Question n°564
Perte de commandes de l'étranger
le ,Ma question est : La Commission du Débat Public n'oublie-t-elle pas l'effet désastreux des objectifs en régression du programme nucléaire français sur le renouvellement des compétences et sur notre capacité à conquérir des marchés ?
Bien sûr les sociétés concernées, pas plus que les sociétés savantes de ce domaine, ne peuvent l'écrire dans un document officiel !
Des objectifs négatifs pour le nucléaire dans une PPE, non seulement sont désastreux pour attirer des jeunes dans nos professions du nucléaire et maintenir notre compétence, mais
ils sont désastreux aussi pour attirer les commandes de l'étranger !
Le gouvernement plaide que nous avons vendu des EPR en Chine, au Royaume-Uni. L'Inde dit au Président Macron que la commande de 6 EPR pourrait se concrétiser vers la fin de l'année 2018. Mais cela fait des années que l'Inde nous l'annonce pour bientôt, alors que voilà longtemps qu'elle en fait construire par les Russes et leur en commande encore.
La Turquie avait annoncé en 2013 son intention d'acheter à un consortium, constitué par Mitsubishi Heavy, ENGIE et une autre entreprise japonaise, Itochu, 4 ATMEA (réacteur de 1100 mégawatts électriques (MWe) développé par AREVA et Mitsubishi, de même génération que l'EPR 1650 MWe) ; mais le client et même nos partenaires n'y croient plus, et on apprend que ce sont des réacteurs russes que la Turquie commande. Les clients potentiels ne se tournent plus vers nous qui annonçons un ardent recul dans la filière nucléaire ! On nous autorise à soumissionner, mais on ne nous choisit plus !
Il faut donc dès que possible supprimer ce qui est explicitement négatif dans notre programme nucléaire.
Quelques mots de la concurrence par les Chinois et par les Russes.
Les Chinois ont un immense marché intérieur qui anime leur industrie sans interruption, et une incitation majeure : leur pollution atmosphérique. Leur longue collaboration avec EDF leur a donné la compétence pour concevoir et proposer à l'exportation un réacteur de 1000 MWe réputé chinois, appelé Hualong One. EDF ayant été contrainte de faire appel à la Chine pour prendre part au financement de 2 EPR au Royaume-Uni à Hinkley Point, les Chinois ont posé comme condition, en contrepartie, que le réacteur suivant, prévu à Bradwell, soit un Hualong One (EDF devant les aider à obtenir son agrément par l'Autorité de sûreté britannique) !
Pour le futur la Chine a d'autres fers au feu sur lesquels le développement est déjà bien avancé (réacteur à haute température, réacteur modulaire, réacteur surgénérateur).
Les Russes, ces temps-ci, emportent pratiquement tous les marchés à l'étranger ! Ils offrent aux clients potentiels des financements étonnants vu leur situation économique encore plus difficile que celle de la France. Aux pays qui n'ont pas l'infrastructure scientifique et industrielle ils offrent de les aider avec du personnel russe, que l'Autorité de Sûreté russe les prenne en charge, ou éventuellement une autorité de sûreté internationale ? Eléments majeurs très intéressants pour un client : ils offrent, comme ils le font déjà avec l'Iran, de reprendre en Russie les combustibles usés pour éviter que du plutonium ne reste dans ces pays ; et de les débarrasser des déchets, ce qui, à nous Français, nous est interdit par la loi. La Russie, elle aussi, a d'autres fers au feu, dont une longue pratique ininterrompue des réacteurs à neutrons rapides.
Face à ces points forts de ces deux terribles concurrents, pouvons-nous gagner cependant des marchés ? Il nous faut progresser considérablement en compétitivité !
Certes, pour l'EPR, on saura réduire les coûts et les délais par rapport aux unités d'Olkiluoto en Finlande et de Flamanville en France, qui ont été des « premiers de série ». Mais il faut beaucoup plus ! Il faut que les entreprises EDF, Framatome et Orano redeviennent concurrentielles et très rentables sans nouvelle intervention de l'Etat sur leur capital :
• par un effort interne, qu'elles font ; mais aussi
• grâce à des mesures très logiques, équitables et souhaitables, qui ne dépendent pas d'elles.
Nous vous remercions pour cette contribution à la réflexion pour l’élaboration de la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie.
Confrontée à d’importantes difficultés ces dernières années, la filière nucléaire a fait l’objet d’une réorganisation profonde, notamment au niveau de la restructuration du groupe Areva (devenu Orano), pour lui permettre de faire face aux défis à venir.
Si sur le long terme la construction du nouveau modèle énergétique dans lequel le Gouvernement s’est engagé impliquera une évolution de l’emploi dans le secteur nucléaire, l’objectif de 50 % de nucléaire dans le mix impliquera à moyen terme le maintien d’un haut niveau de compétences sur l’ensemble des activités de la filière, du cycle du combustible au démantèlement en passant par la maintenance des réacteurs, notamment en termes de recherche et d’innovation, comme le souligne la Stratégie nationale de la recherche énergétique (SNRE) adoptée en décembre 2016. Dans le cadre du comité stratégique de la filière nucléaire (CSFN) en cours de structuration, le Gouvernement veillera également à ce que la filière continue à investir sur les sujets les plus structurants pour son modèle économique et sa compétitivité.
C’est sur ces bases que la filière pourra continuer à se positionner avec succès sur de futurs contrats à l’export.
Bonnes paroles!
Et vous croyez que les jeunes et les clients potentiels seront convaincus par ces bonnes paroles, et même qu'ils les entendront? Vous vous voilez la face! Le danger est très grave!