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Avis n°565

Communication du Ministère

Ajouté par 2614 (Bures-sur-Yvette), le
[Origine : Site internet]

Ma question porte sur la façon dont est traitée la question nucléaire dans le débat Nucléaire et PPE et sur la communication du Ministère sur le même sujet. En lisant les contributions du maître d'ouvrage au débat, on peut comprendre que le principal argument pour la baisse de la part du nucléaire dans la production électrique est la diversification du mix pour diminuer notre vulnérabilité à un défaut générique. Cet argument est tout à fait pertinent, tout comme sa contrepartie : on fait des économies de série en standardisant le parc. Pourquoi à aucun moment n'y a-t-il de débat, en pesant le pour et le contre des 75% vs 50% ?

Le débat Nucléaire et PPE rassemblait deux antinucléaires notoires qui défendaient une position sans nuance de sortie du nucléaire coûte que coûte et prioritaire sur la sortie des combustibles fossiles. Les raisons avancées relèvent de la rhétorique antinucléaire classique avec des arguments dont aucun n'est repris par le gouvernement pour appuyer le souhait de réduction du nucléaire. Ce débat n'était donc pas très éclairant sur le sujet qui va animer la prochaine décennie qui est : le pays se portera-t-il mieux avec 50% ou 75 % de nucléaire dans son mix dans un environnement en contraction d'approvisionnement pétrolier ? Par ailleurs inviter M. Laponche en tant que physicien et expert nucléaire est à la fois factuellement vrai et extrêmement trompeur pour le citoyen. C'est sans doute le seul ancien du CEA à soutenir de telles positions et ses dires ne reflètent donc en rien les positions des ingénieurs et experts du domaine (de plus un scientifique de son niveau ne peut pas ne pas être conscient des biais de son raisonnement, ce qui m'inquiète sur son honnêteté intellectuelle et m'attriste de la part d'un ancien de mon école d'ingénieur). Aucun invité de la SFEN, du CEA, d'une association défendant le nucléaire n'était invité. Le représentant de RTE réalise une prestation dont la neutralité force le respect face à tant d'adversité, alors que le représentant d'EDF est de facto sur la défensive et se contente d'éléments de langage pour ne froisser personne sans traiter la question de fond du caractère souhaitable ou pas de la diminution de la part du nucléaire.

Je termine par une critique de la communication du Ministère sur ce sujet dont les contradictions sont en train d'instiller dans l'opinion un profond sentiment de malaise quel que soit le "camp" défendu. Les antinucléaires entendent des paroles qui leur plaisent (il faut réduire le nucléaire, ce n'est pas une énergie d'avenir...) mais voient bien que la réalité des actions ne suit pas. Les défenseurs du nucléaire se sentent agressés en permanence voire assiégés, et en particulier les ingénieurs, techniciens, ouvriers et physiciens du domaine.
Il me semble que la position du Président de la République n'est pas de démanteler la filière nucléaire française, alors pourquoi communiquer de cette manière ?
Doit-on attendre le prochain choc pétrolier pour retrouver nos esprits et nous rendre compte que tous nos jeunes ingénieurs sont partis chez Rosatom ?
Si même les personnes bien informées dans les ministères continuent à entretenir cette défiance, comment l'opinion publique peut-elle se faire un avis éclairé ?
Lorsqu'il faudra décider de la construction de nouveaux EPR, comment allez-vous communiquer ?
Si on a fait le mauvais pari, en serons-nous réduit à devoir acheter la copie chinoise de l'EPR ou son équivalent russe ?
Serait-il envisageable que, dans le cadre du débat, nos services de renseignement postent une courte vidéo explicative sur l'influence de certains pays ou industriels sur l'opinion publique via divers média (ONG, media alternatif...) ?
A qui profiterait le crime d'une augmentation de notre dépendance au gaz et une destruction de notre filière nucléaire à l'export ?
J'espère en tout cas que cette communication douteuse est maîtrisée et seulement politiquement stratégique et que le gouvernement sera capable d'expliquer un revirement de situation lors de la prochaine crise pétrolière (probablement autour de 2020 si on en croit Total) en lissant ses contradictions.