnemental des avions.
Il indique un projet de recherche très ambitieux sur l'application des
nanotubes qui permet d'espérer augmenter dans une dizaine d'années
l'efficacité de la désalinisation de l’eau d’un coefficient de 10,
voire de 100 par rapport aux procédés actuels.
Selon lui, on peut beaucoup attendre des nanotechnologies, mais il faut
comprendre le produit, le procédé, les aspects de sécurité et maîtriser
l'ensemble du process.
Avant de lever la séance, Jean Bergougnoux passe la parole à Gwenael
Rapenne, du CNRS, pour une petite démonstration sur le fonctionnement
des "nano machines" à partir d’un microsope à effet tunnel.
Il donne une illustration en images animées de la manière dont on peut
déplacer une nano-construction, ou faire tourner une « nan-brouette »
constitué de quelques atomes. Il indique que ses trois ans d’études ont
causé la production de 8 mg de CO2, c'est-à-dire dix mille fois moins
qu’une voiture en un kilomètre.
Il insiste sur le fait qu’un moratoire sur la recherche est totalement
inenvisageable. C'est ce qui permet d'avancer et d'accumuler des
connaissances pour savoir si ce qui est créé au niveau des
nanotechnologies peut être intéressant, et il serait aberrant de
commercialiser des molécules sans les tester.
Jean Bergougnoux clôt la séance à 23 heures en le remerciant, ainsi que tous les participants.
Base 350 personnes présentes et 49 questions papiers. |
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