Avis n°147
Compte-rendu de l'atelier "Les consommations d'électricité"
le ,Le niveau prévisible des consommations énergétiques en général et des consommations électriques en particulier est un des points cardinaux du débat sur la PPE. C'est en effet assez globalement la capacité à prévoir les besoins ou la demande qui va permettre de dimensionner l'offre, les équipements nécessaires à la production. C'est à partir d'une analyse assez fine des segments de cette demande qu'on va plus qualitativement imaginer le mix énergétique du futur.
A la pliure entre « mix énergie » et « mix électrique », la question posée est en gros de savoir dans quelle mesure les usages actuels d'énergie fossile (en matière de carburants et de chauffage en particulier), peuvent et doivent se reporter vers d'autres formes d'énergie, renouvelables ou non : électricité, gaz, biomasse pour l'essentiel. C'est une tendance observable à l'échelle mondiale où cette substitution vers l'électricité est assez forte. C'est un choix auquel chaque habitant consommateur de notre pays va se trouver confronté dans de nombreux aspects de sa vie quotidienne, mais qui devra s'opérer aussi dans l’industrie, les services et les transports aussi.
L'atelier consacré à la question des consommations électriques a permis de souligner des ponts de convergence mais aussi de mettre en lumière des divergences assez marquées.
Les sujets sur lesquels il y a un consensus touchent aux tendances observées ces dernières années et notamment au fait que globalement la consommation d'électricité a paru stagner ou décroître, contrairement aux tendances antérieures et en tout état de cause contrairement aux prévisions. L'interprétation sur les causes fait surgir une première discussion : s'agit-il d'une tendance liée simplement à la stagnation économique, qui risque d'être contrecarrée par les dynamiques de la reprise (c'est en partie l'inquiétude exprimée dans le rapport du CESE), ou au contraire les efforts accomplis en matière d'efficacité énergétique ont-ils déjà produit leurs fruits ? Probablement les deux explications se combinent-elles.
Le consensus s'étiole cependant quand il est question des temps à venir.
Aucun des scénarios de RTE ne prévoit d'augmentation significative de la consommation, même avec une augmentation très significative poussée jusqu'à près de la moitié du parc global de la part de véhicules électriques. Autrement dit le transporteur d'électricité estime que les nouveaux usages de l'électricité seront compensés par la continuation des gains d'efficacité électrique et par les économies réalisées en la matière. Dans son DMO, le Ministère de l'écologie, maitre d'ouvrage, parait plutôt reprendre cette analyse.
Différente est la pente suggérée par EDF qui est plus prudente sur les effets sur les consommations d'une croissance retrouvée, de l'essor démographique et des nouveaux comportements de consommation et en particulier de la mobilité. Jusqu'à + 0,8% par an, c'est une hausse modérée mais assez significative sur la durée de la PPE qu'évoque l'énergéticien. In fine, il estime que la part de l'électricité va augmenter dans une consommation énergétique globalement plutôt en rétraction.
Plus volontariste est la position de l'association Negawatt qui indique que les performances des matériaux et les innovations atteintes en matière de bâtiment ou d'usages spécifiques autorisent, à condition qu'on en ait la volonté, de vraies politiques systématiques d'économie massive d'électricité : signaux prix aux produits vertueux, formation à la performance électrique, refus du tout électrique notamment en matière de véhicules, réglementation adaptée.
Ces observations contrastées ont été complétées par les contributions des autres participants :
Enedis a consacré un important travail à l'examen des consommations régionales dont le distributeur tire la conclusion justement que les politiques d'incitation doivent épouser mieux les particularités locales, en particulier en matière de soutien aux territoires industriels.
Moins impliqués dans le débat de prospective, les deux autres intervenants, de l'Avere et de Gimelec, ont fait valoir à la fois les immenses progrès accomplis dans leurs secteurs et les potentiels nouveaux offerts par ces progrès à moyen terme : ainsi la contribution des véhicules électriques à la réduction de la pointe par le flux en provenance des batteries redistribuant vers le réseau ne doit-il pas faire redouter que ces véhicules participent de l'explosion des consommations électriques.
Ainsi les potentialités offertes par une gestion digitale ou les data centers, par ailleurs plus efficaces eux-mêmes que par le passé, améliorent-elles les performances électriques dans des secteurs innombrables de la société, qu'il s'agisse d'industrie, de transport ou de services.
Il convient donc de prendre en compte dans un cas comme dans l'autre le fait que ces évolutions pourraient permettre elles aussi à l'arrivée des économies d'électricité considérables.
Commentaires
Jacques Peter Ingénieur des Mines en retraite
Atelier de controverse très intéressant qui traite un sujet fondamental. Il y a une opposition claire entre les partisans d'une prévision à la baisse, RTE Négawatt et le producteur et surtout celui qui connait le mieux son fond de commerce EDF. D'un côté on prévoit après 7 ans de stabilité une courbure vers la baisse permettant de réaliser la commande du ministre à RTE, 50% de nucléaire en 2035, , zéro nucléaire en 2050 pour Négawatt, de l'autre EDF prévoit une hausse modérée due à une plus grande pénétration de l'électricité française propre , chassant les fossiles décarbonés soit + 30TWh en 2035.
Je note que l'optimiste EDF était seul face à d'autres pros et que la présence de l'association Négawatt n'était pas équilibrée par sauvons le Climat ou la SFEN, ou encore IED.
L'efficacité était au centre du débat. Peut-elle s'accélérer?
Ayant pris le temps le matin de discuter avec les vendeurs d'appareils électrique du grand commerce et observé les rayons , j'ai beaucoup appris, davantage que dans les études théoriques.
D'abord tous les industriels concurrents se sont alignés sur A++ majoritairement . Ne pas être au niveau conduit à ne plus être exposé et donc à sortir du marché. Il y a pas de différence entre les industriels allemands, Bosch et Siemens et les autres. Où est l'argument selon lequel les pauvres français achèteraient moins performant que leurs voisins?
Ensuite les vendeurs constatent que le public regarde les étiquettes et en tient compte. Mais ils ajoutent les effets rebonds. On a maintenant des machines qui lavent et sèchent le linge avec même parfois des pompes à chaleur.
Ensuite on touche parfois des limites : on lave aujourd'hui à 30° et après? La cuisinière à induction aujourd'hui abordable c'est - 40% et après quoi?
J'en déduis qu'une politique réussie, à mon avis la seule, de l'Europe a consisté à rendre obligatoire les affichages de performance électrique.
Venons en maintenant au constats des économistes Ceux de Louvain constatent une certaine saturation de l'efficacité énergétique dans le temps, les indicateurs européens ODEX établi avec l'ADEMEd'efficacité énergétique donnent 1,1%/an pour l'industrie, 1,8% /an pour le logement, ils ont plutôt tendance à freiner. Atteindre globalement pour l'Europe 1,5%/an serait un exploit.
En ce qui concerne RTE, le bilan prévisionnel 2016 présentait une étude de marché complète établie avec les , pardon, le producteur qui concluait à une stabilité de la consommation. Pourquoi ce virage 2017 avec maintenant une prévision de baisse? Expliquez nous!
L'efficacité énergétique est un processus continu. On peut voter toutes les lois et mettre en place toutes les réglementations qu'on veut, on ne courbe pas comme cela ces tendances.
Je veux dire au représentant négawatt qui se présente comme un homme d'action qu'il est bien sympathique, mais que je ne peux prendre pour argent comptant toutes ses idées; J'ai assisté entre autres à une présentation par la ville de PARIS qui ne manque pas de moyens, de la rénovation énergétique de ses écoles: bilan -20% obtenu autant par l'isolation que par la gestion des comportements; maintien des 20 degrés, arrêt du chauffage de locaux inoccupés, alors d'où sortez vous que l'on peut faire -80% sur le parc ancien?
Vous prolongez la vie de vos appareils, moi aussi, éduquons nos enfants et petits enfants dans ce sens.
Mais la diffusion par attraction d'une morale de frugalité est plus efficace que l'imposition par la loi, souvenons nous de l'échec de la prohibition. Déclarer dans la loi que la consommation d'électricité doit baisser et programmer dans ce sens l'appareil de production conduit au noir, voir l'Australie du Sud. Mais je suis heureux de vous entendre promouvoir les pompes à chaleur.
Pour moi, d'abord militant du climat la différence fondamentale entre les deux thèses vient du choix que l'on fait entre la promotion de l'électricité décarbonée à substituer au gaz ou au fuel et carburants ou à une réglementation logement, chef d'oeuvre de l'art bureaucratique qui a privilégié le gaz.
Donc au nom du climat, je vote pour Julien Bouchard et son optimisme. Il faut programmer un système électrique faisant face à une légère hausse de la consommation.
Pour vos questions
Bonjour à tous,
Si vous avez des questions relatives au contenu de cet atelier pour lesquelles vous souhaitez une réponse, que ce soit de l'Etat ou de la Commission, nous vous invitons à les poser via le formulaire dédié aux questions-réponses : https://ppe.debatpublic.fr/posez-question
RTE graphique tendanciel... tendancieux?
Le graphique sur le "ralentissement tendanciel de la consommation d'électricité" présenté par RTE à 3:13 me semble de peu d'intérêt : il donne visuellement l'impression d'une forte baisse de consommation or il ne s'agit que d'une baisse des taux de croissance... (donc croissance tout de même bien que ralentie).
C'est un peu gênant pour une présentation à un public non initié.
Contrôle des débats
"à l'échelle d'un pays il y a une relative stabilité, hein, entre le soleil le vent tout ça, ça s'équilibre, ça a été montré déjà plein de fois"
Lorsqu'un intervenant assène une contre vérité comme celle là, que n'importe qui peut contrer en allant sur e CO2 mix ou Frauenhofer Institut (Energy charts) il devrait y avoir une autorité régulatrice qui réagisse. (Voir fig 1 de mon point de vue No 8. )
L'augmentation de la consommation d'électricité
La position de RTE est la même que celle de l'Ademe qui a repris celle de Négawatt.
Négawatt prétend diviser toutes les consommations d'énergie par deux ce qui ne pourrait se faire que par la contrainte du rationnement. Et dire que soleil et vent s'équilibre relève du grand n'importe quoi!
Ce qui me surprend est qu'aucun représentant de Sauvons le Climat, porteur du projet Négatep, n'ait été invité à ce débat.
Le projet Négatep est autrement mieux construit que celui de Négawatt qui n'a aucune chance de se réaliser.
Quant à la consommation d'électricité, elle continuera à monter faiblement certes, mais elle montera comme on peut le voir en France et en Allemagne en 2017. Il est vrai que l'on fait des gains d'efficacité mais il est vrai aussi que les nouvelles applications et la mobilité électrique entraîneront une augmentation de la consommation. Le représentant d'EDF a parfaitement raison.
électricité nucléaire "décarbonée" à temporiser
L'intervenant EDF va un peu vite dans son propos préalable : tout comme le pétrole et le gaz, l'uranium, matière première de l'énergie produite, est aussi importé. Son extraction et son enrichissement produisent également du CO2... tout comme les démantèlements à prévoir d'ailleurs
EDF est encore à mon sens en dessous de l'objectif
Rappelons les objectifs de fond : la diminution des GES et du CO² en particulier et autant que possible du nucléaire. L’absent ce sont les morts dans le monde actuels 20000/j dont 100 sur notre territoire sans parler des maladies , dus à la pollution de l’air et de l’eau ( OMS), essentiellement dus à la combustion qui assure 85% de l’énergie mondiale, 72 pour la France.
Mark Lynas environnementaliste anglais dans son ouvrage « Six degrés que va t-il se passer » Dunod 2008, définit le concept de coin= 1 Gt de co² de moins en 2055 : c’est aujourd’hui 2Millions d’éoliennes de 1Mw, (plus de la moitié du territoire Français), ou deux fois plus pour produire de l’H² en remplacement du carburant pour les voitures ou 700 centrales nucléaires de 1000Mw pour remplacer les centrales à charbon…il faudrait 7 coins pour stabiliser nos émissions en 2055.
On a besoin de toutes les énergies non carbonées et donc du nucléaire,et dispositifs associés pour réussir mais dans une évolution compatible avec une industrialisation et intégration des technologies supportable par les citoyens aux grés des avancées techniques.
La citoyenneté voudrait aussi, de rapatrier sur nos territoire les industries sous traitées dans les pays ou l’énergie est fortement carbonée et que l’on souhaite énergétiquement moins polluantes. Cela représente aujourd’hui 35% de notre impact.
L’électricité à toute sa part à prendre dans cette transformation, la plus aboutie et peut facilement remplacer le fioul parfois le gaz ( >40Mtep a eux deux sur notre territoire) la sensibilité thermique gaz est deux fois celle de l’électricité. Mais aussi les carburants. Dans ces conditions les prévisions sont loin du compte.
Même en développant le thermique solaire pour le chauffage, et l'isolation; l'aspiration à l’accès du mieux vivre s'accompagnera d'une progression de l'énergie électrique bien plus importante que celles envisagées ici.
La mutation vers l'électricité peut être rapide et efficace, au delà des aspects purement thermiques, la mobilité, le camionnage a repenser, ferroutage ou rapatriement des industries carbonées sur notre territoire (ce serait civilement responsable). Le fonctionnement en réseau à fait ses preuves, les investissements sont énormes (questions posées) mais c'est le prix à payer pour vivre vieux en bonne santé.
La "relative stabilité" éolien + solaire
Dans la dernière vidéo ( http://dai.ly/x6h17s6 ) à t=14:58, Monsieur SIDLER de l'association Négawatt dit : "à l'échelle d'un pays il y a une relative stabilité, hein, entre le soleil le vent tout ça, ça s'équilibre, ça a été montré déja plein de fois" .
J'ai voulu vérifier, et en traçant le graphique de production éolien+solaire en France en 2016, j'obtiens ça : https://pbs.twimg.com/media/DZeo3vpXcAA6KsZ.jpg:large
Je ne vois trop où est la stabilité.
Monsieur SIDLER pourrait-il préciser quel critère d'évaluation il prend en compte pour jauger la stabilité de production électrique et donner les références des études qui ont montré "déjà plein de fois" l'existence de cette "relative stabilité" ?