Déroulement des réunions

Comptes-rendus et synthèses des réunions publiques

Les comptes-rendus des réunions publiques font état de l’intégralité des propos échangés par l’ensemble des acteurs du débat. Un compte-rendu synthétique des réunions publiques sera, lui aussi, accessible au fur et à mesure du débat.

Note de synthèse de la réunion de Clermont

Réunion publique de Clermont-Ferrand

 

Mardi 10 novembre 2009

 

Note de synthèse

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Prologue

En ouverture, les participants assistent à la projection du film de 5 minutes réalisé par le Maître d'ouvrage, constitué des 7 ministères qui ont sollicité de la Commission nationale du Débat public l'organisation de ce débat.

 

Introduction

Jean Bergougnoux introduit cette cinquième réunion qui s'inscrit dans une série de dix-sept, en se présentant comme président de la Commission particulière chargée d'animer le débat public sur le développement et la régulation des nanotechnologies.

 

Comme ce fut déjà le  cas à Strasbourg et à Toulouse, le président de la CPDP accepte de donner le micro à une militante anonyme qui se lance dans une longue déclaration non seulement sur l'inutilité du débat puisque, selon elle, tout est déjà décidé mais aussi sur la dépendance de la CPDP à l'égard des Pouvoirs Publics qui transforme à ses yeux ce débat en une « opération de propagande ». Ses propos sont véhémentement soutenus par une dizaine de personnes réparties dans la salle qui tentent d'empêcher que le débat s'engage sur le fond. L'irritation à l'égard des perturbateurs, d'un public qui, quelles que soient ses opinions sur les nanotechnologies, est venu pour s'informer et discuter, se manifeste de manière de plus en plus vigoureuse et, finalement le débat s'engage selon le programme prévu en dépit d'un certain nombre d'interventions intempestives (hors micro).

 

Jean Bergougnoux, n'ayant pu dans ce contexte expliquer les principes d'organisation du débat retenus  par la CPDP, a été amené à rappeler à plusieurs reprises, en réponse à des intervenants, que compte tenu du champ très étendu à couvrir et pour éviter la répétition à l'identique de 17 débats très généraux et quelque peu superficiels, la CPDP a choisi de proposer des thèmes à approfondir pour chaque réunion, étant entendu que toute liberté est laissée au public pour mettre en débat tel ou tel autre thème plus général qui le préoccupe. 

 

Première séquence : les nanotechnologies et le secteur automobile 

 

Panélistes : Francis Peters (Michelin), Hélène Burler (CEA voitures électriques), Claude Champredon (France Nature Environnement), Philippe Hubert (INERIS), Jean-Denys Canal (directeur d'APOJEE)
Animateur : Jean Bergougnoux, président de la CPDP

La forte présence du secteur automobile dans la région a conduit à proposer pour la première séquence la thématique des nanotechnologies dans ce domaine d'activité.

 

Francis Peters rappelle que Michelin, tout comme ses grands concurrents, s'est efforcé au fil des ans de réduire la « résistance au roulement » due aux pneumatiques génératrice de consommation inutile de carburant, d'accroître la durée de vie des pneumatiques et, bien sûr d'améliorer sans cesse leur adhérence garante de la sécurité des utilisateurs. De longue date, l'adjonction de noir de carbone, plus récemment de silice, ont permis des progrès substantiels. Il souligne qu'il s'agit là de nanomatériaux, agrégats très stables de nanoparticules et  fortement liés à la gomme des pneus et, en aucun cas, de nanoparticules libres ou libérables. D'ailleurs, les particules résultant de l'usure des pneus sur la route ont une taille moyenne largement micrométrique et non pas nanométrique. Néanmoins, la croissance très forte attendue du nombre de véhicules, la nécessité de maîtriser les émissions de CO2 , de ménager les ressources rares, imposent d'aller beaucoup plus loin et les grands constructeurs étudient activement la possibilité d'améliorer encore la performance de leurs pneus par le recours à différentes nanoparticules (nanotubes de carbone entre autres). Francis Peters assure que Michelin ne mettra ce type de solution en pratique que s'il y a une totale assurance de l'absence de risque pour la santé et l'environnement.

 

Philippe Hubert, de l'INERIS, (Institut National d'Études sur les Risques Industriels), analyse d'abord les composantes de la pollution atmosphérique. Il souligne que si les particules ultrafines, voire nanométriques ne représentent en masse qu'une petite partie de cette pollution, il n'en va pas de même en nombre où elles peuvent être prépondérantes. Il apparaît d'autre part clairement qu'en milieu urbain, les particules d'origine anthropique sont largement prépondérantes par rapport aux particules d'origine naturelle. Selon des études britanniques, la circulation automobile serait très généralement un facteur explicatif majoritaire de ces émissions anthropiques, même si d'autres sources d'émission (chauffage, combustion du bois, usages industriels) ne doivent pas être négligées. Aujourd'hui, la part de la pollution atmosphérique imputable à des nanoparticules manufacturées introduites intentionnellement dans le cadre des applications des nanotechnologies est certainement extrêmement faible. Elle mérite cependant une attention particulière pour l'avenir car leur toxicité risque d'être plus élevée que celle des nanoparticules présentes aujourd'hui dans l'atmosphère. Philippe Hubert présente ensuite une analyse des facteurs complexes qui interviennent dans la toxicité des particules ultrafines et a fortiori nanométriques : très petite taille, réactivité très forte liée à la grande surface d'échange pour une masse donnée, effet "cheval de Troie" qui favorise le transport d'autres polluants, changement d'échelle, responsable d'effets divers (franchissements de membranes notamment). Compétant le propos de Francis Peters, il insiste sur la nécessité de réduire toutes les pollutions liées à la circulation automobile, C O2, bien sûr, mais aussi émissions de particules de toute taille qui ont des sorts divers mais préoccupants dans le système respiratoire 

 

La manière la plus radicale de réduire les émissions tant de CO2 que de particules est de substituer partiellement ou totalement à la combustion des carburants fossiles une énergie « propre », l'électricité.  Hélène Burlet fait le point sur les limites qu'impose aujourd'hui au développement du véhicule électrique l'autonomie encore trop limitée des batteries. Elle explique que grâce aux nanotechnologies, il est possible d'accroître considérablement la surface des électrodes et donc de stocker beaucoup plus d'énergie dans un volume donné. Elle indique, en outre, qu'au-delà de la performance énergétique, l'équipe du CEA étudie très activement la manière d'éviter tout risque de « relargage » de nanoparticules même en situation accidentelle. A une question posée dans la salle sur le bilan global du véhicule électrique compte tenu de la production d'électricité, elle indique que dans le cas de la France où le nucléaire et l'hydraulique  non émetteurs de CO2  prédominent dans la production d'électricité, ce bilan est très favorable mais que l'on étudie également la possibilité de charger les batteries par des panneaux photovoltaïques.

 

Jean-Denys Canal, représentant d'une Association fédérant 50 PME-PMI travaillant de près ou de loin dans l'industrie automobile, constate qu'il y a aujourd'hui peu d'implication de ces entreprises en matière de nanotechnologies. Il a également procédé à une investigation rapide chez les grands constructeurs et équipementiers et a pu constater que s'il y a beaucoup de travaux de recherche et beaucoup de réflexions sur l'utilisation des nanomatériaux dans l'automobile, les applications concrètes restent aujourd'hui très limitées, les peintures résistantes aux rayures en constituant l'exemple emblématique. 

 

Claude Champredon, au nom de France Nature Environnement, rappelle que c'est l'attitude d'une association responsable telle que FNE qui a permis d'obtenir dans le cadre du Grenelle de l'environnement, la promesse du lancement de ce débat public. Il se déclare satisfait que cette promesse ait été tenue et souligne toute l'importance qu'il attache à la qualité de ce débat. Il insiste sur la vigilance qui s'impose en présence d'une technologie émergente et qui constitue à ses yeux une véritable fracture technologique, dont les implications sont fortes dans tous les secteurs d'activité, en particulier dans celui de l'automobile. La vigilance doit s'exercer notamment à travers l'application du principe de précaution, l'information du grand public et l'élaboration d'une réglementation française et européenne réellement protectrice.

 

Le débat qui s'instaure dans le prolongement de ces interventions porte d'abord sur les questions de limitation de la pollution automobile. Il est clair que tous les moyens disponibles doivent être mis en œuvre : limitation de la circulation des voitures individuelles et des camions par report sur d'autres modes de transport (transports en commun, fer, fluvial), amélioration de la performance des pneus, développement de la voiture électrique.... Dans certains cas, les nanotechnologies peuvent être utiles dès lors que l'on saura en maîtriser les risques.  

 

Le débat s'élargit grâce à de nombreuses questions ou interventions émanant d'étudiants, ingénieurs, chercheurs, responsables dans les ministères, médecins, responsables d'association de consommateurs, et « simples citoyens ». Parmi les préoccupations exprimées émergent notamment la nécessité d'approfondir les études sur la toxicité, d'assurer l'identification des produits et des risques des produits (Jean Bergougnoux rappelle à cet égard la réunion d'Orléans ou a été largement évoqué le règlement européen qui va instaurer une obligation d'étiquetage pour les cosmétiques contenant des nanoproduits manufacturés), la mise sous contrôle des  risques par des instances indépendantes. On évoque également les applications médicales des nanotechnologies, notamment en matière de cancérologie. On n'oubliera pas non plus les questions très importantes soulevées en début de réunion sur les impacts sociétaux et les problèmes éthiques liés au développement des nanotechnologies.