Déroulement des réunions

Comptes-rendus et synthèses des réunions publiques

Les comptes-rendus des réunions publiques font état de l’intégralité des propos échangés par l’ensemble des acteurs du débat. Un compte-rendu synthétique des réunions publiques sera, lui aussi, accessible au fur et à mesure du débat.

Compte-rendu de la réunion publique de Besançon

M. GAFFET.- Concernant l’efficacité des masques, il y a différents rapports. Dans celui de l’AFSSET en particulier, il y a un chapitre entier sur l’efficacité des masques.

Comment un masque fonctionne-t-il concrètement ? Une particule va en ligne droite parce qu’elle a une énergie initiale. C’est le cas des particules de 8 micromètres à 300 nanomètres. De 1 à 100 nanomètres, ces particules sont suffisamment petites pour être soumises à la convexion au moindre mouvement d’air.

La conception des masques sera faite pour à la fois les particules les plus petites dispersées par mouvements que l’on va qualifier de browniens et celles qui auront une trajectoire en ligne droite.

Il n’y a pas une étude spécifique. Il y a plusieurs études. Aussi surprenant que cela puisse paraître, si nous nous attachons à la physique de la chose, l’efficacité des filtres augmente avec la diminution des particules. Plus une particule est petite en dessous de 300 nanomètres, plus sa collection sera possible. Concrètement, l’efficacité d’un certain nombre de filtres est de 100 % pour les particules de 1 à 10 nanomètres.

Vous avez posé la question pour les masques. La question qui se pose est différente. Ce n’est pas une question d’efficacité du filtre en lui-même, mais une question d’efficacité de liaison masque-visage.

Quand il y a un risque élevé d’exposition, quand il faut faire une intervention sur une machine qui vient de tomber en panne avec des fuites particulières, dans tous les guides de bonnes pratiques comme ceux des agents de sécurité au niveau international ou ceux des industriels, il est recommandé de travailler avec des masques en surpression et de puiser l’air à l’extérieur du laboratoire et non pas dans le laboratoire. Les recommandations sont d’interdire le recyclage de l’air pour alimenter le masque en surpression et de chercher de l’air de l’extérieur. Cela existe dans tous les guides de bonnes pratiques.

Je confirme que sur la base des travaux publiés, l’efficacité des filtres augmente quand la taille des nanoparticules diminue en dessous de 300 nanomètres.

M. CHAUSSADE.- Merci. Nous allons passer à la deuxième séquence mais vous pourrez poser vos questions, y compris si vous voulez revenir sur les points que nous avons abordés.

Excusez-moi, Madame. Je vous devais la parole. Allez-y.

Une intervenante.- Je voudrais savoir le métier de ce Monsieur qui est en train de prendre des photos. Quelle est son statut exact ?

Nous sommes déjà filmés. Cela suffit ! Est-il nécessaire d’avoir en plus la collection de photos ? C’est un peu étrange. C’était une parenthèse.

M. CHAUSSADE.- Vous pouvez demander à ne pas être photographiée.

Une intervenante.- Quelqu’un a posé la question de la liste des produits qui contiendraient des nanotechnologies. Sans faire de publicité, un journal a répondu le samedi 21 novembre, en partie du moins.

Je lis : « Un inventaire des produits contenant des nanomatériaux. Le bureau européen de des unions de consommateurs basé à Bruxelles vient de mettre en ligne sur son site Internet (beuc.eu) un inventaire des produits de consommation contenant des nanomatériaux ». Cela a précédemment été dit. Il y a 151 articles qui concernent les produits de beauté, les tissus, les jouets pour enfants, certaines peluches et les compléments alimentaires.

Cela rejoint le souci de ce médecin, puisque des compléments alimentaires semblent déjà contenir des nanomatériaux ; ainsi que des produits d’entretien. On cite même des marques. Avec l’aide de ses organisations membres, notamment l’UFC Que Choisir en France, le BMUC a identifié plusieurs marques françaises comme Babyliss, Chanel, Dior, Chantecaille, et Gerry-Colin(?).

L’article continue. Effectivement, certains se font du souci et d’autres moins. Nous pouvons déjà avoir la liste des objets contenant déjà ces nanomatériaux, semble-t-il.

Mme LARRIEU.- Je vais apporter un complément. Actuellement, un certain nombre d’entreprises indiquent sur leurs notices, leurs publicités, leurs documents descriptifs qu’il y a des nanoparticules qui améliorent telle ou telle fonction, notamment dans les domaines du cosmétique et du textile.

Il n’y a en revanche aucune obligation de déclaration. Aucun pays n’a imposé une déclaration.

Je réponds également au médecin qui disait qu’il faudrait faire une information au consommateur. Dans le cadre des débats du Grenelle, il a été décidé qu’il y aurait en France une obligation de déclaration. Ce n’est pas encore une obligation d’étiquetage. Cela n’empêche pas les industriels de faire des étiquetages. Des associations de consommateurs peuvent regrouper cette information et la mettre à disposition, mais il n’y a aucune exhaustivité sur cette information.

Les nanoparticules et les nanomatériaux ne sont pas quelque chose d’homogène. Il y en a de toute nature. Il y en a un certain nombre dont les usages, comme la nanosilice évoquée dans le film, sont largement plus diffusés et connus que d’autres qui sont beaucoup plus récentes. C’est très hétérogène.

M. ROCHE.- Je suis Jean-Paul ROCHE, de la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Je souhaite apporter un complément. En matière de cosmétiques, il y a une obligation d’information. Un règlement communautaire de mars 2009 oblige à ce que tout cosmétique contenant des ingrédients de nanomatériaux doit l’indiquer dans l’ingrédient. L’ingrédient est suivi entre parenthèses, vous le verrez, de nanos.

Il est vrai que pour les autres produits, il n’y a pas de texte communautaire. Des réflexions sont actuellement menées en France pour savoir comment informer les consommateurs sur la présence de ce type d’ingrédients. Le débat fera certainement avancer les choses.

Concernant un point de débat de tout à l’heure sur l’obligation de sécurité, il n’y a pas que le règlement REACH. Il y a au niveau communautaire et au niveau français, puisque c’est la France qui a été précurseur et que cela a été repris au niveau européen, l’obligation générale de sécurité. Pour tous les produits de consommation, le fabricant, l’importateur doivent obligatoirement s’assurer que dans des conditions normales ou prévisibles d’utilisation leur produit ne présente pas de danger pour la santé. C’est eux qui doivent en apporter la preuve. Ce n’est sans doute pas totalement satisfaisant, mais il commence à y avoir des choses sur ces secteurs.

Deuxième séquence : Nanotechnologies et compétitivité

Panélistes : Michel FROELICHER (directeur de CTMN- Institut Pierre Vernier), Dr. Pierre MINOTTI (PDG de Stilmach) Daniel COURJON (chercheur au CNRS), Jacques Terraz (membre du FNE), Benoît CROGUENNEC (responsable de la Commission AFNOR nanotechnologies)


Animateur : Galiène COHU, membre de la CPDP

Mme COHU.- Merci. Nous allons aborder cette deuxième séquence. Concernant la compétitivité, M. TIBORT l’a précédemment souligné, Besançon est un pôle de compétitivité. M. PIRANDA en a également parlé à propos de l’innovation et de son importance.

Pour entamer directement cette deuxième séquence, nous avons ici quelques directeurs d’entreprises innovantes. Je demande à M. MINOTTI, directeur de SILMACH, comment est intervenue la création de son entreprise, comment cela a pu se passer, quels ont été les freins, les obstacles et les opportunités d’être dans cette région pour que nous puissions concrètement faire un premier tour de question.

M. MINOTTI.- Je représente une petite entreprise locale qui a été créée il y a maintenant six ans à l’initiative d’un certain nombre de chercheurs du CNRS et de l’université de Franche-Comté. Notre entreprise est née d’une genèse assez longue d’une bonne quinzaine d’années. Elle est née du fait également de la disparition progressive de l’industrie horlogère.

Il est logique que les scientifiques de la région et les politiques également fassent naître des industries de substitution à des industries qui disparaissent. C’est la réalité des cycles économiques qui veut cela. La création de l’entreprise est le résultat d’un long processus de maturation de technologies en laboratoire qui ont permis de transposer les technologies historiques, datant de plusieurs centaines d’années dans le cas de l’horlogerie, sur des technologies plus récentes nées aux Etats-Unis dans les années 70 essentiellement.

Ce que nous réalisons aujourd’hui, ce ne sont ni plus ni moins que des pièces micromécaniques, voire nanomécaniques parfois, qui utilisent dans le processus de structuration de la matière des technologies dérivées de la microélectronique tout simplement.

Les nanomachines développées par SILMACH sont quelque part des circuits intégrés ayant la capacité de mouvoir la matière à l’échelle du micromètre ou du nanomètre. Le savoir-faire de l’entreprise réside dans la conception de processus de transduction d’énergie permettant de contrôler les déplacements de matière à l’échelle du micromètre ou du nanomètre.

Mme COHU.- Vous avez parlé de l’importance de politiques qui ont permis la naissance d’entreprises qui soient compétitives si on peut dire. Je ne sais pas si Monsieur TIBORT veut répondre.

M. TIBORT.- Lorsque est arrivée la fin de toute l’horlogerie, le savoir-faire dans le micro, le micron a été utilisé à ce moment-là et a fait l’objet de réorientations vers d’autres choses, dont beaucoup le biomédical. Les gens qui sont autour de la table en ont beaucoup plus bénéficié que ce que moi j’en ai vu. Mais une vraie politique s’est mise en place à partir de ce moment. Il y avait des représentants du Conseil régional. Ils devraient être mieux placés que moi pour répondre.

Mme COHU.- Je voudrais un autre témoignage. Nous avons une autre entreprise, l’entreprise LOVALIT, qui est encore une start-up ou une PME, monsieur VERINE ?

M. VERINE.- Nous sommes plutôt une TPE qu’une PME, puisque nous ne sommes que 5 personnes. Nous existons depuis 2005. Un transfert de technologies de l’université nous a permis de réaliser des instruments et des composants pour des instruments permettant de voir la matière à l’échelle nanométrique. Nous n’étions pas dans la région à l’origine. Nous avons été attirés par la région qui avait un certain nombre d’atouts, en particulier une centrale technologique, des endroits qui nous ont permis de fabriquer plus facilement les composants qui nous intéressent.

Très schématiquement, nous utilisons la lumière pour regarder la matière à l’échelle nanométrique ou submicronisme. C’est un moyen de mieux connaître les nanoparticules, de voir ce qu’il y a à l’intérieur, de quoi elles sont composées et de les analyser.

Mme COHU.- Vous êtes donc sur le marché de l’instrumentation ?

M. VERINE.- Oui. Nous commercialisons des instruments et nous fabriquons plus particulièrement une partie de l’instrument qui permet de voir à l’échelle submicronique.

Mme COHU.- En matière de compétitivité et de marché de l’instrumentation, comment situez-vous cela au niveau Franche-Comté, national, vos concurrents internationaux ?

M. VERINE.- Il y a effectivement quelques fabricants européens. Les plus gros, ce sont plutôt des instruments soit américains soit asiatiques. C’était d’ailleurs une surprise. Nous, nous n’avons rien fait spécialement pour, mais d’emblée 50 % de ce que nous faisons est exporté et la plus grande partie vers l’Asie.

Mme COHU.- En matière de création, comment votre arrivée ici s’est-elle passée ?

M. VERINE.- Ici, l’avantage est qu’il y a un environnement technologique très important avec FEMTO-ST et tous les laboratoires environnants. Nous sommes actifs dans plusieurs projets de recherche qui incluent encore des gens de FEMTO-ST et des projets européens qui incluent d’autres acteurs au niveau européen.

Mme COHU.- Au niveau des laboratoires, nous avons M. Daniel COURJON du CNRS. Quelle est votre liaison, votre partenariat avec toutes ces entreprises ?

M. COURJON.- Tout d’abord, ces deux entreprises montrent un aspect dont nous n’avons pas parlé aujourd’hui. Sur les nanotechnologies, nous avons beaucoup parlé des poudres, des nanoparticules et des risques que nous prenons. Mais là, ce sont deux autres aspects.

Il y a, d’une part, l’aspect microsystème, nanosystème. Je rappelle qu’un système est un ensemble de fonctions élémentaires. Une bicyclette est un système, une montre est un mini-système ; et un micro-système est de l’ordre de quelques microns.

Pour faire ces systèmes, nous sommes obligés de faire appel à des nanotechnologies, des nano outils capables de graver avec une finesse énorme. Cela appartient aussi à la nanotechnologie. Il n’y a pas seulement les poudres. Le cas de SILMACH est emblématique. Il est né dans les années 90, 95 quand vous travailliez à l’institut des microtechniques.

M. MINOTTI.- La véritable origine des dispositifs développés aujourd’hui, c’est 1989, naissance du premier moteur compatible avec les circuits intégrés, c’est-à-dire graver à partir de technologies microélectroniques à Berkeley aux Etats-Unis.

En Franche-Comté, Jean-Jacques GALEPIN, qui était à la pointe de ces technologies et un décideur scientifique au niveau local puis national, a très rapidement misé sur cette apparition, sur cette fracture technologique pour que la Franche-Comté se mobilise parmi les premières dans le monde dans ce type de dispositif. Il a mis les moyens en créant notamment un laboratoire mixte CNRS-université de Tokyo, dans lequel nous nous sommes expatriés pendant plusieurs années.

J’étais chercheur au CNRS à l’époque et je me souviens avoir expatrié une dizaine de post-doctorants qui se sont formés aux nanotechnologies et qui ont ensuite intégré des starts-ups françaises dans le domaine.

M. VERINE.- La leçon de la crise horlogère est qu’il a été considéré que l’absence d’innovation avait amené à cet échec. C’est pourquoi dans les années 80 a été créé ce centre, l’Institut microtechnique, où une stratégie de microtechnologie puis de nanotechnologies s’est développée.

Cette nanotechnologie est évidemment moins intrusive que celle des poudres. Mais cette technologie coûte très cher, car elle fait appel à des machines outils qui coûtent une fortune.

Concernant l’aspect de LOVALIT, c’est le même scénario. On retrouve non pas les machines-outils qui fabriquent ces micro-objets, mais des systèmes de caractérisation. C’est un véritable marché. Les nanotechnologies ne sont pas seulement des poudres. Nous recevons tous les systèmes de nanocaractérisation dont les microscopes sur lesquels LOVALIT travaille. Ces sauts technologiques dont M. MINOTTI a parlé, c’est-à-dire la capacité de rester dans notre domaine de compétence de l’horlogerie et de fabriquer des systèmes qui sont faits par des technologies qui n’ont rien à voir.

C’est de la nanotechnologie qui a comme gros inconvénient le coût des machines. Nous avons essayé de résoudre partiellement ce problème en Franche-Comté, en bénéficiant d’une centrale de technologie de très haut niveau. Elle est installée à FEMTO-ST. M. DE LA BACHELERIE en est responsable. Elle permet de mettre des équipements extrêmement coûteux à la disposition de la Franche-Comté, mais aussi du reste de la France.

Mme COHU.- Merci. Nous avons aussi à notre table France Nature Environnement, M. Jacques TERRAZ, qui peut intervenir à tout moment s’il a des questions à poser et qui a quelques vues à exprimer sur le sujet.

 M. TERRAZ.- Je suis ici représentant de France Nature Environnement pour la Franche-Comté. Quelques mots pour ceux qui ne nous connaissent pas. C’est une fédération absolument indépendante de tout mouvement politique, religieux ou philosophique et qui regroupe en France 3 500 associations.

De ce fait, nous sommes en quelque sorte à l’interface entre le public, les chercheurs et les industriels.

Nous pensons, et peut-être si j’enfonce encore un peu le clou, que le débat vient un peu tard.

La France a mis sur le marché un certain nombre de produits que nous ne connaissons pas et dont nous ne connaissons pas encore totalement l’action. Ce n’est pas en attendant que l’épidémie se déclare, comme pour l’amiante, que nous réagirons. Nous aurions dû réagir en amont. Je pense que c’est une question d’éthique, de morale, vis-à-vis des citoyens.

Nos craintes sont les suivantes. Nous voudrions que toutes les nanoparticules mises sur le marché soit connues, identifiées. Nos connaissances sont pour le moment très incomplètes, ainsi que leurs effets.

Nous voudrions aussi que, dans la mesure de leurs connaissances et de leurs possibilités, les chercheurs nous communiquent un certain nombre de renseignements. Je sais que le dévoilement du secret est difficile, car c’est antinomique avec la compétitivité.

Autre demande de France Nature Environnement et autre crainte : il faudrait que les consommateurs soient bien informés que ce produit contient ou non des microparticules ou des nanoparticules.

On le fait bien avec les colorants. Quand vous achetez une confiture, des bonbons, on vous affiche les colorants, les conservateurs etc. Pourquoi pas les nanoparticules ? C’est important. La question des ouvriers protégés a déjà été évoquée et je n’y reviendrai pas.

Un autre point que France Nature Environnement voudrait est que l’on inclue dans le coût du produit le coût santé et le coût environnemental.

Quant à l’écotoxicité, on n’en a pas encore parlé. On a surtout parlé de l’humain, ce qui est normal, mais je dirai avec l’aide d’un exemple que les nanoparticules pollueront notre environnement. Il y a par exemple des nanoparticules dans tous les cosmétiques. Je crois savoir que ce sont des nanoparticules à base d’argent. Il n’y a pas que l’argent mais il y en a au moins. Après avoir pris un bain de soleil et vous être enduit de crème solaire, vous prenez une douche, vous vous baignez et ces nanoparticules sont libérées dans la nature. Il y a vraiment un problème.

Dans nos carburants de voiture, il y a aussi des nanoparticules : celles-ci ne partent pas dans l’eau mais dans l’air. Les cellules végétales, tout comme les cellules animales ou humaines, seront soumises à l’action de ces nanoparticules qui, tout le monde le sait, sont capables de pénétrer la membrane cellulaire. Là où le vice est encore plus important, c’est qu’elles sont capables d’entraîner dans le cytoplasme des éléments qui eux ne pouvaient auparavant pas rentrer à l’intérieur de la cellule. C’est très important.

Les nanoparticules sont de véritables petites bombes à retardement. Nous craignons que certaines nanoparticules provoquent des cancers. Tout le monde le sait. Il y a ici des représentants du monde médical, les cancers mettent plusieurs années à se dévoiler.

(Applaudissements.)

J’ai vu sur vos affiches : « Je m’informe, je m’exprime. » Je pose simplement une question : « Le gouvernement nous écoutera-t-il ? Nous répondra-t-il ? »

Mme COHU.- Oui. Vous serez écoutés et nous vous répondrons. Si les personnes ad hoc ne peuvent pas vous répondre ce soir, vous recevrez la réponse plus approfondie ultérieurement de la part d’experts du maître d’ouvrage.

M. MINOTTI, puisque M. TERRAZ a souligné le problème de la compétitivité et de la protection intellectuelle et industrielle, pensez-vous qu’il y a antinomie avec une information de l’ensemble des consommateurs ?

M. MINOTTI.- Avant de répondre à cette question, je voudrais rebondir sur ce qui vient d’être dit. Nous sommes quelque part effectivement concernés au premier chef par les nanotechnologies, mais pour autant notre activité ne génère pas de nanoparticules dans l’environnement. C’est tout à fait clair. Si je peux rassurer le public, j’imagine qu’aujourd’hui vous êtes tous porteurs de téléphone portable ou d’ordinateur personnel. Les micros processeurs dans vos ordinateurs ne sont ni plus ni moins les mêmes dispositifs que ceux que nous mettons aujourd’hui sur le marché. Les seules nuances entre les micros processeurs et les micro-, nanomachines développées par notre entreprise sont liées à la capacité de nos systèmes de bouger, de réaliser des fonctions mécaniques, optiques et d’échanger de l’énergie de manière interactive avec le monde extérieur.

Pour nous, un moteur n’est ni plus ni moins qu’un microprocesseur qui a la capacité de se déplacer à une certaine échelle.

Si vous devez avoir peur des produits développés par SILMACH, alors j’ai un conseil à vous donner : enterrez le plus rapidement possible votre ordinateur portable ou personnel, car il est constitué de dispositifs qui sont de pures répliques de ceux que nous mettons nous-mêmes sur le marché.

Je voulais simplement rassurer la salle en disant que, dans le secteur des nanotechnologies, il y a des domaines qui ne sont pas générateurs de nanoparticules et qui ne sont pas toxiques.

Il peut évidemment y avoir des problèmes d’éthique par rapport à certaines applications de produits développés dans le secteur des nanotechnologies, mais toutes les nanotechnologies ne sont pas systématiquement toxiques, au sens d’une émission de nanoparticules dans l’environnement.

C’est important, car mon problème majeur consiste à créer de l’emploi. Il faut aussi quand même que notre région puisse reconstituer un tissu industriel pour l’avenir. Ne serait-ce que vis-à-vis de nos enfants. J’ai des enfants et je ne souhaite pas qu’ils soient dans l’obligation absolue de s’expatrier un jour en Asie pour trouver un emploi.

Si nous pouvons faire en sorte, avec quelques industriels capables, de faire émerger de nouvelles technologies dans les régions voire même en Europe, ne nous privons pas de le faire. Nous sommes malheureusement dans une compétitivité mondiale et, si nous pouvons le faire sans générer de particules toxiques, pourquoi s’en priver ?

Je vais rapidement revenir sur la question des brevets.

Les nanotechnologies sont effectivement génératrices de propriété intellectuelle. Pour situer notre position sur le domaine, nous possédons une dizaine de familles de brevets. Quand je parle de famille de brevets, c’est un brevet initialement français qui est ensuite étendu au niveau mondial. Ce qui signifie que nous disposons dans l’entreprise d’une centaine de brevets nationaux après extension.

On peut très bien faire naître des technologies de rupture et divulguer de l’information sous la forme de brevet. Au sein des entreprises comme les nôtres, nous évitons les publications scientifiques qui divulguent de l’information au monde extérieur à titre gratuit. Nous passons par le brevet pour nous assurer de la propriété intellectuelle des technologies qui naissent dans notre entreprise.

La véritable difficulté est dans le coût de la propriété intellectuelle puisqu’un brevet mondial représente un coût d’environ 150 000 euros sur sa durée de vie. Pour de petites entreprises comme la nôtre, cela représente un coût significatif par rapport aux ressources de l’entreprise.

Mme COHU.- Merci. Monsieur NANOMI, rejoignez-vous cette position ?

M. NANOMI.- Nous exploitons un brevet qui appartient à l’université sous une licence. Toute la société intellectuelle que nous avons générée depuis, c’est plutôt des secrets de fabrication que nous maintenons en interne, justement à cause du coût de dépôt des brevets.

Mme COHU.- Vous ne déposez donc pas de brevet ?

M. NANOMI.- Nous ne sommes pas assez riches pour l’instant.

Mme COHU.- Y a-t-il des questions dans la salle ?

Un intervenant.- Je voudrais intervenir sur la comparaison entre l’informatique actuelle et une informatique basée sur les nanotechnologies. Nous savons que l’informatique présente dans les ordinateurs, dans les téléphones portables cause beaucoup de soucis au niveau du recyclage à la fin de vie de l’instrument. Nous pouvons de la même manière imaginer les risques encourus lors de la fin de vie de techniques basées sur les nanotechnologies dans le futur.

M. COURJON.- L’avantage de ces produits nouveaux est qu’ils sont beaucoup plus petits que les puces mises en place il y a une quinzaine d’années. Cela signifie que nous consommons déjà beaucoup moins de matériaux précieux comme l’or et d’autres substances et les matériaux de base qui composent ces puces sont en très petits volumes. Et nous ne sommes pas du tout dans la dimension nanométrique. Ces puces mesurent plusieurs centaines de nanomètres. Nous ne sommes donc pas dans la dimension de la nanoparticule.

En fait, ces technologies permettent de limiter considérablement la consommation de matières premières. En ce sens, c’est plus un avantage qu’un inconvénient, par rapport aux puces énormes qui existaient dans les années 90.

Une intervenante.- Je rebondis sur la question qui a été posée et à laquelle vous n’avez pas répondu.

Ce n’est pas parce qu’elles sont petites qu’elles n’auront pas une fin de vie un jour. Comment cette fin de vie se passera-t-elle ? Y aura-t-il la même précaution au niveau de la fabrication qu’avec la défabrication ? Personne n’a répondu à cette question.

M. COURJON.- L’industrie de recyclage se met en place. Entre recycler une pièce de deux centimètres de côté ou une pièce d’un demi-centimètre de côté, il n’y a technologiquement pas de différence. Ce n’est pas un problème actuel.

 Le problème n’est pas là, mais plutôt dans le fait que nos ordinateurs partent dans des pays étrangers où ils sont recyclés par des gens qui n’ont pas les moyens de se protéger. C’est là qu’est le scandale actuel.

Une intervenante.- Je suis tout à fait d’accord, d’où la traçabilité.

M. MINOTTI.- Je vais ajouter un élément concernant les dispositifs que nous mettons sur le marché. Il s’agit de puces en silicium. Je rappelle que nous avons du silicium sous nos pieds. Cela représente l’écorce terrestre. Les deux tiers de l’écorce terrestre, qui fait quelques dizaines de kilomètres de profondeur sous nos pieds, représentent pour l’essentiel les composants de base de silicium. Nous en avons absolument partout autour de nous à l’état pas naturel, mais pratiquement.

Le rejet de puces en silicium pur ne pose a priori pas un problème drastique. Ce qui pose un problème drastique à mon sens, c’est plus les rejets de batteries, de piles en tout genre qui pose des difficultés de recyclage du produit.

Je tiens à préciser que les nanotechnologies nous donnent précisément l’opportunité de mettre sur le marché des produits que je qualifierai de verts au sens écologique du terme, puisque les capteurs que nous sommes capables de mettre sur le marché grâce à la mercurisation sont des capteurs sans batterie, sans pile et sans électronique embarquée. Grâce à la mercurisation, nous avons la capacité de réaliser de nouvelles familles de capteurs qui permettront de traiter de manière drastique le problème de la gestion de l’énergie sous la forme de micro-sources.

Nous savons que la gestion des piles est devenue un enjeu majeur dans la mesure où nous vivons dans un environnement où nous avons toujours plus de produits nomades autour de nous. Les nanotechnologies permettent précisément d’espérer traiter au moins à la marge ce type de problème.

En résumé, les puces en silicium ne posent pas de problème particulier en termes de stockage et de résidus, puisque nous en sommes déjà environnés depuis notre naissance. Ce qui pose un vrai problème est plus le stockage de sources d’énergie. Là, les nanotechnologies peuvent amener des solutions véritablement vertes sur le sujet.

L intervenante.- Je réinterviens car je ne suis tout de même pas venue pour rien ce soir, pour apprendre que les nanotechnologies sont des produits verts ! Il fallait vraiment que je me déplace pour entendre cela ! Je transmettrai ! J’avoue que vous exagérez un peu quand même.

De plus, si je veux revenir au début de votre exposé et bien avant, c’est pareil. Il y a un langage qui devrait être has been en 2009 : « Je crée de l’emploi, donc j’ai le droit de polluer. » Il va falloir revenir là-dessus. Il y a eu le Grenelle depuis. Je vous conseille fortement de vous y intéresser, car cela n’a plus de sens en 2009.

Mme COHU.- M. FROELICHER, président du salon MICRONORA, quand vous faites votre salon, prenez-vous en compte l’ensemble du secteur des nanotechnologies ? Vous occupez-vous aussi de traitement des déchets ?

M. FROELICHER.- Nous essayons de promouvoir les nanotechnologies car elles ont à nos yeux un potentiel extraordinaire, surtout dans la micro mécanique. Dans d’autres métiers dans le transfert de technologies, pour continuer ce que dit M. MINOTTI, nous essayons justement d’améliorer la compétitivité et de créer des emplois en amenant les nouvelles technologies. Les nano peuvent être une carte intéressante à jouer.

Il y a deux exemples dont un a été cité par M. GAFFET et que j’aime beaucoup, celui de l’usinage. Savez-vous que tous les outils de coupe sont recouverts de matériaux durs pour usiner les matériaux ? Une thèse a été faite il y a environ deux ans à l’INSA. Elle a montré que si les carbures étaient sous forme de particules d’une dimension d’environ 35 nanomètres, leur durée de vie était extraordinaire, bien amplifiée par rapport à la phase normale. C’est une carte extraordinaire à jouer pour nos métiers.

L’usinage par d’autres moyens, par des lasers, on peut en faire des dimensions nanométriques. C’est aussi important.

On critique beaucoup les nanotechnologies, et mon voisin a un peu raison ; mais elles ont tout de même des potentialités extraordinaires. Savez-vous qu’un nanotube de carbone est 100 fois plus résistant et six fois plus léger que l’acier ? Imaginez la potentialité que l’on a avec un tel outil.

M. GAFFET a également parlé du cuivre. Un nanograin de cuivre est meilleur conducteur thermique que le massif. Il est meilleur conducteur d’électricité. L’intérêt pour la microélectronique dont M. GAFFET a parlé est extraordinaire : vitesse de communication, vitesse de transfert des électrons. Mécaniquement, c’est trois fois plus résistant que le massif. Il faut regarder toutes ces potentialités qu’il faut savoir mettre en œuvre.

MICRONORA essaie de trouver des sociétés qui le mettront en œuvre. Les protections, il faut en prendre. C’est un peu aux industriels. Quand on fait de l’usinage, il peut y avoir des poussières nanométriques. Nous l’avons fait avec notre laser. Il faut mettre des aspirateurs et des filtres pour récupérer les particules. Cela a précédemment été évoqué. On ne peut pas travailler les nanoparticules sans certaines précautions. Sinon, elles ont une potentialité que nous devons développer dans notre métier.

Un intervenant.- J’aimerais dire que, sans s’opposer au potentiel immense qui peut exister avec les nanoparticules, il faut garder conscience qu’il s’agit de matières tout à fait nouvelles. On ne peut pas faire l’amalgame entre le silicium contenu dans l’écorce terrestre et les nanoparticules des machines fabriquées à partir de silicium car, à une certaine échelle, elles peuvent avoir des propriétés totalement différentes de celles qu’elles ont à une autre échelle. Cette approche est essentielle dans la compréhension des influences des nanoparticules.

Par rapport à ce qui a été dit juste avant, il ne faut pas faire d’a priori sur l’influence ou la non-influence, ni sur les méthodes de précaution, sur comment on peut justifier qu’une méthode de précaution est valable si on ne peut pas détecter correctement la présence et l’influence des nanoparticules.