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Avis n°108

Pour une meilleure acceptabilité des éoliennes terrestres

Ajouté par Jean Paul ANONYMISé (Maintenon), le
[Origine : Site internet]
Energies renouvelables

Le développement de l'éolien terrestre nécessite de prendre en compte la dévalorisation des propriétés situées dans un rayon de 2 km autour des éoliennes. cette dépréciation devrait être estimé par une commission indépendante comprenant des juges administratifs et des professionnels de l'immobilier.
L'etude de Gibbons, Stephen (2015) Gone with the wind: valuing the visual impacts of wind turbines through house prices. Journal of Environmental Economics and Management, 72. pp. 177-196. ISSN 0095-0696 - DOI: 10.1016/j.jeem.2015.04.006 confirme confirme l'existence possible d'une dépréciation immobilière de l'ordre de quelque pourcent. Cette étude porte sur 38 000 transactions situées dans un rayon de 2 km. Elle indique que les effets résultants de fermes éoliennes de petite taille (1 à 10 turbines) se concentrent dans les deux premiers kilomètres où la réduction de prix est de 5%. (The effect of smaller wind farms with less than 1-10 turbines is, as might be expected, concentrated in the first 2 km where there is a 5% reduction in prices.) Cette étude confirme l'existence possible d'une « valorisation » comme le souligne l'étude d'impact. En effet, l'étude estime que cette valorisation est constatée dans 2% des cas lorsque les éoliennes ne sont pas visibles et pour une distance comprise entre 4 et 8 km. Le fait que cette étude repose sur une évaluation à partir d'un modèle numérique de terrain de la visibilité des éoliennes minimise la généralisation et confirme la nécessité d'une étude concrète.
La loi danoise sur la promotion des énergies renouvelables (Loi n ° 1392 du 27 décembre 2008) prévoit : « Toute personne qui, en érigeant une ou plusieurs éoliennes, cause la perte de valeur biens immobiliers, en supporteront les frais ». Une autorité d'évaluation décide de l'importance de la perte de valeur sur la base d'une évaluation individuelle des biens. Cette autorité est composée d'un président qui possède les qualifications pour être nommé juge et d'un expert en évaluation de la valeur de biens immobiliers. Les 551 premières compensations sont évaluées à 57 000 DKK, soit environ 7 600 € par maison.
Dans la pratique l'implantation d'éoliennes terrestres s'accompagne d'une opposition marquée entre les propriétaires exploitants concernés par le projet et les riverains de la future installation. Elle correspond à la présence de deux groupes : un premier groupe qui estime subir les impacts négatifs du projet, principalement l'impact sonore et/ou visuel ainsi que la dépréciation de leurs biens ; un deuxième groupe constitué des propriétaires et des exploitants concernés par le projet qui connaîtront des gains économiques jugés par le premier groupe comme « appréciables ». Cette opposition crée un sentiment d'injustice environnemental.
La réglementation actuelle favorise les éoliennes. Le rapport sur les « nuisances sanitaires des éoliennes terrestres » adopté par l'Académie nationale de médecine le 9 mai 2017 rappelle les articles R1334-32 et R1334-33 du code de Santé Publique qui fixe à 30 dB à l'extérieur des habitations le seuil à partir duquel intervient une limitation de l'émergence de 5 dB de jour ou de 3 dB la nuit à un ajout sonore. Le rapport souligne : « En d'autres termes, le seuil à partir duquel intervient une limitation de 5 dB à un ajout sonore (bruits de voisinage, etc.) dépend du type d'émetteur du bruit, les éoliennes étant « favorisées » par rapport aux autres bruits ordinaires...
Or quelques bridages supplémentaires permettraient de résoudre ce point.

Commentaires

Effectivement la question de la dépréciation/valorisation immobilière n'est pas prise en compte dans le déploiement de l'éolien terrestre en France.
Il faut également souligner que la jurisprudence permet désormais à un acquéreur d'annuler une vente s'il juge que les nuisances de nouvelles éoliennes sont trop importantes :
Cass. Civ 3, 29.6.2017, Z 16-19.337
Article AFP à ce sujet : https://www.boursorama.com/patrimoine/actualites/le-bruit-des-eoliennes-...

De même que l'augmentation significative de la taille des machines n'est pas considérée.
En effet, en Angleterre, où a été réalisée l'étude de Gibbons, comme dans de nombreux pays, se pose régulièrement la question de l'adaptation de la réglementation de l'éloignement des éoliennes de plus en plus hautes vis à vis des habitations.
Si cette question est légitime, elle ne trouve pour le moment aucune réponse dans la réglementation française puisque notre Etat estime que notre système d'autorisation est suffisant afin de prémunir les riverains et la biodiversité des impacts éolien.

Ainsi notre gouvernement s'appuie sur ses Préfectures afin d'autoriser ou non un parc éolien, qui elles mêmes, prennent une décision en fonction des études d'impact et de divers avis.

Cependant, notre petit secteur de la Somme (env. 10 km2) tend à prouver que ce système d'autorisation possède un certain nombre de failles :
Ce secteur a fait l'objet de cinq enquêtes publiques de projets éolien en moins d'un an. Quatre autres projets sont encore à l'étude. Cinquante éoliennes sont dores et déjà en fonction. Ce sont donc 125 éoliennes au total qui sont projetées sur ces 10km2. Voir la carte ici : https://www.facebook.com/sosdecampagnes80/photos/p.1805723713055905/1805...

Dans les faits, cette expérience nous permet de conclure :

- Au sujet des études :
Il serait vivement souhaitable que les cabinets réalisant les études d'impact soient rémunérés non pas, directement par les exploitants, mais par le gouvernement, au même titre que les enquêteurs public.

Cela permettrait d'obtenir des études plus impartiales en assurant aux cabinets d'êtres réengagés, même dans le cas d'études aux conclusions défavorables aux projets.

En effet, nous avons pu constater que les cabinets tendent à minimiser les impacts, ce qui est par ailleurs assez régulièrement signalé par le service des Inspections Classées.

Cependant, ces services ont des délais à respecter afin de rendre leurs avis et il leur est donc impossible d'imposer la réalisation de nouvelles études qui pourraient s'avérer nettement plus pertinentes que quelques compléments.

- Au sujet de la prise de décision de l'Autorité compétente : Même si dans notre cas, la saturation du secteur est évidente la Préfecture ne peut semble-t-il s'appuyer sur aucune loi afin de refuser les projets.

C'est pourquoi, malgré de nombreux avis négatifs (Chambre de l'Agriculture, Unité Architecture et Patrimoine, enquêtes publiques et Autorité Environnementale soulignant les impacts), trois de ces projets ont tout de même été autorisés en moins d'un an.

Il existe ainsi un vide juridique évident puisque la réglementation de la distance des 500m des habitations n'interdit en rien, la saturation ou l'encerclement total des communes.
Ce qui est bien entendu préjudiciable aux riverains, mais s'avère également néfaste à la biodiversité (voir l'exemple de l'Hommelet ici : https://www.facebook.com/sosdecampagnes80/posts/1805636219731321).

Il serait ainsi essentiel que les seuils de saturation et d'encerclement établis par la Dreal Centre ne soient plus considérés comme de simples recommandations, mais qu'ils deviennent réglementaires.

De même qu'il serait souhaitable de redonner un pouvoir de décision d'autorisation à une seconde autorité. Une décision unanime de deux autorités distinctes permettrait en effet de s'assurer de l'acceptabilité des projets, et donc d'une meilleure sécurité juridique.

- Au sujet des contrôles acoustiques :
Cela fait ici plus d'un an que nous avons signalé la gêne occasionnée par le bruit des parcs en fonctionnement. Toutefois, depuis lors, aucun contrôle n'a été réalisé.
Par ailleurs le service concerné nous a clairement fait part de son manque de moyens techniques et humains afin de réaliser de tels contrôles.
C'est pourquoi, selon ces services les contrôles sont réalisés la plupart du temps par un cabinet d'étude rémunéré par l'exploitant.
Si, à nouveau, il est possible de s'interroger quant à l'impartialité de tels contrôles, il est surtout de constater que la réglementation en la matière n'est pas adaptée à la réalité du bruit éolien.

En effet, comme souligné dans le commentaire ci dessus, la réglementation est favorable aux éoliennes en termes d'émergences.

Et pour autre exemple évident, les contrôles sont systématiquement effectués aux habitations les plus proches, cependant ce ne sont pas celles qui sont nécessairement les plus impactées.

Les acousticiens reconnaissent pourtant que l'intensité du bruit propagé est dépendant de divers facteurs, dont notamment la topographie, ce qui n'est nullement pris en compte dans la réglementation actuelle.
Il est donc possible de s'interroger sur la pertinence de la réglementation acoustique en regard des impacts de l'éolien.

- Au sujet des objectifs de puissance installée à atteindre :
Il est de constater que notre secteur avait dépassé les objectifs fixés par l'ancien SRCAE avant que ne soient autorisés les parcs visibles sur notre carte.

De même que la région des Hauts de France dépasse désormais largement ses objectifs en éoliennes autorisées. Voir ici : https://www.facebook.com/sosdecampagnes80/photos/pcb.1749174848710792/17...

Pourtant la plupart des parcs s'installent en milieu rural, et sur les couloirs de vent. (Voir ici : https://www.facebook.com/sosdecampagnes80/posts/1804889943139282 et ici : https://www.facebook.com/sosdecampagnes80/posts/1810688832559393)
Les éoliennes s'implantent donc essentiellement en milieux sensibles pour la biodiversité (campagnes et couloirs de migration), non pas en zones industrialisées.
Il est donc essentiel que son déploiement soit maîtrisé. Pourtant, bien que de nombreux SRCAE soient désormais annulés pour défaut d'évaluation environnementale, aucune nouvelle étude n'a été réalisée à l'échelle départementale ou régionale.
Les impacts cumulés des parcs ne sont donc que très partiellement analysés, puisqu'ils ne sont considérés que très localement (15 à 20km) au sein des études d'impact des promoteurs.
Etudes, qui par ailleurs, évoquent elles mêmes le manque de données sur les effets cumulés des parcs éolien.
Ainsi, ces études au cas par cas se révèlent clairement insuffisantes en regard des enjeux pour le système complexe qu'est la biodiversité.

En conclusion, la compensation semble être la règle principale actuellement, tant financièrement qu'écologiquement. Mais elle possède ses limites et il conviendrait donc de les définir.

Et comme le souligne l'Académie Nationale de Médecine, une réglementation plus adaptée aux nuisances et aux impacts, une réelle prise en compte de l'avis des riverains ainsi que des objectifs correctement établis sont nécessaires afin d'améliorer l'acceptabilité et de posséder une réelle maîtrise de l'éolien.

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En complément de l'avis 108 et des précisions supplémentaires apportées par le commentaire précédent, il me semble utile de citer un extrait du rapport de l'Académie de médecine sur les nuisances sanitaires des éoliennes terrestres adopté le 9 mai 2017 :
"...la défiguration du paysage par des structures considérées comme inesthétiques
voire franchement laides par les riverains plaignants doit être considéré comme relevant non
d’un problème d’esthétique environnementale (le temps influera probablement sur nos critères
de beauté architecturale) mais d’une réelle nuisance sanitaire. En effet, la « pollution visuelle»
de l’environnement qu’occasionnent les fermes éoliennes avec pour corollaire la dépréciation
immobilière des habitations proches génère des sentiments de contrariété, d’irritation, de stress, de révolte avec toutes les conséquences psycho-somatiques qui en résultent [32]. Et les
impressionnantes perspectives de développement de l’éolien terrestre (l’installation d‘environ
500 nouvelles éoliennes dont la hauteur devrait atteindre 200 mètres ou plus est prévue pour
les 5 ans à venir !) ne pourront qu’amplifier des sentiments en voie d’être partagés par une
proportion croissante de la population française.
Curieusement, cette nuisance visuelle ne semble pas ou très peu être prise en considération
par les décisionnaires politiques ou les promoteurs et industriels concernés (étant posé
qu’aucun d’entre eux n’installerait ou n’acquerrait une propriété à proximité d’un parc
éolien !)."

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