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Le dossier du maître d'ouvrage

Le dossier du maître d’ouvrage aborde les grands champs du sujet qui structurent le débat.

Dossier du Maître d'ouvrage - Partie 3

Le maître d'ouvrage

Se positionner pour l’avenir

Les nanotechnologies ont fait l’objet d’une intense activité scientifique, technologique et politique depuis dix ans. Tous les pays développés ont reconnu l’importance d’investir dans les nanotechnologies pour garantir la compétitivité économique, dans un environnement mondial extrêmement concurrentiel.

 

Une quatrième révolution industrielle ?

L’histoire est jalonnée de grandes ruptures technologiques. Sans remonter à l’Antiquité, l’histoire manufacturière comporte des phases jalonnées par des révolutions industrielles. Chacune d’elles se caractérise par la conjonction de conséquences économiques (prise de parts de marché et augmentation consécutive du niveau de vie) et de conséquences sociales (bouleversements des modes de vie antérieurs).

Ainsi, la première révolution de 1830 (qui s’appuie sur l’essor du charbon, de la métallurgie, du textile et de la machine à vapeur) est marquée par une concentration sans précédent des moyens de production et, en miroir, par les problèmes sociaux liés au développement des grands ensembles industriels et urbains.

La deuxième révolution (fin du XIXe siècle) est marquée par l’émergence de l’électricité, de la mécanique, du pétrole et de la chimie. Cette rupture associe innovations technologiques et nouveaux modes de production (taylorisme). La troisième, après la crise économique de 1929, voit apparaître de nouveaux moyens de communication et d’échange, via la téléphonie et les nouvelles technologies, qui tirent parti de l’électronique et trouvent leur apogée avec le développement de masse du transistor à base de silicium.

Cette troisième révolution est vraiment celle du XXe siècle et nous en mesurons à peine les effets, dont le phénomène de la globalisation. À noter également que le XXe siècle est celui de la prise de conscience des conséquences du développement industriel sur la sécurité sanitaire et environnementale, après plusieurs crises mémorables.

C’est dans ce contexte qu’émergent les nanotechnologies. Elles entraîneront, comme pour les évolutions majeures des trois derniers siècles, de nouveaux changements économiques et sociaux. Il importe qu’elles répondent aux besoins de la société, au choix des individus en tant que citoyens et consommateurs, et recueillent leur consentement. 

 

Les trois blocs, USA, Japon, Europe, se trouvent à présent confrontés à une forte concurrence de la Chine, mais aussi d’autres pays émergents particulièrement dynamiques, de taille comparable à la France, comme la Corée du Sud et Taiwan.

La France au 5e rang mondial

Le nombre de publications constitue l’un des principaux indicateurs de performance du niveau d’innovation d’un pays.

Dans le concert international, la France, avec 3 526 publications nanos en 2006 se situe au 5e rang mondial. Elle souffre néanmoins, comme le montre une analyse du cabinet américain Lux Research, d’un déficit chronique de capacité d’exploitation économique des résultats de la recherche. Elle est en effet classée, avec le Royaume-Uni, dans la catégorie des tours d’ivoire, c’est-à-dire des pays qui disposent d’une recherche fondamentale de haut niveau mais ne parviennent pas en tirer des bénéfices sur le plan économique via le dépôt de brevets et la création d’entreprises. En outre, la France ne présente aucune évolution positive dans ce classement à l’échéance 2012 mais plutôt une régression vers la catégorie dite « minor league ». C’est donc sur ce point particulier qu’elle doit produire un effort majeur pour passer de la recherche fondamentale au réel développement économique. Sans impulsion majeure à brève échéance, la France n’a aucune chance de jouer à moyen terme un rôle majeur au niveau international dans le domaine des nanotechnologies.

Le volume de publications en nanotechnologies a plus que triplé en 10 ans : 63 440 publications dans le monde en 2006, contre 20 852 en 1996. La production scientifique mondiale sur cette décennie est de plus de 420 000 publications.

Une analyse plus détaillée sur les dernières années montre cependant une dynamique différente selon les pays. Si la production scientifique reste relativement stable aux États-Unis et semble amorcer un déclin au Japon depuis 2005, la production scientifique chinoise dans le domaine des nanotechnologies est en pleine croissance.

Des technologies militaires convoitées

Au plan mondial, de nombreux pays s’intéressent aux applications militaires des nanotechnologies. Les États-Unis figurent en première ligne, avec un effort de recherche d’environ 350 millions d’euros par an pour les nanotechnologies militaires (soit 34 % du budget alloué globalement aux nanotechnologies par ce pays) et la création d’un institut dédié (Institute for Soldier Nanotechnology).

Par comparaison, l’effort militaire français reste modeste, tant en valeur absolue que relative : environ 20 millions d’euros par an, soit seulement 7 % du budget total consacré par la France aux nanotechnologies.

Les États-Unis sont suivis par le Japon, le Royaume-Uni, l’Allemagne et Israël. Il est néanmoins difficile, dans la masse d’applications évoquées publiquement, de faire la part entre les applications réelles et les projections futuristes ou purement spéculatives, voire tenant de la désinformation. La Chine, l’Inde et la Russie investissent aussi fortement dans ces technologies, mais l’ampleur et le contenu de leurs programmes restent mal connus.

Enfin, de nombreux pays émergents, comme le Brésil ou l’Afrique du Sud, ou du Sud dont l’Iran, l’Algérie, le Nigéria et l’Arabie Saoudite, s’intéressent aussi aux nanotechnologies pour des objectifs déclarés de souveraineté nationale. Sans doute y voient-ils un moyen de contrebalancer la puissance occidentale en investissant dans le développement de technologies du futur.

Les programmes de l’Union européenne

Au niveau européen, la coopération entre États, pas toujours aisée de manière bilatérale, ne peut que tirer bénéfice, en particulier pour la recherche, des programmes et dispositions mis en œuvre dans le cadre de l’Union et permettre aux nouveaux entrants de s’ouvrir davantage à ces aspects et s’associer à leurs enjeux.

Les programmes financés par l’Union européenne s’articulent notamment au sein du programme-cadre de recherche et de développement technologique (PCRDT), autour des réseaux ERA Net et autour des plates-formes technologiques européennes, ETP pour European Technological Plateform.

 

La photonique étudie la lumière et développe les technologies capables de la contrôler, notamment dans le but de transmettre des informations via des faisceaux lumineux. Elle concerne de très nombreux secteurs. Un pôle de compétitivité lui est consacré dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.   Pôle de compétitivité

 

EXPLICATION
Une accélération en Chine
L’éveil chinois en matière de nanotechnologies est relativement récent, puisque la période 2005-2006 représente près de la moitié de la production scientifique chinoise de ces dix dernières années dans le domaine (20 000 publications en 2005-2006 sur les 44 400 publications entre 1996 et 2006). En 2005, la Chine avait déjà largement dépassé le Japon. En 2006, la Chine représente 16,6 % de la production scientifique mondiale sur les nanotechnologies, juste derrière les États-Unis (17,4 %), qu’elle devrait dépasser dans les années à venir si les tendances actuelles de croissance pour la Chine et de relative stabilité de la production scientifique pour les États-Unis se maintiennent.
REPERES
Les fonds dédiés par l’Union européenne aux nanotechnologies s’élevaient à 530 millions d’euros en 2006, à comparer aux 1,775 milliard de dollars des États-Unis et 1,650 milliard de dollars consacrés par les pays de la zone Asie (Japon, Corée du Sud, Chine, Taïwan, Inde).

REPERES
JTI – Joint Technological Initiative
Un JTI est un partenariat public-privé, concentré sur une thématique industrielle donnée, avec un objectif bien défini, s’adressant à un marché important mais où les acteurs européens ont des faiblesses. Il est financé par des fonds publics et privés.




 


 

Le paysage de la recherche européenne en matière de nanotechnologies

Parmi les programmes de recherche communautaires, le septième programme-cadre de recherche et de développement technologique, 7e PCRDT, de l’Union européenne s’étendra de 2007 à 2013 et constitue le programme de recherche publique le plus important au monde. Dans ce cadre, le programme NMP (nanosciences, nanotechnologies, matériaux, procédés) est financé par la Commission européenne et consacré aux nanotechnologies et nanosciences, matériaux multifonctionnels, nouveaux procédés et systèmes de fabrication et leur intégration pour améliorer la sécurité et la qualité de la vie.

Un programme transversal dans le cadre du 7e PCRDT est consacré à l’amélioration des rapports entre sciences et société.

Les réseaux ERA Net ont été lancés par la Commission européenne pour encourager l’implication des États membres à travers des programmes nationaux. Il s’agit de créer, dans une thématique donnée, un consortium d’organisations ou d’agences nationales de financement de la recherche afin de coordonner leurs programmes, mettre en commun leurs ressources et financer des projets de recherche multinationaux. Parmi eux :

- le réseau NanoSci-Era Net, coordonné par la France (CNRS) depuis 2004, finance des projets de recherche fondamentale à long terme dans toutes les thématiques en favorisant l’interdisciplinarité. NanoSci-ERA compte 13 partenaires et 5 partenaires associés, appartenant à 12 pays ;

- le réseau MNT ERA Net soutient des projets de recherche en microtechnologie (nanoélectronique, nanobiotechnologie, micro et nanosystèmes, composants optiques, nanomatériaux, sources d’énergie, capteurs, instrumentation, modélisation de simulation). MNT ERA Net est constitué de 17 agences nationales ou régionales de financement de la recherche ;

- le réseau Euronanomed, ERA-Net coordonné par la France (CEA) vise le développement des concepts de la nanomédecine. Il a été lancé en 2009 et compte 24 partenaires de 17 pays.

- les plateformes technologiques européennes ou ETP (European Technological Plateform) sont des initiatives proposées conjointement par l’industrie et par la Commission européenne afin de définir des priorités et une stratégie commune en matière de recherche, de technologie et de développement dans une thématique donnée. Elles jouent un rôle clé dans l’alignement de la recherche institutionnelle sur les besoins de l’industrie, sont mises en place dans le 7e PCRD et ont pour but d’assurer à l’Europe une position de leadership dans la recherche et l’industrie.

Parmi ces plateformes ETP :

- le programme ENIAC (European Nanoelectronics Initiative Advisory Council) est une Joint Technological Initiative (JTI) centrée sur la nanoélectronique. Il a pour but d’augmenter l’intégration, la miniaturisation et la fonctionnalité des dispositifs électroniques. D’autres activités liées à la stratégie industrielle y sont encouragées, l’innovation, la normalisation, la coopération internationale, la formation et l’appui aux PME ;

- le programme Photonics21 regroupe la majorité des acteurs européens de la photonique. Il a pour but la coordination des activités de recherche et développement dans des thématiques comme les technologies d’information et de communication, l’éclairage et l’affichage, les technologies de fabrication, la science de la vie et la sécurité ;

- le programme NanoMedicine vise à développer les applications des nanotechnologies dans les sciences du vivant, plus précisément le diagnostic médical, la détection précoce, la prévention des maladies, le traitement et le suivi médical. Trois thématiques y sont présentes : diagnostic et imagerie, vectorisation des médicaments et médecine régénérative.

 

À signaler, dans le programme européen de santé publique 2008-2013, une action conjointe publiée en février 2009 sur la sécurité des nanomatériaux sous l’impulsion de la présidence française de l’Union européenne en décembre 2008. Cette action a fait l’objet d’un appel d’offres. La France en a assuré la coordination et a présenté un dossier pour un programme dénommé Nanogenetox visant à établir une méthodologie robuste relative à la détection de molécules potentiellement génotoxiques, c’est-à-dire pouvant compromettre l’intégrité du génome. Quinze nanoparticules déjà sur le marché et utilisées dans divers produits (silice, dioxyde de titane et nanotubes de carbone) vont être soigneusement caractérisées au plan physique et chimique et faire l’objet de tests. Cette action, sur 3 ans, regroupe 17 institutions et 13 États membres.

La place de la France

En dehors du nombre de publications, vu plus haut, le positionnement de la France peut s’apprécier grâce aux indicateurs que sont la création de start-up, la valorisation de la recherche et le transfert de ses résultats vers l’industrie, le financement (public, privé), les moyens mobilisés (humains et matériels) et l’efficacité de l’organisation.
 

La France a mis en place un ensemble de dispositifs de soutien à l’innovation : 5 pôles de compétitivité directement concernés par les micro et nanotechnologies et plusieurs instituts Carnot. Néanmoins, en 2005, la France déposait seulement 1,5 % des brevets dans le monde et se positionnait derrière des pays tels que la Corée du Sud et Taiwan. Ainsi, le financement de la recherche privée est très inférieur en pourcentage à celui consenti dans d’autres pays. Les conditions d’une stratégie de valorisation efficace vers l’industrie ne sont donc pas réunies. Les freins à la création, et surtout au développement des start-up, sont bien réels en comparaison avec les pays comme les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni ou Israël.

Un financement public important, mais une structuration variable selon les champs

Dans les programmes-cadres européens de recherche et développement (au sein des 6e et 7e PCRD), la position française est inégale : plutôt forte dans le programme ICT, elle l’est beaucoup moins dans le programme NMP. Les entreprises françaises n’ont pas réussi à s’établir comme coordinateur dans l’appel NMP spécifique aux PME. Ceci contraste avec la bonne performance des laboratoires publics et des grandes entreprises sur les champs micro et nanoélectroniques.

Le niveau des dépenses publiques en France est significatif, les programmes variés et relativement larges. La structuration est toutefois variable selon les champs.

REPERES
Les instituts Carnot
Le réseau des instituts Carnot a pour mission de développer des partenariats de recherche avec les acteurs socio-économiques (grands groupes, PME, start-up, collectivités territoriales) et de favoriser les transferts de technologies.
  REPERES
Micro et nanotechnologies : un effort croissant
En 2008, l’Agence nationale de la recherche (ANR) a consacré 83 m€ aux nanosciences et nanotechnologies soit 12,5 % du volume de ses appels.
     

EXPLICATION

Mise en réseau, mise à niveau
La France a mis en place des groupements de recherche C’Nano assurant une mise en réseau des laboratoires et des deux réseaux de centrales technologiques (grandes centrales et centrales de proximité), couvrant l’ensemble du territoire. Les investissements effectués dans ces centrales ont permis de remettre à niveau les équipements indispensables au développement de filières innovantes et adaptés aux besoins industriels.

 

  REPERES
Programme ICT
Programme-cadre européen dans les technologies de la communication
Programme NMP
Programme-cadre européen nanosciences, nanotechnologies, matériaux et nouvelles technologies de production.

 

Le plan Nano-Innov

Présenté le 5 mai 2009 par le Gouvernement, le plan Nano-Innov vise à mettre en place une stratégie d’innovation dans les nanotechnologies.

Il repose notamment sur la création de centres d’intégration des nanotechnologies à Grenoble, Saclay et Toulouse, où la recherche fondamentale travaillera avec les entreprises pour mettre au point des technologies, déposer des brevets, créer des produits.

Dès 2009, 70 M€ seront consacrés à ce plan.

Pour assurer une allocation efficace et pertinente des crédits du plan de relance, la ministre chargée de l’enseignement supérieur et de la recherche a également installé un comité de pilotage du plan Nanotechs Nano-Innov.

Composé de trois collèges d’égale représentation (nanosciences, nanotechnologies et industriels), il est chargé :

* de la rédaction des appels à projets de l’Agence nationale de la recherche, financés par le plan de relance dans le domaine des nanotechnologies. L’agence est, pour sa part, chargée de la mise en œuvre de ces appels à projets ;
* de la répartition des financements d’équipements de recherche en nanosciences et nanotechnologies prévus dans le plan ;
* de la coordination des travaux de recherche technologique en nanotechnologies et de l’interface avec la communauté scientifique des nanosciences, notamment dans le cadre des centres d’intégration technologique, comme celui de Saclay.

Il aura également un rôle actif de proposition, notamment de toute initiative nationale ou européenne permettant :

* d’assurer une coordination de l’effort national de recherche dans ce domaine (travaux des laboratoires, investissements, appels à projets…) dans la durée, prenant en compte les autres initiatives nationales, européennes et internationales aussi bien en nanotechnologies qu’en nanosciences ;
* de renforcer le transfert de technologies entre la recherche publique et l’industrie française et assurer une politique cohérente de la propriété intellectuelle des entités publiques en la matière ;
* d’améliorer la connaissance du grand public sur les nanotechnologies, leurs utilisations et leur gouvernance, en particulier dans le cadre du présent débat public ;
* de développer les formations nécessaires à l’émergence d’une véritable filière industrielle française dans ce domaine ;
* et, enfin, de créer une coordination européenne plus forte sur les nanotechnologies, notamment dans le cadre d’un projet de communauté de la connaissance qui pourrait être présenté au comité directeur de l’Institut européen de technologies (IET).

 

Les grands instruments, principalement les sources de rayonnement synchrotron et de neutrons, servent à la caractérisation des nanomatériaux et matériaux nanostructurés.

En micronanotechnologies pour les sciences du vivant, la situation de la France est contrastée avec des forces en recherche (biophysique, biomicrofluidique, nanoparticules et vectorisation) mais une faiblesse liée au nombre insuffisant d’industriels en instrumentation biomédicale. Ce marché est actuellement dominé par les États-Unis. Mais depuis peu se développent en France des start-up issues de la recherche, moteur privilégié du développement de l’innovation.

La France dispose d’atouts incontestables en micronanoélectronique avec une solide recherche de base universitaire, un centre de recherche technologique majeur en microélectronique CEA-LETI (laboratoire d’électronique et de technologie de l’information) et un investissement public et privé considérable (supérieur à 1 milliard d’euros).

Dans le champ des matériaux innovants, qui concerne à la fois la mécanique, la chimie et la biologie, une collaboration étroite s’est établie entre les laboratoires académiques et les industriels. Malgré la forte incitation de partenariat et de transfert soutenue par l’ANR, la structuration est difficile à mettre en place compte tenu de la diversité des thématiques et des produits.

 

La micronanoélectronique, au carrefour de la micromécanique, de la microélectronique et des nanotechnologies, est un secteur de pointe pour la France. Elle déploie quatre axes de recherche fondamentale et technologique décisifs : le développement de solutions pour fabriquer de nouveaux composants, la révolution des objets intelligents, l’électronique hybride et l’intégration matériel logiciel (systèmes embarqués).
EXPLICATION
Les grands instruments en France
Quatre de ces grands instruments existent en France : le synchrotron Soleil et le laboratoire Léon Brillouin basés à Saclay, l’institut Laue Langevin et l’European Synchrotron Radiation Facility basés à Grenoble.
Les évolutions récentes, ou à venir, de ces centres les ouvrent encore davantage aux nanosciences.

 

  Le synchrotron Soleil et le laboratoire Léon Brillouin basés à Saclay

 

DEFINITION : Agence nationale de la recherche (ANR)
Agence de financement de projets de recherche qui s’adresse à toute la communauté scientifique, aussi bien aux laboratoires publics qu’aux entreprises. La mission de l’agence est de financer des projets de recherche originaux (répondant aux appels qu’elle lance) et d’encourager le partenariat entre ces acteurs.
L’ANR organise chaque année des appels à projets sur des domaines thématiques spécifiques. Les projets sont sélectionnés sur des critères de qualité scientifique, auxquels s’ajoute la pertinence économique dans le cas des projets de recherche appliquée faisant intervenir des entreprises.

 

Les programmes français

De nombreux travaux de recherche en France dans le domaine des nanosciences et nanotechnologies s’appuient sur le réseau des centrales technologiques. Ils sont également menés dans le cadre des programmes soutenus par l’ANR et dans les pôles de compétitivité.

L’ANR soutient plusieurs programmes :

– le programme P3N (programme national en nanosciences et nanotechnologies) subventionne des projets de recherche fondamentale et appliquée, nanocomposants, micronanosystèmes, nanobiotechnologies, nanomatériaux, instrumentation et métrologie, modélisation et simulation. Un volet est dédié à l’impact et aux risques des nanotechnologies pour la santé et l’environnement ainsi qu’aux aspects éthiques et sociétaux. À titre d’exemples :

 
– Aquanano (2007), transfert de nanoparticules manufacturées dans les aquifères : développement d’une méthodologie et identification des processus ;

– Nanobench (2007), Assessing the S&T economic and social impact of nanotechnologies ;

– le programme matériaux et procédés vise la recherche de nouveaux matériaux et de procédés industriels, l’amélioration de leurs performances techniques et économiques et encourage le transfert de technologie vers l’industrie. Les nanomatériaux occupent donc une bonne place dans ce programme ;

– le programme SEST (santé environnement et santé travail) a pour but de révéler l’impact, encore peu connu, des facteurs environnementaux sur la santé humaine, en mesurant l’exposition à ces facteurs et en identifiant leur rôle dans l’origine ou l’aggravation de certaines maladies. Ce programme s’intéresse en particulier à l’éventuelle toxicité des nanoparticules. À titre d’exemples, les programmes suivants peuvent être cités :

– Nanofeu (2007), impact des nanocharges sur le comportement au feu ;

– Signanotox (2007), signatures toxicologiques de nano-objets manufacturés sur des cellules humaines après inhalation ou ingestion ;

– Nanodetect (2006), synthèse, détection et toxicologie de nanoparticules métalliques (Au, Ag, Pt) ;

– NTCTOX (2006), évaluation de l’influence de la nature des nanotubes de carbone sur la santé humaine et l’environnement ;

 
– Respinttox (2006), effets des nanotubes de carbone sur l’appareil respiratoire. Rôle de leurs caractéristiques physico-chimiques ;

– Nanotox (2005), toxicologie des nanoparticules, influence de la taille, de la composition chimique et de la réactivité de surface sur leurs effets pulmonaires et rénaux ;

– Casisurf (2005), caractérisation in situ de la surface des aérosols fins et ultrafins.

Cinq des pôles de compétitivité comptent les nanotechnologies parmi leurs thématiques :

– Minalogic, situé dans la région Rhône-Alpes (Grenoble), est structuré autour des solutions miniaturisées intelligentes pour l’industrie qui résultent de l’association des micronanotechnologies et du logiciel embarqué. Procédés développés : anticipation des ruptures technologiques de la nanoélectronique, maîtrise de la conception des circuits complexes, interface des puces avec leur environnement et création des outils de développement. Secteurs visés : de l’automatisation des processus industriels à l’électronique de grande consommation en passant par les systèmes d’optimisation de la consommation d’énergie, la chaîne de l’image ou le monde de la connectivité et de la mobilité.

Les partenaires Minalogic : plus d’une centaine de partenaires, des laboratoires publics appartenant au CNRS, CEA, Inria, l’Institut national polytechnique de Grenoble et l’université Joseph Fourier et de grands groupes industriels comme STMicroelectronics, e2v, Philips, Freescale, Thales, Air liquide, Schneider, Hewlett-Packard, Bull, Sun Microsystems, France Télécom, Xerox, Mentor Graphics et des PME comme Soitec, Sofradir, Memscap, Teem Photonics, Tronic, Soisic, Iroc ;

 

Les principaux centres de recherche en nanotechnologies en France.

– SCS (Solutions Communicantes Sécurisées), situé dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, vise l’intégration des matériels et des logiciels pour transmettre, échanger et traiter des informations de manière sécurisée et fiable. Applications dans la téléphonie mobile numérique, les télécommunications par satellite, la carte à puce, l’étiquette électronique (RFID), les transactions électroniques, la géolocalisation. S’adresse aussi à la banque, la distribution, la santé, le tourisme, la sécurité et la défense.

Les membres de SCS : des laboratoires publics appartenant au CNRS, École centrale de Marseille, École des mines de Saint-Étienne, Eurecom, ENST, Inria, universités de Marseille, université de Nice, des grands groupes industriels comme Alcatel Space, Altran, Amadeus, Atmel, France Télécom, Gemalto, Hewlett-Packard, IBM, Infineon, NXP, Oracle, Safran, SAP, STMicroelectronics, Texas Instruments et des PME comme Apsis, DataComsys, IBS, Impika, Orsay Physics, Polymage, Shaktiware, Trusted Logic, Visioscopie ;

– S2E2 (sciences et systèmes de l’énergie électrique), situé dans la région Centre, vise l’ensemble de la chaîne de valeur de l’énergie électrique et s’adresse aux marchés suivants : énergies nouvelles, équipements grand public et nomades, bâtiment résidentiel et tertiaire, équipements industriels…

Les membres de S2E2 : des laboratoires publics appartenant au CNRS, CEA, université de Tours, université d’Orléans etdes industriels comme ST Microelectronics, Legrand, Thermor, Dalkia, A2E Technologies, Vermon, Mecagis ;

– le pôle Photonique, situé dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, est spécialisé dans les systèmes complexes d’optique et d’imagerie dédiés aux milieux hostiles (observation de l’espace et de la Terre, optique marine et sous-marine, outils photoniques pour la fusion nucléaire) et à des marchés connexes (microélectronique, sciences de la santé, environnement et risques naturels et industriels, procédés industriels).

 Les membres du pôle Photonique : une vingtaine de laboratoires publics appartenant à L’ifremer, CNRS, DGA, Inria, Ensam et une centaine d’entreprises comme Thales Alenia Space, Eurocopter, Thales Microsonics, ST Microelectronics, Texas Instruments, Atmel, Siemens, Bertin technologies, Seso, Dassault Systèmes, Image Technologies, Nano Physics, Valmeca, Sema Group, Comex, Cégelec, Cybernetix ;

– le pôle MicroTechniques, situé à Besançon (Franche-Comté), est centré autour du savoir-faire de l’usinage au sens large (automobile, téléphonie, aéronautique, électroménager, secteur biomédical…). Il s’adresse aux domaines industriels où les volumes, les poids, les dimensions des composants et des produits diminuent en augmentant leur densité fonctionnelle.

Les membres du pôle Microtechniques : des laboratoires, CNRS, ENSMM, institut Femto-ST, université de Franche-Comté, université de technologie de Belfort-Montbéliard et un grand nombre de PME comme Alcis, Cheval Frères, Digital Surf, Imasonic, Micro Mega, NanoJura, Optec, Photline Technologies, Silmach, Statice Santé.

Trois réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA) ont également été créés dans le domaine des nanosciences :

– Nanosciences à la limite de la nanoélectronique (Grenoble) fédère les initiatives du CEA, du CNRS, de l’INPG et de l’UJF pour les thématiques électronique quantique, magnétisme, photonique, matériaux, sciences du vivant, caractérisation et métrologie, modélisation ;

– Triangle de la physique (Orsay) rassemble les laboratoires du triangle géographique Palaiseau-Orsay-Saclay (université Paris sud XI, CNRS, École polytechnique, CEA, Onera, Iota, ENSTA et Sup’Elec) dans les domaines optique, physique de la matière diluée et condensée, physique des milieux complexes, nanophysique et physique statistique ;

– Centre international de recherche aux frontières de la chimie (Strasbourg) rassemble l’université Louis Pasteur, le CNRS et les sociétés BASF (chimie) et Bruker (instrumentation) dans le domaine de la chimie en interface avec la physique, les matériaux et la biologie.


DEFINITION : Pôles de compétitivité

Un pôle de compétitivité rassemble, sur un territoire donné, des entreprises, des laboratoires de recherche et des établissements de formation pour développer des synergies et des coopérations.
D’autres partenaires, dont les pouvoirs publics, nationaux et locaux, ainsi que des services aux membres du pôle sont associés.
L’enjeu : s’appuyer sur les synergies et des projets partenariaux et innovants pour permettre aux entreprises impliquées de prendre une position de premier plan dans leurs domaines, en France et au niveau international.
  DEFINITION : Centrales technologiques
Le réseau national de grandes centrales technologiques vise à fournir aux chercheurs les technologies nécessaires (salles blanches, équipements et instrumentation…) à la réalisation des projets de recherche et de développement des laboratoires. Il est complété par des centrales de proximité, de moindre envergure, qui complètent, à l’échelle locale, l’infrastructure des grandes centrales.
Elles sont réparties sur l’ensemble du territoire.

 

 

Grâce aux grandes centrales technologiques et aux centrales de proximité (voir les cartes), des programmes de R&D partenariale efficaces ont pu se développer en France. Le pays possède en outre un leadership européen sur le marché des composants pour systèmes embarqués qui le met en position de faire évoluer le contenu de la stratégie de recherche européenne en électronique et dans le domaine de l’interface matériel logiciel.

Le poids de la recherche publique

L’activité nanotechnologique dépasse largement le cadre des applications industrielles évoquées dans cette partie. La recherche publique est également très présente mais les approches gouvernementales dépendent beaucoup des pays considérés.

Ainsi, en Europe et au Japon, la recherche publique joue un rôle très important. En France, en 2006, les dépenses publiques affectées aux nanotechnologies avoisinaient les 300 millions d’euros, à comparer aux 430 de l’Allemagne et aux 150 du Royaume-Uni.

Les fonds communautaires , qui s’élevaient à 530 millions d’euros en 2006, ont atteint 1,1 milliard d’euros en 2007. Globalement, les grandes zones mondiales investissent des sommes très voisines, bien qu’au niveau des pays les implications soient plus contrastées.

Quelques pistes pour l’avenir

Le secteur de la micronanoélectronique est actuellement un secteur dans lequel la recherche est très active. Des développements sont ainsi attendus en matière d’électronique embarquée et d’objets intelligents. Ces recherches nécessitent une coordination qui regroupe les représentants des industriels et du monde académique. Relever ce défi passe par la création d’une infrastructure de recherche de niveau international ouverte à la fois aux chercheurs et aux industriels, autour de grandes et petites plates-formes d’équipements, de fabrication et d’instrumentation.

Il est par ailleurs essentiel de tirer parti du potentiel des nanotechnologies en biologie et en santé. Pour y parvenir, il est envisagé de disposer d’une interface forte avec le monde clinique pour rapprocher ces technologies des patients en lien avec les grands enjeux des sciences du vivant à l’ère post-génomique : compréhension du fonctionnement de la cellule à l’échelle nanométrique, convergence avec la biologie des systèmes.

 

Le développement des nanomatériaux innovants doit également être focalisé sur des champs d’application à forts enjeux sociétaux (énergie durable, en particulier efficacité énergétique des bâtiments et des transports, environnement, diminution des impacts des matériaux sur l’environnement). Le consensus des scientifiques et des industriels doit être recherché autour des feuilles de route qui serviront de base à la programmation du domaine.

Le projet de révision de la stratégie nationale de développement durable (SNDD) préparé pour la nouvelle période 2009-2012 a mis en évidence l’intérêt de mieux intégrer le développement durable dans les orientations de la recherche et d’encourager la structuration de la communauté des chercheurs autour de ses enjeux. La SNDD souligne la nécessité de prendre ceux-ci en compte dans les orientations stratégiques des établissements de recherche, comme les aspects économiques, environnementaux et sociaux dans l’évaluation des programmes et projets de recherche appliquée. Favoriser la recherche est un préalable à l’amélioration de l’efficacité et de la sobriété des technologies. Au-delà, le développement de l’expertise scientifique, la sollicitation des forums d’experts, le développement d’une culture délibérative autour des grandes questions scientifiques, peuvent contribuer à atteindre un tel objectif.

La dynamique du Grenelle environnement doit être prise en compte pour coordonner, au plan national, la recherche sur l’étude et la maîtrise d’impacts éventuels des nanotechnologies : caractérisation, détection, traçabilité et toxicologie des nanomatériaux, impact potentiel des nanomatériaux sur l’environnement (écotoxicologie, cycle de vie, procédés sûrs de fabrication, récupération et traitement des déchets). Il est également indispensable de renforcer la base scientifique permettant de définir le bon niveau des mesures de prévention, lorsqu’elles sont nécessaires, pour la sécurité du personnel, du public et de l’environnement. Enfin, il est impératif de favoriser les actions en relation avec le public pour échanger sur les usages et pour expliquer les efforts de recherche, les bénéfices et les éventuels risques, les aspects juridiques et éthiques relevant des nanosciences et des nanotechnologies.