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			M. CHAUSSADE.- Bonsoir à tous. Je suis Jean-Pierre CHAUSSADE, membre de
			la commission particulière du débat public. Je vais animer ce soir
			cette réunion, accompagné de Galiène COHU qui va me rejoindre et qui
			animera la deuxième séance de cette soirée de ce débat public sur les
			nanotechnologies. 
			 
			Je vous remercie beaucoup de ce que l’on vous a imposé pour venir ici
			ce soir. Vous vous êtes facilement prêtés à cette signature, cette
			adhésion. Nous tenons absolument à ce que chacun puisse s’exprimer
			librement et respecte la liberté de parole. Pour nous, c’est la
			condition d’un vrai débat et de pouvoir faire en sorte que chacun soit
			libre d’intervenir. 
			 
			Ce débat a été décidé par la Commission nationale du débat public, qui
			est l’autorité administrative indépendante chargée par la loi de 1995
			et surtout par celle de 2002 d’organiser les débats publics. 
			 
			Les débats publics sont demandés par des maîtres d’ouvrage, souvent
			pour une autoroute, un projet ferroviaire, l’extension d’un port, d’un
			aéroport etc., et de façon exceptionnelle il s’agit de politique
			générale. Il y a eu un débat national sur la gestion des déchets
			nucléaires. 
			 
			Sous le pilotage du ministère du Développement durable, sept ministères
			ont demandé à la CNDP l’organisation de ce débat pour éclairer leurs
			choix futurs en termes de développement et de régulation des
			nanotechnologies. 
			 
			Ceci était un engagement du Grenelle de l’environnement. Dès lors que
			la CNDP a été saisie de cette demande, elle a nommé une commission
			particulière qui a été constituée à cette fin, qui est seule
			responsable de l’organisation et de l’animation du débat, et ce, en
			toute indépendance par rapport à tous les acteurs et en particulier aux
			ministères qui ont demandé ce débat. Nous sommes saisis de ce débat et
			nous sommes responsables de l’animation de ce débat. 
			 
			Comme tout débat public, la commission particulière de ce débat public
			a pour principal objectif d’informer un public aussi large que
			possible, non seulement de l’aspect technique du débat, mais aussi de
			manière équitable, des différentes opinions qui s’expriment et se
			manifestent sur ce sujet. 
			 
			J’insiste sur cet aspect d’information qui est fondamental. Souvent,
			quand on parle de nanotechnologies, le public a plutôt un retrait. Il
			considère que c’est une affaire de spécialistes. Notre ambition est de
			faire en sorte que le grand public se sente concerné, car cela
			concerne, déjà à travers un certain nombre d’applications, sa vie et
			cela concernera de plus en plus notre société. Il est donc très
			important que le grand public s’approprie ce sujet des nanotechnologies. 
			 
			La deuxième mission est d’écouter tout ce que le public souhaite dire,
			toutes ses attentes, ses questions, ses préoccupations, ses craintes,
			ses oppositions et ses propositions. Nous écoutons tout. Nous n’avons
			pas à défendre telle ou telle position. Nous sommes là pour les écouter
			toutes. 
			 
			Le troisième point est de rendre compte des arguments échangés au cours
			du débat pour que chacun, et l’État bien sûr, mais aussi les
			chercheurs, le corps médical, les entreprises, les associations,
			l’ensemble des citoyens puissent en tirer les enseignements utiles dans
			le cadre de chacune des responsabilités. 
			 
			Un principe fondamental nous guide dans ce débat. Nous parlerons de
			tout ce dont le public souhaite parler. Notre champ est très large. Le
			public, et non pas les spécialistes, est au centre de cette réunion. 
			 
			Comment le débat se passera-t-il ? Notre commission réunit sept
			personnes. Ce sont des généralistes. Nous ne sommes absolument pas des
			spécialistes des nanotechnologies. Il y a 8 mois, je n’y connaissais
			rien. Nous sommes aidés par un secrétariat général qui organise
			matériellement l’organisation du débat avec l’aide d’une agence. 
			 
			Le débat a été décidé par la Commission du débat public en mars 2009.
			Son lancement officiel a été fait le 23 septembre lors d’une conférence
			de presse. Il y a six semaines, nous étions à Strasbourg pour la
			première des 17 réunions publiques. Nous irons dans chaque région pour
			que le débat public soit présent dans toute la France. La dernière se
			tiendra à Paris fin février 2010. 
			 
			Le compte-rendu de ce débat sera rendu public, selon la loi, au maximum
			deux mois après la fin du débat. Dans ce compte-rendu, nous rendrons
			compte de tout ce qui aura été dit non seulement au cours des réunions
			mais également de tout ce qui se dit, s’écrit, sur le site Internet du
			débat public. 
			 
			Après avoir rendu ce compte-rendu, le maître d’ouvrage, soit les sept
			ministères, se sont engagés dans un délai de trois mois, c’est-à-dire
			avant l’été 2010, à décider de la suite qu’ils donneront à ce débat. 
			 
			Nous sommes à la septième réunion publique ce soir à Besançon. Nous
			sommes allés à Strasbourg, Toulouse, Orléans Bordeaux Clermont-Ferrand
			et Lille. Toutes ces réunions ont compté quasiment 2 000 participants. 
			 
			Nous avons entendu plusieurs positions par rapport au sujet des
			nanotechnologies. Certains vont jusqu’à demander un moratoire sur les
			nanotechnologies et sur la recherche, mais d’autres demandent des
			recherches de toxicologie préalablement au développement de nouveaux
			produits. Plusieurs avis se retrouvent sur la nécessité d’une
			réglementation plus spécifique aux nanotechnologies. 
			 
			Du côté des entreprises, la position est variable selon leur taille et
			leur domaine d’activité. Les grandes entreprises disposent de centres
			de recherche et considèrent qu’elles apportent les preuves d’innocuité
			de leurs produits et qu’elles ne mettent sur le marché que des produits
			sûrs. Le public, de son côté, exprime des préoccupations par rapport à
			la question de santé et d’environnement et voudrait au minimum un
			étiquetage des produits contenant des nanoparticules. Certains
			réclament qu’une haute autorité, soit existante soit à créer, assure le
			contrôle de toxicité des nouveaux produits et délivre des autorisations
			de mise sur le marché. 
			 
			Surtout, ce qui est commun à plusieurs réunions, il apparaît une
			demande d’évaluation produit par produit, évaluation entre les risques,
			d’une part, et l’utilité sociale du produit, d’autre part. Certains
			demandent que des produits de type gadget pour grand public ne soient
			pas actuellement dans une phase d’incertitude et que ces produits «
			gadgets » ne soient pas autorisés. 
			 
			J’ai précédemment parlé des réunions publiques et je vais parler du
			site Internet. Ce site Internet est très utilisé et l’est de plus en
			plus, lors des débats. C’est un complément indispensable pour atteindre
			un public encore plus large que celui qui participe aux réunions
			publiques.
			 
			
			Je vais vous donner quelques chiffres. Nous avons eu 48 000 visites sur
			le site Internet à ce jour. Cela fait un peu plus d’un mois que le site
			est véritablement actif. Il y a plus de 240 000 pages consultées. Cela
			signifie que les gens s’arrêtent sur le site et qu’ils ne "zappent" pas
			rapidement. 
			 
			C’est une possibilité que vous avez, 108 avis ont été déposés. Comme
			vous l’avez vu à l’entrée ainsi que sur le site Internet, il y a 42
			cahiers d’acteurs publiés. Je voudrais insister sur cet aspect, car
			c’est la preuve que beaucoup souhaitent donner leur avis sur ce sujet
			très important, notamment les associations, les agences pour la santé,
			des organismes, des entreprises etc. Vous avez à travers ces 42 cahiers
			d’acteurs beaucoup d’avis différents, complémentaires qu’il est
			important d’intégrer et, en tout cas, que nous intégrerons dans notre
			compte-rendu au même titre que les contributions écrites. 
			 
			Les questions du public sont un autre aspect important. Nous en avons
			recensé 344. Toutes les questions auront leur réponse. Nous, commission
			particulière du débat public, nous en sommes les garants. Ces questions
			sont principalement orientées vers le gouvernement qui répond à ces
			questions. Nous vérifions que le contenu de la réponse est bien complet
			par rapport à la question. Nous sommes véritablement garants. Nous
			verrons que vous pouvez poser ces questions par oral, mais surtout je
			vous invite à les mettre également par écrit, de sorte qu’en plus de la
			synthèse de ce débat, en plus de tout ce que nous dirons, de
			l’intégralité du débat, les questions soient bien ordonnancées sujet
			par sujet. 
			 
			Pour vous informer, le dossier du débat est à l’entrée. Ce dossier a
			été préparé par les ministères. Ce n’est pas le dossier de la
			commission particulière. C’est sous la responsabilité des ministères.
			Il y a également, toujours sous leur responsabilité, une synthèse de ce
			dossier plus facilement lisible. 
			 
			Pour éclairer le public, il y a également une synthèse du document du
			nano forum du CNAM qui réunit experts et entre associations, mais il
			nous semble que cette synthèse est importante pour comprendre les
			éléments du débat. Vous pouvez également vous orienter sur le nano
			forum du CNAM pour avoir plus de précisions. Nous publions aussi
			périodiquement une lettre d’information sur le débat. Tous ces
			documents sont à votre disposition, soit ici, soit sur le site Internet
			de la commission. Vous avez les 42 cahiers d’acteurs. Pour intervenir
			pendant les réunions, vous pouvez demander à prendre la parole et
			également écrire vos questions. 
			 
			Les réunions publiques se déroulent dans toute la France. Une synthèse
			est publiée deux jours environ après chaque réunion. Vous pouvez suivre
			tout ce qui se passe, car nous avons à chaque fois un sujet spécifique
			et tout cela permet de compléter votre information sur l’ensemble du
			sujet. 
			 
			Vous pouvez télécharger tous ces documents. Nous avons également pour
			chaque soirée le verbatim, c’est-à-dire le mot-à-mot de toutes les
			interventions. 
			 
			Nous avons prévu d’aborder deux thématiques ce soir, mais elles ne sont
			pas exclusives. C’est vous qui nous orientez sur les sujets que vous
			souhaitez traiter à travers vos questions. 
			 
			Nous verrons d’abord en quoi ce sujet concerne votre région. Un certain
			nombre d’acteurs et certains membres d’associations réagiront. La
			deuxième séquence aura trait aux nanotechnologies et à la
			compétitivité. Dans la région, un certain nombre de toutes petites
			entreprises commencent à démarrer sur le sujet. Il est intéressant de
			les écouter pour voir comment elles développent leurs activités et
			quels sont les freins à ce développement. Ce sera la deuxième partie. 
			 
			Pour participer, vous pouvez poser vos questions après les différentes
			premières interventions. Des représentants des différents ministères
			sont à votre disposition pour répondre à vos questions concernant la
			santé, la recherche, les questions d’étiquetage, la défense des
			consommateurs, etc. Un certain nombre de gens à votre disposition. Un
			certain nombre d’intervenants présenteront leurs activités mais ils
			sont aussi à votre disposition pour répondre à vos questions et
			éclairer ou réagir par rapport à telle ou telle intervention. 
			 
			Il y a un point important : celui du droit à l’image. Les personnes ne
			souhaitant pas figurer sur des photos ou films sur le débat doivent se
			manifester auprès des hôtesses. 
			 
			J’en ai terminé avec cette introduction. Je vais maintenant demander
			qu’un film vous soit projeté. Ce n’est pas celui de la commission
			particulière du débat public, mais celui présenté par les ministères
			qui présentent pourquoi ces ministères ont demandé ce débat public. 
			 
			Merci. 
			 
			(Projection d’une vidéo)
			
			 
			 
			
			M. CHAUSSADE.- Voilà le film présenté par les ministères. Catherine
			LARRIEU, qui représente le ministère de l’environnement du
			développement durable, va donner quelques commentaires sur la
			motivation des sept ministères par rapport à ce débat. 
			 
			Mme LARRIEU.- Merci. Jean-Pierre CHAUSSADE m’a présentée. 
			 
			Vous avez vu ce film où nous avons essayé de dresser un panorama rapide
			que vous trouverez beaucoup plus détaillé dans le dossier du débat qui
			a été mis à votre disposition. Je voudrais vous apporter quelques
			éléments sur la raison de ce débat. 
			 
			C’est un engagement du Grenelle de l’environnement. Cela signifie qu’en
			demandant à la commission du débat d’organiser ce débat, l’Etat s’est
			fait le porteur d’une volonté partagée, cosignée par l’ensemble des
			parties prenantes du Grenelle qui sont des acteurs très variés. Ce sont
			les pouvoirs publics, soit l’Etat et les représentants des
			collectivités à différents niveaux (régions, villes, départements,
			etc.) Ce sont également les représentants des employeurs. La plupart
			des grands représentants des employeurs (le MEDEF, la CGPME) se sont
			associés à la demande que ce débat soit tenu. Ce sont les représentants
			des syndicats. Les cinq grandes centrales syndicales françaises se sont
			engagées pour demander ce débat car, comme nous l’avons vu, les
			travailleurs sont déjà pleinement concernés dans quelques entreprises,
			ainsi que chez les fournisseurs, les clients qui manipuleront des
			technologies ou des produits. Ce sont bien sûr des représentants
			d’associations environnementales et enfin des représentants de
			consommateurs et de familles. 
			 
			L’Etat a pris l’engagement d’organiser ce débat en réponse à cette
			demande d’élargir le débat au-delà des cercles scientifiques. Il y
			avait déjà eu depuis quelques années un soutien des pouvoirs publics à
			un débat entre experts publics et privés. En 2007, un colloque s’est
			tenu à la Cité des Sciences avec un certain nombre d’interlocuteurs
			scientifiques publics, privés et associatifs. Il y a également eu
			depuis 2007 le soutien du ministère de la Santé au nano forum du CNAM
			que Jean-Pierre Chaussade a évoqué et qui constitue un lieu de débat,
			de confrontation d’informations sur les nanotechnologies et les
			nanoproduits. Il a paru important aux partenaires du Grenelle de
			l’environnement d’élargir ce débat, puisque les conséquences, les
			impacts, les enjeux, les questions de compétitivité, de risques,
			d’évolutions sociétales associés aux nanotechnologies ne concernent pas
			que les experts, mais bien tous les Français. 
			 
			Voilà la genèse de ce débat. Qu’est-ce que l’Etat veut en faire ? C’est
			un débat atypique. Jean-Pierre Chaussade l’a dit. Souvent, la forme du
			débat public est utilisée pour des projets déjà bouclés ou quasiment
			bouclés qu’il convient ensuite de porter à la connaissance du public
			pour avoir sa réaction. Il s’agit de projets d’infrastructure ou de
			grand équipement. 
			 
			Nous ne sommes pas du tout dans ce cas de figure. L’Etat ne fait pas
			débattre sur un projet de réglementation notamment qui serait déjà
			ficelé, mais sur des orientations. Ces orientations sont des réflexions
			sur la gouvernance, sur la manière de gérer la complexité des enjeux et
			des conséquences de ces développements. Cela nous place dans une
			position d’écoute et non de défense d’un projet tout ficelé. 
			 
			Les décisions ne sont pas prises. Nous sommes dans quelque chose
			d’assez nouveau, de débattre avec le plus grand nombre d’acteurs
			possible avant de prendre des décisions. Quelques décisions ont été
			prises. J’y reviendrai dans le courant du débat, s’il y a des questions
			sur les questions de déclaration liées aux nanoparticules notamment,
			mais l’ensemble des décisions ne sont pas prises. 
			 
			M. CHAUSSADE.- Merci. Je demande aux membres de la première séquence de
			rejoindre leur place. Nous allons passer au concret, mais s’il y a une
			ou deux questions concernant le débat, son organisation, s’il y a un
			peu plus de compréhension là-dessus. Si quelqu’un veut intervenir, il
			est le bienvenu. 
			 
			Une intervenante.- Selon quels critères a-t-on le droit d’entrer dans
			la salle ? J’ai des amis qui sont restés dehors. Ils n’avaient rien de
			spécial dans leur sac, seulement le délit d’être jeune ou je ne sais
			pas. Je voudrais que l’on me réponde. Sinon, je ne vois pas pourquoi je
			resterai ici. Vraiment. 
			 
			M. CHAUSSADE.- C’est ce que j’ai précédemment expliqué : nous sommes
			dans un cadre Vigipirate. C’est sous la responsabilité des autorités de
			Besançon. Ce que nous demandons, c’est dans un deuxième temps de
			remplir le questionnaire pour une adhésion. 
			 
			(Intervention hors micro.) 
			 
			Une intervenante.- Si nous ne pouvons pas passer la porte extérieure,
			nous n’aurons pas de questionnaire contrairement à une personne qui
			n’est pas identifiée comme contestataire. 
			 
			M. CHAUSSADE.- Y a-t-il une explication ? 
			 
			M. VEDRINE.- Il y a effectivement Vigipirate, mais c’est une réunion...  
			 
			Une intervenante (hors micro). 
			 
			M. VEDRINE.- Je ne les connais pas, mais je vais vous expliquer la
			raison de la situation que j’ai vue autant que vous avez pu la voir ou
			que quelqu’un vous l’a dite. Nous faisons ces réunions depuis quelques
			fois. Nous en sommes à la septième. Il y a aujourd’hui de la part des
			personnes ou des autorités qui suivent nos débats, parce qu’ils sont
			importants, une vigilance sur l’ensemble des personnes. C’est tout.
			Au-delà de la notion de Vigipirate, nous écoutons les autorités
			publiques. Cela ne va pas plus loin. 
			 
			Un intervenant.- Ces personnes peuvent-elles venir ou sont-elles définitivement en dehors du débat ? 
			 
			M.VEDRINE.- Il faut que je voie si les autorités avec qui j’ai discuté
			sont encore là. Si vous le permettez, pour montrer qu’il y a un aspect
			positif, je vais voir si je peux trouver les personnes qui ont pris la
			décision et négocier avec elles pour que ces personnes puissent rentrer. 
			 
			M. CHAUSSADE.- Nous faisons le maximum pour qu’elles puissent rentrer.
			Bruno Védrine va les rencontrer et voir ce qui est possible. 
			 
			Je suis vraiment désolé de ce genre de choses car l’esprit est bien que
			tout le monde puisse s’exprimer, s’écouter et s’informer et que nous
			ayons un vrai débat dans la sérénité.  
			 
			
			 
			 
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			Je voudrais que l’on ouvre cette première séquence. Elle concerne les
			nanosciences et nanotechnologies en région Franche-Comté. Il y a un
			certain nombre d’intervenants. 
			 
			N’hésitez pas. Par rapport aux intervenants, je ne souhaite pas qu’il y
			ait une série d’exposés. Je souhaite que vous interveniez et que vous
			réagissiez au fur et à mesure. Nous gérerons au mieux pour que vous
			ayez les réponses à vos questions. 
			 
			Je passe la parole à Eric GAFFET. Quand nous sommes venus ici il y a
			trois semaines pour repérer les activités dans la région, beaucoup de
			gens nous ont demandé si Eric GAFFET était sur la première table. C’est
			lui. C’est l’incontournable. Il sait tout et connaît tout. Nous l’avons
			donc invité. Merci, Eric GAFFET, de donner un peu l’aspect pédagogique,
			car c’est encore un peu mystérieux tout ce qui est nano,
			nanotechnologies, nanoproduits, etc. Merci de  nous éclairer. 
			 
			M. GAFFET.- Cela s’appelle mettre la pression sur l’intervenant ! 
			 
			Je vais essayer de relever le défi. Je suis chercheur au CNRS et je
			travaille sur les nanomatériaux depuis ma thèse au début des années 80.
			Cela fait plus de 25 ans que je travaille dans le domaine des
			nanomatériaux. 
			 
			Concrètement, on parle souvent de révolution nanomatériaux. Je précise
			que, pour la science des matériaux, l’aspect nanomatériaux en tant que
			tel est un paramètre supplémentaire pour à la fois modifier les
			propriétés chimiques ou physiques, par exemple, et atteindre ou
			optimiser les performances d’un matériau en termes d’application et de
			produit. 
			 
			C’est ce qui est symbolisé par cette pyramide. Il y a les moyens
			d’élaboration que l’on appelle les procédés qui permettront d’obtenir
			le matériau. Parmi les paramètres que l’on utilisait jusqu’au début des
			années 70, on se fondait sur la modification de la cristallographie,
			soit la structure chimique de la matière. On pouvait également
			travailler sur les éléments d’addition, soit sur les aciers des bases
			aluminium pour améliorer les performances. C’est ainsi que l’on a
			permis d’alléger les carrosseries des voitures. La nanostructuration ou
			la dimension nanométrique est intervenue comme paramètre
			complémentaire. Dans les années 80, nous avons compris que cela avait
			un rôle très important en termes de modification de propriétés
			physiques et chimiques. 
			 
			Pour obtenir les nanomatériaux en termes de procédés, les trois grandes
			familles sont indiquées en jaune. Vous voyez les méthodes mécaniques,
			physiques et chimiques. Il y a deux grandes voies de synthèse des
			nanomatériaux, des nanoparticules au sens large ou des nanodispositifs
			plus tard. Il y a la voie descendante pour travailler la matière et
			réduire la dimension de l’objet, ou alors la voie ascendante par
			laquelle nous travaillerons les atomes. Dans une première entité, les
			différents procédés essaieront d’élaborer les atomes et de les agréger
			les uns aux autres pour faire des particules et atteindre des
			dimensions nanométriques. 
			 
			Sur les deux photos que vous voyez ici, il y a des nanoparticules de
			diamant. Elles mesurent 3,4 nanomètres. Sur la photo de droite, vous
			voyez une observation microscopique électronique en transmission. On a
			agrandi la matière. C’est une énorme loupe avec un agrandissement de
			300 000. Les points blancs ou noirs sont des atomes. A l’échelle des
			laboratoires, on est capable d’imager les atomes et d’observer la
			matière. 
			 
			Je travaille moi-même dans le domaine des méthodes mécaniques, ce que
			l’on appelle la mécanosynthèse. Cela consiste à prendre des matériaux,
			à les casser à haute énergie et à restructurer la matière à l’échelle
			nanométrique par une succession de fractures et de soudures. Pour cela,
			nous utilisons des broyeurs (inaudible) et nous obtenons des poudres.
			Ensuite, soit nous conservons ces poudres microniques de l’échelle du
			millième de millimètre à l’intérieur desquelles il y a une
			nanostructuration, car cela peut-être intéressant de travailler sur des
			nanoparticules pour certaines applications ; ou alors nous consolidons
			ces particules pour faire des matériaux massifs. Nous avons utilisé un
			procédé spécifique pour lequel nous avons un brevet avec un laboratoire
			américain que j’évoquerai ultérieurement, et nous consolidons la
			matière pour faire des pièces massives. 
			 
			L’une des propriétés que j’illustre ici, par exemple, c’est un
			sillicium de (inaudible) métallique, c’est pour des applications à très
			haute température. Ce matériau est intéressant à haute température mais
			il présente simplement un problème rédhibitoire pour son application
			actuellement : c’est qu’entre 300 et 500 degrés, s’il est mis dans une
			atmosphère humide, il se transformera en poudre. Il ne peut donc pas
			être utilisé sous forme micronique ou millimétrique. En revanche, si
			vous avez un matériau nanostructuré (comme le petit cube que vous voyez
			en bas à droite à l’échelle du laboratoire, mais il fait tout de même 1
			centimètre cube ; on peut faire aussi 10 centimètres cube), le même
			matériau à l’échelle nanométrique évitera cette corrosion
			catastrophique et ce matériau résiste très bien à la corrosion à 300 ou
			400 degrés. 
			 
			Sur la diapositive suivante, vous voyez la modification des propriétés
			mécaniques. Ici, en général, un matériau dur sera assez fragile. Sur
			l’axe vertical, les matériaux sont très résistants. En revanche, l’axe
			horizontal est l’allongement. Un matériau dur a une faible possibilité
			d’allongement. En revanche, un matériau que l’on peut allonger a une
			faible dureté. Quand on travaille sur les nanomatériaux, on peut
			améliorer les deux propriétés : à la fois l’allongement et la dureté.
			Sur la diapositive en haut qui est une multicouche cuivre-chrome, cela
			permet d’avoir des outils de coupe pour des machines à très haute
			vitesse. 
			 
			Cette application est utilisée en France et a été développée avec une
			société sous-traitante de Renault, avec le CEA par exemple. Vous avez
			aussi la possibilité de déformer des matériaux normalement fragiles.
			Vous avez ici une céramique. C’est du verre. Si vous essayez de plier
			le verre avec cette enclume, il cassera. En revanche, à l’échelle
			nanométrique, il sera possible de le déformer complètement. 
			 
			L’autre application : le petit morceau de cuivre en bas, vous avez en
			gros un échantillon qui peut faire un centimètre. Si vous le passez
			dans un laminoire, il vous sera possible de l’allonger de 5 000 pour
			cent. 
			 
			Si je vous fais subir la même transformation, vous deviendrez aussi grand que la tour Eiffel. 
			 
			En termes d’application du matériau, il est possible d’avoir un
			matériau beaucoup plus léger que l’on pourra mettre en forme très
			facilement et qui aura de bonnes propriétés. 
			 
			Sur la diapositive suivante, dans le domaine de transfert des
			technologies et de valorisation de nos travaux, nous avons un certain
			nombre de transferts avec des entreprises leaders au niveau mondial,
			ainsi qu’un brevet avec un laboratoire américain en Californie portant
			sur la densification de nanomatériaux denses. C’était le premier brevet
			s’appuyant sur cette technologie développée par les Japonais 20 ans
			auparavant. 
			 
			Le dernier transparent illustre la maîtrise des risques. Quand on est
			dans le domaine des nanomatériaux ou des nanoparticules en laboratoire,
			elle est prise en compte. Dès 2005-2006, dans mon laboratoire, nous
			avons fait faire des mesures de contrôle avec des équipes spécialisées
			de l’INRS (Institut national de la recherche sur la sécurité.) Nous
			avons mis un protocole opératoire dans le laboratoire permettant
			d’éviter l’exposition. C’est simple à faire pour notre situation.
			Toutes les opérations de transfert et de manipulation des poudres se
			font en boîtes à gants étanches qui permettent d’avoir un confinement
			étanche par rapport à l’atmosphère et qui n’exposent pas les
			opérateurs, que ce soit les permanents ou les étudiants.
			 
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