Point de vue n°36
Cahier d'acteur n°17 - Club Power to Gas
"Le « Power to Gas », levier de réussite de la transition énergétique : un contributeur majeur à une décarbonation ambitieuse de tous les secteurs d'activité par conversion de l'électricité, et une solution pour le stockage de l'énergie."
Commentaires
Les pilotes industriels ?
Depuis que l'Adème a pris à son compte le 100 % ENR de Négawatt et a parlé du stockage par la méthanation par réaction de Sabatier, un certain nombre d'ingénieurs spécialistes de la production électrique a fait un calcul montrant qu'au mieux le rendement de cette opération était de 20 % et ceci a été présenté à l'Adème.
Puis il a été convenu que nous aurions sous peu les rendements donnés par les pilotes industriels en cours de montage pour essai.
Nous attendons toujours les résultats et nous pensons qu'en leur absence, la méthanation, qui est une opération réalisable, n'a pas les rendements requis. Produire 5 MWh pour en récupérer 1 ne nous paraît pas une solution sérieuse.
Au club power to gas
Vous dites vous même que votre projet n'est pas de faire de l'électricité. (effectivement, si on rajoute 50 % de centrale gaz, on est à 30% avec vos rendements de (optimistes) de 60% de méthanation, et sans perte de stockage et transport de gaz.
Votre projet ne peut donc être qualifié de stockage pour les ENR intermittentes. La question de leur intermittence reste entière.Il n'est pas une alternative aux batteries.
D'autre part, où trouvez vous la quantité de CO2 nécessaire? Les installations de méthanisation sont loin de faire un appoint significatif, sauf à ne plus cultiver que pour méthaniser. Et séparer le CO2 de fumées de combustion est très coûteux en énergie, c'est ce qui fait capoter les essais d'enfouissement.
Dans mon analyse du scenario Negawatt, j'ai calculé que essayer de boucler les besoins conduit à 40 000 éoliennes, 38 000 méthaniseurs, des kirielles de gazoducs....L'installation d'Audi, impressionnante par sa taille, représente une production marginale comme je l'ai calculé dans mon point de vue No8.
Tout cela est peut être techniquement réalisable, mais ni socialement, ni économiquement.
Question sur les à-coups de production et sur les coûts
Vos informations sont très intéressantes.
Sans être aucunement spécialiste, j'ai entendu dire que les électrolyseurs n'aiment pas beaucoup les à-coup de production. Vous avez certainement étudié ce que seraient les variations de la puissance disponible pour une électrolyse selon différents parcs de production d'électricité. Si la capacité éolienne est forte, ces variations peuvent être brutales (la variation du vent pouvant parfois s'ajouter à celle de la consommation).
Pourriez vous donc indiquer la variation maximale de charge, en plus ou en moins, de l'électrolyseur d'une heure à l'autre ?
Autre question : peut-on avoir une idée du montant des investissements, des coûts fixes et des coûts variable de la production d'hydrogène et de méthane (il faut alors compter le coût du CO2).
Je vous en remercie.
Henri Prévot
Le stockage
Nous sommes donc d'accord; vos projets ne résolvent en rien le problème de l'intermittence des ENR aléatoires.
Et si on veut fabriquer H2, par électrolyse, c'est plus simple de le faire en heures creuses aux bornes d'une centrale nucléaire, et à grande échelle, sans à coups..
Pour fabriquer le CH4, tout est question de disponibilité de CO2 et coût global. Pour l'instant on n'en a aucune idée.
Don ce c'est pas possible d'inclure ça dans une programmation.
Complément de réponse au "Club Power to gas"
Je confirme tout à fait la réponse de 4Vconsulting du 28/05/2018. J'ajouterai que le problème n'est pas technique mais économique, le facteur négatif principal étant la faible durée de fonctionnement des installations Power to gas si elles sont exclusivement alimentées par de l'électricité éolienne et/ou photovoltaïque. Et plus encore si on n'utilise que les surplus de ces sources : le facteur de charge des électrolyseurs devient alors dérisoire et l'amortissement des installations quasi impossible.
Remerciements, commentaires et questions
Merci beaucoup pour ces échanges très éclairants sur le Power to Gaz !
Dans ce qui suit j’utilise beaucoup « il me semble » ou « je comprends » car je ne suis pas expert.
Mais je pense d’abord que le jugement porté sur telle ou telle technologie en général, et le Power to Gaz en particulier, se doit d’être multi-critères (faisabilité technique, rendement énergétique, rentabilité économique, émissivité en gaz à effet de serre, consommation de ressources épuisables, etc). Ainsi si une solution paraît faible sur le plan économique, elle est peut-être forte sur le plan environnemental. Il y a un compromis à faire, et tous ces critères évoluent dans le temps.
Il me semble que la rentabilité économique du Power to Gaz dépendra beaucoup du prix du carbone.
Je comprends que la comparaison avec la production électrique à partir de gaz naturel, si on égalise la comparaison par rapport à la perte de rendement de 50% qui est valable dans les deux cas, n’est pas si défavorable, et que dans ce cas, l’efficacité du Power to Gaz par rapport au Gaz naturel est de 60% à 78%. Il me semble que cette perte pourrait à terme être compensée par le gain en émissions de CO2 évitées.
Il me semble que si l’on utilise le méthane pour des usages dispersés eux-mêmes émissifs dans l’atmosphère, on réduit au mieux (en supposant que le CO2 capté provient d’une installation fonctionnant elle-même au gaz) l’intensité carbone (rapport du CO2 émis à l’énergie produite) par un facteur deux. Je comprends qu’on peut réduire encore cette intensité si on boucle le cycle, en réinjectant le méthane dans l’installation initiale d’où le CO2 a été capté. Idéalement, on pourrait faire tendre l’intensité carbone vers zéro !
Je comprends que le Power to Gaz a vocation à utiliser l’électricité « fatale » des EnR électriques, c’est à celle qui, sans solution de stockage, serait produite en excès de la consommation instantanée et de toute façon perdue. Je comprends donc que le fonctionnement de la chaîne Power to Gaz est en première approche intermittent, tout comme les EnR électriques dont il dépend. Il me semble toutefois qu’en intégrant des stockages-tampons, par exemple des batteries en sortie des EnR électriques (ce qui me semble également une solution pour éviter les à-coups sur les électrolyseurs), ou bien stocker l’hydrogène en sortie de l’électrolyseur lorsqu’on veut produire du méthane, on peut cantonner les désagréments de l’intermittence en amont de la chaîne (qui je le reconnais est une sacrée « usine à gaz »).
J’ai vu qu’une société canadienne Carbon Engineering propose des installations d’extraction du CO2 de l’atmosphère. Comment cela peut-il être rentable énergétiquement et économiquement à un taux de 400 ppm alors qu’on dit que l’extraction de CO2 des fumées en contenant de l’ordre de 80% peut poser un problème ?
Je sais que la réaction de Sabatier nécessite un catalyseur à base de nickel ou des catalyseurs améliorés. Est-ce que les ressources mondiales de nickel, de lanthane ou d’autres éléments du système périodique, sont suffisantes pour pouvoir dire que le Power to Gaz est une solution à « longue durabilité » voire pérenne ?
Je pense que les ressources de Recherche et Développement devraient être consacrée massivement à résoudre les multiples questions de l’impasse environnementale globale, et que le Power to Gaz entre dans cette catégorie, et que les activités qui n’entre pas dans cette catégorie, sont souvent de l’ordre du gadget quand elles n’aboutissent pas à accroître les problèmes environnementaux.
Quels rendements? quelles réalisations?
Quels sont les rendements énergétiques attendus pour les cycles power-to-gas-to power dans le cas de l'hydrogène et du méthane? Cela a-t-il été vérifié sur des pilotes? Lesquels ?
Pourquoi en pas faire en Bretagne, qui n'a ni nucléaire ni combustibles fossiles, et une faible autonomie électrique ( 15 %), un démonstrateur de l'efficacité de ces méthodes à une échelle industrielle?