Question n°406
Coût du nucléaire intégrant le risque d'accident
le ,J'ai lu plusieurs réponses concernant le coût estimé de l'électricité produite par l'énergie nucléaire allant de 60€/Mwh pour les centrales existantes (intégrant provisions de démantèlement, de traitement des déchets et de recherche publique) jusqu'à 120€/Mwh pour les futurs EPR britanniques. Des comparaisons sont effectuées avec les coûts de production en Enr (éolien, PV). Or sur ces filières, les parcs sont obligatoirement assurés contre les risques d'accident. Pour effectuer de telles comparaisons, il est donc indispensable d'intégrer le coût laissé au contribuable pour le risque d'accident de centrale nucléaire. Les rapports du Sénat et de la Cour des comptes en font état en mentionnant la totale insuffisance des provisions imposées aux opérateurs. En intégrant ce risque réel d'accident (cf three miles island, Tchernobyl et Fukushima), le prix de revient du Mwh nucléaire dépasserait les 200€/Mwh selon des estimations d'assureurs. Pourquoi omettre ce risque dans les présentations du coût du nucléaire ?
L’estimation du coût global d’un accident nucléaire est difficile. Il faut considérer un certain nombre de coûts : coût radiologique, coût de la contamination du site et des territoires voisins, coût en termes d’image et coût post-accidentel sur la gestion du parc dans son ensemble. L’IRSN a publié des estimations[1] reprises par la Cour des Comptes[2]. Ainsi, suivant la typologie de l’accident et le niveau de contamination, le coût varie de 120 Md€ à 450 Md€ par accident grave ou majeur (les dernières estimations de l’accident de Fukushima font état d’un montant entre 100 et 300 Md€ selon la prise en compte de l’ensemble des dépenses qui s’écoulent sur de nombreuses années après l’accident[3]).
Ramené à la production électrique d’un parc qui fonctionnerait sur 40 ou 50 ans en moyenne, le coût d’un accident serait de 1 à 3 €/MWh dans une approche non probabiliste en cas de couverture annuelle par un fonds dédié dont le rendement serait de 5 %[2]. Il est donc faible par rapport aux autres composantes du coût de production en considérant la faible probabilité d’occurrence d’un tel évènement (de 10-5 à 10-4 par an par réacteur en cas d’accident de fusion de cœur, y compris partielle et sans rejets d’éléments radioactifs, selon l’IRSN[4]).
Le coût associé au risque d’un accident nucléaire se matérialise pour les exploitants nucléaires par une prime d’assurance versée chaque année. Le risque nucléaire est régi au niveau international par un régime de responsabilité civile particulier, qui prévoit la responsabilité du seul exploitant sans que sa faute ait à être démontrée et limite en contrepartie son montant par des plafonds de durée et de montants d’indemnisation des dommages causés aux personnes et aux biens.
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[1] Estimation des coûts d’accidents nucléaires en France : Méthodologie appliquée par l’IRSN (avril 2014)
[2] Coût de l’électricité nucléaire, actualisation 2014 (mai 2014)
[3] D’après le rapport « Estimation of Accident Risk Cost in Nuclear Power Plant » publié en japonais par Tepco en novembre 2011
[4] Les accidents de fusion de cœur des réacteurs nucléaires de puissance, IRSN, 2013