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			INTERVENANT.- C'est une question sur la géo-ingénierie. Entre autres,
			les programmes de géo-ingénierie pour capter du CO2, provoquer
			l'opacité des rayonnements solaires, fertiliser les océans avec des
			particules de fer ou de l’urée pour stimuler la séquestration du CO2
			dans le planton marin. Tout cela est bien gentil, a priori, pourquoi le
			faire alors qu'il y a peut-être des moyens sociaux sur la réduction des
			voitures, la réduction de la consommation de pétrole, etc. ? En plus,
			on ne connaît pour l'instant aucune des conséquences de ces
			éléments-là. Le problème des nanoparticules, c'est aussi ce genre de
			gadget. Vous présentez au début la médecine, pour que vous soyez mieux,
			c’est gentil, mais on nous a fait le coup pour les OGM. Mais il y a
			tout le reste qui est derrière. 
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- L'utilisation des nanoparticules ou des nanomatériaux
			de caractères si différents pour lutter contre le réchauffement
			climatique, c'est un truc sur le papier ou on y pense sérieusement ? 
			 
			
			 
			 
			
			Mme CAMBOU.- Je ne sais pas répondre à cela, mais je trouve la question
			extrêmement intéressante. Parce que si je reprends le thème de la
			médecine de tout à l'heure, on ne s'attaque pas aux maladies, mais on
			met de grands pansements. C'est quand même comme cela qu'on est en
			train de gérer, puisqu’on n'est pas en train de réfléchir sur comment
			éviter de polluer, comment éviter de défaire les océans qu'on esquinte
			à vue d’œil, etc., mais c'est à chaque fois, comment on va inventer des
			systèmes qui vont permettre de refaire du business sans s'attaquer à
			toutes nos mauvaises pratiques. Je ne suis pas d'accord sur une telle
			logique et je comprends la question.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Une autre question ? Cela peut être une prise de position. Ce n'est pas forcément une question.
			 
			
			 
			INTERVENANTE.- On voit que les nano-objets ont envahi l’habitat,
			l'énergie, les matériaux, les biens d'équipements, les applications
			multiples comme l'informatique, le textile, la médecine, les
			cosmétiques. Ce n'est pas étonnant que l’on ait un grand débat parce
			que nous en avons partout. En Midi-Pyrénées, il y a 900 entreprises
			concernées par les nanotechnologies. Ces entreprises produisent des
			objets, mais qui sait ce qu'elles produisent ? Qui les utilise ? Quels
			sont les impacts qu'ils ont sur nous ? Je suis bien contente que la
			représentante du ministère nous l’ait dit. Il faudrait a minima une
			identification, et pour cela les connaître, un logo spécifique qui
			puisse informer les consommateurs, les citoyens et les salariés dans
			les entreprises, afin que ceux-ci puissent choisir d’en utiliser ou non
			et que cela remonte dans les CHS-CT. Il faut une législation qui
			encadre la production et l'utilisation des nanotechnologies.  
			  
			Ce que je voulais vous dire, c'est qu'il y a une chose tout en amont,
			on pourra faire tout ce qu'on veut, si les nanotechnologies et les
			nanoobjets continuent d'être produits, une chose va être certaine,
			c’est qu’elles finiront en déchets, comme finissent à peu près la
			plupart de nos objets. Nous aurons des nanodéchets qui finiront dans
			les incinérateurs, en centre d’enfouissement technique ou dans les
			stations d’épuration. Nous les retrouverons dans l’égout. À l'heure
			actuelle, la plupart des collectivités veulent étendre l’égout sur les
			champs. Il y aurait une dissémination de faite. Si cela arrivait à
			passer l’égout, on aurait une dissémination par l’eau. Je pense qu’il
			faut absolument un moratoire. Il faut qu'on en sache beaucoup plus
			avant qu'il y ait des objets dans la vie courante. 
			(Applaudissements.)
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- On va passer la parole à Pascal Guiraud, en lui
			posant deux questions. La première question posée, c'est au fond :
			est-ce que l’on sait où sont les nanotechnologies ? Lorsque vous vous
			êtes penché sur les problèmes de gestion des déchets, est-ce que vous
			avez réussi à faire un peu une cartographie du cheminement des
			nanoproduits ? 
			 
			
			 
			M. GUIRAUD.- Bonjour. Je vous remercie de me donner la parole.
			J'aimerais avoir le premier transparent si cela est possible. Avant de
			répondre à ces deux questions, parce que c'est bien l'objet de ma
			présentation, je voudrais préciser que je représente une association
			qui s'appelle l’ORDIMIP qui est l’observatoire régional des déchets
			industriels en Midi-Pyrénées. Elle regroupe différents acteurs qui se
			sentent concernés par la gestion des déchets des activités économiques
			en général. On retrouve des services et des établissements publics de
			l'Etat, des collectivités territoriales, des entreprises, des
			associations patronales, mais aussi des associations de protection de
			l'environnement, des associations de consommateurs et ce qu'on a appelé
			des personnalités qualifiées, des universitaires, des journalistes,
			etc. C'est un résumé de ce que l'on est en train de faire aujourd'hui.
			C'est de cela qu'on s'est occupé. Cette association qui existe depuis
			pas mal d'années, qui sert à comprendre où vont et où sont les déchets
			en Midi-Pyrénées, s'est autosaisie du problème des nanotechnologies.
			Finalement, que sait-on de cela ? Est-on capable d'identifier des
			déchets ? Est-on capable de voir où ils vont ? Est-on capable de
			prévoir des filières pour commencer à traiter des objets que l'on ne
			sait toujours pas retraiter ? A-t-on des moyens pour anticiper le
			problème ?  
			 
			
			Là-dedans, l'idée était de répondre à trois enjeux importants pour
			cette filière : est-on capable d'avoir une gestion des déchets adaptée
			à l'endroit où ces produits sont créés et utilisés, par exemple, dans
			des laboratoires de recherche ? Est-on capable de protéger les salariés
			des filières de collectes, depuis les éboueurs qui ramassent les
			poubelles, jusqu’aux centres de traitement un peu plus sophistiqués et
			aux mises en stockage des déchets inutiles ?  
			  
			Est-on capable d'adapter des filières de traitement ? Par rapport à
			tout ce qui existe déjà pour tout autre type de déchet. Sait-on faire
			du recyclage de l’eau ? Est-ce qu’on sait traiter l'eau qui pourrait
			être polluée par des nanoparticules ? Sait-on traiter les déchets et
			s'assurer qu'à la sortie il n’y a rien ?  
			Pour faire cela on a fait une grande enquête sur Midi-Pyrénées à partir
			de l'année 2008 où on a contactés 900 entreprises, 35 laboratoires de
			recherche censés utiliser des nanotechnologies. On a eu un taux de
			réponse qui amène au constat qu'il y a sur le transparent. C'est-à-dire
			qu'on ne sait rien. Pourquoi ? Parce que les gens eux-mêmes ne savent
			pas. On a discuté avec des responsables hygiène et sécurité dans les
			entreprises, et ils disent : c'est quoi ces nanotechnologies ? Que
			voulez-vous qu’on regarde ou qu’on recherche ? Il y a un manque cruel
			d'informations au niveau le plus basique pour avoir des retours pour
			organiser des filières, pour s'assurer que l'on fait cela sans danger.  
			Pour terminer rapidement sur cette introduction, mais on y reviendra un
			peu plus en détail plus loin. On a pu émettre des recommandations très
			fortes basées sur un retour d’expérience. On est allé voir sur le
			terrain. On est allé recueillir des informations pour mettre en œuvre
			des solutions qui ne plaisent pas à une grande partie d’entre vous,
			mais sur lesquelles il est quand même nécessaire de réfléchir et
			d'anticiper dès maintenant. Sur ces recommandations, il y a d’abord un
			niveau basique d'information et de transparence. On a parlé depuis le
			début d'étiquetage. Cela permettrait aux gens de savoir ce qu'ils
			manipulent et de prendre des précautions. Cela permettrait aux
			entrepreneurs, qui achètent des produits, de protéger leurs salariés.  
			 
			Ensuite, il y a un volet nécessaire de formation. Si on veut que les
			gens qui sont en charge de cela sachent que faire vis-à-vis de dangers
			potentiels, il faut que l'on soit capable de leur proposer des cursus,
			soit en université, soit sous forme de formation continue, ou de stages
			pour qu’ils sachent quoi faire. Or, cela n'existe toujours pas ou ça
			commence à peine à apparaître.  
			Le troisième volet important, c'est la réglementation. On en a
			largement parlé jusqu'à maintenant. Tant que nos dirigeants ne sont pas
			capables d'inscrire en dur, dans des lois, ce que sont des
			nanoparticules et de se mettre d'accord là-dessus, pour passer à la
			réalité du problème et pas rester deux ans sur un problème qui n'en
			n'est pas encore un, il faut aller plus vite et inciter les gens à
			faire cette réglementation, pour qu'on puisse savoir pour quelles
			nanoparticules il va y avoir danger et pour lesquelles il faut prendre
			des protections particulières.  
			Et le dernier point qui me semble essentiel, parce que je suis moi-même
			chercheur et impliqué dans cette thématique-là, c’est que nous avons
			besoin de connaissances.  
			  
			
			On n’a pas forcément besoin de connaissances dans le cadre de déchets
			sur les nanotechnologies, mais sur le devenir des nanoparticules
			lorsqu’elles passent dans le traitement d'ordures ménagères. Vous allez
			jeter des chaussettes à la poubelle, elles vont partir en usine
			d’incinération. Est-ce que les conduits des cheminées sont équipés de
			filtres suffisants pour arrêter des nanoparticules issues de cette
			combustion ? On ne sait pas. Est-ce que des sous-produits de
			dégradation de ces nanoparticules ne vont pas passer dans des gaz ? On
			ne sait pas. Est-ce que dans les mâchefers (qui sont les résidus de ces
			usines d’incinération), on va avoir des nanoparticules que l'on va
			ensuite étendre sur les routes pour être éventuellement liquidée par la
			pluie ? On ne sait pas. Est-ce que quand vous lavez vos chaussettes,
			vous retrouvez des nanoparticules qui vont dans la station d'épuration
			? Est-ce que la station d’épuration est capable de les arrêter ? On ne
			sait pas. C'est un grand domaine.  
			Pour revenir sur les aspects financiers dont on a parlé tout à l’heure,
			on a parlé de 2 ou 3 % qui sont, à juste titre, dédiés pour les
			recherches sur la toxicologie, mais on réclame, en termes de recherche
			sur les déchets, que l'on puisse être capable de dégager les fonds
			substantiels pour mettre en œuvre des protections et des filières de
			traitement et ce n’est pas quelque chose qui va à l’encontre d'un
			développement industriel.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Merci. 
			(Applaudissements.) 
			Il y a des réactions immédiates à ce que vous venez de dire.
			 
			
			 
			INTERVENANT.- Merci pour ce discours qui est franc et clair, permettant
			de prendre conscience que l'on manque totalement d'informations, comme
			nous tous, citoyens qui participons à ce débat. Avant, tous ceux qui
			intervenaient avec une position un peu officielle me semblaient
			aveugles et portaient une sorte d'enthousiasme vers ces nouvelles
			technologies qui, on le sait, et malheureusement depuis longtemps,
			présentent des risques importants.  
			Nous-mêmes, aux Amis de la Terre, nous avons fait une veille
			documentaire qui a permis d'accéder à certains documents, diffusés dans
			des milieux scientifiques, restreints. Les connaissances sont là,
			mais   comme par hasard   elles sont confinées dans ce milieu
			scientifique et ne débordent jamais de cette sphère vers le politique
			ni vers l'administratif.  
			 
			(Réactions à la tribune.) 
			Je vous céderai le micro tout à l'heure, vous pourrez répondre largement.  
			  
			
			D'après ce qu'on a entendu, on sait que la proportion donnée à la
			recherche   permettant d'anticiper et d'évaluer tous les risques   est
			ridicule par rapport aux applications directes de ces nanotechnologies.
			C'est un discours que nous avons tous entendu. Effectivement, nous
			sommes dans une course à la nouveauté, une course technologique pour
			être dans la "cour des grands", comme on a su l'être pour le nucléaire
			qui permet de développer de nombreuses technologies. 
			Ce débat sur les nanotechnologies est pratiquement similaire à celui
			qu'on a pu avoir sur certaines technologies liées au nucléaire. Il y a
			vingt ans, nous avions déposé une plainte devant le procureur de
			Toulouse parce qu'il y avait de l'iode radioactif dans la Garonne. On
			pensait que cela venait des centrales nucléaires mais on s'est aperçu
			finalement qu'en aval de Golfech   qu'on surveillait   la radioactivité
			était plus faible qu'en amont, et plus on remontait et plus c'était
			radioactif ! On s'est aperçu que cela venait de tous les laboratoires
			autour de Toulouse ! Vingt ans après, le problème est exactement le
			même. Nous avons fait des analyses dans la Garonne, on nous a dit : «
			Il va y avoir des cuves de rétention, une surveillance des patients,
			des protocoles vont être mis en place », et vingt ans après, j'ai fait
			des analyses dans la Garonne et j'ai trouvé exactement les mêmes
			niveaux de pollution. 
			Quand vous dites qu'il y a de la recherche, j'ai des doutes quant aux conséquences réelles de ces recherches.  
			Tout à l'heure, José a dit qu'il faut arriver à une réglementation des
			rejets. Avant de réglementer les rejets, il faudrait certainement les
			maîtriser et, fortement, arrêter de les diffuser comme cela se fait
			actuellement aveuglément dans la nature. Il y a des milliers de
			produits qui contiennent des OGM… Tout à l'heure quelqu'un m'a montré
			un produit cosmétique bio contenant des nanoparticules ! C'est
			intolérable ! Les gens qui veulent acheter des produits bio à 99 % ne
			veulent pas de produits à base de nanotechnologies  
			On a parlé aussi de moyens de surveillance. Quand on connaît le
			développement actuel de la recherche, le soutien à toutes les
			industries pour qu'elles foncent, qu'elles aillent de l'avant, qu'elles
			produisent de la croissance, on sait très bien que les moyens de
			surveillance n'existent pas et qu'on n'en veut pas ! On n'en veut pas
			parce que cela va brider les industriels, que cela va empêcher d'avoir
			la productivité la plus intéressante possible pour tous ceux qui
			spéculent sur tous ces nouveaux produits. 
			Troisièmement, il y a des exemples… On a eu l'occasion de rencontrer
			des gens qui travaillent dans différents laboratoires ou centres de
			production… Ils nous disent qu'effectivement dans les laboratoires en
			France il y a des protections, car ceux qui produisent ne sont pas
			fous, ils protègent ou essaient de protéger leurs salariés, mais ces
			peintures qui vont [… ] 
			  
			On va peut-être en parler tout à l'heure au sujet de l'aéronautique…
			Ces produits lorsqu'ils vont par exemple chez Airbus, il est écrit :
			"Si vous respectez le protocole de sécurité, vous ne risquez rien",
			sauf que rien n'est indiqué pour savoir comment se protéger, se mettre
			à l'abri, et surtout les ouvriers eux-mêmes qui manipulent ces produits
			n'ont aucune information pour savoir si ces produits contiennent ou non
			des nanotechnologies, alors qu'on sait maintenant, pour des questions
			d'aérologie, de légèreté, etc., que ces produits se développent
			largement dans cette industrie.  
			Quand on nous fait croire qu'il y a de la recherche, comme tout à
			l'heure le premier intervenant au nom du CEA, quand on voit avec des
			termes scientifiques très beaux, toutes les slides qui passent les unes
			derrière les autres, tout cela permet de nous faire croire que la
			recherche est largement avancée, mais c'est faux ! Actuellement rien
			n'est maîtrisé, c'est totalement diffusé, et c'est bien pour cela que
			nous demandons un moratoire, pour qu'enfin on évalue totalement ces
			risques et qu'ensuite, en fonction de l'évaluation de ces risques, on
			puisse savoir s'ils peuvent ou non être mis sur le marché.
			Actuellement, malheureusement, on a l'impression qu'il serait temps
			d'arrêter la catastrophe sanitaire avant qu'elle arrive. 
			(Applaudissements.)
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Merci.
			 
			
			
			
			José CAMBOU, puis j'aimerais entendre Catherine MIR sur la réglementation. 
			 
			 
			 
			Mme CAMBOU.- Sur la surveillance, j'explique ce que j'ai voulu dire tout à l'heure, je n'ai peut-être pas été claire. 
			
			Très concrètement, aujourd'hui, quand un site industriel est dit
			"installation classée pour la protection de l'environnement", il fait
			l'objet d'un cadrage juridique, il est obligé d'être soit déclaré soit
			autorisé, il y a un ensemble de surveillances prévues pour les rejets
			qui accompagnent son activité.  
			Or aujourd'hui on se rend bien compte que les sites amenés à travailler
			sur des nanoparticules ne sont pas forcément du domaine de
			l'installation classée, donc aujourd'hui rien n'est prévu en termes de
			surveillance et de cadrage des rejets.  
			Il fallait d'abord obtenir qu'il y ait une obligation de déclaration
			pour qu'on sache où cela se passe en France et sur quel type de
			produit. C'est ce qui est actuellement dans le projet de loi dit
			couramment "Grenelle II", on l'a dit tout à l'heure.  
			  
			Il faudra après des textes d'application comme toujours, et on espère
			que le Gouvernement ne mettra pas longtemps à les promulguer. Une fois
			qu'ils seront sortis, on pourra logiquement surveiller un ensemble de
			sites avec un cadrage adapté, ce qu'on ne peut pas faire aujourd'hui.  
			Je pense quand même que c'est dans l'intérêt du thème environnemental
			qui est celui de notre séquence pour l'instant de savoir ce qui est
			diffusé ou non, sans attendre les calendes grecques. Toi-même, quand tu
			témoignes que tu trouves des problèmes de radioactivité à l'aval de
			Toulouse, c'est bien à partir de ton premier témoignage qu'il y a eu
			des avancées, même si elles ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il est
			donc important de surveiller et c'est ce que nous réclamons.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Vous voulez répondre.
			 
			
			 
			 
			
			INTERVENANT.- Je voulais faire un complément d'information. Quand on
			parle d'installation classée pour la protection de l'environnement,
			c'est une belle hypocrisie ! Une installation classée, c'est une
			installation dangereuse et elle n'est certainement pas classée pour la
			protection de l'environnement. De nombreux sites ont été déclassés pour
			éviter qu'ils ne soient surveillés… pour que les autorisations soient
			accordées beaucoup plus facilement, sans aucune instruction… C'est ce
			que je voulais dire en parlant du manque de surveillance et de moyens
			pour surveiller tous les produits toxiques. 
			 
			
			 
			 
			
			M. LE PRESIDENT.- Merci.
			 
			
			Catherine MIR ?
			 
			
			 
			Mme MIR.- Je voudrais remercier Les Amis de la Terre qui disent qu'il
			faut beaucoup plus de moyens pour les services qui s'occupent des
			installations classées, puisque notre direction générale justement
			s'occupe des installations classées. Je travaille à la Direction
			générale de la Prévention des Risques, où le travail est immense. Nous
			nous occupons des installations classées, mais également des produits
			chimiques   on a parlé beaucoup du règlement REACH tout à l'heure   et
			des risques pour la santé et l'environnement en général.  
			Nous travaillons à élaborer la réglementation. Nous préparons des
			textes qui sont discutés par l'ensemble des ministères, mais aussi très
			largement avec les associations, notamment par exemple pour les
			installations classées au Conseil supérieur des Installations classées.
			Par exemple, le projet de déclaration a été discuté dans le cadre du
			Grenelle de l'Environnement et du Comité opérationnel qui a suivi.  
			  
			Contrairement à ce qui a été dit, les décisions ne sont pas toutes
			prises. Il y a des réflexions au niveau communautaire. Notre travail
			consiste à élaborer la réglementation française, mais également de
			discuter avec les autres états membres des réglementations européennes.
			 
			Tout à l'heure M. GUIRAUD a bien dit que le Parlement européen avait
			"lancé un pavé dans la mare" si je puis dire, en disant qu'il fallait
			prévoir des dispositions particulières concernant les nanoparticules et
			les nanotechnologies. La Commission, bien entendu, écoute les
			parlements européens. Aujourd'hui, nous discutons ; des réflexions se
			mettent en place au niveau de la Commission pour prévoir les éléments
			d'adaptation au dispositif réglementaire. Tout n'est donc pas décidé.
			On peut reprendre l'exemple de REACH, on a bien vu le rôle des
			associations dans les discussions qui ont concerné ce règlement.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Soyons plus précis : le Grenelle II comporte des obligations de déclaration ?  
			Mme MIR.- Tout à fait. Au cours du Grenelle, il y a eu identification
			de certaines lacunes au niveau réglementaire, dont la réglementation
			REACH. Le projet de déclaration porte sur la fabrication, la mise sur
			le marché et l'utilisation des nanoparticules. Les fabricants,
			importateurs et distributeurs devront déclarer les quantités mises sur
			le marché, l'identité des nanoparticules, ce qui nécessite une
			définition. On en a parlé tout à l'heure. Il faut l'arrêter tout de
			suite même s'il y a des discussions entre les scientifiques pour savoir
			quel est exactement le périmètre des nanotechnologies, mais il faut
			prendre une décision, on ne peut pas attendre indéfiniment de savoir ce
			qu'est une nanotechnologie. Si la définition n'est pas bonne, on
			l'aménagera, mais il faut s'arrêter sur une définition des
			nanoparticules. Elle existe déjà pour les cosmétiques. Ensuite, on
			identifiera les usages, ce qui est très important pour connaître
			l'exposition de la population et les risques de dissémination dans
			l'environnement.  
			Certes, les règlements existants ne sont pas adaptés, puisque le
			règlement REACH n'a pas été fait à l'époque des nanotechnologies, il y
			avait d'autres choses importantes. Tout à l'heure, quelqu'un a dit que
			des substances étaient bien plus dangereuses qui sont mises sur le
			marché, oui. Essayons donc d'être plus vigilants vis-à-vis des
			nanomatériaux. 
			Le plus important, c'est que les principes de ces réglementations sont
			solides. Le règlement REACH dit d'abord que les industriels qui mettent
			sur le marché les substances sont responsables de celles-ci. Ils
			doivent donc procéder   bien sûr il y a une deuxième évaluation   et
			financer eux-mêmes les études pour démontrer que les produits mis sur
			le marché ne sont pas toxiques pour la santé et pour l'environnement.
			C'est un premier principe. 
			 
			
			 
			Mme CAMBOU.- C'est nouveau. 
			 
			
			 
			Mme MIR.- Cela vient de REACH. 
			Le deuxième principe, tout aussi important, c'est que lorsqu'une
			substance est dangereuse, il faut la substituer par une autre substance
			ou une autre technique, une autre méthode qui soit moins dangereuse. Il
			n'y a pas droit de mise sur le marché tout simplement parce qu'on a
			travaillé sur l'évaluation de la substance. Si une substance est moins
			dangereuse, on doit la privilégier par rapport à d'autres substances
			dangereuses.  
			Ensuite, il y a des dispositifs d'autorisation et de restriction qui sont en place.  
			En ce qui concerne les déchets, je dirai la même chose : les principes
			de la réglementation sont solides. Le producteur du déchet est
			responsable du déchet qu'il produit et le producteur d'un produit est
			également responsable de l'élimination du produit in fine. C'est ainsi
			qu'aujourd'hui on a des filières de traitement et de recyclage des
			emballages, des filières de recyclage des piles qui contiennent des
			produits dangereux pour l'environnement. On a tout un dispositif
			réglementaire qui fonctionne, qui est éprouvé, avec pour les déchets
			une stratégie fixée par un cadre européen. Il faut voir sur un plan
			pratique si le dispositif est adapté aux nanomatériaux. 
			Effectivement, il y a des défauts de connaissances, mais des
			connaissances commencent à se faire jour. Tout à l'heure, la personne
			représentant Les Amis de la Terre disait qu'il y a déjà des
			connaissances qui circulent mais que les pouvoirs publics ne se les
			approprient pas. On commence à avoir un certain nombre de connaissances
			et aujourd'hui il faut commencer à agir et à regarder très
			attentivement, je crois que c'est l'objet du débat public, ces
			questions pour voir comment adapter les réglementations. Le
			Gouvernement français, via la déclaration, a marqué une première étape.
			Elle permettra de connaître, de surveiller, de voir les pratiques, puis
			il y aura d'autres étapes.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Je voudrais prendre un exemple concret pour bien vous expliquer.  
			Supposons qu'ARKEMA fabrique des nanotubes de carbone. Il fait une
			déclaration, précise la quantité qu'il produit, qu'il met sur le
			marché, fait-il une déclaration à qui il vend ? Parce que derrière
			c'est un marchand de peinture qui va mettre les nanotubes de carbone
			dans la peinture… Quelle obligation a le peintre quant aux produits
			qu'il met sur le marché ? 
			Mme MIR.- Le fabricant a l'obligation de déclarer l'identité, la
			quantité, l'usage, donc on saura qu'ils ont un usage de peinture, car
			son client l'informera de l'usage de la substance. C'est un dispositif
			qui fonctionne dans le cadre du règlement REACH.  
			  
			La loi prévoit également que le fabricant informe les autorités
			publiques des personnes auprès desquelles il commercialise le produit.
			On aura donc une première traçabilité.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Si j'achète sur le marché une raquette de tennis renforcée aux nanotubes de carbone, j'aurai l'information ? 
			Mme MIR.- Pour l'instant, non. Les questions d'étiquetage des produits
			sont réglementées au niveau européen et aujourd'hui il n'y a pas de
			réglementation particulière concernant les nanomatériaux au niveau
			européen, si ce n'est pour les cosmétiques pour lesquels une obligation
			vient d'être faite. Ces discussions doivent être portées au niveau
			européen et il nous faut des arguments bien fondés pour avancer. 
			 
			
			 
			Mme CAMBOU.- Les arguments, on les a donnés ! Cela fait deux ans qu'on
			les donne ! Tout le monde demande un étiquetage ! On sait que
			l'étiquetage ne peut pas être franco-français. On a entendu le message
			! On a compris ! Mais on dit que l'Etat français peut être une
			locomotive, car pour bouger le train européen, il faut que quelqu'un le
			démarre pour que les wagons suivent.  
			Tout le monde dans cette salle, j'imagine (parce que tous les cahiers
			d'acteurs que je peux lire, que ce soit des associatifs, des syndicats,
			etc. le montrent) demandent de l'étiquetage. L'étiquetage permettra aux
			personnes qui interviennent, soit en tant qu'acheteur, soit en tant que
			transformateur, quand ils sont dans des positions de travail, d’accèder
			à l'information. Or les gens sont porteurs d'angoisse. Un salarié qui
			saura, pourra demander des protections, ne vivra pas dans le même type
			d'angoisse. Toutes les associations de consommateurs réclament un
			étiquetage pour avoir le droit de choisir. Vous pourrez me dire que
			dans dix ou quinze ans ils ne pourront choisir qu'entre des
			nanotechnologies, mais en tout cas aujourd'hui ils demandent le droit
			de choisir.  
			Je vous demande instamment de faire en sorte que la France ait un rôle
			de locomotive, c'est ce que nous attendons des pouvoirs publics. 
			(Applaudissements.)
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Nous avons eu une discussion très intéressante à
			Strasbourg il y a quelques jours à ce sujet. J'ai posé la question
			stupide : supposons que la France fasse une réglementation qui ne soit
			pas eurocompatible, qu'est-ce qui se passe ? La réponse de la
			Commission européenne a été : faites-la ! Cela remonte au niveau
			européen. Ou bien c'est très intelligent et on peut peut-être trouver
			un accord, ou bien les autres pays ne sont pas d'accord et à ce
			moment-là vous êtes en infraction, vous revenez en arrière.
			 
			
			 
			Mme MIR.- Je voudrais répondre à M. Bergougnoux très vite. 
			Le projet de déclaration est regardé très attentivement par la
			Commission, d'abord pour voir s'il est compatible avec le droit
			européen, mais aussi parce que cela peut être un exemple intéressant.
			Il est regardé dans les deux sens. Pour l'instant notre démarche est
			plutôt regardée avec un intérêt positif. Je ne suis pas sûre qu'une
			initiative sur l'étiquetage aurait été regardée de la même façon.  
			Par ailleurs, sur la question des travailleurs, il existe un outil
			fondamental concernant les substances chimiques pour assurer la
			sécurité des travailleurs, ce sont les fiches de données de sécurité
			accompagnant les produits. 
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Tout à fait.
			 
			
			 
			Mme MIR.- Au niveau européen, nous réclamons que, sur les fiches de
			données de sécurité, il soit porté mention des nanomatériaux et
			nanoparticules. Nous avons obtenu qu'il y ait une référence à l'état
			dimensionnel de la substance. Les négociations sont progressives et il
			faut avancer avec détermination. 
			 
			
			 
			 
			
			M. LE PRESIDENT.- Les fiches de sécurité, j'en ai une sous les yeux…
			C'est un fabricant norvégien de poudre de nanosilice 999... Sa fiche de
			sécurité est apparemment bien faite. "Identification des dangers : le
			produit a peu de chance d'être nocif si utilisé et conditionné comme
			prescrit. Néanmoins, d'une façon générale, l'inhalation à dose
			excessive de particules inférieures à 100nm peut être à l'origine d'un
			risque pour la santé mais la valeur limite d'exposition professionnelle
			n'a pas été définie par nanoparticule." C'est une fiche de données de
			sécurité établie selon les règles mais il manque quelque chose pour la
			remplir. Je ferme la parenthèse et je donne la parole à Monsieur.
			 
			
			 
			 
			
			INTERVENANT.- Je voudrais essayer d'élargir au cycle de vie complet
			d'un produit, car j'ai l'impression qu'on n'a pas élaboré de réflexion
			sur ce problème, de la fabrication de votre raquette de tennis à son
			élimination en tant que déchet. J'ai l'impression qu'on est en train de
			reproduire l'erreur faite pour le nucléaire. On va vu la semaine
			dernière un reportage édifiant sur ce que devenaient les déchets
			nucléaires, à la fin duquel le Haut-commissaire au CEA nous disait que
			l'important était d'avoir confiance… Cela me pose un peu question. J'ai
			l'impression qu'on ne tire pas les leçons de l'histoire.  
			Quelles sont les institutions ou entités qui vont nous garantir la
			prise en compte effective du cycle de vie d'un produit ? Est-ce que ce
			sera toujours le CEA ? Est-ce que d'autres personnes seront invitées
			dans le débat ? Il serait intéressant de démocratiser davantage cette
			question, sans remettre en cause la recherche de Monsieur au CEA, ce
			n'est pas le problème, c'est un problème de prise en compte globale du
			produit constitué de nanoparticules.  
			  
			M. LE PRESIDENT.- Si on va jusqu'au bout de votre pensée, vous
			recommanderiez une agence indépendante avec un conseil d'administration
			pluri-disciplinaire ?
			 
			
			 
			INTERVENANT.- C'est une option, à condition que cela ne constitue pas une usine à gaz supplémentaire. 
			 
			
			 
			 
			
			M. LE PRESIDENT.- Exactement. C'est bien là la vraie question. On revient à votre problème.
			 
			
			 
			 
			
			M. GUIRAUD.- Je voulais intervenir sur l'aspect réglementaire. J'ai
			bien entendu les déclarations de bonnes intentions, je vous en remercie
			et on prendra garde au sein de l'observatoire qu'elles soient mises en
			pratique, mais sur le terrain les gens ont des interrogations urgentes.
			On s'est donc permis de proposer quelques recommandations.  
			(Affichage d'un transparent)  
			On s'est permis de faire des propositions de réglementation pour
			l'étiquetage, on n'y revient pas, mais il y a quelque chose qui nous
			tient à cœur, c'est de faire en sorte que lors du financement public
			d'une recherche sur les nanomatériaux, la convention de financement
			prévoie un volet obligatoire sur l'analyse du cycle de vie, de
			récupération et de remise en ordre des déchets produits. Ce n'est pas
			une volonté scientifique, c'est issu de discussions approfondies
			pendant des heures de réunion avec des acteurs d'origines différentes,
			des associations, des scientifiques, des industriels du déchet et
			d'autres secteurs. Ces personnes qui travaillent tous les jours sur des
			choses comme cela nous demandent cela.
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Est-ce qu'on pourrait revenir sur la physique des
			choses ? Monsieur Flahaut, comment détruit-on des nanotubes de carbone
			? Comment élimine-t-on l'argent nanométrique ? 
			 
			
			 
			M. FLAHAUT.- C'est un composé qui ne contient que du carbone, donc il
			suffit de les incinérer et on obtient du CO2. Au laboratoire, on
			travaille sur la synthèse des nanotubes de carbone. Tous les objets mis
			en contact avec les nanotubes de carbone, au cours de la fabrication,
			que ce soit les masques, les gants, tous les matériels de protection,
			etc., terminent dans des conteneurs particuliers qui partent à
			l'incinérateur en fin de production.
			 
			
			 
			 
			M. LE PRESIDENT.- Vous êtes sûr de ne pas rejeter des nanotubes de carbone en l'état dans la nature ?
			
			 
			 
			
			 
			M. FLAHAUT.- En tout cas, on fait tous les efforts…
			 
			
			 
			 
			
			M. LE PRESIDENT.- Vous faites tous les efforts pour que ce ne soit pas le cas. 
			Et l'argent nanométrique, ça s'élimine comment ? Qui a la réponse ? Qui
			sait éliminer l'argent nanométrique ? Ce serait une bonne question ! 
			Un intervenant ? Je ne sais pas s'il a la réponse…
			 
			
			 
			INTERVENANT.- Excusez-moi, je n'ai pas la réponse.  
			Je vais vous exposer ma position, cela va peut-être vous faire sourire.
			Je suis diplômé en matériaux nanotechnologiques et je suis militant
			écologiste. 
			 
			
			 
			M. LE PRESIDENT.- Oui, pourquoi pas !
			 
			
			 
			INTERVENANT.- Comme je suis encore un peu jeune, j'ai des rêves, je
			pense à une société meilleure, etc. Mais là pour les nanotechnologies
			il faut agir assez vite. En fait, je cadre ma question dans la société
			actuelle. De ce point de vue, je pense qu'un moratoire complet est
			irréalisable compte tenu des investissements déjà réalisés. On peut
			lutter pour, mais je ne pense pas que cela passera.  
			En même temps, on ne peut pas confier la tâche à un industriel de
			s'assurer que tous ses produits sont bons et ce pendant tout le cycle
			de vie, parce que ce n'est pas dans son intérêt. On a bien vu par le
			passé qu'il suffit qu'un seul produit mis sur le marché sur 10 000 soit
			problématique pour qu'il y ait un vrai problème de santé publique.
			Comment faire confiance à tous les industriels sur ce sujet ? Je pense
			que c'est impossible. Si on se tourne vers des chercheurs
			universitaires, cela ne me paraît pas être la bonne voie non plus,
			parce que ces dernières années les chercheurs universitaires ont été
			vraiment concentrés sur la recherche appliquée, ce qui est peut-être
			justifiable, mais ils ont perdu une certaine liberté qui leur aurait
			peut-être permis de faire des investigations sur les conséquences à
			long terme des nanotechnologies. Je pense donc à une organisation.
			Évidemment, l'avenir de la DGRP, Monsieur SCHUSTER du CEA, je pense à
			vous… Néanmoins, sans vouloir vous vexer, vos budgets sont ridicules !
			 
			
			 
			 
			
			M. LE PRESIDENT.- C'est peut-être leur avis aussi !
			 
			
			 
			 
			
			INTERVENANT.- Je me souviens avoir fait un exposé quand j'étais
			étudiant au tout début où je disais qu'il fallait des milliards de
			dollars pour faire du milliardième de mètre. De l'argent, il y en a,
			mais la part consacrée à l'étude de la toxicité et des déchets est
			vraiment ridicule. 
			J'ai une armée pour me protéger des dangers extérieurs, j'ai une police
			pour me protéger des dangers intérieurs, cela représente des sommes
			colossales, mais pourquoi n'ai-je pas un vrai organisme centralisé,
			efficace, avec une véritable autorité, qui me protégerait des biens
			industriels, de consommation, etc. ?
			 
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