Question n°301
Efficience de la politique climatique
le ,L'unanimité des économistes, ce qui est plutôt rare, estime que l'imputation d'un coût aux émissions de CO2 (sous forme de taxe ou prix issu d'un marché de quotas) est la solution la plus efficiente pour limiter puis faire décroître les émissions de CO2. Notamment le Prix Nobel français d'économie, Jean TIROLE, l'exprime très nettement dans son ouvrage « Economie du bien commun ». Cf p 290 et 291 de son ouvrage : « Contrairement à l'approche économique, les politiques de régulation dirigistes sont fondées sur la contrainte administrative... Ces politiques dirigistes créent de fortes disparités de prix implicites du carbone pour les différents types d'émissions et augmentent le coût de la politique écologique pour la société ». N'est-ce pas la raison pour laquelle il y a peu de progrès dans la lutte contre le changement climatique, alors même que les sommes consacrées sont très importantes ?
Ainsi, d'après le dernier rapport de la Cour des Comptes de mars 2018 sur le soutien aux énergies renouvelables (EnR), les prévisions de dépenses soutien pour les EnR électriques (très majoritairement éolien et photovoltaïque) se monteraient à 121 milliards € pour les engagements pris jusqu'à la fin 2017.
Ainsi les seuls contrats signés avant 2010 pour l'énergie photovoltaïque pèseront, au total lorsqu'ils seront arrivés à terme, pas moins de 38,4 milliards d'euros pour les finances publiques, pour moins de 1% de la production d'électricité. Ces contrats représenteront encore 2 milliards par an en 2030 et une subvention de 480 € par MWh. Pour l'éolien, les contrats vont coûter 40,7 milliards d'euros en 20 ans pour 2% de la production électrique.
Comme le parc électrique français émet moins de 0,1 tonne de CO2/MWh, il est clair que le coût implicite de la tonne de CO2 non émise est extrêmement élevé. Ainsi, pour des panneaux intégrés au bâti, le prix actuel garanti de rachat sur 20 ans est de de 200 €/MWh (particuliers, moins de 3 kWc) et celui du marché de gros est inférieur à 50 €/MWh. Cela implique donc un prix de la tonne de CO2 de (200-50)/0,1= 1500 €/tonne de CO2 ! Ceci, alors que le prix de la tonne de CO2 est très bas sur les marchés de gros électriques (moins de 10 €/tonne de CO2), au point de ne pas permettre en Europe aux centrales à gaz de mieux se placer au « merit order » par rapport aux centrales au charbon, ce qui est tout à fait contradictoire avec une politique climatique.
Il faut aussi souligner que les filières EnR thermiques, qui se substituent à des énergies carbonées (fioul, gaz), reçoivent dix fois moins de crédits que les EnR électriques, même si les coûts de la tonne de CO2 non émises y sont notablement plus faibles.
Y aura t-il un engagement des pouvoirs publics que le critère du coût de la tonne de CO2 économisée soit explicité pour les différents politiques de soutien aux EnR, afin de garantir une efficience de l'utilisation des fonds publics ? Verra-t-on un rééquilibrage vers les EnR thermiques ? A quand une diminution des octrois d'émission de CO2 sur les marchés de gros de l'électricité, pour diminuer l'utilisation de centrales au charbon ? Les citoyens sont en droit de demander plus de cohérence de l'utilisation de leurs deniers, pour une politique climatique nettement plus efficiente que celle menée jusqu'à présent.
Nous vous remercions pour votre contribution qui viendra enrichir notre réflexion.
Soutien aux énergies renouvelables :
Concernant les coûts du soutien au développement des énergies renouvelables, compte tenu de la baisse des coûts des technologies renouvelables, en particulier solaires et éoliennes (cf. graphiques ci-dessous), le développement de nouveaux projets renouvelables a un impact beaucoup plus faible sur les charges de service public que celui des projets soutenus par le passé que vous mentionnez.
Ce soutien initial a permis de développer des technologies dont les coûts ont aujourd'hui fortement baissé.
Cette baisse des coûts devrait se poursuivre, mais son effet se fera ressentir de façon décalée dans le temps. En effet, les contrats au titre des soutiens aux énergies renouvelables électriques ont une durée allant jusqu'à 15 ou 20 ans, ce qui signifie que les charges de soutien aux énergies renouvelables comporteront encore pour plusieurs années une part des charges liées aux projets les plus anciens. En revanche, grâce à la baisse des coûts des technologies renouvelables, le coût des engagements futurs est beaucoup plus faible que celui des engagements passés, ce qui contribue à ralentir la hausse des charges de service public.
En France, pour le photovoltaïque, le prix moyen proposé par les lauréats de la dernière période de candidature est de 85 €/MWh pour les installations sur bâtiments, contre 106,7 €/MWh début 2017 et 135,6 €/MWh en 2015. En 2030, le coût de production du photovoltaïque au sol devrait être compris entre 40 et 50 €/MWh et le coût du photovoltaïque sur bâtiment compris entre 60 et 70€/MWh.
Rentabilité des politiques de soutien aux énergies renouvelable par rapport au critère du coût de la tonne de CO2 :
Le coût en euros par tonne de CO2 évitée est un indicateur fréquemment utilisé dans le cadre des évaluations climat. Cet indicateur permet d'éclairer les choix même s'il a des limites.
La réduction des émissions de gaz à effet de serre est bien un objectif central de la politique énergétique, il n'est cependant pas le seul. L'article L. 100-1 reprend les objectifs que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a donné à politique de l'énergie :
• La maîtrise de la demande ;
• Assurer la sécurité d'approvisionnement ;
• Maintenir un prix de l'énergie compétitif ;
• Préserver l'environnement, effet de serre mais également les autres enjeux environnementaux et le risque nucléaire ;
• Garantir l'accès de tous à l'énergie ;
• Lutter contre la précarité énergétique ;
• Contribuer à la mise en place de l'Union européenne de l'énergie.
La PPE doit organiser l'atteinte de l'ensemble de ces objectifs.
Soutien aux énergies renouvelables thermiques :
Le Gouvernement soutien les énergies renouvelables thermiques et un fonds « chaleur » a notamment été mis en place afin de soutenir cette production de chaleur. Le Fonds chaleur soutient le développement de toutes les filières de chaleur renouvelable promues dans la Programmation pluriannuelle de l'énergie. Il est opéré par l'ADEME.
Dans son fonctionnement, il permet de faire émerger les projets en visant à garantir un prix de la chaleur renouvelable produite inférieure d'environ 5 % à celui obtenu avec des énergies conventionnelles. Pour tenir compte des prix actuels du gaz et relancer l'attractivité des projets, les aides du Fonds chaleur ont été revalorisées en 2016 de + 10 % en moyenne pour les petits et moyens projets et de + 20 % en moyenne pour les gros projets.
Le CITE octroyé aux particuliers donne également un crédit d'impôt incitant à l'installation de systèmes de chauffage renouvelables.