Avis n°439
Pour M. le Président Archimbaud
le ,Nous approchons de la fin débat et c'est en tant que lecteur attentif de l'ensemble des débats, avis et cahiers d'acteurs que je me permets, M. le Président Archimbaud, d'intervenir.
Ayant assisté à la rencontre organisée à Bordeaux par le Conseil régional de la Nouvelle Aquitaine, j'ai bien compris que, malgré votre indépendance, votre action est soumise à un cahier des charges qui vous impose de respecter les termes de la loi de transition énergétique dont vous ne pouvez remettre en cause ni les objectifs, ni les moyens et que votre action ne peut par conséquent que porter sur les freins ou les leviers.
M. Archimbaud, après avoir pris effectivement connaissance de l'ensemble des débats, je vais me permettre de vous donner un conseil.
En effet, la compilation de l'ensemble de ces données, souvent particulièrement bien argumentées, parfois par des personnalités éminentes, par exemple les membres de l'Académie des sciences ou de la Cour des Comptes, fait ressortir clairement que c'est bien le contenu de la loi de transition énergétique, dont on sait dans quelles conditions elle a été promulguée, qui doit être remis en cause. Vous devez en particulier, impérativement, vous nous l'avez dit, fixer l'échéance de la réduction à 50 % de la part du nucléaire. Or, alors que cette décision sera irréversible et lourde de conséquences pour le pays, il vous sera très difficile de le faire de façon rationnelle en vous appuyant sur un argumentaire et des études solides et incontestables. Vous pouvez me rétorquer qu'il y a les fameux scénarios de RTE et que vous pouvez vous appuyer dessus. Mais, si vous lisez cette formidable documentation que constitue ce débat, vous pourrez constater que la démonstration y est faite que RTE a fait le choix d'hypothèses beaucoup trop optimistes, même dans le cas du scénario « VOLT » (cf. notamment mon commentaire « Critique des études de RTE » dans le cadre du cahier d'acteur des anciens du nucléaire). Je ne prendrais qu'un exemple : l'hypothèse sur l'évolution de la consommation d'électricité, que RTE prend à la baisse et EDF à la hausse, ce que vous jugez incohérent et qui est un élément tout à fait déterminant en ce qui concerne le taux de pénétration possible du renouvelable. Si le parc nucléaire a été imprudemment trop réduit, une erreur sur cette hypothèse peut s'avérer fatale pour l'équilibre et la stabilité du système électrique, pour l'économie française et pour nos objectifs en matière de réduction de la production de gaz à effet (cf. le cas de l'Australie du sud également évoqué dans un des commentaires). Comme je vous l'ai moi-même fait remarquer au cours du débat, dans ce cas, parce qu'on n'est jamais certain qu'une hypothèse se vérifiera, il faut faire plusieurs scénarios et une analyse de risque, ce que, en l'occurrence, ne propose pas RTE dans ses études.
Il ressort par conséquent de ces débats que, comme l'a fait remarquer le représentant de l'Académie des sciences et de la technologie à Bordeaux, que la loi de transition énergétique présente de nombreuses faiblesses et, que nonobstant votre cahier des charges, il est nécessaire de la réajuster.
A défaut, si vous tenez absolument à fixer une échéance pour la réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique, je me permets de vous conseiller d'adopter les grandes lignes de l'échéancier proposé dans le cahier d'acteur d'EDF pour trois raisons :
• il est proposé par un exploitant qui a une très longue expérience, sans équivalent en France, voire en Europe, de l'ensemble de la problématique du domaine de la production du transport, de la distribution et de la vente d'électricité, mondialement reconnue et assise sur une recherche et développement incontestable,
• adopter cet échéancier, c'est rendre à l'exploitant ses responsabilités en matière de sûreté et d'équilibre du réseau ainsi que de management de son entreprise, ce qui est la moindre des choses dans un système économique ouvert à la concurrence,
• la fermeture progressive des tranches nucléaire se réalisera alors sous la responsabilité de l'exploitant (ou le cas échéant de l'Autorité de sûreté nucléaire) sans intervention de l'état et donc sans avoir recours à une indemnisation dont le montant total peut s'élever, je le rappelle, si l'on cumule l'indemnité et le manque à gagner, à plusieurs milliards d'euros, surtout si l'arrêt des tranches conduit à un déséquilibre production/ consommation qui, de surcroît conduira inévitablement à une hausse des prix du marché et donc du manque à gagner.