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Avis n°311

Comment franchir les barrières psychologiques à la démarche négawatt ?

Ajouté par Vincent ANONYMISé (Aureilhan), le
[Origine : Site internet]

Nous sommes à mi-débat. Je constate un certain "négawattosceptiscisme" de la part de certains, qui considèrent que le nucléaire est la SEULE option possible. Ce point de vue me rappelle le "climatosceptiscisme", que nous avons combattu ensemble. Maintenant que la nécessité de réduire nos émissions de GES est acquise de manière quasi unanime, la nécessité de réduire notre dépendance au nucléaire ne fait pas consensus. Une barrière psychologique doit être franchie pour accepter qu'une France décarbonnée est POSSIBLE, SANS NUCLEAIRE.

Accepter de lire le scénario négawatt, accepter de lire les scénarios RTE (y compris les plus ambitieux, qui ont été gommés dans le dossier du Maître d'Ouvrage), accepter que la technologie nucléaire ne tienne pas ses promesses.

Je suis inquiet sur l'issue de ce débat, car des arbitrages forts doivent être pris MAINTENANT sur l'avenir de cette filière. Je suis inquiet car M. Macron semble attiré par les sirènes radioactives.

Mais je suis confiant, car :
* la dynamique de transition est très forte (les ONG parlent de "1 millions d'emplois pour le climat", alors que le nucléaire ne parle que de 200k emplois),
* les filières "alternatives" sont structurées et prêtes à changer d'échelle.
* M. Macron sait analyser les données économiques, et il verra que l'option nucléaire est la plus coûteuse - sans même tenir compte du coût des dommages en cas d'accident (portés à 100% par l'Etat).
* M. Macron et le mouvement "En Marche !" souhaitent rétablir un équilibre territorial, et ils comprendront rapidement que les économies et la production décentralisée vont dans ce sens. Alors que le nucléaire concentre les capitaux sur des territoires ciblés.

Comment les arbitrages qui émergeront de ce débat ne seront-ils pas influencés par des biais psychologiques, de résistance au changement, de définition de ce qu'est une société moderne, etc. ? Telle est ma grande interrogation.

Commentaires

En ce qui me concerne, je me classe volontiers parmi les "negawattosceptiques", et les pro-nucléaires, mais certainement pas pour des raisons psychologiques.
Je ne sais pas, d'ailleurs, ce qui vous amène à supposer cette motivation irrationnelle chez ceux qui pensent de la sorte.

Le scénario Négawatt prévoit des changements majeurs dans les modes de vie et les sources d'énergie.
Or, les documents proposés par cette association ne présentent pas de calculs détaillés, seulement des résultats synthétiques.
Je ne vois pas ce qu'il y a d'étonnant à ce que cela suscite une certaine circonspection.

53000

Pour avoir pris connaissance du scénario négaWatt je me classe aussi dans le camp des sceptiques !
50% de nucléaire en 2025 (dans 7 ans donc...) et 0% de nucléaire à partir de 2035 sont des objectifs complètement irréalistes.
Bien que les idées de base soient très bonnes, ce scénario est basé essentiellement sur des hypothèses très optimistes (pour ne pas dire farfelues !) en terme d’efficacité/sobriété énergétique et de déploiement des EnR.
Je ne reviens pas sur les problèmes techniques posés par les EnR qui ne seront aucunement résolus dans un laps de temps aussi court.
Quant à la sobriété, allez donc expliquer (sans imposer) au consommateur qu'il devra faire des efforts, et que c'est pour la bonne cause !
Alors oui, je ne suis pas pro-nucléaire et pourtant je suis un négawattosceptique, ce n'est pas un problème de "barrières psychologiques".
PS : les scénarii de RTE, bien que plus "doux", me paraissent autant irréalisables...

38330

Merci pour ces réactions constructives, sur lesquelles je souhaite rebondir d'emblée.

Il ne faut pas confondre ce qui est matériellement possible (en termes technico-économique), et ce qui se fera. Serons-nous arrivés à 0% nucléaire en 2035 et -90% sur le CO2 en 2050 ? Je crains que non. Bien que ce soit possible si on le veut vraiment, collectivement.

Avec une accélération des progrès sur les différents axes "négawatt" (sobriété, efficacité, EnR), il est possible de changer rapidement les choses. Les hypothèses, détaillées dans le Manifeste négawatt, ne me semble pas aussi fantaisiste que vous le dites. Donnez-nous des exemples svp de progrès qui vous semble "irréaliste".

Enfin, je rebondi sur "allez donc expliquer (sans imposer) au consommateur qu'il devra faire des efforts, et que c'est pour la bonne cause" -> C'est ce que je fait - comme des milliers d'autres personnes - depuis 15 ans, notamment en relayant les études de l'ADEME (entre autre). Sauf que nous ne considérons pas nos interlocuteurs comme de simples "consommateurs", mais comme des citoyens, contribuables, père-mère de famille, etc.

Un consommateur n'existe que s'il consomme.
Un être humain a d'autres manières d'exister.

Il reste du chemin à parcourir, mais les progrès réalisés en termes d'acceptabilité du discours négawatt sont énormes (plus personne ne ricane lorsqu'on parle de bâtiment passif), et une majorité de nos concitoyens est prête au changement, à titre pro ou perso - dans les prochaines années. Le principal blocage vient - à mon avis - d'une minorité qui n'est pas prête à ce changement.

65800

Bonjour,
merci pour votre retour.
Ce que j'ai voulu souligné dans mon message précédent c'est surtout le problème de "timing" du scénario négaWatt. C'est dans ce sens que je le trouve irréaliste.
Tous les indicateurs de consommation d'énergie montrent que, même s'il y a en effet un baisse de consommation sur ces dernières années (pas en 2017 : hausse de 0.9%), la tendance n'est pas assez forte pour caler avec ce scénario à l'horizon 2025 et 2035. Il faudrait un sursaut des pouvoirs publics (déploiement des EnR, efficacité énergétique), un sursaut des "citoyens" (sobriété) le tout conditionné par des avancées notables sur le plan technologique.
Ce qui est loin d'être gagné !
Par contre je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il faut tout mettre en œuvre pour aller dans ce sens.

38330

vous notez 1 million d'emploi dont les ONG parlent et 200k emploi pour le nucléaire
Est ce selon vous sur la même aire géographique ?
Actuellement il y aurait 10 million d'emploi dans le MONDE pour les ENR et 107000 seulement en France (données IRENA) dont + de 30000 dans biomasse +de 30000 dans biofuels 10000 dans grande hydraulique et donc seulement environ 30000 pour solaire
Comment pensez vous qu'on puisse atteindre 1 million alors que les 200k existent aujourd'hui ce ne sont pas des emplois potentiel ou futurs il existent

90000

J'ai posté une analyse de ce scenario dans le point de vue No 45.
La barrière psychologique à franchir pour accepter Negawatt, c'est l'acceptation de vivre dans le "meilleur des mondes".

75013

En réponse au commentaire de GERARD GRUNBLATT :
* Je faisais référence à la campagne "1 million d'emploi pour le climat", menée depuis 2017, et portée par un collectif d'ONG (info sur http://emplois-climat.fr)
* Pour info, le volet "emploi" du scénario négaWatt a été étudié par M. QUIRION (CIRED-CNRS), et il est question d'environ 600 000 emplois NET total d'ici 2050 : près de 1M de création (bâtiment, EnR et réparation essentiellement) et 350k de destruction (transport et énergies non renouvelables).

La transition énergétique ne peut se résumer au nombre d'emplois pour la production d'énergie. Il faut aussi regarder le nombre d'emploi pour consommer moins d'énergie.
Et plutôt que de chercher à préserver des emplois dans les filières carbonés ou nucléaires, il conviendrait de réfléchir à la meilleure moyenne de 'recycler' ces compétences, pour les mettre au service de la transition énergétique.

Enfin, il faut aussi poser la question à l'envers : "combien ça rapporte ?", et non plus "combien ça coûte ?". Cette question sera débattue très prochainement lors des Rencontres du CLER - Réseau pour la transition Énergétique.

65800

Vous vous demandez quelles sont les hypothèses farfelues du scénario "negawatt"...
Allons-y :
Une "hausse du nombre de personnes par logement" et la "réduction de la part de maisons individuelles" : ce sont deux tendances opposées à l'évolution actuelle.
"La rénovation thermique performante [de] 780 000 logements [...] par an" : on est déjà trèèès loin de l'objectif annoncé de 500 000 par an..
"La généralisation [...] des appareils électriques les plus
performants" : pas en 2025, vu les durées de vie moyennes de ces équipements, pas en 2030 non plus !
"L’équilibre du réseau électrique grâce au développement du power-to-gaz" : le prototype le plus puissant (en construction) n'est que de 50MW, il faudrait au moins 10x plus pour absorber l’excédent des EnR fatales. Donc, non, pas en 2030.

nota: Je ne suis par contre pas contre leurs hypothèses : a titre individuel, je fais ce que je peux pour réduire ma consommation d'énergie (appart en rénovation énergétique, pas de voiture, consommation de viande modérée...).

44000

J'ai commenté le texte initial par quelques question et commentaires intégrés :

Mais je suis confiant, car :
* la dynamique de transition est très forte (les ONG parlent de "1 millions d'emplois pour le climat", alors que le nucléaire ne parle que de 200k emplois),
* les filières "alternatives" sont structurées et prêtes à changer d'échelle.
Commentaire : il n'y a en fait aucune limite car ce sont des emplois subventionnés et donc proportionnel aux subventions.

* M. Macron sait analyser les données économiques, et il verra que l'option nucléaire est la plus coûteuse
Question : si ceci était vrai pourquoi subventionner les ENR par milliards d'euros par an ?

- sans même tenir compte du coût des dommages en cas d'accident (portés à 100% par l'Etat).
Commentaire: on peut dire la même chose pour l'ENR Hydraulique.

* M. Macron et le mouvement "En Marche !" souhaitent rétablir un équilibre territorial, et ils comprendront rapidement que les économies et la production décentralisée vont dans ce sens. Alors que le nucléaire concentre les capitaux sur des territoires ciblés.
Commentaire: L'équilibre territorial c'est sympa, mais le combat actuel est la réduction de la production de CO2, combat que l'on sait perdu en France, en Europe, dans le Monde, et aussi, moi, je ne suis pas confiant.

13001

"Maintenant que la nécessité de réduire nos émissions de GES est acquise de manière quasi unanime"
Peut-être mais ça ne compensera jamais la forte augmentation dans les 2 à 3 prochaines décennies des émissions de la Chine, de l'Inde et autres pays encore peu développés.
Les émissions de GES de la France "pèsent" 1% des émissions mondiales et celles résultant de notre production d'électricité moins de 10% de nos émissions, soit moins de 0,1% des émissions mondiales.
Climatosceptique ou pas, l'avenir climatique n'est pas entre nos mains. Contentons nous de nous efforcer de réduire notre consommation de pétrole dans les transports. Ce sera déjà pas mal.

"une France décarbonnée est POSSIBLE, SANS NUCLEAIRE."
Pour le moment l'Allemagne démontre que cela est faux.

"Comment les arbitrages qui émergeront de ce débat ne seront-ils pas influencés par des biais psychologiques, de résistance au changement, de définition de ce qu'est une société moderne, etc. ? "
Il n'y a pas de résistance au changement quand celui-ci n'est pas imposé et qu'il apporte un "plus" dans la vie courante (ordinateur et téléphone portable par ex.). Ce qui a été le cas jusqu'à présent avec le progrès technologique.
Aujourd'hui la transition énergétique ne nous apporte pas une électricité meilleure qu'avant, par contre elle la rend plus chère...
Je ne vois pas trop ce que vous désignez par "biais psychologiques", il me semble que vous attribuez simplement cela à ceux qui ne partagent pas votre opinion.

75013