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Avis n°114

Penser l’énergie en France

Ajouté par Guillaume ANONYMISé (Manosque), le
[Origine : Site internet]
Mix énergétique

De l'énergie, pourquoi ? Pas de secret : l'homme en a besoin pour adapter son environnement à sa condition, à ses besoins, et au-delà, à ses envies. C'est ainsi que PIB et consommation d'énergie vont de pair. De l'énergie disponible et en abondance garantit notre niveau de vie. Et la décroissance ? Il suffit de jeter un œil au portable de ses prétendus défenseurs pour s'apercevoir que c'est un combat perdu d'avance : la plupart du temps, dernier modèle, grand écran, connecté en permanence à des serveurs énergivores.

De l'énergie en abondance, c'est d'abord de l'énergie pas chère. Car si les prix augmentent, consommation et production vont mécaniquement diminuer : c'est la décroissance, qu'au fond personne ne veut subir. Par ailleurs, il est souhaitable de limiter l'impact environnemental de l'énergie. Pour cela, il faut réduire la production des déchets dont la gestion n'est pas économiquement viable aujourd'hui, comme les gaz à effets de serre (GES) rejetés dans l'atmosphère, mais pas seulement. Et lorsque c'est possible, il faut s'orienter vers une gestion responsable des déchets, pour en limiter les effets.

Dans l'immédiat, face à l'urgence climatique, électrifier l'énergie permet de la décarboner, si tant est que les moyens de production électrique restent peu émetteurs de GES, c'est-à-dire avec un recours modéré aux combustibles fossiles. Dans ce contexte, tant que le stockage de l'électricité reste limité du fait d'un coût élevé, il faut aussi privilégier les sources d'électricité pilotables, c'est-à-dire celles qui exploitent une ressource stockable.

L'hydroélectricité utilise l'énergie potentielle de l'eau, stockable dans des réservoirs. Elle présente un coût et un impact environnemental relativement faible, bien que la constitution de réservoirs perturbe l'écoulement des eaux et les écosystèmes, et accapare de grandes surfaces. Via pompage, les réservoirs d'eau peuvent néanmoins constituer un bon moyen de stocker l'électricité. En France, la ressource hydroélectrique est déjà bien utilisée, dans la mesure où il faudrait mobiliser des terrains habités ou exploités pour l'asservir davantage. Une opération politiquement impossible aujourd'hui. L'hydroélectricité représente un peu plus de 10% de notre consommation électrique.

L'incinération de déchets, que ce soit avant ou après leur transformation, par méthanisation par exemple, pose actuellement la question du coût et du bilan carbone : il faut multiplier les installations pour limiter l'impact environnemental du transport des déchets en grandes quantités, tandis que les technologies restent relativement onéreuses.

Le coût de l'éolien et du solaire photovoltaïque a diminué ces dernières années. Mais ces sources d'énergie non pilotables introduisent une intermittence qu'il faut gérer au niveau du système de production et de distribution d'électricité. Le faible impact environnemental de ces énergies est attractif, mais il convient de les réserver à des emplacements stratégiques pour des questions de rentabilité du système de production électrique dans son ensemble. En Europe du Nord, il faut d'autant plus les limiter que les pot-au-noir y sont courants : ce sont ces périodes sans vent ni soleil qui durent typiquement une semaine. Dans plusieurs pays de cette région et malgré l'interconnexion du réseau Européen, l'augmentation vertigineuse des prix de l'électricité témoigne d'un surdimensionnement de l'éolien et du solaire : c'est notamment le cas de l'Allemagne.

Parmi les sources majeures de production d'électricité qui restent, il y a le thermique à flamme, très producteur de GES, et le nucléaire. Jusqu'à présent, la France a choisi un recours massif au nucléaire, si bien que son électricité est la plus décarbonée de la planète. En France, pas de réacteurs sur des zones très sensibles, une autorité de sûreté indépendante et attentive, et une technologie éprouvée depuis des décennies à travers le monde : le réacteur à eau sous pression. Et les déchets ? Des solutions existent pour les gérer, la France est en train d'en déployer une à Bure. Et même en prenant dans ses coûts le démantèlement de ses installations, l'électronucléaire reste une énergie compétitive. A court terme, et à moins de changer fondamentalement un des paramètres de l'équation énergétique, il est donc difficile de justifier une baisse significative de la part du nucléaire dans notre pays.

Avec un faible coût de l'électricité et des émissions de GES au plus bas, pourquoi vouloir tout changer ? Nos moyens de production électrique sont déjà décarbonés, avec un MIX qui favorise l'hydroélectricité, le nucléaire, et qui inclut une part modéré d'éolien et de solaire photovoltaïque. En France, il est donc clair aujourd'hui qu'il faut concentrer nos efforts pour pérenniser ces moyens de production, améliorer l'efficacité énergétique et décarboner l'énergie en accroissant son électrification.

Commentaires

L'argument selon lequel les énergies hydroélectriques et nucléaire n'émettent pas de particules carbone , et peu chères en rapport avec les autres énergies comme le solaire ou l'éolienne correspond aux critères des besoins croissants de notre société.
Mais des compléments d'info semblent nécessaires quand on parle de "déchets" pour les énergies solaires et éoliennes. Ils existent mais les gens ne réalisent pas...
Quant au nucléaire, ce mot fait peur dans l'inconscient collectif.
Il y a eu les graves accidents deTchernobyl, puis Fukushima... La radioactivité tue et les explications sur la sécurité des centrales en France doivent être davantage développée:
Comment cela se passe-t-il réellement pour la maintenance?
Comment et où sont sont stockés les déchets nucléaires radioactifs pour des millions d'années? (C'est du moins ce qu'on croit)

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Merci pour ce commentaire, qui me permet de développer un peu mon opinion. En ce qui concerne les accidents de Tchernobyl et de Fukushima, ce sont bien sûr des événements qu'il faut prendre en compte, mais dans notre pays, il me semble qu'on s'en sort pas si mal. On peut toujours critiquer quand on estime que ça ne va pas en disant "c'est mieux ailleurs", et quand ça va quand même, "regardez, les autres ont rencontré des problèmes". Mais sur le fond, Tchernobyl, c'est une vieille technologie datant de la guerre froide qui pouvait produire de la matière pour les bombes en plus de produire de l'électricité : mettre en rapport cet accident avec le nucléaire actuel reviendrait plus ou moins à se défier des avions de ligne parce qu'il y a eu beaucoup d'accident de zeppelins... A Fukushima, les réacteurs ont été exposés à un tsunami. En France, je n'ai pas souvent vu de tsunami. A Fukushima, des explosions d'hydrogène ont eu lieu, entraînant le rejet d'éléments radioactifs. Ce risque d'explosion est connu, partagé et pris en compte dans nos réacteurs depuis 20 ans. Les spécificités culturelles japonaises, qui rendent difficiles l'indépendance des différentes parties, industrie, état et autorité de sûreté, ont ici sans doute joué un rôle dans la non-prise en compte de ce risque connu et identifié. Le nucléaire français, qui se montre le plus sûr du monde, a toutefois décidé d'investir encore pour améliorer la sûreté de ses centrales suite à cet accident, dans le cadre du "grand carénage". Au final, cela fait des décennies que plus de 70% de notre électricité est nucléaire, et cela sans accroc : n'est-ce pas un motif valable de remplacer notre peur par de la fierté, ou n'a-t-on pas le droit en France d'être fiers de nos succès ? Par souci de complétude, je finis enfin sur les deux autres points évoqués : maintenance et déchets. La maintenance, on trouve plein d'informations en ligne là-dessus : visites décennales, remplacement de gros composants... Vu de loin, ça a l'air de la maintenance de grosses installations industrielles, avec en plus un niveau d'exigence supplémentaire associé au nucléaire. Concernant les déchets, la France a étudié le problème et s'oriente vers une solution de stockage en couche géologique à Bure : Cigéo. Ce sont plutôt des milliers d'années (et non des millions) qui sont nécessaires pour revenir au niveau de la radioactivité de l'uranium que l'on trouve dans la nature, ç ce que j'ai compris : long, certes, mais pas tant que ça à l'échelle géologique. Enfin, si la radioactivité est dangereuse à haute dose, l'exploitation des réacteurs actuels a causé très peu de morts, et de ce point de vue, elle n'a pas à rougir de la comparaison avec les autres filières de production électrique. Cela indique clairement que le risque est gérable, et en plus, la différence avec beaucoup d'autres industries, c'est que des moyens sont mis pour gérer cette dangerosité. Le principal problème du nucléaire français, ça semble être plutôt sa difficulté à faire valoir ses succès face à des médias très anti-nucléaires qui contribuent à maintenir un inconscient collectif de peur irrationnelle. Ce climat risque de nous faire adopter des choix désastreux : l'abandon d'un savoir-faire unique et reconnu dans le monde, d'une filière industrielle rentable et d'un pilier pour notre économie et notre performance en matière d'émissions de gaz à effet de serre. A l'heure des choix, gardons la tête froide !

04100

La meilleure source d'énergie est celle qu'on ne gaspille pas.
Petit exercice : 30% d'économie pour un logement qui consomme 10 MWh par an, multiplié par 3 millions de logements ça fait combien de réacteurs nucléaires ??? Une petite dizaine ?
Si on appelle Négawatth le MWh économisé en isolant, on s'aperçoit que son coùt est en gros le dixième de celui du MWh produit. Ce qui fait que le coùt total de l'opération est du même ordre de grandeur que celui de la fraude fiscale. La politique c'est faire des choix : du travail, du confort, des économies, ou alors la course folle à produire toujours plus.

73210

La course folle à produire toujours plus est un choix de société, pas un choix politique. Le communisme l'illustre bien : parfois au départ choix politique, il ne réussit à véritablement s'imposer dans les sociétés que par la force. Je préfère quant à moi un système politique démocratique, bien que je déplore qu'il aura à satisfaire les pulsions consuméristes de mes concitoyens... On ne peut pas tout avoir !

Dans ce cadre, conserver une part large part d'énergie d'origine nucléaire me semble la solution la moins pire pour préserver notre environnement et notre santé en France, du moins tant qu'une certaine tempérance ne sera revenue.

04100

« Si on appelle Négawatth le MWh économisé en isolant, on s'aperçoit que son coùt est en gros le dixième de celui du MWh produit. »

Si l’isolation est rentable, isolez ! Sans attendre que les autres paient pour les économies que vous ferez.

Ça n’aura aucun effet sur la fraude fiscale.

57000

La réflexion de Butimage et la réponse de Bernard CY posent une question fort importante et à laquelle devrait répondre la politique de l'énergie.
Dans certains cas l'économie d'énergie ne coûte rien (vous baissez la température et vous mettez un chandail de plus), ou assez peu (vous mettez une isolation thermique dans les compbles le jour où vous devez refaire la toiture), ou assez cher si vous isolez par l'extérieur votre pavillon pour économiser un demi-mètre cube de fioul par an, ou les yeux de la tête dans d'autres cas. D'où la question : quelle est, raisonnablement, la dépense maximum en € par mégawawatt.heure fossile économisé ? Cela guiderait les investissements de tout un chacun. Il est navrant que l'Etat ne nous donne pas une réponse.

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